Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Activité des sénateurs

Nous défendons un nucléaire de haut niveau et pas low-cost.

Par / 26 janvier 2023

Dès l’ouverture de la discussion générale de ce texte, nous avons émis un certain nombre de réserves, tant sur la forme, que sur le fond. Sur la forme d’abord, parce que nous regrettons que rien ne change sur votre méthode. Nous vivons une crise sans précédent, dont le constat est clair et demande une réponse globale.

Aujourd’hui, c’est un système concurrentiel qui s’effondre et qui n’a jamais tenu par lui-même, dans lequel il a toujours fallu intervenir pour qu’un semblant de concurrence émerge. Et quelle concurrence !

Des fournisseurs alternatifs dopés aux aides d’Etat indirectes, propulsés par l’assèchement organisé de l’opérateur historique. Un marché européen de l’électricité, où se sont invités traders et spéculation, et où la fraude est massive.

Des valeurs marchandes sans réalité concrète, des échanges sans stock, des factures sans lien avec les mix électriques nationaux. Un fiasco pour les usagers et usagères, pour l’innovation, pour l’investissement, pour le développement des énergies décarbonés.

Cette situation, personne ne peut l’ignorer tant la crise l’a rendue visible. Les collectivités, les entreprises, les artisans, les particuliers, personne n’est épargné.

Mais un choc n’est jamais une fatalité.

Lorsque l’on prend la mesure de ce qui se produit, lorsque que l’on accepte qu’il faut changer de logiciel, on peut rebâtir quelque chose, on peut régler la question efficacement et durablement. Ce n’est pas l’approche que vous avez retenue, Madame la Ministre.

Vous continuez de penser qu’il est possible de continuer sur un traitement partiel des enjeux autour de l’énergie, texte par texte, projet de loi par projet de loi. Sans remettre en question le cadre global. Mais ce n’est pas possible.

Tous les groupes ici vous l’ont dit, d’ailleurs. Les sensibilités politiques sont loin d’être les mêmes, mais tous vous ont reproché la méthode avec laquelle vous abordez le sujet.

Six mois avant la Programmation Pluriannuelle de l’énergie, vous nous présentez un texte pour réduire les délais administratifs sur le nucléaire. En réalité, c’est symptomatique de quelque chose.

C’est symptomatique du rôle du Parlement aux yeux de votre gouvernement. Des chambres d’enregistrement selon vous, devant lesquelles vous faites passer des textes parce que la Constitution vous le demande. Mais ce n’est pas le débat qui vous intéresse. D’ailleurs, le mieux selon vous, c’est de ne pas amender.

Mais Madame la Ministre, la filière nucléaire n’a pas souffert des délais administratifs. Elle a souffert des atermoiements des gouvernements successifs et de la volonté de mettre fin à cette filière.

Du côté des communistes, nous soutenons le développement du nucléaire, tout comme celui des énergies renouvelables. Mais à deux conditions : démocratie et sécurité. Faire passer un texte, alors que le débat public n’est pas fini sur le nucléaire, ce n’est pas sérieux.

Pire, la réduction des délais administratifs risque de provoquer colère et incompréhension, alors que ce sont des projets qui vont s’étendre sur un siècle. On a besoin de prendre le temps de la concertation et de l’acceptabilité.

Et vous avez un autre problème. Imaginez que le Parlement décide de retenir le scénario de RTE 100% renouvelable dans la Programmation Pluriannuelle de l’Energie. Ce n’est pas notre volonté, mais imaginons. Nous aurons donc passé du temps à bavarder pour rien.

D’ailleurs, vous avez passé 8 minutes sur les 11 de votre intervention générale, au début du texte, pour nous expliquer ce dont il ne fallait pas parler. À savoir l’essentiel et l’important. En réalité, sur ce projet de loi, il aurait fallu s’en tenir au secondaire et au superficiel.

Et si le Parlement ose amender, ou si vous êtes minoritaires, c’est soit la procédure accélérée, soit le 49-3 à l’Assemblée nationale ou autre passage en force, comme vous le faites actuellement avec l’article 47-1 sur les retraites.

Venons-en au fond. Sur le financement du nucléaire : interdit d’en parler. C’est une chose de modifier un article du code de l’urbanisme, c’en est une autre de savoir comment financer 8 nouveaux EPR à plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Avec EDF, nous aurions une maîtrise publique via un groupe réétatisé. Nous voulons savoir quelle sera la nouvelle architecture du groupe. Là aussi, interdit d’en parler : ce n’est pas à l’ordre du jour. Permettez-moi de vous dire que les parlementaires que nous sommes ont le droit de s’interroger sur les capacités d’un groupe à investir alors qu’il a déjà 60 milliards d’euros de dettes. Mais non. Passez votre chemin, le gouvernement s’occupe de tout.

Et quelle régulation de ce nouveau nucléaire, avec l’ARENH 2.0 après 2025 ? Là encore, interdit d’en parler. On nous répond que les négociations ont commencé, d’ailleurs on ne sait même pas avec qui. Pourtant c’est un sujet sur lequel on ne peut pas se faire l’économie de la réflexion tant ce système est absurde et insupportable.

Est-ce que vous allez continuer à ruiner EDF avec un système comme l’ARENH ? Est-ce que vous allez nous faire voter pour des installations nucléaires qu’EDF n’aura pas les moyens d’entretenir ? Est-ce que le service public va continuer d’être racketté au profit d’acteurs alternatifs ?

Ensuite, la question fondamentale concerne les tarifs réglementés de vente de l’électricité. Et pourtant, pas un mot. Madame la Ministre, êtes-vous pour leur maintien ou pour y mettre un terme, comme avec le gaz en juin 2023 ? Ce ne sont pas des questions annexes, c’est le cœur du sujet.

Enfin, sur les enjeux de sécurité et d’emploi. Pas un mot sur les travailleurs et travailleuses de la filière, ni même pour celles et ceux qui font les frais de la sous-traitance en cascade. Nous vous avons interrogée sur le sujet, et vous nous avez répondu qu’ils « ne rêvent pas tous du statut des IEG ». Je le redis et je l’assume : nous ne devons pas rencontrer les mêmes.

Nous, nous exigeons, avec elles et eux, que ce statut soit sanctuarisé et élargi à tous les sous-traitants. Il en va leur sécurité, en plus de la nôtre et de l’attractivité de la filière. De la reconnaissance de leur travail et de leurs qualifications. Parce qu’il faut être clair.

La décennie de retards de l’EPR de Flamanville ne vient pas des lenteurs administratives, mais en grande partie de la casse des métiers, des savoirs faire, des compétences.
Tout ça a été précipité par le recours abusif à la sous-traitance, et on le voit surtout chez les soudeurs et soudeuses, mais c’est une réalité qui touche l’ensemble de la filière.

Comme pour les énergies renouvelables, que nous défendons, nous demandons un nucléaire de haut niveau et non pas low-cost.

Nous voulons construire notre indépendance sur ces deux piliers, sous maîtrise publique, et nous appuyer sur nos propres savoir-faire. Car pour nous, l’énergie est un bien commun de l’Humanité qui doit être sortie des griffes du marché.

Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons.

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