Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Fonctionnement du Syndicat des Transports d’Ile-de-France

Par / 7 février 2006

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,

Je commencerais mon intervention en soulignant le traitement exceptionnel réservé par la conférence des présidents à cette proposition de loi.

Ainsi, à peine déposée sur le bureau du Sénat, le 25 janvier dernier, cette proposition de loi a été directement intégré à l’ordre de jour.
Un rapporteur a été nommé seulement six jour plus tard et le rapport, examiné par la commission le jour suivant. Mes félicitations, Monsieur le rapporteur.
Et six jours plus tard, elle est débattue en séance publique.

La majorité invoque, pour justifier d’une telle rapidité, l’impasse dans laquelle se trouverait le Syndicat des transports d’Ile de France pour pouvoir fonctionner.
Cette précipitation témoigne en réalité de l’embarras de la majorité sénatoriale après le vote de l’amendement Devedjian à l’assemblée nationale et son maintien par la CMP qui est responsable de la situation actuelle.

Sur le fond, cette proposition de loi de mon collègue Karoutchi, est donc un énième rebondissement dans la difficile décentralisation de la gestion du STIF, qui aurait dû être effective depuis le 1er juillet dernier.
Cette décentralisation s’est faite sans moyen. A l’époque de la discussion de la loi dite de « responsabilités locales » nous nous étions déjà élevés contre cette décentralisation au rabais qui, loin de permettre une démocratisation du STIF et une gestion de proximité, avait juste comme objectif d’alléger les charges de l’Etat. En témoigne encore récemment le retrait de l’Etat du financement des contrats de plan et la suppression de 20 projets sur les 47 qui devaient être réalisés en Ile de France.

Ainsi, depuis la loi du 13 août 2004, l’action a été longue pour obtenir de l’Etat les compensations financières nécessaires au transfert du STIF.
Ainsi lors de la réunion du 3 juin dernier de son conseil d’administration, le Préfet de Région, représentant de l’Etat et alors président du STIF, apprenait aux administrateurs qu’il n’y avait toujours aucune réponse de l’Etat quant aux demandes de compensations financières des collectivités locales et en particulier aucune assurance pour la dotation pour l’achat de matériel roulant.
Ce n’est que très récemment que le gouvernement s’est enfin engagé à transférer 200 millions d’euros par an sur 10 ans.

Le STIF allait donc pouvoir fonctionner. Mais non, il est apparu prioritaire à Monsieur Devedjian et à ses amis, de proposer des mesures risquant d’entraver durablement le bon fonctionnement du STIF en le privant de réel pouvoir de décision.

Ainsi, par un amendement scélérat adopté le 13 décembre dernier à l’Assemblée Nationale lors du vote de la loi relative à la sécurité et au développement des transports, désormais toute décision, lorsqu’elle fait progresser les contributions d’autres collectivités que la région à plus de deux points au dessus du taux moyen d’évolution des prix, doit être prise à la majorité des deux tiers des membres du conseil d’administration.
Ainsi, selon cette disposition, toute politique de tarification sociale, qui serait mise en place par la majorité actuelle serait soumise au veto d’une minorité de blocage de droite.

Il n’est pourtant pas du rôle de la représentation nationale de revenir sur le vote des électeurs franciliens qui ont placé à la tête de l’exécutif régional et donc au conseil d’administration du STIF, une majorité de gauche. Cet amendement est tout simplement, comme je l’ai déjà dit, un déni de démocratie !

Dans ce contexte, le 20 janvier dernier, Jean-Paul Huchon a proposé à l’assemblée régionale d’adopter une modification du règlement intérieur qui lui permet à tout moment de renoncer à la proportionnelle et d’imposer le scrutin majoritaire pour désigner les représentants de la Région au syndicat des transport d’Ile de France. Décision immédiatement traduite devant le tribunal administratif par l’opposition.

Face à cette situation de blocage, la proposition de loi dont nous avons à débattre aujourd’hui se place sur le terrain du compromis.
En effet, en revenant partiellement sur l’amendement Devedjian, elle souhaite rendre plus difficile l’exercice de droit de veto octroyé à l’opposition.
La commission a également assortie cette nouvelle disposition d’une durée de vie limitée, en fixant une période expérimentale de 7 ans.
Mais, si c’est un compromis que l’on recherche, celui-ci ne nous convient pas pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, il n’est pas du domaine législatif de revenir sur les modalités de fonctionnement du STIF. Ceci va à l’encontre du principe même de décentralisation qui impose l’autonomie des collectivités territoriales.

Les modalités de vote doivent ainsi, à notre sens, être définies par un règlement intérieur du STIF, élaboré collectivement par les différents partenaires.
La loi définit-elle les modalités de vote en ce qui concerne les autres autorités organisatrices de transport régionaux ? Non, alors pour quelles raisons faire une exception avec le STIF ?
D’autre part, nous nous opposons à ces dispositions qui rompent avec la notion de solidarité territoriale en permettant à certains départements mieux pourvus en infrastructures et en matériel de refuser de contribuer au développement de l’offre de transport envers les départements les plus défavorisés.

