Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Le gouvernement ouvre à la concurrence les transports ferrés internationaux de voyageurs

Régulation des transports ferroviaires : conclusions de la CMP -

Par / 2 novembre 2009

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

Près d’une année après l’examen par notre haute assemblée de ce texte déclaré en urgence, nous voici réunis pour l’adopter dans sa forme définitive, telle qu’issue des travaux de la commission mixte paritaire. L’urgence, dans ce cas, visait donc plus à priver les assemblées d’une seconde lecture, qu’à accélérer le processus législatif qui a été bien long. Nous déplorons ces nouvelles pratiques qui privent les parlementaires de leur prérogatives. De plus, une seconde lecture aurait été utile au regard des nombreuses évolutions du texte et notamment l’introduction d’un titre entier par rapport au projet de loi initial.

Pourtant, sur le fond, la philosophie de ce texte reste la même. Il s’agit d’ouvrir à la concurrence les transports ferrés internationaux de voyageurs, et maintenant routiers, grâce à l’intervention massive du gouvernement par voie d’amendements sur ce texte.

Pourtant, nous continuons de penser qu’avant toute nouvelle déréglementation, un bilan des libéralisations aurait du être réalisé afin d’étudier les conséquences concrètes en termes environnemental, d’emploi et de service public des politiques européennes affirmant la concurrence libre et non faussée comme l’alpha et l’oméga de toute politique publique.
En effet, de manière mécanique depuis maintenant des décennies, les institutions européennes, auxquelles vous participez, s’acharnent à prôner le démantèlement des services publics nationaux au nom de la modernité et de l’efficacité.

Mais que constate-t-on ? L’ouverture à la concurrence n’a permis qu’une seule chose, que des opérateurs privés puissent faire des bénéfices dans des secteurs auparavant réservés à l’intervention de la seule puissance publique.
Pour les usagers, c’est la double peine. Les tarifs augmentent et les services rendus se détériorent.

Objet de la première directive de libéralisation, le fret ferroviaire n’a cessé de décliné depuis l’ouverture à la concurrence. A la politique de volume impulsée sous le Ministre Gayssot, vous avez substitué une politique de rentabilité économique, favorisant les autoroutes ferroviaires et abandonnant le wagon isolé. Pourtant ces autoroutes n’ont de sens que si l’on renforce parallèlement le wagon isolé. Cette nouvelle politique de compétitivité au sein même du fret a laissé des territoires entiers et de nombreuses PME sans solutions.
L’activité de fret a été filialisé, empêchant toute péréquation au sein de la SNCF entre les activités rentables et non rentables. A ce titre, les effets d’annonce récentes du gouvernement et de la direction de la SNCF sont tronquées puisque le projet « fret d’avenir » au lieu de permettre un essor du fret, entérine l’abandon pure et simple du wagon isolé. Ces décisions se font toujours au mépris des impératifs d’aménagement du territoire et de développement économique.

Ainsi, malgré les déclarations d’intention lors du Grenelle de l’environnement, les actes posés par ce projet de loi et par votre gouvernement restent profondément anti écologiques.
Si un conseil de développement durable du réseau ferré national, qui ne comprendra aucun parlementaire, je le souligne, est créé par cette loi, vous refusez toujours de reconnaître que l’activité de wagon isolé relève de l’intérêt général. Sacrifier l’activité de wagon isolé, c’est pourtant mettre sur les routes des millions de camions supplémentaires.

Cette idée que tout ce qui ce qui n’est pas rentable doit être abandonné n’est ni moderne ni écologique, comme vous voulez nous le faire croire. Cette impératif de rentabilité économique est juste inopérant lorsque que l’on se situe du côté de d’intérêt général et de satisfaction des besoins. Être le garant de l’intérêt général est la responsabilité première de l’État et non comme j’ai pu l’entendre dans les débats à l’Assemblée nationale « de veiller à la concurrence sans discrimination ».

A ce titre, nous déplorons que ce texte, par le biais des opérateurs de proximité, remette en cause l’unicité du réseau national et justifie que RFF se débarrasse d’une partie de son réseau jugé non rentable à l’article 2, tout en envisageant de lui confier la responsabilité des gares de fret à l’article 2 bis.
La modernité, ce n’est donc pas de laisser la main invisible du marché, ou plutôt l’ARAF réglementer l’activité des transports, être moderne, c’est investir pour moderniser les transports publics et les infrastructures afin d’améliorer leur efficacité et leur fiabilité. C’est également mailler le territoire en s’appuyant sur le réseau existant et le fortifier. Mais de cela, vous ne voulez en entendre parler.

A l’inverse, la région Ile de France, par le biais du STIF, a contribué à développer l’offre de transports dans la région capitale par des investissements massifs. Cela vous est insupportable. Vous faîtes donc le choix au détour d’un amendement plus que contestable, tant sur la forme que sur le fond, de transférer purement et simplement son patrimoine à la RATP.

Au delà de votre volonté inébranlable de remettre la main sur les transports en Ile de France, voir sur le conseil régional nous l’avons bien compris, cet amendement pose un problème de fonds. Vous martelez sans cesse que Bruxelles interdit les aides d’État, vous prenez même cela comme justification pour ouvrir le capital de la Poste, mais parallèlement vous offrez gratuitement à la RATP un patrimoine gigantesque de plusieurs milliards. C’est un double discours difficile à entendre !

