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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Projet de loi d’orientation pour l’avenir de l’école

Par / 17 mars 2005

Motion de demande de renvoi en commission
du projet de loi sur l’avenir de l’école

Monsieur le président,
monsieur le ministre,
mes chers collègues,

Nous le savons tous ici, l’école, l’avenir de nos enfants et de notre jeunesse sont des sujets de préoccupation majeurs pour nos concitoyens. Leurs craintes et leurs exigences sont toujours très fortes, car chacun a bien conscience que c’est au sein de notre école que se joue largement la vie future de cette génération en devenir.
Nous savons que chaque parent investit une part importante de lui-même dans son enfant, avec une volonté farouche de dépassement, pour que sa progéniture vive mieux que lui, qu’elle ait une appréhension élargie du monde, qu’elle profite d’un bagage culturel plus important que lui.
A travers cet investissement, le parent, le citoyen, tente de s’affranchir de ses propres ignorances et des ségrégations dont il a pu être la victime.
Cette espérance est partagée par tous les membres de notre société. C’est un élément fondateur du pacte républicain qui nous rassemble, du pacte social qui nous unit.
Ainsi, cette volonté commune s’exprime dans notre Etat républicain, en faisant de l’éducation nationale une priorité, un pilier essentiel, pour fonder l’égalité entre les citoyens.
De ce fait, quand le législateur décide de se pencher sur cette importante question, il doit s’entourer des avis à la fois les plus divers et les plus autorisés. Il doit se mettre en position d’écoute, ce qui signifie qu’il lui faut entendre toutes les opinions et ne pas en rester à ses propres options.
Le sujet est trop grave pour devenir l’enjeu d’un combat idéologique dévastateur. Avec une telle attitude, c’est tout l’édifice de concertation qui s’effondre, pour ne laisser place qu’à la colère et à l’opposition de ceux qui ont été écoutés, sans doute, mais qui n’ont pas été entendus.
Et pourtant, nous en sommes là !
Après des mois de consultation, vous devez faire face, monsieur le ministre, à un vaste mouvement de protestation, que vous tentez de prendre de vitesse et de réduire en choisissant la pire des solutions : l’épreuve de force.
Ainsi, c’est au cours de l’examen de ce texte à l’Assemblée nationale que vous avez déclaré l’urgence, afin d’en permettre l’application dès la rentrée prochaine. Cet aspect vous aurait-il donc échappé au moment où vous avez déposé ce projet de loi ?
Non ! Vous avez déclaré l’urgence pour tenter de faire passer votre texte avant que la protestation ne se développe. Votre crainte est même si grande que vous avez accéléré son dépôt sur le bureau du Sénat, au risque de dévaluer la mission de notre assemblée.
Le refus d’entendre un autre avis, l’urgence que vous avez déclarée et l’accélération de nos travaux que vous avez exigée m’amènent naturellement, au nom de mon groupe, à demander le renvoi de ce texte à la commission, de manière que nous puissions travailler sérieusement.
La sagesse sénatoriale, reconnue et acceptée par tous, est indissociable d’un certain temps de réflexion et il aurait donc fallu que nous prenions du temps pour examiner un tel projet de loi.
En effet, sur un sujet aussi important, la commission des affaires culturelles - ce n’est pas votre faute, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission - n’a mené que vingt-six auditions.
Alors que bon nombre de lycéens sont descendus dans la rue, nous n’avons reçu aucun de leurs représentants.
Nous nous apprêtons à réformer les IUFM et à les rattacher aux universités. Or nous n’avons reçu aucun directeur d’IUFM ni aucun président d’université !
Par ailleurs, ce projet de loi vise notamment à supprimer le Conseil national des programmes et le Haut conseil d’évaluation de l’école. Or nous n’avons entendu aucun membre de ces organismes ! J’ai pourtant en mémoire des rapports, en particulier de ce Haut conseil, sur les raisons de l’échec scolaire au collège et sur les redoublements, rapports dont les conclusions auraient été intéressantes pour la commission. Serait-ce parce que ces avis ne correspondaient pas à ceux qui sous-tendent ce projet de loi qu’on n’a pas jugé nécessaire de les soumettre à notre réflexion ?
C’est sans doute pour les mêmes raisons que nous n’avons reçu aucun membre du Conseil supérieur de l’éducation ni du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. En effet, ces deux prestigieux organismes ont émis des avis négatifs sur cette réforme.

