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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Une obsession économique qui aboutit à une hiérarchisation des savoirs

Enseignement supérieur et recherche : conclusions de la CMP -

Par / 3 juillet 2013

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et la recherche opère peu de changements par rapport au texte initial. Notre groupe confirme donc son vote négatif sur un texte qui ne crée toujours pas les ruptures nécessaires et attendues avec les logiques initiées par la précédente majorité de droite, qui, avec la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « loi LRU », et le pacte pour la recherche, ont abouti à une déstructuration de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Les reproches que nous formulions lors l’examen du projet de loi au Sénat peuvent être réitérés dans des termes quasiment identiques, voire, à certains égards, plus durs, car des amendements graves, introduits pendant l’examen du texte au Sénat, sont maintenus à l’issue de la commission mixte paritaire.

L’objectif de transfert vers le monde économique reste la pierre angulaire de ce projet. Ce faisant, il impose de manière exclusive une certaine conception de la recherche et des études supérieures, qui limite l’aptitude de la science à s’adapter à un avenir que personne n’est en mesure de prévoir. L’obsession économique qui l’irrigue aboutit à une hiérarchisation des savoirs que nous ne partageons pas, alors que la connaissance doit être la première visée de l’université et de la recherche.

Centrer l’université et la recherche sur l’employabilité et la croissance économique revient à privilégier la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale, les sciences dites « dures » au détriment des sciences humaines et sociales.

Quant à la précarité, si le constat de son explosion dans l’enseignement supérieur et la recherche n’est contesté par personne, nous regrettons que le projet de loi ne s’en empare pas de façon prioritaire. En effet, le projet de loi n’est pas une programmation de moyens et d’emplois, ce qui est en contradiction avec l’objectif affiché par le Gouvernement de mettre l’éducation et la jeunesse au cœur de son action. Or, à nos yeux, une réhabilitation de l’enseignement supérieur et de la recherche ne peut faire l’économie de ce volet sans risquer l’échec.

L’autonomie budgétaire des universités, au travers des responsabilités et compétences élargies, les RCE, avec leur corollaire, qui est le déficit, pour un grand nombre d’entre elles, a contribué à diminuer la part des emplois pérennes au profit des emplois contractuels. Les RCE sont pourtant maintenues !

L’Agence nationale de la recherche, dont le financement par projet a également fait exploser la précarité, n’est pas plus remise en question.

L’article 20, qui tend à substituer à la procédure d’habilitation des diplômes celle d’accréditation des établissements, qui vaut habilitation à délivrer des diplômes, est maintenu. L’évaluation porte non plus sur le contenu des formations, mais sur la capacité de mise en œuvre. Cela nous paraît d’autant plus dangereux que les communautés d’universités et établissements créées par le projet de loi pourront être accréditées, alors qu’elles peuvent être constituées d’établissements publics comme privés.

L’article 38, lui, a été réécrit, mais sans changements positifs. Il ne s’appuie toujours pas sur un principe de coopération souple et non hiérarchisée entre établissements, seul à même de garantir une cohérence territoriale dans un cadre national garantissant le principe d’égalité d’accès au service public de l’enseignement supérieur et de la recherche sur tout le territoire. Cet article substitue aux PRES de nouvelles formes de regroupements et de coopérations territoriales qui conservent les caractéristiques de superstructures de gouvernance, d’autant moins démocratiques que ces regroupements sont désormais rendus obligatoires et que la région y est systématiquement associée.

Ancré dans la logique européenne de spécialisation régionale pour une compétitivité internationale, le projet de loi crée de nouvelles structures de coopération fondées sur l’idée de recentrage de l’enseignement supérieur et de la recherche sur des secteurs d’activités innovants à fort potentiel de croissance, avec des retombées mesurables, au service des ambitions industrielles avant d’être au service des populations.

La CMP a également maintenu l’article 42C, introduit au Sénat par un amendement de nos collègues centristes, qui crée un statut dérogatoire pour les établissements privés à but non lucratifs leur permettant d’avoir un système de qualification propre, un contrat pluriannuel validé par un comité spécial, sans être soumis aux contraintes que connaissent les universités.

L’article 43 bis, qui introduit le principe de mobilité entre les statuts et la possibilité d’effectuer des missions simultanées et qui porte atteinte au statut des personnels, est également maintenu par la CMP, ce que je déplore franchement.

Enfin, l’article 49, qui substitue à l’AERES, l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, un Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, aux missions et à la composition presque identiques, n’a pas non plus subi de modifications, malgré l’opposition quasi unanime de la communauté universitaire à ce type de pratique.

L’évaluation individuelle et collective est certes un exercice indispensable, mais elle devrait être effectuée par des personnes légitimes, reconnues et élues par leurs pairs, dans un but d’amélioration du travail collectif, et non afin de contrôler le travail effectué avec des critères quantitatifs non représentatifs de la qualité du service accompli.

Seule avancée notable : la CMP a rétabli la procédure de qualification nationale préalable au recrutement des enseignants-chercheurs, même si nous savons tous qu’elle doit être améliorée.

La possibilité finalement maintenue, alors que nous l’avions supprimée en commission, de transfert à des collectivités de biens immobiliers dédiés au logement social étudiant, loin de contribuer à répondre aux besoins des étudiants – j’en veux pour preuve ce qui se passe à la résidence universitaire d’Antony – va au contraire servir les intérêts des spéculateurs immobiliers.

Madame la ministre, à cet égard, permettez-moi d’ouvrir une parenthèse pour vous dire que, depuis lundi après-midi, les grues sont à l’œuvre à Antony ! Je referme cette parenthèse pour vous confirmer notre désaccord sur ce texte. Le groupe CRC votera donc contre les conclusions de la commission mixte paritaire, ce qui ne devrait pas vous surprendre.

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