Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Egalité des chances et CPE : conclusions de la commission mixte paritaire

Par / 9 mars 2006

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Chers collègues,

Depuis le début de l’examen de ce texte, l’objectif de la majorité et du Gouvernement est resté le même : écourter le plus possible la discussion et passer en force devant le Parlement.

Après le 49-3, les procédures réglementaires douteuses n’ont pas manqué, et vous n’avez pas hésité à prendre quelques largesses avec le règlement du Sénat.
Tout y est passé : réserve de pans entiers du projet de loi, déclarations très contestables, d’irrecevabilité de dizaines d’amendements ou sous-amendements, demandes multiples de priorité sur d’autres et j’en passe....
Vous n’avez pas hésité, enfin, sur l’article 3 bis du CPE, à porter atteinte au droit constitutionnel d’amender, soutenus dans ce projet par une majorité UPM complaisante.
Pourtant, comme je l’ai dit à la fin de nos débats : vous avez échoué. Tous les medias soulignent la puissance du REFUS, tous les sondages concordent, vous êtes désavoués, vous êtes battus.

Le Gouvernement De VILLEPIN-SARKOZY ne pourra pas se cacher derrière la responsabilité de la majorité parlementaire, qui aura voté le texte pour faire appliquer ses dispositions inacceptables et unanimement rejetées.
Vous serez contraints, dans tous les cas, avec ou sans ce vote, de revenir sur ce projet de loi. Et le Gouvernement ne restera pas longtemps encore droit dans ses bottes.
Vous êtes aujourd’hui dans une impasse, car plus personne n’est dupe de la politique profondément inégalitaire et injuste de ce Gouvernement visant à institutionnaliser la précarité.

Tout au long des débats, le Gouvernement, soutenu par une majorité silencieuse, a montré qu’il était prêt à tout pour faire progresser la libéralisation de notre société et la déréglementation du marché du travail, le CPE étant pour vous une mesure phare...

Depuis 2002, vous avez déjà franchi un certain nombre d’étapes : autorisation du travail de nuit des mineurs, généralisation des dérogations à la limitation du temps de travail hebdomadaire de 35 heures, multiplication des possibilités de recours aux emplois précaires et aux emplois aidés, etc... le tout avec des milliards d’euros d’exonération et cadeaux fiscaux.
Comme le MEDEF le réclame, il vous restait le contrat de travail et les procédures de licenciement.

Mais c’est sûrement avec le CPE-CNE la mission de trop.
Pour servir un patronat toujours plus demandeur de flexibilité et de profit, vous acceptez de revenir sur l’ensemble des droits des travailleurs, gagnés par des décennies de luttes syndicales, sociales et politiques.
Vous voulez sécuriser le parcours des employeurs dans un environnement économique hyper concurrentiel, en faisant porter le risque « d’entreprendre » sur les salariés, et pas n’importe lesquels, sur les jeunes.
Vous les condamnez à la précarité et à l’exclusion et leurs possibilités d’intégration sociale, familiale et professionnelle sont compromises.

Depuis 20 ans, la tendance est à la mobilité sociale descendante d’une génération à l’autre, les enfants ne sont plus assurés aujourd’hui de pouvoir maintenir un statut professionnel et un niveau de vie équivalent à celui de leur parent. Pire encore, il faut qu’ils s’attendent à une position dégradée, même avec un diplôme supérieur à celui de leurs aînés.

Or, plutôt que de lutter contre cette tendance, vous l’amplifiez en faisant peser sur ces jeunes l’appétit dévorant des entrepreneurs.
Avec le CPE comme avec le CNE, un jeune, diplômé ou non, pourra, durant les deux premières années de son contrat être licencié à tout moment, sans que son employeur ait à justifier d’un quelconque motif.
Je me demande bien quel genre de vie il commencera à construire.

Votre discours de l’action, ou de l’intégration des jeunes est inaudible, Monsieur le Ministre, pour tous celles et ceux que vous condamnez à un tel avenir.
Et c’est la même logique à l’œuvre avec l’abaissement de l’âge de l’apprentissage à 14 ans.

Au lieu de répondre aux échecs d’orientation ou aux échecs scolaires de certains enfants par des moyens financiers et de personnels conséquents, vous organisez la sortie des plus fragiles du système scolaire.
A la place du « plus d’école », vous répondez « plus d’entreprise » pour des enfants encore en pré-adolescence, c’est-à-dire qui amorcent à peine leur transition physique et psychologique vers l’âge adulte et à 15 ans, vous rajoutez le travail de nuit.

