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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Le Budget 2007 de la mission jeunesse, sport et vie associative est opaque et cache de fortes baisses derrière une hausse apparente.

Par / 8 décembre 2006

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je tiens à souligner l’intérêt de la majorité pour ce budget - si important pour notre pays - de la jeunesse, des sports et de la vie associative, puisque, si nous sommes cinq élus de l’opposition à être présents ce soir, je ne vois en revanche aucun sénateur de la majorité. C’est formidable !
Le rapport de notre collègue M. Murat reprend vos propos, monsieur le ministre, qualifiant d’historique ce budget pour 2007, en raison de son passage symbolique au-delà du milliard d’euros.
Mais le budget que nous étudions ce soir n’est, lui, que de 780 millions d’euros. Aussi, je souhaite soulever, dans un premier temps, la question de sa lisibilité et de sa sincérité.
Avec la réforme de la LOLF, nous devrions avoir, dans le projet de budget, une justification à l’euro près des dépenses prévues. Or, prenons le programme « Sport » : si nous raisonnons en budget consolidé, comme vous le souhaitez, monsieur le ministre, nous ne disposons d’aucune information sur la nature des dépenses du CNDS. Déjà, l’an passé, je vous demandais de nous communiquer le budget prévisionnel de cette institution ; nous n’en disposons toujours pas, ce n’est pas normal !
Par ailleurs, dans le programme « Sport », qui s’élève à 205 millions d’euros, 80 millions d’euros vont aux fédérations sportives, soit 44 % des dépenses, sans que nous connaissions les actions qui sont menées dans le cadre de leur activité.
Finalement, nous ne disposons d’informations que sur 26 % du programme « Sport ». C’est dire combien il est, d’une certaine façon, opaque. Il vous permet ainsi des effets d’annonce sur telle ou telle action de votre ministère, sans que quiconque ait les moyens de vous contredire.
Cependant, les chiffres sont têtus. Le budget de la mission que vous nous présentez est de 780 millions d’euros, alors qu’il était de 756 millions d’euros l’année passée. Mais, derrière cette hausse apparente de 24 millions d’euros, se cache en fait une très forte baisse à périmètre constant.
En effet, le budget pour 2007 prévoit 25 millions d’euros d’investissements supplémentaires au profit de la rénovation de l’Institut national du sport et de l’éducation physique, l’INSEP, ce dont, évidemment, nous nous félicitons. Mais ce n’est pas une dépense nouvelle dans l’activité.
Dans ce budget, sont également prévus 15 millions d’euros pour couvrir les exonérations - un peu scandaleuses - de charges dues à votre loi sur le sport professionnel.
Il faut, par ailleurs, ajouter 6 millions d’euros pour la mise en place de votre programme « Parcours animation sport » et pour couvrir les premières dépenses de votre loi sur le volontariat.
Ainsi, 46 millions d’euros sont consacrés à des charges nouvelles, sans compter les transferts de 11 millions d’euros de frais de personnels assumés auparavant par l’éducation nationale.
Donc, au total, derrière l’apparente hausse de votre budget, se cache une baisse de 6 % ou 7 %. De ce fait, c’est sans doute l’un des plus mauvais budgets que vous ayez eu à défendre depuis que vous êtes ministre.
Et nous sommes encore plus inquiets lorsque nous nous interrogeons sur la sincérité de votre budget. En effet, il sert habituellement de variable d’ajustement en fin d’exercice. Ainsi, en 2005, 10 % des dépenses prévues n’ont pas été engagées.
Alors, si, au lendemain des échéances électorales à venir, votre successeur devait poursuivre dans la même voie, le risque est que cette baisse, que nous venons de dévoiler pour l’année 2007, ne soit finalement encore bien plus grave en fin d’exercice.
Cette diminution affecte tous les programmes de votre budget. Mais le manque de lisibilité de celui-ci, que nous venons de dénoncer, vous permet de faire des déclarations d’autosatisfaction qui sont difficilement justifiables.
Ainsi, par exemple, pour le programme « Sport », vous avez déclaré, devant la commission, que 230 millions d’euros viendraient en soutien à la pratique sportive du plus grand nombre et à la valorisation de ses fonctions éducatives et sociales, alors que l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre » ne dispose que de 35 millions d’euros et est en baisse de 35 % par rapport à 2006.
Qui plus est, sur ces 35 millions d’euros, 21 millions d’euros vont aux fédérations sportives, dont l’action en faveur de la promotion du sport pour tous reste quelque peu floue et, de toute façon, faible.
De ce fait, les fonds déconcentrés visant à soutenir les actions de développement des pratiques sportives chutent de 8 millions à 3 millions d’euros.
