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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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À quand la grande loi sur la culture et le patrimoine, si souvent annoncée ?

Adaptation au droit de l’UE dans les domaines de la propriété littéraire et artistique -

Par / 18 décembre 2014

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, avant d’évoquer le contenu du présent texte, permettez-moi de formuler deux remarques.

Sur la forme, d’abord, l’engagement de la procédure accélérée est une modalité d’examen dérogatoire au fonctionnement normal du Parlement et donc préjudiciable au bon exercice de la démocratie. Si cette discussion en procédure accélérée a pour finalité d’éviter une sanction de la Cour de justice de l’Union européenne liée au retard de transposition par la France, nous pouvons nous interroger sur les raisons de cette absence de transposition en temps voulu.

Sur le fond, ensuite, la transposition aurait pu se faire dans le cadre d’une grande loi sur la création culturelle et le patrimoine, réclamée par mon groupe, promise par le Gouvernement, mais maintes fois reportée.

Car la culture est non pas un supplément d’âme, mais au contraire ce bouillonnement sans lequel aucune vie ne surgit pleinement, sans lequel aucun lien essentiel ne peut se tisser entre une population et son juste désir de rencontrer l’art, les artistes, dans une diversité de lieux et dans la proximité, notamment.

La culture doit donc plus que jamais être défendue au sein d’une grande loi qui conforte sa place et son importance, ainsi que celle des personnels qui œuvrent pour sa vitalité.

Je pense évidemment aux intermittents, dont les droits sociaux sont mis à mal et qui peinent à défendre leurs droits dans le cadre de la concertation mise en place sur l’assurance chômage, face aux attaques du MEDEF, pour qui cette bataille n’est pas la première pour détruire les droits sociaux.

La suppression des budgets dédiés à l’action culturelle qui ne manquera pas de découler des restrictions drastiques imposées aux collectivités privera certainement les citoyens de lieux essentiels où se construit une conscience capable de donner à tous les outils de compréhension du monde.

Par conséquent, madame la ministre, nous espérons qu’une telle loi verra bien le jour, car la culture s’avère plus qu’indispensable en cette période de crise qui délite tous les liens sociaux.

J’en viens maintenant aux dispositions contenues dans le présent texte.

Elles ne posent pas de problème majeur. Si les secteurs concernés par ce projet de loi sont variés, celui-ci a une certaine unité : il va dans le sens d’une plus grande protection des auteurs et des biens culturels, tout en favorisant le rayonnement et l’accessibilité des œuvres.

Les premiers articles transposent la directive de 2011 sur la protection des droits d’auteur et des droits voisins. Ils opèrent une harmonisation européenne de la durée de protection des droits d’auteur et des droits voisins dans le secteur musical seulement, en raison des défis particuliers auxquels est confronté ce secteur menacé par les nouveaux usages numériques et le téléchargement illégal.

Il s’agit de porter de cinquante à soixante-dix ans la durée de protection des droits voisins pour les artistes-interprètes musicaux et les producteurs de phonogrammes à compter du fait générateur des droits, car, actuellement, les droits patrimoniaux s’éteignent souvent du vivant de ces artistes.

La deuxième directive transposée est celle de 2006 relative aux œuvres orphelines. Elle crée une exception ou une limitation aux droits d’auteur et aux droits voisins pour les œuvres orphelines écrites, cinématographiques, audiovisuelles ou sonores.

Est ainsi prévue la possibilité pour les bibliothèques, musées, services d’archives ou établissements d’enseignement de numériser et de mettre à disposition du public des œuvres orphelines faisant partie de leur collection, c’est-à-dire des œuvres dont les titulaires de droits d’auteur ou de droits voisins n’ont pu être retrouvés.

La numérisation ne peut se faire que pour des missions culturelles, éducatives et de recherche, sans but commercial ou économique.

Enfin, la troisième directive transposée, datant de 2014, concerne la restitution des biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d’un État membre.

Dans un objectif de lutte contre le trafic des biens culturels, l’Union européenne s’est dotée, le 1er janvier 1993, de deux instruments concernant la protection des biens culturels : un règlement instituant un dispositif de contrôle à l’exportation lors de la sortie du territoire de l’Union européenne, et une directive permettant aux États membres de se voir restituer leurs trésors nationaux qui, ayant quitté illicitement leur territoire, sont retrouvés sur le territoire d’un autre État membre.

Devant le manque d’efficacité de ces dispositifs, une nouvelle directive a été adoptée. La définition des trésors nationaux est ainsi précisée, incluant désormais les œuvres des collections des musées de France et les objets mobiliers classés « monuments historiques », mais aussi, et de manière explicite, les biens relevant tant du domaine public, au sens du code général de la propriété des personnes publiques, que des archives publiques.

Un allongement du délai pour permettre aux autorités de l’État membre requérant de vérifier la nature du bien est également prévu, passant de deux à six mois et, enfin, est intégré un allongement du délai d’exercice de l’action en restitution, qui passe de un an à trois ans.

Une précision est enfin introduite : c’est le possesseur du bien qui a la charge de la preuve, dans le cas où l’État demande une indemnité, et dans ce seul cas. (Exclamations.) Je vois qu’il n’y a pas que moi que cela inquiète… Ce dernier point opère, en effet, un renversement de la charge de la preuve en rupture avec le droit interne, qui reconnaît une présomption de bonne foi au possesseur d’un bien, selon l’article 2274 du Code civil, confirmé par la jurisprudence de la Cour de cassation.

Ce point, même s’il est très strictement circonscrit, comme le rappelait Mme la rapporteur, risque de créer une insécurité juridique et un renversement des principes juridiques du droit français en matière d’acquisition d’un bien frauduleux, ce qui nous interroge assez fortement.

Nous voterons néanmoins ce texte, en continuant à alerter sur les conséquences éventuelles de cette disposition.

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