Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Un affaiblissement de la biodiversité

Interdiction de la mise en culture du maïs génétiquement modifié -

Par / 17 février 2014

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi relative à l’interdiction de la mise en culture du maïs génétiquement modifié MON 810 répond en partie, vous le savez, aux propositions soutenues par le groupe CRC depuis de nombreuses années.

En effet, dès 2006, nous avions déposé une motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés. À cette occasion, nous avions affirmé de façon argumentée notre refus de voir les plantes génétiquement modifiées envahir le sol français.

Aujourd’hui, les sept minutes qui nous sont imparties dans la discussion générale ne me permettent pas d’aller au fond du débat, mais je reviendrai dans quelques instants sur les principales justifications de notre opposition à ce type de culture, opposition qui se limite à la production, à la commercialisation, à la consommation, et qui ne vise pas la recherche en ce domaine.

Lors de l’examen en 2006 du projet de loi précité, lequel, souvenons-nous, fut modifié à la suite de l’adoption d’un amendement communiste, la sénatrice Evelyne Didier affirmait dans cet hémicycle « qu’il serait hasardeux de justifier la défense des cultures OGM par la nécessité de se mettre en conformité avec le droit communautaire. Ne confondons pas les contraintes juridiques et la volonté politique ! ».

Huit ans plus tard, nous constatons avec une satisfaction particulière que la volonté politique existe aujourd’hui. Nous sommes même d’autant plus satisfaits, monsieur le ministre, que nous vous avons entendu conseiller à la Commission européenne d’écouter de temps en temps un tout petit peu l’opinion publique européenne.

En effet, au-delà des enjeux en termes de santé, d’environnement, d’agriculture, que je déclinerai dans un instant, il ne faut pas négliger l’importance, singulièrement en France, de la dimension culturelle de la nourriture et des modes de production agricole.

Comme vous le savez, la communauté scientifique n’ayant pas tranché la question de l’innocuité ou de la nocivité des OGM pour la santé, il nous semble donc important de rester prudents.

Or, à l’échelon européen, la délivrance d’autorisations de mise sur le marché s’accélère, indépendamment de la question des cultures. Au mois de novembre dernier, la Commission européenne a autorisé, pour l’alimentation animale et humaine, dix plantes génétiquement modifiées dites « empilées », ainsi que le pollen issu du maïs MON 810.

Les PGM empilées contiennent plusieurs événements de transformation, la plus emblématique étant le maïs SmartStax, comportant huit transgènes. Par conséquent, interdire la culture de plantes génétiquement modifiées ne signifie donc pas assurer aux consommateurs une alimentation sans OGM. C’est pourquoi nous militons en faveur d’une meilleure information des consommateurs relative aux produits alimentaires contenant des OGM.

Outre les pathologies lourdes, dont on ne peut déterminer si elles sont causées par l’ingestion de plantes génétiquement modifiées, il semblerait que les protéines produites par les gènes puissent présenter des risques de toxicité et d’allergénicité.

Pour ce qui concerne l’interdiction de mise en culture de maïs génétiquement modifié, nous soutenons sans réserve la démarche du Gouvernement en raison non seulement des risques environnementaux et sociaux, mais également du modèle agricole qui sont associés à l’utilisation des plantes génétiquement modifiées.

D’une part, l’incidence environnementale des cultures de PGM est plus clairement établie, des atteintes sur la faune ayant été constatées, que ce soit sur les insectes ou sur les vers de terre. De surcroît, la coexistence des cultures OGM en plein champ et de l’apiculture est, vous le savez, impossible. Nous connaissons tous le cas emblématique de cet apiculteur allemand qui a constaté la présence de pollen de maïs OGM MON 810 dans son miel et qui a intenté une action en justice. En 2011, la Cour de justice de l’Union européenne a décidé qu’un tel miel ne pouvait pas être commercialisé sans autorisation. Tous ces éléments font donc peser un risque disproportionné et injustifié sur la filière apicole.

D’autre part, en 2012, le Haut Conseil des biotechnologies évoquait, dans sa recommandation relative à l’autorisation de culture du maïs génétiquement modifié, un certain nombre d’éléments qui devraient entrer en ligne de compte dans le bilan du coût et des avantages des plantes génétiquement modifiées. Il relevait, notamment, la suppression d’emplois dans les exploitations agricoles en raison de la modification des pratiques culturales. Il soulignait également les effets des modifications introduites sur le temps de travail des agriculteurs et, parallèlement, sur la taille des exploitations, ainsi que sur les filières associées : sélection variétale, machinisme agricole, agro-industries, etc.

Il nous semble en outre que les pratiques agronomiques associées à la culture des plantes génétiquement modifiées entrent en contradiction avec le modèle agro-écologique que nous souhaitons développer en France, lequel nous pousse à nous interroger sur l’abandon des moyens non chimiques de lutte contre ce que l’on appelle les « adventices », de la pratique des rotations de cultures ou du désherbage mécanique.