Ainsi, selon cette proposition de loi, un département, en invoquant un intérêt majeur et par un vote des deux tiers de son assemblée délibérante, pourrait demander au STIF une seconde délibération à la majorité qualifiée cette fois pour toute décision augmentant les charges de fonctionnement.
Prenons un simple exemple, le conseil général des Yvelines, qui pourrait disposer d’une majorité des deux tiers de ses élus UMP serait ainsi en capacité de bloquer une décision du STIF alors même qu’il ne contribue qu’à 1% de son budget. Ce n’est pas sérieux.

Nous estimons au contraire que le STIF doit permettre de définir un intérêt commun régional. Intérêt commun qui va de pair avec la solidarité, tout cela devant être évidemment conjugué à la volonté régionale de mettre en oeuvre une politique de cohésion territoriale, mais également de cohésion sociale.

Cette distinction entre l’intérêt commun, garanti par un vote à la majorité simple et l’intérêt majeur, garanti par le vote aux deux tiers, pose également question en faisant apparaître une hiérarchie qui placerait l’intérêt commun en dessous de l’intérêt dit majeur. Les conséquences de ce type de construction juridique sont plutôt hasardeuses.
Ce qui manque, fondamentalement, au STIF, c’est moins la définition de nouvelles règles de vote que le renforcement de la démocratie sociale dans son fonctionnement, avec notamment la représentation des usagers au sein du conseil d’administration.

Nous estimons enfin qu’aujourd’hui la véritable urgence reste que le STIF, qui gère près de 7 millions de déplacements par jour, se mette au travail pour répondre concrètement aux besoins de transports des franciliens.
Cela passe notamment par la juste compensation de la décentralisation du STIF. Ainsi, comment se fait-il qu’aujourd’hui l’Etat garde la maîtrise du FARIF ?
Je vous rappelle que le Conseil Régional a émis le souhait depuis maintenant plus d’un an que le Fonds d’Aménagement de la Région d’Ile-de-France constitué par le produit de cette taxe soit reconstitué, et que son produit lui soit entièrement reversé.
Cette demande est justifiée, comme celle que le Conseil régional soit décisionnaire pour fixer le niveau et l’assiette de cette taxe locale.

Par voie d’amendement lors du vote de la loi de finances 2006, nous avions proposé un relèvement de ce taux. Ce réajustement aurait permis de dégager des financements d’environ 300 millions d’euros par an. La majorité sénatoriale l’a refusé.
De plus sur le produit rapporté par cette taxe, soit 340 millions d’euros, seuls 183 millions ont été versés à la région en 2004, le reste étant tombé dans les caisses de l’Etat.

Mais, bien entendu, il est nécessaire également de faire appel à ceux qui bénéficient au premier chef d’un bon réseau de transport de commun, c’est à dire, les acteurs économiques, ceux-là mêmes qui souffrent et vont souffrir toujours plus de la congestion automobile qui progresse continuellement dans cette région.

Il est donc nécessaire de réévaluer le taux plafond du versement transport comme nous vous l’avons proposé lors du vote de la loi de finances 2006.

Si le STIF dispose des moyens financiers à la hauteur des enjeux, il pourra alors développer une politique des transports qui allie efficacité économique et sociale.
Par exemple, il nous apparaît prioritaire la mise en oeuvre d’une politique tarifaire d’égalité sociale et géographique.

Nous nous satisfaisons donc de l’adoption par l’assemblée régionale de l’amendement proposé par le Groupe communiste alternative citoyenne et républicain de consacrer 50 millions d’euros sur le budget 2006 en faveur d’une tarification sociale, visant à la gratuité des transports pour les chômeurs et les personnes à faibles ressources.

Et je trouve particulièrement symbolique que les élus de droite aient refusé de prendre part au vote sur cette proposition. On voit bien ainsi ce qui, au fond, oppose la gauche et la droite.

Il nous apparaît également essentiel de remettre à niveau les infrastructures et le matériel roulant.
La nouvelle majorité à la région souhaite rompre avec le sous-investissement chronique dans les transports publics en Ile-de-France depuis plus de vingt ans. Cette volonté a largement pesé dans le choix des électeurs lors des élections régionales.
Laissons alors la région mener la politique de transport pour laquelle elle a été élue et arrêtons les bricolages législatifs politiciens.

Sans aller plus loin, je crois que vous m’aurez compris, les sénateurs du groupe Communiste, Républicain et Citoyen souhaitent pour leur part le retrait pur et simple de l’amendement Devedjian qu’il n’estime pas aménageable.
En conséquence, à moins d’adoption d’amendements conséquents, nous ne voterons pas cette proposition de loi.

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