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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Hélas, les réponses apportées ici sont superficielles

Liberté, indépendance et pluralisme des médias (nouvelle lecture) -

Par / 29 septembre 2016

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, est-il besoin de rappeler le contexte – non pas politique, politicien ou électoral, mais social – dans lequel nous avons discuté de cette proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias ?

Pour mémoire, faut-il rappeler le niveau extraordinaire de concentration d’une presse française aux mains d’une douzaine d’industriels milliardaires qui sont bien plus préoccupés de renforcer leurs capacités d’influence dans les affaires ou dans la commande publique qu’intéressés par le droit au savoir de nos concitoyens ?

Faut-il rappeler les immenses difficultés, notamment financières, de la presse écrite d’information générale et politique quand elle ne bénéficie pas de l’intérêt de ces industriels ?

Faut-il rappeler les difficultés dans la prise en compte de la révolution numérique ? À ce sujet, faut-il rappeler la remise en cause de l’universalité de la diffusion quand, à l’instar des exploits de M. Drahi, la neutralité du net est remise en cause ?

Faut-il enfin rappeler les conditions de travail des journalistes et des équipes rédactionnelles et les pressions qui, trop souvent, les empêchent d’assurer une information libre, pluraliste et honnête ?

C’est dire la nécessité et l’urgence d’un texte majeur en la matière.

Madame la ministre, chers collègues, ce texte aborde la question de la concentration des médias, mais il le fait de manière trop superficielle. C’est pourtant déjà à cet enjeu démocratique que le Conseil national de la Résistance avait tenté de répondre dans ses ordonnances, qui inspireront cette belle formulation selon laquelle la presse est comme une « maison de verre », une presse qui n’est pas « un instrument de profit commercial », mais « un instrument de culture », ayant pour mission « de donner des informations exactes, de défendre des idées, de servir la cause du progrès humain. »

Il ne s’agissait pas, madame Mélot, d’invoquer des valeurs « autoproclamées » de gauche,…

Mme Colette Mélot. Si !

M. Patrick Abate. … il était simplement question de valeurs, au sens propre du terme.

J’en reviens au présent texte. Celui-ci confie au CSA une mission qu’il ne peut remplir que partiellement, vu son champ d’action, alors même que des structures journalistiques auraient pu venir en appui. Tel était le sens de certains de nos amendements.

Par ailleurs, concernant les comités de déontologie, la rédaction de l’article 7 a certes progressé, mais elle reste encore bien insuffisante. En outre, comme nous l’avons déjà exprimé, il ne faudrait pas que cette évolution tende à faire peser sur les seules épaules des journalistes la responsabilité de l’indépendance de la presse.

En la matière, nous persistons à le dire, la démarche consistant à souscrire à des chartes de déontologie « maison » peut apparaître au mieux comme superflue, au pire comme contre-productive en termes de protection des journalistes. Je voudrais rappeler que l’ensemble des organisations syndicales du pays sont signataires de la charte de Munich, texte fondateur européen et pilier des droits et des devoirs des journalistes, transposé au niveau international, qui doit rester le texte de référence.

Je dirai encore un mot concernant les lanceurs d’alerte. Nous avions, ici même, déjà fait valoir notre détermination en la matière à l’occasion de la discussion du projet de loi pour une République numérique et nous l’avons rappelée lors de l’examen de cette proposition de loi. Il est indiscutable que des progrès ont été réalisés, mais insuffisamment à notre avis, notamment concernant les fonctionnaires et le secret des affaires. On nous a expliqué, madame la ministre, que le projet de loi Sapin II viendrait utilement compléter le dispositif – oui, mais toujours insuffisamment.

Les lanceurs d’alerte bénéficient d’une protection certes améliorée, mais le lanceur d’alerte devrait être considéré au même titre que celui qui porte assistance à personne en danger, bien qu’il s’agisse en l’espèce de porter assistance à « société en danger ». Il s’agit bien d’inverser la logique avec laquelle on aborde ces problèmes.

De la même façon, et en dépit de la vision très restrictive de la majorité sénatoriale, ce texte contient des mesures allant dans le bon sens sur le secret des sources, même s’il nous semble que la rédaction pourrait encore être améliorée, notamment en matière de qualification des faits justificatifs de la levée du secret des sources. Cependant, on ne peut que se réjouir que le délit de recel soit abrogé.

Nous aurions aimé discuter avec vous, madame la ministre, d’une rédaction de compromis entre l’état du droit, tel qu’il est issu de la loi Dati, et la proposition retenue par le texte, mais cela sera certainement impossible. J’y reviendrai.

Parmi les mesures allant dans le bon sens, je citerai les articles 11 et 11 bis sur la suspension des aides publiques pour des publications ne respectant pas la liberté et l’indépendance de la presse, ainsi que ceux qui portent sur la transparence à l’égard des lecteurs en ce qui concerne la composition du capital.

Enfin, on ne peut que se féliciter des mesures sur la reconnaissance des associations de défense de la liberté d’information, ainsi que de la mesure sur la numérotation logique des chaînes, ou encore de celles qui concernent le dispositif dit Charb auquel, vous le savez, nous sommes très attachés.

Nous regrettons forcément de ne pas pouvoir débattre – dans l’éventualité de l’adoption de la motion tendant à opposer la question préalable – de ce texte pourtant nécessaire, attendu, auquel nous aurions pu ne pas nous opposer, voire que nous aurions pu approuver sous réserve de certains enrichissements.

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