Par ailleurs, les fonds d’intervention de votre ministère en faveur du mouvement sportif local disparaissent et les dépenses ciblées visant à soutenir les jeunes en difficulté, les femmes et les handicapés passent de 10 millions à 8 millions d’euros. C’est donc votre action au service du sport pour tous que vous sacrifiez de nouveau.
Depuis votre prise de fonctions, vous n’avez jamais cessé, d’année en année, de réduire vos politiques en ce domaine, au profit de la professionnalisation du sport.
Bien sûr, je vous entends déjà me répondre que ces dépenses seront dorénavant partagées avec les interventions du CNDS. Seulement voilà, si l’on additionne les postes budgétaires que nous venons de signaler, cela représente 9 millions d’euros, qui étaient auparavant assumés par votre ministère et qui seraient transférés au CNDS. Il faut, par ailleurs, y adjoindre les 7 millions d’euros que vous supprimez de vos interventions au profit des collectivités locales.
Ainsi, vous transférez au CNDS 16 millions d’euros de dépenses supplémentaires sans que la moindre augmentation soit prévue à son budget, mis à part les 20 millions d’euros réservés à vos dépenses en faveur du Plan national pour le développement du sport.
Dès lors, globalement, malgré vos effets d’annonce, les budgets mis à la disposition du sport, à périmètre constant, vont lourdement baisser cette année.
Sur les 205 millions d’euros du programme « Sport », 25 millions d’euros vont aller, je le répète, à la rénovation de l’INSEP. Aussi, il ne restera donc plus que 180 millions d’euros pour les autres actions, soit une baisse de 10 %.
Quant aux fonds mis à la disposition du CNDS, ils restent stables, bien que vous lui transfériez de nouvelles charges. De plus, il ne faut pas oublier que, lors du passage du FNDS au CNDS, les recettes de cet organisme ont chuté de plus de 30 %. Aussi ne peut-il faire face qu’à 10 % des demandes qui lui parviennent, tant pour soutenir des actions sportives locales que pour subventionner de nouveaux équipements.
En l’espace d’un an, cet organisme s’est totalement paupérisé. Ce sera pire en 2007. Notre rapporteur note d’ailleurs, à sa façon, cette réalité.
Déjà, l’an passé, je vous alertais et proposais un amendement visant à renforcer les recettes du CNDS. Cette année, j’ai de nouveau formulé cette demande, avec mon groupe, par le biais un amendement déposé à l’article 29 du projet de loi de finances, mais le refus est le même. Je le regrette.
Je déplore également de ne pas partager votre satisfaction, monsieur le ministre, quand vous déclarez que les moyens du programme « Jeunesse et vie associative », maintenus par rapport à 2006, permettront de consolider le plan exceptionnel d’aide à la vie associative dans les quartiers.
En effet, c’est oublier que ce programme n’avait reçu que 10 % de cette aide supplémentaire, et que ces sommes correspondaient simplement aux montants des annulations de crédits effectuées l’année précédente. L’effort était mince dans votre budget ; le plan exceptionnel n’y était pas.
Vous dites, malgré tout, que celui-ci sera maintenu. Si, sur la masse, les chiffres concordent, en y regardant de plus près, nous nous apercevons une nouvelle fois que la réalité est bien plus complexe.
Dans le domaine de la jeunesse, les budgets représentent au total 62 millions d’euros, soit une hausse de 1,6 %, ce qui correspond au taux de l’inflation. Donc, il y a stabilité.
Toutefois, il convient de noter que les deux tiers de ces dépenses sont des frais de structures. Les sommes qui vont sur le terrain aux associations et aux familles ne représentent que 20 millions d’euros, dont 7 millions d’euros sont destinés à l’opération « Envie d’agir ». Vous avez fait une communication lors du dernier conseil des ministres sur ce sujet, ce qui nous permet de disposer d’éléments sur les publics concernés, que nous n’avions pas dans les documents budgétaires. Je vous en remercie.
Cette opération ne touche, malgré tout, que 40 000 jeunes sur les 15 millions qui ont entre onze et trente ans, soit 0,3 % du public visé. C’est finalement très peu !
Quant aux associations locales financées pour leurs actions « jeunesse », elles devront se satisfaire de 13 millions d’euros au lieu des 14 millions d’euros qui leur avaient été alloués l’an passé, soit une baisse de 7 %.
Les actions du programme « Jeunesse et vie associative » spécifiquement consacrées à la vie associative sont dotées de crédits s’élevant à 73 millions d’euros, soit un montant exactement identique à celui de l’année dernière.
