Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Accès des jeunes à la vie active en entreprise (remplacement du CPE)

Par / 13 avril 2006

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Chers collègues,

Avec le projet de loi sur l’égalité des chances, le Gouvernement a voulu imposer, par la force, sa vision ultra-libérale de la société.
Vous avez échoué, les jeunes et les salariés ont remporté une formidable victoire. Les syndicats d’étudiants, lycées et salariés ont, dans l’unité, conduit une juste lutte.

Tout au long des débats, les sénateurs du groupe Communiste Républicain et Citoyen ont dénoncé point par point les dispositions de ce texte, et l’absence totale de concertation avec les organisations syndicales.
Nous avons aussi opposé un nombre important de propositions pour répondre efficacement et justement aux enjeux soit disant soulevés par ce projet de loi sur l’égalité des chances.

Mais toutes nos propositions ont été rejetées, voire carrément ignorées par une majorité, qui, en bons soldats du Gouvernement, ne poursuivait qu’un seul objectif : écourter le plus possible la discussion et passer en force devant le Parlement.

Après le 49-3 à l’Assemblée Nationale, les procédures réglementaires douteuses n’ont pas manqué, et vous n’avez pas hésité à prendre quelques largesses avec le règlement du Sénat.
Et, pour l’anecdote, M. de Rohan bénéficiant même d’un passe droit en recevabilité pour un amendement, depuis déclaré inconstitutionnel.

Tout y est passé : réserve de pans entiers du projet de loi, déclarations très contestables d’irrecevabilité de dizaines d’amendements ou sous-amendements, demandes multiples de priorité sur d’autres et j’en passe....
Vous n’avez pas hésité, enfin, sur l’article du CPE, à porter atteinte au droit constitutionnel d’amender, soutenus en cela par des parlementaires UMP complaisants et responsables de la crise qu’ils ont imposé au pays.
Votre majorité, M. le Ministre, qui a abusé de procédures inqualifiables, et vous-même, devriez être affligés par nombre de vos propos figurant dans le compte rendu des débats.

Mais malgré cette tentative de passage en force devant la représentation nationale, c’est le pays lui-même qui s’est emparé du débat.
Très vite, une majorité de nos concitoyens, de toutes générations a exprimé son refus de la précarité et de cette société libérale, inégalitaire et injuste, que le gouvernement Villepin - Sarkozy veut lui imposer.

A plusieurs reprises déjà, les citoyens vous ont alerté, ils ont su se mobiliser, dans les urnes ou dans la rue, pour faire entendre leur voix et s’exprimer clairement contre vos projets.
Ce fut le cas le 29 mai dernier, lors du référendum, avec une majorité de Français s’exprimant contre la vision ultra-libérale de l’Europe, que vous vouliez réduire à un grand marché déréglementé. Et où le Président, de la République répondait à un panel de jeunes un tristement célèbre « Je ne vous comprends pas » !
Même opposition aussi contre la directive Bolkenstein sur les services.
Même surdité aux très graves évènements qui se sont déroulés en octobre et novembre dans tout le pays.
Dans tous les cas, c’est la société libérale et dérégulée, la même que celle sous-entendue par le CNE et CPE, qui est encore et toujours rejetée par nos concitoyens.

Mais vous n’avez pas su, ni voulu, l’an passé, tirer les leçons du suffrage universel, vous avez méprisé des millions de nos concitoyens.
Et il vous aura malheureusement fallu plus de 3 millions de personnes, à plusieurs reprises, dans la rue pour revenir enfin, sur la question du CPE.

Aujourd’hui le Gouvernement Villepin - Sarkozy se trouve confronté à un « raz le bol » des citoyens.
Parmi eux, les jeunes crient leur colère face à la situation qui leur est faite et à l’avenir que vous leur dessinez.

Ils en ont assez d’être stigmatisés, d’être montrés du doigt et considérés comme une charge pour la société.
Ils dénoncent cette situation où 56% des jeunes ménages de moins de 30 ans sont surendettés, où 50% des 18 - 29 ans sont contraints de rester chez leurs parents, où encore d’être la tranche d’âge la plus touchée par la pauvreté (8% contre 3,5% pour les plus de 60 ans).
Et c’est pour cela que le CPE leur est apparu comme particulièrement inacceptable, et c’est contre cela qu’ils ont lutté avec clairvoyance et responsabilité.
Depuis 2002, vous n’avez cessé de mettre en pièce le code du travail et de réduire comme peau de chagrin les droits sociaux des citoyens.

C’est l’autorisation du travail de nuit des mineurs, ou encore la généralisation des dérogations à la limitation du temps de travail hebdomadaire de 35 heures, ou bien la multiplication des possibilités de recours aux emplois précaires, aux temps partiels, et aux emplois aidés, etc... le tout avec des milliards d’euros d’exonération et cadeaux fiscaux.

Pour servir un patronat toujours plus demandeur de flexibilité et de profit, vous ambitionnez, outre le contrat unique, de revenir sur l’ensemble des droits des travailleurs, gagnés par des décennies de luttes syndicales, sociales et politiques.

Vous dites vouloir sécuriser les parcours professionnel, mais c’est l’inverse que vous organisez.
C’est au contraire la sécurisation des parcours des employeurs dans un environnement économique hyper concurrentiel que vous défendez, en faisant porter le risque « d’entreprendre » sur les salariés, et en particulier sur les jeunes.

Avec le CPE, comme la CNE, vous souhaitiez clairement les condamner à la précarité et à l’exclusion et leur ôter toute possibilité d’intégration sociale, familiale et professionnelle.