Ce fameux amendement établie également un calendrier fixant l’ouverture à la concurrence pour les métros à 2039, soit dans trente ans. Que traduit donc cet amendement sinon votre volonté farouche à vouloir faire dire au règlement OSP, ce qu’il ne dit pas. En effet, ce règlement n’impose pas l’ouverture à la concurrence des transports régionaux et urbains, il encadre simplement les formes choisies par les autorités organisatrices.
Comment à ce titre, ne pas faire le lien avec ce que proposait pour les TER, le sénateur Haenel en première lecture au sénat ou la proposition du député Mariton qui proposait de définir un échéancier pour ouvrir à la concurrence les TER. Certes, ces amendements ont été repoussés, mais pas sur le fond, simplement parce que l’un de nos collègues éminent travaille à réaliser des propositions sur ce thème.

Je vous rappelle donc une nouvelle fois, la réponse de Nathalie Kosciusko Morizet lors d’une séance de question qui affirmait que « l’objet du règlement OSP n’est pas d’anticiper l’ouverture à la concurrence des services ferroviaires intérieurs ».
Vous n’avez que ces mots à la bouche, « concurrence libre et non faussée » ; et ce, alors même que tous les indicateurs sont au rouge, indiquant que ce modèle économique est en échec. Les conséquences sociales du règne du marché que subissent aujourd’hui de plein fouet nos concitoyens méritent une prise de conscience urgence sur vos erreurs et non que vous accélériez l’ampleur des réformes.

Dans votre logique, vous créez l’ARAF, nouveau gendarme du ferroviaire, pour accompagner cette ouverture à la concurrence. Les pouvoirs qui lui sont confiées sont importants afin de garantir l’arrivée des nouveaux entrants dans des conditions favorables. Ces autorités de régulations dite indépendantes sont le nouveau modèle de la puissance publique afin de garantir transparence et indépendance. La transparence, mes chers collègues, vous ne l’obtiendrez pas par un désaisissement de l’Etat de ses responsabilités, mais bien au contraire, en garantissant des espaces de démocratie. Mais de cela vous êtes très loin : suppression massive d’élus, muselage du parlement par les nouveaux règlements des assemblées, suppression autoritaire de la taxe professionnelle … La liste est longue de vos attaques contre les représentants du peuple.

Cette autorité disposerait donc d’un pouvoir réglementaire et d’un pouvoir de sanction. S’agissant du pouvoir réglementaire, il s’agit d’un pouvoir par délégation, mais dans le silence du ministre, cette homologation est réputée acquise. Ceci correspond à une grave atteinte au principe de constitutionnalité du pouvoir réglementaire. Sur le fond, nous trouvons que la concentration de ces pouvoirs dans les mains de personnalités qui ne seront pas comptables de leurs actes est absolument scandaleuse. D’autre part, nous renouvelons notre opposition à la supériorité de l’ARAF sur l’ESPF, réaffirmé par l’article 9 de cette loi qui indique que le respect des règles de sécurité ne saurait avoir pour effet d’entraver le bon fonctionnement du marché concurrentiel. Nous continuons de penser que la sécurité ne peut être sacrifiée sur l’autel de la rentabilité économique.

Les débats ont aussi permis d’intégrer dans ce texte, d’une part la création d’une nouvelle direction au sein de la SNCF regroupant les 14 000 agents travaillant pour le compte de RFF et d’autre part, le fait que la gestion des gares devrait aujourd’hui faire l’objet d’un traitement spécifique par la SNCF dans ses comptes. Et ce alors qu’aucune directive communautaire ne l’impose.
Il s’agit d’attenter une nouvelle fois à l’unicité de l’opérateur public pour le mettre en difficulté. A l’inverse, nous considérons que seule une entreprise intégrée, permet de gager la sécurité et la présence du réseau ferré et d’opérateurs sur l’ensemble du territoire.

Ce zèle du gouvernement français est encore plus inexplicable alors même que chacun s’accorde à penser que l’existence de services publics dans notre pays a permis d’amortir la crise économique que nous traversons.
Pourtant, la logique de votre politique reste toujours la même : on socialise les pertes et on privatise les profits.

Cela donne dans ce secteur pourtant si stratégique que celui des transports le schéma suivant : on s’appuie sur les collectivités pour financer sur leur territoire les services non rentables sous peine de les supprimer et parallèlement on ouvre à la concurrence les axes rentables, on développe les fameux PPP pour permettre aux géants de l’immobilier de réaliser des profits colossaux.

L’État lui se désengage et notamment dans la loi de finances. L’aide au transport combiné ne cesse de décroître, de 35 millions cette année contre 90 en 2002. Les subventions à l’AFTIF sont en baisse de 220 millions …
La révolution verte, prônée par Monsieur Borloo dans cette assemblée en introduction des débats sur le grenelle, ne verra donc pas le jour en 2010 grâce à l’implication de l’Etat.

A ce titre, la reprise de la dette de RFF n’est toujours pas à l’ordre du jour, même si je me félicite que ce texte prévoit que le gouvernent remette un rapport au parlement sur cette question avant fin 2009. Je ne peux que vous incitez à vous dépêchez sur ce point, il y a urgence !

Vous l’aurez au final, bien compris, les sénateurs du groupe CRC SPG ne pourront voter ce texte qui par une logique récurrente démantèle le service public ferroviaire.

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