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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Débat national sur l’école

Par / 21 janvier 2004

par Annie David

Monsieur le Président,
Messieurs les Ministres,
Mes chers collègues,

L’Ecole est l’affaire de chacun d’entre nous. Elle est un droit à la connaissance, un droit pour les apprentissages, pour apprendre à vivre ensemble, un droit essentiel à chacun de nos jeunes leur permettant d’acquérir, de la maternelle à la fin de leur parcours scolaire, les savoirs et connaissances pour construire leur avenir.
En ce sens, le système scolaire de l’Education Nationale a fait de spectaculaires progrès depuis 20 ans. Mais ses moyens, ses méthodes et ses programmes actuels de ce système arrivent au bout de ce qu’ils peuvent faire, malgré la mise en place des ZEP, et l’investissement professionnel remarquable de la plupart des enseignants et des personnels de l’éducation nationale.

L’école aggrave la ségrégation sociale, le nombre de jeunes quittant le système éducatif sans qualification augmente, le nombre d’étudiants stagne et tend même à régresser.
Parce que le parti communiste, qui a été de toutes les luttes pour l’école publique, demande depuis fort longtemps un grand débat sur l’Ecole, ses parlementaires ont accepté de participer à la commission Thélot pour l’organisation de ce débat de société, que nous ne posons pas comme une finalité en soi mais bien dans la perspective d’une transformation profonde du système éducatif, répondant aux attentes de la communauté éducative, de nos jeunes, de leurs parents, confrontés à une société en pleine évolution.

Or, la rapidité dont il a fallu faire preuve pour débattre a amené des discussions inachevées. Trois mois pour débattre soit, mais concentré sur une semaine par département. L’ambition affichée ne se retrouve pas dans l’organisation des débats. Vous annoncez plus d’un million de participants mais il manque véritablement trois publics : les jeunes, les directeurs d’établissements et surtout les populations des quartiers difficiles.
Débattre sur l’école nécessite aussi d’avoir une vision globale allant de la maternelle à l’enseignement supérieur. Or, la place accordée à l’école maternelle est insignifiante et l’enseignement supérieur est exclut.

Quant aux thèmes abordés, beaucoup rejoignent vos préoccupations. Sans doute vos déclarations intempestives, Messieurs les Ministres, ont franchi le cercle de cette commission, rendant difficile la neutralité… tandis que d’autres sont ignorés, dévoyant ainsi la discussion : la gratuité, la scolarisation des enfants de moins de trois ans, par exemple.
L’école de la réussite pour tous est avant tout un enjeu social, aussi on ne peut faire un état des lieux de l’école sans faire celui de la société. Là encore, vous l’avez exclu du débat.

Il ne peut y avoir de démocratisation scolaire efficace sans une politique sociale conquérante et ambitieuse : c’est le droit au logement, actuellement en crise et dont le gouvernement s’est délesté, le droit à la santé, remis en cause par le texte sur la santé publique, le droit au travail, malmené aujourd’hui, n’en démontre la multiplication des plans de licenciements, le droit pour l’école d’avoir les moyens de ses ambitions. Or, les annonces de suppressions de postes, tant d’enseignants que de personnels de différents servies, pour la rentrée 2004, n’augure pas du bon respect de ce droit, alors que le débat n’est pas encore clos !

L’école n’est donc pas isolée du tissu social et laisser croire que l’échec scolaire pourrait n’être réglé que par l’école elle-même est hypocrite, voire dangereux. En accueillant les élèves, elle enregistre les dégâts humains du chômage, de la précarité et les dégâts psychiques d’une fragilité croissante face à l’avenir. La désespérance sociale pèse lourd dans l’espoir envers l’Ecole.
C’est sur le triptyque Ecole Laïque, Gratuite et Obligatoire que s’est fondé l’école de Jules Ferry mais, ce sont bien les luttes citoyennes qui ont permis d’instaurer et de conserver un service public d’éducation nationale et l’accession à l’enseignement secondaire de la quasi totalité des jeunes.

