Violences conjugales : une loi pour protéger
Par Laurence Cohen / 16 février 2023La proposition de loi créant une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales que nous examinons aujourd’hui en nouvelle lecture, aura connu un parcours des plus tumultueux. Cette proposition de loi de notre collègue centriste Valérie Létard reprenait une proposition de loi déposée par ma collègue Michelle Gréaume en février 2021, je veux les en remercier.
Face aux nombreuses insuffisances de l’action publique en matière de lutte contre les violences conjugales, le gouvernement a déposé et fait adopter un amendement visant à réécrire intégralement l’article 1er.
Nous saluons le fait que plusieurs amendements GDR aient été adoptés pour encore enrichir le texte supprimer la condition que le gouvernement avait instauré sur la régularité au séjour et sur les difficultés financières immédiates. Une aide universelle se doit de l’être, même si elle est modulée en fonction des besoins.
Le fait que la présence d’enfants à charge ait été pris en compte et que cela soit l’Etat et non plus la CNAF qui gère ses dépenses de l’aide sont également des mesures positives.
L’introduction de l’article 1er TER qui prévoit une loi de programmation pluriannuelle de lutte contre les violences faites aux femmes, en ciblant l’accompagnement psychologique et social, l’hébergement, la formation est extrêmement importante. Madame la Ministre, même sans caractère normatif, pouvez-vous nous confirmer que cette loi verra le jour avec les moyens nécessaires, que cela soit pour le 3919 comme cela est prévu, comme pour les autres associations qui nous alertent.
Les groupes LR et centristes ont également enrichi cette PPL. Et si j’ajoute enfin, que plusieurs amendements du groupe socialiste ont complété le texte en précisant notamment que l’accord de la victime était nécessaire avant l’information du président du conseil départemental, vous aurez là un texte largement transpartisan.
Cette construction partagée s’explique en grande partie par la progression des violences conjugales dans notre pays.
Selon l’Observatoire national des violences faites aux femmes, 213 000 femmes ont été victimes de violences physiques et sexuelles commises par leur partenaire ou ex-partenaire en 2019.
Selon le bilan du ministère de l’intérieur paru cet été, le nombre de féminicides a augmenté de 20% en 2021 par rapport à l’année précédente : 122 de nos sœurs, nos mères, nos cousines, nos voisines, nos filles sont décédées sous les coups d’un conjoint ou ex-conjoint, contre 102 en 2020.
Par conséquent il est indispensable d’accompagner les femmes qui sont majoritairement les victimes de violences conjugales à sortir de l’emprise morale et économique exercée par le conjoint.
L’instauration d’une aide financière d’urgence aux victimes permettra d’encourager cette démarche de départ salvatrice.
Nous ne pouvons que regretter que la grande cause du quinquennat d’Emmanuel Macron ne bénéficie pas des 2 milliards d’euros demandés par les associations féministes, afin d’engager une véritable lutte efficace contre les violences, en agissant sur l’éducation et la prévention plutôt que d’attendre l’apparition des comportements violents.
Et je profite pour insister sur un fait important : si nous voulons débarrasser la société de ce fléau, je vous invite madame la ministre à mettre à l’ordre du jour une loi cadre en vous appuyant sur celle faite par les associations féministes et notamment le CNDF. C’est mon souhait et je crois qu’il est partagé.
En conclusion, cette proposition de loi est un premier pas pour accompagner les victimes de violences conjugales qui nécessite des moyens financiers de l’Etat.
En attendant, les sénatrices et sénateurs du groupe Communiste Républicain Citoyen et Ecologiste voteront favorablement ce texte, en espérant une adoption conforme pour une entrée en vigueur le plus vite possible.