De plus, comme le souligne une expertise collective de l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, et du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, datant de 2011, sur les variétés tolérantes à des herbicides, « l’emploi récurrent de la même molécule dans la rotation a (...) entraîné des dérives de flore et l’apparition d’adventices résistantes. Ces problèmes émergents ont nécessité le recours à des solutions de désherbage complémentaires, revenant à des programmes comportant plusieurs traitements, et induisant une augmentation des tonnages d’herbicides utilisés par rapport aux économies initiales réalisées ».

Les organismes génétiquement modifiés contribuent donc à une standardisation, à une diminution du nombre de variétés et, partant, à un affaiblissement de la biodiversité.

Vous avez annoncé, monsieur le ministre, une proposition de loi-cadre à l’échelon européen pour permettre aux États membres, une fois l’autorisation de culture d’un OGM accordée, de l’interdire au plan national dans un cadre législatif plus serein que les actuelles clauses de sauvegarde.

Pour protéger efficacement les citoyens européens, une réforme en profondeur des procédures d’autorisation des OGM au niveau de l’Union serait souhaitable. En effet se pose le problème des contaminations entre pays membres qui n’opteraient pas pour les mêmes règles.

Enfin, le développement des OGM contribue également à une soumission croissante des agriculteurs aux quelques entreprises agro-industrielles créatrices de plantes génétiquement modifiées protégées par des brevets. Les effets sur les filières de production de semences, d’ailleurs souvent des entreprises françaises, et la survie du certificat d’obtention végétale ne doivent pas être négligés à cet égard.

Nous avons eu l’occasion, là encore, de mesurer les enjeux liés à la brevetabilité du vivant qui risque de remettre en cause la capacité d’innovation en matière d’amélioration végétale au plan national.

M. Jean Bizet. C’est vrai !

M. Thierry Foucaud. À ce titre, l’accord de partenariat transatlantique négocié depuis le mois de juillet 2013 entre les États-Unis et l’Union européenne risque d’affaiblir et d’isoler la France dans ses positions.

À ceux qui tenteraient de nous rassurer en disant que, d’une part, ces négociations ne devraient aboutir que dans deux ans et que, d’autre part, l’OMC inflige déjà à l’Union européenne des pénalités de plusieurs centaines de millions d’euros en raison de son refus d’importer des organismes génétiquement modifiés, nous répondons que le traité transatlantique, comme son pendant pour la zone Pacifique, aura pour effet d’autoriser les multinationales à poursuivre en leur nom propre un pays signataire dont la politique aurait un effet restrictif sur leur politique commerciale.

Les industries de biotechnologie, avec Monsanto en première ligne, attendent que la zone de libre-échange transatlantique permette d’imposer enfin aux Européens leur catalogue de produits OGM en attente d’approbation et d’utilisation.

Monsieur le ministre, parce que le groupe CRC a toujours défendu notre modèle agricole et alimentaire, nous voterons le texte issu des travaux de la commission des affaires économiques, tout en regrettant que son objet soit restreint et en réaffirmant la nécessité pour le Gouvernement de mettre en cohérence sa politique avec son action aux niveaux européen et international.

Les dernieres interventions

Affaires économiques Kanaky : dire non à la colonisation de peuplement

Projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. - Par / 27 mars 2024

Affaires économiques Formation, salaires et accès au crédit

"Tests PME" et création d’un dispositif "impact entreprises" - Par / 26 mars 2024

Affaires économiques CETA : une victoire démocratique

Projet de loi sur la ratification du CETA - Par / 21 mars 2024

Affaires économiques Sécurité nucléaire : pourquoi défaire ce qui fonctionne ?

Projet de loi sur la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection - Par / 7 février 2024

Affaires économiques La bagnole reconditionnée

Proposition de loi visant à favoriser le réemploi des véhicules au service des mobilités durables et solidaires sur les territoires - Par / 14 décembre 2023

Affaires économiques 1% du budget de l’État pour le sport

Vote des crédits 2024 pour le sport - Par / 11 décembre 2023

Affaires économiques Inflation : les rustines du gouvernement

Si vous voulez agir sur la hausse des prix, bloquez-les ! - Par / 9 novembre 2023

Affaires économiques Les pratiques détestables des acteurs du secteur

Accès au marché de l’assurance emprunteur - Par / 26 janvier 2022

Affaires économiques Cette pratique fait obstacle aux continuités écologiques

Limitation de l’engrillagement des espaces naturels - Par / 10 janvier 2022

Affaires économiques L’agrivoltaïsme maîtrisé peut avoir des vertus

Développement de l’agrivoltaïsme en France - Par / 4 janvier 2022

Affaires économiques Le remède proposé ici risque d’être pire que le mal

Accès au foncier agricole : conclusions de la CMP - Par / 7 décembre 2021

Affaires économiques La cause animale est un sujet que nous ne pourrons plus occulter

Lutte contre la maltraitance animale : conclusions de la CMP - Par / 18 novembre 2021

Administration