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Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Les personnels de La Poste victimes eux aussi de la libéralisation

Modification du statut de La Poste -

Par / 3 novembre 2009

Monsieur Le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

On ne le sait que trop, toute réforme structurelle d’une entreprise s’accompagne de casse sociale et des conditions de travail pour les salarié-es. Aussi je souhaite vous faire part des craintes importantes suscitées chez les personnels par votre projet de réforme.

Avant d’en examiner les conséquences, je me permets un état des lieux sur leur situation actuelle, elle-même issue de plusieurs réformes, qui nous permettra de voir vers quelle catastrophe salariale nous irions avec cette nouvelle étape de déconstruction de La Poste avec sa transformation en SA.

Mais que représente La Poste aujourd’hui au niveau salarial ? Tout métiers confondus, La Poste c’est 287 000 salarié-es, dont 142 000 fonctionnaires et 145 000 salariés de droit privés dits « contractuels » en CDI ou en CDD. La Poste c’est aussi plus de 200 filiales en France et à l’étranger.
A l’énoncé de ces chiffres, on constate la diversité des situations des salarié-e-s de « La Poste », regroupés en de nombreux métiers, parfois très différents mais complémentaires pour accomplir la mission de service public.

Cette diversité, résultat de l’histoire ; c’est aussi la conséquence de choix délibérés des pouvoirs publics et les dirigeants de La Poste : la marche forcée vers une société commerciale filialisée. Déconstruire et diviser, c’est finalement classique, c’est diviser pour mieux… réformer !

Une des conséquences de la transformation des « PTT » en « France Télecom » et « La Poste » fut le choix donné aux salariés d’être « re-classifiés » ou « reclassés ». Traduisez par demeurer fonctionnaire ou devenir un contractuel soumis au droit privé. A ainsi été créée ainsi une catégorie de salarié-e que l’on pourrait nommer les « Ni Ni », Ni tout à fait des salarié-es de droit privé, car ils n’en ont pas tous les droits. Ni plus tout à fait des fonctionnaires. Après des années de lutte, elles et ils sont toujours dans une situation de discrimination, dont le rapport Larcher en 2002 en soulignait d’ailleurs le caractère anormal.

Au fil du temps, les garanties statutaires accordées aux fonctionnaires de la Poste ont peu à peu fondu et nous savons qu’elles auraient totalement disparues si des règles juridiques françaises (le statut de la Fonction Publique) n’étaient venues gêner l’envie des financiers (de Bercy comme de Bruxelles) de basculer vers des sociétés totalement commerciales.

Ainsi coexistent aujourd’hui une multitude de situations salariales et de régimes juridiques hétérogènes et inégalitaires : un « ornithorynque juridique » selon les dires mêmes des salariés de La Poste.

Cette superposition de régimes laisse perdurer de nombreuses zones de non droit. Cela se traduit concrètement par l’absence des protections essentielles accordées soit par le statut de fonctionnaire soit par le droit du travail. Pour exemple, la réglementation sur les Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) ne s’applique pas aux personnels de La Poste, alors que certains d’entre eux ne sont pas fonctionnaires et ne bénéficient pas non plus du droit public du travail !

Cette réforme, si elle était adoptée, représenterait un nivellement par le bas même en matière de retraite. En effet, si La Poste devenait une SA cela entrainerait pour ses personnels un changement de caisse de retraite de l’IRCANTEC vers l’AGIRC et cela pourrait se traduire par une augmentation des cotisations et une diminution des retraites. A terme L’IRCANTEC n’y survivrait pas, faute de ressources.

Alerté sur cette question, Monsieur Estrosi, Ministre de l’Industrie, s’est engagé en commission à trouver une solution qui satisfasse tout le monde. Sachez que nous serons très vigilants quant aux suites données à ce dossier primordial.

Le passage de La Poste en une SA n’est qu’une étape dans un processus qui même vers sa privatisation. Il n’est qu’à voir votre proposition d’actions gratuites en direction des salariés. D’une part, seuls les cadres pourraient y prétendre puisqu’il qu’il faut les acheter et, d’autre part, vu que cette option n’est valable que 2 ans, cela aboutirait à terme à des reventes massives de la part des salariés avec les risques d’une privatisation indirecte et rampante.

Même si l’on nous dit dans les yeux, encore une fois, que La Poste ne sera jamais privatisée, les précédents nous incitent à la méfiance ! Avec cette réforme, La Poste deviendrait une société anonyme… comme France Telecom et on ne peut s’empêcher de regarder leur destin parallèle. A France Telecom, nous sommes face à de dramatiques situations humaines et il faut savoir qu’à La Poste, il y a déjà énormément de salarié-es qui souffrent de cette gestion pathogène du personnel.
On nous martèle : nous n’avons pas le choix, cette dérégulation est inévitable, c’est l’Europe et l’Organisation Mondiale du Commerce qui dicte cette ouverture de tout secteur à la concurrence totale et débridée. Mais c’est faux et mes collègues l’ont dit avant moi, nous avons le choix.

En refusant le passage de La Poste en une Société Anonyme ce n’est pas le statut-quo que nous prônons. Au contraire nous appelons de nos vœux une réforme d’envergure. Elle se traduirait d’une part pour les usagers, par la pérennisation d’un véritable service public de la Poste, et, d’autre part, pour les salariés, par l’acquisition d’un statut juridique unifié, notamment grâce à la « convention collective unique » dont il est question depuis des années.

Pour conclure, remarquons qu’à l’heure où l’on commence à mesurer l’étendue et la gravité de la souffrance au travail, la mission parlementaire de la commission des affaires sociales sur le « mal être au travail » en témoigne, à l’heure où certaines entreprises commencent à revenir en arrière et où l’actualité nous rappelle chaque jours les dégâts humains que l’ultra libéralisme engendre, cette réforme est déjà dépassée et n’est plus en phase avec les besoins des populations en ce début de 21è siècle.

Voila pourquoi nous voterons contre la transformation de La Poste en société anonyme, justifiée par aucune nécessité économique, structurelle, salariale, si ce n’est celle d’une future privatisation de La Poste à plus ou moins brève échéance.

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