Ecole laïque. Je réaffirme mon attachement pour la laïcité, vecteur de la cohésion d’une société riche en diversité. Mais, nous aurons l’occasion d’en débattre puisque votre gouvernement a décidé de légiférer.
Ecole gratuite : si elle l’a été, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les familles sont, quelquefois fortement, mises à contribution (transport, fournitures scolaires….) Des initiatives de compensation ont été inventées par l’état, et surtout par les collectivités territoriales mais la gratuité totale de l’école en terme de droit public n’existe pas.

Aussi, parce que l’éducation est un droit essentiel, parce que l’école n’est pas une marchandise : Langevin et Wallon remarquaient à ce sujet et il y a plus de 50 ans : « Le niveau de développement d’un pays se mesure aux moyens qu’il consacre à l’éducation », parce que l’école tisse le lien social et doit assurer l’égalité des chances, je pense que nous devons nous inscrire dans une démarche de gratuité effective.

Obligation de la scolarité : aujourd’hui jusqu’à 16 ans, ne faut-il par la rendre obligatoire jusqu’à 18 ans, vous l’avez dit vous-même, la discussion doit s’engager cela en réponse au besoin important d’une élévation du niveau de qualification annoncée ? Cela répond aussi au droit, pour tous les élèves à l’issu du collège, de poursuivre des études de second cycle et à la nécessité d’élever pour tous, le niveau de culture et de qualification indispensable à l’épanouissement de chacun et de la société.

Cette mesure devrait s’accompagner d’une réflexion à la fois sur les contenus de la culture commune et des voies diversifiées pour l’atteindre. En effet, malgré l’accès à un plus grand nombre d’enfants issus de milieux modestes, le collège unique n’a pas permis d’effacer les disparités sociales et encore 160000 jeunes sortent du cursus scolaire sans qualification.
Cependant, c’est par ce socle commun de connaissance que chaque individu, en s’appropriant le patrimoine commun, se lie à la communauté nationale. Une orientation précoce ne ferait qu’entériner des inégalités contre lesquelles l’école doit lutter.

Si la mission du collège unique a été mise à mal, c’est souvent en raison d’un manque de moyens mais aussi parce que la diversité des élèves aurait dû passer par la diversité des réponses. A l’intérieur du collège, nous devons prendre en charge spécifiquement les élèves en grande difficulté, sans oublier pour autant les bons élèves, ou les élèves surdoués et nous devons aussi assurer l’accueil des enfants handicapés.

De même, il faut repenser le contenu des enseignements. La résorption de l’échec scolaire doit passer par une harmonisation des contenus et par des pratiques pédagogiques diversifiées. Le collège de la réussite pour tous reste donc à construire.

Par ailleurs, l’enseignement secondaire général est peu diversifié et apporte peu à la démocratisation. Peut-être faut-il créer de nouvelles filières générales (des dérivées de la série scientifique, lettre…) afin de les rendre plus attractives.
Le contenu des enseignements de la filière professionnel n’est pas exempt de critiques. Par exemple, à l’ère de la mondialisation, on n’y enseigne qu’une langue étrangère.

Mais on ne doit pas penser l’échec scolaire uniquement à partir du collège mais bien le prévenir dès la maternelle. La scolarisation des moins de trois ans régresse aujourd’hui, alors que des études montrent qu’elle permet de réduire l’échec scolaire pour les enfants issus de classes défavorisées. Ce droit donné à certains de nos enfants, accompagné d’une école maternelle de qualité, a pour objectif de permettre une meilleure réussite de tous les élèves. Le Haut Conseil d’Evaluation de l’Ecole souligne lui aussi le rôle incontestable du développement de la scolarisation en maternelle dans l’amélioration de l’ensemble du système scolaire

L’école primaire et le collège de la réussite pour tous lieux d’acquisition d’une culture commune, voici les clés pour accéder et réussir au lycée. L’idée que la connaissance ne peut être accessible qu’à certains est pour moi inacceptable !
Aujourd’hui au moins autant qu’hier, l’Ecole, pour de très nombreux élèves, est le seul lieu d’acquisition de ces savoirs. Elle doit le rester, car ce sont ces acquisitions qui permettront de construire les bases d’une formation solide et durable, laquelle conditionne à la fois des possibilités futures de formation, et l’égalité de chacun dans la participation à la vie démocratique. Il ne peut y avoir de transformation efficace sans une véritable démocratie.

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