Ainsi, le « non » au CPE est un « non » bien plus vaste au soi-disant modèle social prôné par Messieurs Blair ou Sarkozy.
Une société où il faut cumuler deux ou trois emplois pour obtenir des revenus qui permettent à peine de subvenir à ses besoins ; une société où près de 10% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté comme c’est le cas aujourd’hui en Angleterre ; bref, une société de la misère et de l’injustice sociale.

Nous rejetons en bloc ce modèle de société à l’anglo-saxon, qui voudrait nous faire croire que seuls les plus courageux réussissent. Et que les difficultés scolaires, sociales ou professionnelles sont le signe d’un comportement de fainéants, ou de profiteurs. Et comment ne pas être scandalisé, quand un député UMP, Monsieur Mariton, se « lâche » dans une tribune du journal le Monde, hier, je le cite « la part manifestante de la société a bien confirmée la préférence française pour le chômage ».

La haine vous aveugle, chers collègues, et je vous rappelle que la part manifestante de la société c’était 63% de notre peuple.
A la fin de nos débats, le 6 mars à 4 heures, je vous alertais, je vous disais que cette jeunesse que vous n’aimez pas vous donne rendez-vous dès le lendemain pour que vous preniez conscience de sa colère légitime et pour que droit soit enfin fait à ses aspirations. Que vous avez beau vous bouchez les oreilles, vous serez obligés d’entendre que le pays va s’exprimer, et je concluais : vous avez perdu la bataille.

Le CPE a disparu, et c’est tant mieux.
Mais on ne peut pour autant passer sous silence, ni le manque de courage du Gouvernement dans cette affaire, ni l’hypocrisie qui transpire dans cette proposition de loi.

On se retrouve aujourd’hui à examiner, au pas de course, une proposition de loi qui n’a pour seul objectif que de tenter de permettre au Premier Ministre et au président de l’UMP de sauver un peu la face.
Le CPE n’est pas supprimé, il n’est pas abrogé, il est remplacé.
Quel courage ! Quelle tenue politique à jouer si bassement sur les mots !
Mais nous ne sommes malheureusement pas surpris par de tels comportements.

Le CPE est donc supprimé et l’article 8 nouveau bricolé par des dispositifs, qui existent déjà. Des dispositifs qui avaient été qualifiés par le Premier Ministre lui-même de « demi-mesures » !
Personne ne sera dupe de ces faux semblants.

Par contre, on constate une fois encore que, quelle que soit la situation, les employeurs ont un lot de consolation.
Au final, ce sont 150 millions en 2006 et 300 millions en 2007 qui iront directement dans les caisses des entreprises, et qui seront financées par le budget de l’Etat.

Ils viendront s’ajouter aux 22 milliards dépensés chaque année sans retour positif pour l’emploi.
Pire encore, de l’avis de tous, cette proposition de loi est reconnue anticonstitutionnelle, dans la mesure où les charges supplémentaires pour l’Etat ne sont pas financées, autrement que par une déclaration du Gouvernement dans l’exposé des motifs d’un amendement.
Les conditions d’un recours n’autorisent pas le groupe CRC à y recourir, et croyez-le, je regrette profondément que d’aucuns y renoncent.

Même avec cette proposition de loi, qui devrait vous obliger à vous incliner vu le contexte, vous choisissez de faire encore un pas de plus dans le sens de vos politiques parfaitement inefficaces en terme d’emploi, mais ruineuses pour notre système de solidarité nationale.

Depuis 2002, aucun infléchissement significatif des chiffres du chômage, et à peine plus de 50 000 emplois créés par an.
Par contre, le taux d’indemnisation des chômeurs par le régime de l’assurance a largement baissé. Et on compte aujourd’hui en France 1,2 millions de bénéficiaires du RMI.
Par contre aussi, la pauvreté a augmenté de façon significative depuis 2002, et cette année, près de 7% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, c’est-à-dire avec moins de 650 euros par mois.

Les Sénateurs Communistes Républicains et Citoyens, s’opposent radicalement à cette politique.
Nous pensons au contraire, qu’il faut mener une réelle politique de relance, qui passe par le rétablissement du pouvoir d’achat des citoyens, par un développement de la croissance, une politique qui lutte contre la spéculation et l’appauvrissement, voire l’étranglement, des PME - TPE par les donneurs d’ordre et le système bancaire.
Il faut envisager concrètement la revalorisation des salaires et des retraites, rétablir dans notre démocratie, qui se dit moderne, le droit à la santé, à l’éducation, le droit du travail et au travail.
Nous n’avons aucune illusion sur votre capacité à y répondre. Pas plus que le MEDEF dont Mme Parisot vient, à défaut d’emplois, de créer un nouveau concept : la SEPARABILITE !

La précarité, la flexibilité sont tellement indigestes, qu’il faut, côté patronat et CAC 40, faire croire à du neuf par des artifices linguistiques.
Nous avons par ailleurs toutes les craintes de nouvelles provocations, comme celles révélées hier de la privatisation de GDF dès juin par un texte au Parlement.
Rappelons à cet égard, la promesse en août dernier de M. Sarkozy de ne pas privatiser EDF - GDF... certes les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent.

M. le ministre, chers collègues, avec les jeunes, avec les salariés, avec notre peuple qui majoritairement et régulièrement contestent votre politique, le groupe CRC exprimera et soutiendra une autre voie pour notre pays, une voie de progrès et d’égalité. Nous voterons contre votre proposition de loi.

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