Le Conseil constitutionnel bloque la démarche référendaire sur les superprofits
26 octobre 2022Déposé par 242 parlementaires, le projet de référendum d’initiative partagé (RIP) ouvrait la voie à une consultation citoyenne sur la taxation des superprofits. Il revenait au Conseil constitutionnel de valider cette démarche légitime, fondée sur une aspiration populaire.
La motivation de cette décision marque un tournant dans la doctrine constitutionnelle. En effet, la procédure de RIP, conformément à l’article 11 de la Constitution, peut porter « sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent ».
Or, la décision du Conseil constitutionnel revient à exclure les réformes fiscales du champ des « politiques de la nation ». Leur lien est pourtant intrinsèque. Cette appréciation est, à titre d’exemple, contraire au dernier rapport de l’OCDE intitulé Tax policy reform 2022 dont l’un de ses directeurs affirme que « les réformes fiscales récentes visent à stimuler la reprise économique après la crise du COVID-19 ».
De plus, les bénéfices réalisés par les entreprises du CAC 40 ont atteint un montant record en 2021, à près de 160 milliards d’euros en augmentation de 82,9% par rapport 2019, avant la crise sanitaire. Le projet de taxation des superprofits a précisément vocation à lutter contre les dérives économiques qu’engendre cette accumulation indue de bénéfices qui débouchaient sur un record de dividendes à 57,5 milliards d’euros. La politique économique de la nation ne peut fonctionner quand le capital se rémunère au détriment des travailleurs, des investissements, tout en supprimant 17 000 emplois sur une année. La croissance doit bénéficier à celles et ceux qui la font tout comme aux contribuables pour que la citoyenneté ne soit pas entachée d’une déconnexion fondée sur l’injustice fiscale et la perte de sens dans un projet économique partagé.
Face à l’évidence de l’arbitraire de la décision, il est temps de s’interroger sur la légitimité de cette institution à s’ingérer dans un débat politique majeur qui de toute évidence ne met pas en cause les principes fondamentaux de la République sauf à penser que la préservation des profits fait partie de ces derniers.
Après le coup de force que constitue l’arrêt prématuré des discussions budgétaires à l’Assemblée nationale via l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, les sénatrices et les sénateurs du groupe CRCE continueront de porter la taxation des profits lors de l’examen au Sénat du projet de loi de finances pour 2023. Plus largement, ils seront disponibles et à l’initiative pour poursuivre ce combat de justice fiscale.