NON, l’entreprise n’est pas le lieu d’intégration et de socialisation des enfants.
Finalement, sur ces deux dispositions, l’apprentissage et le CPE, nous n’avons eu droit qu’à un simulacre de débat parlementaire.
Aucune discussion n’a été possible, malgré le nombre très important de propositions que nous vous avons soumis, comme toute l’opposition également.

La gravité de la mise en place de l’apprentissage « junior » a été à peine maquillée par quelques dispositions d’affichage, pour se donner bonne conscience, mais rares sont les dispositifs réellement coercitifs pour les entreprises, en qui le Gouvernement a toute confiance.
A peine avons-nous réussi à faire entrer ces tout jeunes apprentis dans le droit commun, en leur faisant bénéficier, comme leurs aînés, d’un droit à une visite médicale. Le texte ne prévoyait même pas ce minimum.
Quant au CPE, le vote conforme de l’article en dit long sur la position du Gouvernement.
Les arguments ne manquaient pourtant pas. Ne serait-ce que parce que ce dispositif va à l’encontre des textes et règlements internationaux, comme la Convention n° 158 de l’OIT par exemple.

Ne serait-ce, aussi, que par la multiplication des recours devant les tribunaux des prud’hommes des salariés victimes de licenciements abusifs dans le cadre de Contrat Nouvelle Embauche.
Les raisons ne manquaient pas pour corriger le dispositif.
Mais rien n’a été possible, et le Gouvernement s’est obstiné, de façon déraisonnée, pour faire voter tel quel le CPE.

C’est une grave erreur que dénoncent 67% de nos concitoyens et qu’un million de manifestants vous a signifiée.
Enfin, plus généralement, ce texte institutionnalise une politique discriminatoire, sous couvert d’un affichage social et égalitaire.
Les politiques de lutte contre les discriminations présentées à la fin du texte se nourrissent d’amalgames douteux, flirtent avec le racisme, pour s’en prendre aux populations les plus fragiles.

Le CV anonyme a, quant à lui, gagné quelques obstacles de plus en CMP, quant à une sensible mise en œuvre rapide.
Au lieu de lutter contre la pauvreté, vous préférer dissoudre les missions du Fonds d’action sociale pour les travailleurs immigrés et leur famille dans une agence pour le cohésion sociale et l’égalité des chances aux objectifs mal définis, mais qui tombe à point nommée quand on annonce le projet de loi de Monsieur Sarkozy autour de « l’immigration choisie ».
De même, vous décidez de suspendre les allocations familiales en cas d’absentéisme scolaire et vous insistez dans cette logique insupportable de pénalisation de la pauvreté.

Et enfin, vous remettez en cause une jurisprudence constante qui prenait en compte dans les effectifs des entreprises les salariés soustraitants.
Avec ce texte, vous avez voulu jouer sur les mots : Or, « l’égalité des chances » n’est pas « l’égalité ».
L’égalité des chances est une vieille idée de l’idéologie libérale pour mettre à mal tous les systèmes de solidarité collective.

L’égalité des chances, c’est le système du chacun pour soi, du repli communautaire, et de la concurrence effrénée entre tous les citoyens et tous les travailleurs.
C’est une société qui nous ferait croire que seuls les plus courageux réussissent. Et que les difficultés scolaires, sociales ou professionnelles sont le signe d’un comportement de feignant, ou de profiteurs.
Toute votre politique, et ce texte en particulier, est emprunt de cette idéologie.
Au contraire, le groupe Communiste Républicain et Citoyen défend une autre idée de l’égalité : l’égalité des droits, dans une société solidaire.

Aujourd’hui, alors que plus d’un million de personnes descendent dans la rue pour refuser votre politique, nous nous associons à eux, en vous demandant le retrait de ce texte, et de ces dispositions inqualifiables, qui font honte à l’histoire de notre pays.
Alors que nous parlons, le nombre d’universités en grève a doublé aux quatre coins du pays, les assemblées générales d’étudiants et de lycéens rassemblent des foules impressionnantes.

La France et les manifestants sont à l’unisson.
Notre groupe communiste républicain et citoyen votera contre votre projet de loi.

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