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Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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La question de la vie chère outre-mer touche tout le fonctionnement des économies et des sociétés d’outre-mer

Régulation économique outre-mer : conclusions de la CMP -

Par / 7 novembre 2012

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous étudions aujourd’hui sera, sans aucun doute, adopté par l’ensemble des sénatrices et des sénateurs.

Comme lors de la première lecture, nous allons approuver ce texte, tout en étant lucides sur sa portée, relativement limitée. Certes, il contient des avancées, notamment dans la lutte contre les monopoles. Néanmoins, comme on l’avait souligné lors de la première lecture, la question de la vie chère outre-mer touche tout le fonctionnement des économies et des sociétés d’outre-mer.

Nous avons bien compris qu’il s’agit d’un premier volet dans cette lutte contre les prix chers outre-mer, mais nous maintenons que ce projet de loi ne réglera pas tous les problèmes liés à la cherté de la vie, car il est indispensable que la question soit abordée dans sa globalité, c’est-à-dire en prenant également en compte la question des revenus.

Il nous faut souligner que le débat d’aujourd’hui intervient au moment où se déroule la Conférence économique et sociale dans chacun des territoires d’outre-mer. D’ici à quelques jours, les premières conclusions seront connues et les propositions concrètes de chaque département d’outre-mer seront formulées.

Il est bien évident que cette conférence économique et sociale ne permettra de régler certains problèmes de l’outre-mer qu’à la condition expresse qu’il y ait la volonté de réfléchir et d’agir dans le cadre d’une approche globale et cohérente. Cette réflexion doit ouvrir la possibilité de tout remettre à plat.

En ce qui concerne les prix, si la lutte contre les monopoles est l’un des leviers qui doit jouer pour les faire baisser, ce n’est pas le seul aspect à aborder. Il faut joindre, par exemple, la question des sources d’approvisionnement pour les territoires ultramarins, mais aussi celle de la fiscalité, tout comme celle du fret.

Pour ce qui est de la diversification des sources d’approvisionnement, il s’agit d’un immense chantier sur lequel on doit continuer à travailler. Deux paramètres doivent être pris en compte : d’une part, l’impérieuse nécessité de protéger la production locale et, d’autre part, l’intérêt de disposer de sources d’approvisionnement plus proches de l’environnement régional. Cette double préoccupation doit se traduire par la prise en compte de la situation spécifique de La Réunion dans le cadre des accords de partenariat économique, ou APE.

En ce qui concerne la fiscalité, la question se pose avec une acuité particulière au moment où les négociations sur l’octroi de mer vont débuter. Quelle sera la position du Gouvernement sur cette question et quelle va être la coordination entre le Gouvernement et les quatre régions d’outre-mer sur ce problème ? À partir de là, dans quelles conditions la négociation entre le Gouvernement et l’Europe va-t-elle se dérouler ?

En ce qui concerne le fret, force est de constater que le dispositif existant n’a pas produit sa pleine mesure. En effet, les crédits affectés à la prise en charge partielle du coût des intrants n’ont pas totalement été consommés. Or cette question du fret est un élément important de la formation des prix. Elle est également décisive à travers la question du coût des intrants pour la production locale, une production locale qui doit être non seulement préservée mais également renforcée, pour soutenir des prix supportables dans l’intérêt des consommateurs.

Cela pose donc la question de l’amélioration de ce dispositif et de son caractère opérationnel. En ce sens, quelles améliorations le Gouvernement envisage-t-il de proposer pour que la totalité des crédits affectés soient mobilisés ?

Lorsque l’on parle de pouvoir d’achat, la question des prix est inséparable de celle des revenus. Il est bien évident que toutes celles et tous ceux qui veulent réduire les inégalités ne peuvent s’accommoder de celles – criantes – qui existent outre-mer dans ce domaine.

Nous pensons à cette grande partie de la population réunionnaise qui vit, ou survit, avec des revenus faibles ou très faibles. Ces familles sont en prise directe avec la réalité de la vie chère outre-mer.

À la suite des manifestations de 2009, un complément de revenus avait été créé pour les travailleurs pauvres ; c’est le RSTA, le revenu supplémentaire temporaire d’activité. Le montant brut du RSTA est au maximum de 100 euros par mois pour les salariés travaillant à temps plein avec un revenu inférieur à 1,4 SMIC. Or le dispositif créant ces prestations expire à la fin de cette année ; s’il n’est pas prolongé, cela impliquera obligatoirement une baisse de revenus pour les salariés pauvres.

Le problème se pose de la même façon pour la prime versée par les employeurs. Mon collègue Paul Vergès était intervenu l’an dernier pour prolonger la période d’exonération des charges liées à cette prime. Le délai supplémentaire qui avait été accordé arrive aussi à expiration. Là encore, le dispositif doit de nouveau être prolongé.

Au moment où ce projet de loi vise à favoriser le pouvoir d’achat, on ne peut laisser une épée de Damoclès planer sur le maintien de ces compléments de revenus pour les salariés les plus défavorisés. On ne peut imaginer que l’entrée en vigueur de la loi contre la vie chère coïncide avec une baisse des revenus des travailleurs les plus pauvres. Il y aurait là une forte contradiction.

Les raisons qui avaient motivé l’instauration du RSTA sont toujours là : la crise s’est aggravée, les manifestations survenues en février dernier l’ont confirmé. C’est pourquoi nous pensons que le Gouvernement doit annoncer sans délai la prolongation de ce dispositif : c’est une question de cohérence et de justice.

Nous ne pouvons donc pas imaginer que le Gouvernement ne réponde pas positivement à la demande formulée par les représentants des salariés. En effet, comment refuser aux salariés du privé le maintien de ce revenu complémentaire de 100 euros destiné à atténuer les effets de la vie chère, alors que des salariés de la fonction publique bénéficient, eux, d’une indemnité de vie chère ?

Le problème de l’harmonisation des revenus est récurrent outre-mer. Nous avons bien noté, monsieur le ministre, que cette question ne figurait pas, pour l’instant, dans l’agenda du Gouvernement, mais, comme vous l’avez également souligné, cela ne doit pas empêcher le débat.

Comment peut-on justifier de tels écarts de revenus dans un même pays ? Comment peut-on construire un développement durable en faisant perdurer les inégalités ? C’est vrai pour La Réunion, mais aussi pour la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, et le problème se pose déjà pour Mayotte.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué ici des hypothèses lors de l’examen de ce projet de loi en première lecture. La question des revenus relève, en effet, de la compétence de l’État : c’est lui qui fixe les revenus de la fonction publique, le montant du SMIC, celui des minima sociaux. Or le coût de la vie est le même pour tous. On ne saurait légitimement en tenir compte pour certains et pas pour d’autres.

Le Président de la République ayant annoncé que son quinquennat serait placé sous le signe de la justice, la question des graves inégalités des revenus outre-mer doit être au cœur des préoccupations. Il s’agit non pas d’aborder le problème « par le petit bout de la lorgnette », nous en sommes d’accord, monsieur le ministre, mais de comprendre que le développement économique est inséparable de la cohésion sociale.

Le débat doit ainsi être mené avec sérieux pour aboutir à des mesures économiquement efficaces, socialement justes, réellement concertées et s’inscrivant dans la durée. C’est pour cela que nous pensons que la Conférence économique et sociale doit tirer les leçons des politiques menées depuis plus de soixante ans pour ouvrir la voie à un réel changement et tracer de vraies perspectives.

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