Monsieur le président,
monsieur le ministre,
mes chers collègues,

Par ces quelques exemples, je crois avoir fait la démonstration, certes rapide, que le travail en commission est loin d’être terminé : c’est la deuxième raison qui motive notre demande de renvoi.
Par ailleurs, permettez au nouveau sénateur que je suis d’exprimer son étonnement devant les conclusions de notre commission.
En effet, toutes les personnes que nous avons reçues ont fait part de leurs craintes, pour le moins, devant les réformes proposées, certaines formulant leurs critiques, voire leur rejet du texte.
Aucune ne semble avoir été entendue.
J’avoue ne pas comprendre !
En tant que maire, je puis vous dire que, si l’autorité municipale agissait de la sorte, n’écoutant pas les avis émis par les représentants de la population et même, parfois, de l’opposition, la contestation, dans nos communes, serait permanente.
Je sais que, dans cette assemblée, siègent bon nombre de maires.
Pourquoi, dès lors, n’avons-nous pas, ici, la même attitude et la même écoute que dans nos villes ?
Monsieur le ministre, en déclarant l’urgence sur ce texte, vous avez, d’une certaine façon, reconnu que notre éducation nationale était malade et qu’il était nécessaire de prendre rapidement des décisions.
Oui, des mesures d’urgence s’imposent !
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de retirer votre projet de loi, afin de le remettre sur le métier.
En attendant, nous pourrions voter un collectif budgétaire, afin de redonner à l’éducation nationale, dès la prochaine rentrée, tous les moyens que, depuis deux ans, elle a perdus.
En prenant une telle décision, vous donneriez à toute la communauté éducative le signe de votre mobilisation en faveur d’une réforme en profondeur, que beaucoup attendent et dont notre pays, vous le savez, a besoin. Je parle non pas d’une réforme à la va-vite et sans moyens, mais d’une réforme ambitieuse, que nous sommes tous prêts à soutenir.
Comme l’écrivait Montesquieu, « pour faire de grandes choses, il ne faut pas être un si grand génie ; il ne faut pas être au-dessus des hommes, il faut être avec eux ».
Or, depuis des semaines, la protestation grandit contre les mesures que vous soutenez.
Toutes les organisations représentatives de la communauté éducative - et vous savez combien une telle unanimité est rare - vous ont dit leurs craintes, voire leur opposition sur tel ou tel aspect de votre réforme.
Vous leur répondez que vous êtes sensible à leurs remarques, mais vous ne bougez pas d’un pouce, vous ne modifiez en rien votre projet de loi, vous restez sourd aux inquiétudes qui s’expriment.
C’est à cause de votre attitude que l’ensemble de votre texte est aujourd’hui remis en cause.
Certes, devant la protestation grandissante, vous avez déclaré que la réforme du baccalauréat était repoussée, ce dont je vous donne acte. Cela étant, vous maintenez dans votre projet de loi tous les éléments qui permettront finalement de mettre en oeuvre cette réforme. Grâce à l’effet d’annonce que constitue le retrait de la réforme du baccalauréat, vous espériez sans doute masquer le fait que vous l’aviez déjà transformé. En effet, en supprimant les TPE, ce sont les conditions de préparation, de passage et, donc, d’obtention de ce diplôme qui sont d’ores et déjà modifiées.

Monsieur le président,
monsieur le ministre,
mes chers collègues,

Ce projet de loi pose un réel problème de lisibilité quant à ses objectifs.
En effet, l’exposé des motifs et les ambitions affichées sont en total décalage par rapport au projet de loi lui-même.
En regard de l’ambition de réussite pour tous, sont proposées des exigences réduites et rabougries pour le plus grand nombre, fondées sur une sélection sociale renforcée et sur une sélection par l’échec qui ne dit pas son nom et dont la responsabilité est rejetée, le cas échéant, sur l’élève et sa famille, en dédouanant l’institution républicaine.
Certes, nous savons bien que, à Lisbonne, il a été décidé d’« optimiser », et non d’augmenter, les moyens donnés pour l’éducation et la formation.
Mais vous savez bien que, en réduisant les moyens accordés à l’éducation nationale, vous diminuez les chances de réussite des élèves les plus en difficulté et vous prenez un risque certain pour le plus grand nombre.
Votre seul espoir, c’est que le plus grand nombre dispose, comme le souhaite le MEDEF, des compétences minimales nécessaires à son « employabilité », dans des emplois précaires, peu qualifiés et faiblement rémunérés. Autrement dit, les conséquences pourraient être dévastatrices.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, au nom du groupe CRC, étant entendu que le retrait pur et simple de ce texte serait la meilleure solution, de le renvoyer à la commission afin que celle-ci en fasse une étude plus approfondie et plus sérieuse.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

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