Mais, là encore, il y a des charges nouvelles. Je pense, notamment, à la mise en oeuvre de la loi du 23 mai 2006 relative au volontariat associatif et à l’engagement éducatif, qui représente une somme de 2,5 millions d’euros, à la prise en charge des assurances en faveur des bénévoles, soit 500 000 euros, et à la mise en place du « Parcours animation sport », pour un montant de 1,5 million d’euros. En définitive, ce sont donc 4,5 millions euros de nouvelles charges qui viennent en déduction des sommes affectées !
Dans le même temps, vous réalisez un effort en faveur de la formation financée par le Conseil du développement de la vie associative en débloquant des crédits consacrés au fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, ou FONJEP, que vous aviez gelés pendant plusieurs années.
Ainsi, l’apparente stabilité du budget en faveur de la vie associative masque 6,5 millions d’euros de dépenses nouvelles. Certes, 2,5 millions d’euros sont compensés par les fonds dont vous disposiez dans le domaine de votre compétence disparue, c’est-à-dire l’économie solidaire. Mais une somme de 1 million d’euros est retirée de vos actions de partenariat avec les associations locales, le reste des économies nécessaires étant réparti sur l’ensemble des autres postes.
Dès lors, force est de le constater une nouvelle fois, malgré vos déclarations, les moyens à périmètre constant sont également en baisse dans ce secteur, à hauteur cette fois de 5 %. Ce seront les associations locales qui seront les premières touchées.
Au total, cette année, votre budget est un budget de rigueur. Il n’est pas à la hauteur de vos missions et des difficultés rencontrées par notre population.
En effet, comment répondre aux besoins de 15 millions de jeunes âgés de onze à trente ans, de 10 millions de licenciés sportifs, de 1 million d’associations dans lesquelles interviennent 12 millions de bénévoles, et de 1,5 million de salariés, qui s’adressent à toute la population de notre pays, avec un budget aussi étriqué ? C’est impossible, et vous le savez fort bien !
C’est pourquoi il serait nécessaire de doubler ces crédits, en attendant qu’ils représentent 1 % du budget de la nation.
C’est une revendication qui a, très longtemps, été celle du mouvement sportif.
Compte tenu des sommes en jeu, il est possible d’atteindre un tel objectif, si l’on en a la volonté politique. Mais encore faut-il l’avoir !
L’évolution que je propose serait socialement juste et économiquement avantageuse. Il s’agirait d’un investissement rentable pour notre société.
Investir dans la jeunesse, c’est évidemment préparer l’avenir.
Investir dans le sport pour favoriser la pratique du plus grand nombre, c’est offrir à tous un équilibre physique et psychique pour leur bien-être et leur santé, dans l’échange et la socialisation.
Investir dans la vie associative, c’est redonner du sens à la citoyenneté et s’ouvrir à de nouvelles pratiques favorisant le lien social et le « vivre ensemble ».
Il s’agit là de défis auxquels notre société devra répondre pour poursuivre son développement.
Monsieur le ministre, voilà cinq ans que vous occupez vos fonctions actuelles et, je le crois et je le regrette, aucune ambition réelle n’est venue porter votre action. Chaque année, vous avez effectué un essaimage budgétaire. C’est la marque d’une politique de restriction, sans cohérence, ni réelle volonté politique. Et ce ne sont pas les quelques millions d’euros supplémentaires, venus au fil des ans, qui ont changé vos capacités d’intervention.
Votre projet de budget pour 2007 est comme celui des autres années, c’est-à-dire petit et étriqué. Il porte la marque de l’empreinte gouvernementale qui s’applique dans tous les secteurs : jamais suffisamment pour ceux qui souffrent de manques et toujours plus pour ceux qui ont déjà beaucoup.
Ainsi, les associations locales, sportives et d’éducation populaire perdront des financements pour leurs actions de terrain, qui s’adressent à tous, notamment aux personnes dans le besoin. Dans le même temps, vous financez 15 millions d’exonérations de charges sociales au profit des 900 sportifs les mieux payés de notre pays, soit en moyenne plus de 16 000 euros pour chacun.
C’est une dépense injuste et je vous demande de la supprimer au profit d’actions en faveur des familles en difficulté.
Cela permettrait, par exemple, d’attribuer un coupon de sport de 30 euros à 500 000 jeunes qui ne peuvent pas s’inscrire dans un club sportif ou une aide de 100 euros à 150 000 enfants qui ne partent pas en vacances.
Une telle subvention aux plus riches de nos sportifs est, me semble-t-il, le symbole des discriminations sociales qui règnent encore dans notre pays et qu’il faudra bien, un jour, mettre en cause. À mon sens, cela devient urgent.
Les mois à venir devraient pouvoir nous donner la possibilité d’avancer dans cette voie. Pour notre part, nous agirons pour qu’il en soit ainsi.

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