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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Financement de la Sécurité sociale pour 2002

Par / 29 novembre 2001

par Guy Fischer

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après l’échec de la commission mixte paritaire, échec prévisible tant les approches du Sénat et de l’Assemblée nationale sur la protection sociale sont différentes, les députés sont revenus sur les dispositions inopportunes introduites, sur l’initiative de la commission des affaires sociales, par la Haute Assemblée en première lecture, et ont rétabli, pour l’essentiel, le texte adopté initialement.

Sur un point majeur, le cadre conventionnel régissant les relations entre les caisses d’assurance maladie et les professions de santé, le projet de loi a été complété.

Ce renouveau conventionnel est attendu par l’ensemble des professionnels de santé hostiles aux mécanismes de sanctions collectives dont vous avez, en d’autres temps, messieurs de la majorité sénatoriale, vanté les mérites pour freiner l’évolution des dépenses de santé.

L’architecture à trois étages retenue est susceptible de rassembler. Toutefois, madame la ministre, pour être efficace et pour responsabiliser les acteurs, le mode de régulation retenu devra impérativement recevoir l’aval des professionnels demandeurs d’une « maîtrise médicalisée et concertée des dépenses ».

La négociation doit permettre les évolutions utiles pour l’assurance maladie. Cette nécessité de renouer le dialogue est d’autant plus forte que, aujourd’hui, le MEDEF avance à grands pas pour mettre à mal la protection sociale française, faisant fi de ses principes fondateurs d’égalité, de solidarité entre concitoyens, de solidarité entre les générations.

Les propositions du MEDEF, présentées par M. Denis Kessler le 20 novembre dernier à Strasbourg, reposent notamment sur la fin du paritarisme et du monopole de la sécurité sociale sur la couverture maladie obligatoire. Elles nous amènent à redoubler de vigilance et renforcent notre détermination à voir effectivement conduites les réformes de fond visant à asseoir et à développer la protection des Français contre les aléas de la vie.

La privatisation de la sécurité sociale, présentée comme le prix à payer pour optimiser les ressources et réduire les dépenses de santé, n’est pas une idée neuve que défendrait seule l’organisation patronale.

Même si la droite semble embarrassée par cette offensive, comme le titraient Les Echos du 21 novembre, il n’en demeure pas moins qu’elle pense depuis longtemps, elles aussi, à « organiser la concurrence en matière de sécurité sociale », et je cite là M. Goulard.

Démocratie libérale n’est malheureusement pas la seule force politique de droite désireuse de voir diminuer la part de la richesse nationale consacrée à la santé. A de nombreuses reprises, nous vous avons entendus ici même, mes chers collègues, plaider la cause des médecins et des infirmières de l’hôpital de votre circonscription et des cliniques privées, tout en faisant grief au Gouvernement, non sans démagogie, de dilapider les fruits de la croissance.

Comment, à recettes constantes, faire bénéficier chacun des progrès scientifiques ? Comment développer la prévention ?

Lors des discussions relatives à la couverture maladie universelle, la CMU, alors que nous prenions appui sur ce qui me paraît constituer l’une des plus importantes avancées sociales de ces dernières décennies pour tenter d’améliorer le niveau de la couverture des besoins de santé de tous les Français et élargir le champ de la protection sociale, vous vous empressiez d’ouvrir largement le domaine de la santé, marché comme un autre à vos yeux, aux opérateurs de soins privés, tels que les organismes d’assurances et les institutions de prévoyance.

A la quasi-unanimité, les syndicats ont condamné le projet alternatif du MEDEF.

Tous rejettent la délégation aux assureurs privés de la gestion de l’offre de soins. Alain Olive, de l’Union nationale des syndicats autonomes, l’UNSA, résume fort justement la situation.

M. Nicolas About, président de la commission. Vous me regardez, mais je ne suis pas le MEDEF !

M. Guy Fischer. Si je vous regarde, c’est que je m’adresse à l’ensemble de notre assemblée, et plus particulièrement à sa majorité !

M. Nicolas About, président de la commission. Pardonnez-moi de vous avoir interrompu.

M. Guy Fischer. J’essaie de parler tout en regardant mon auditoire !

Alain Olive, donc, résume fort justement la situation : « La mise en concurrence ne va pas résoudre le problème de gestion et de maîtrise de santé. En revanche, elle va accumuler les inégalités. » C’est en effet la porte ouverte à la sélection des personnes en raison de leurs ressources, de leur handicap ou affection lourde.

Si vous vous rappelez quelle fut l’attitude des assureurs privés, AXA en l’occurrence, prompts à se désengager de la couverture des personnes handicapées lorsque cette dernière devenait trop lourde, vous comprendrez que nous n’adhérions pas à la thèse soutenue pour, prétendument, moderniser l’assurance maladie.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Ce n’est pas sur les propositions du MEDEF que nous votons ce soir !

M. Guy Fischer. Les solutions radicales préconisées pour les autres branches sont tout aussi condamnables, car elles incitent au désengagement des entreprises du financement et de la gestion des actions. C’est particulièrement vrai pour la politique familiale, qui serait entièrement financée par la CSG.

Que dire de la fusion envisagée de tous les régimes de retraite obligatoire des salariés en un régime par points strictement contributifs, et de l’idée, une fois de plus caressée, d’augmenter la durée de cotisation requise pour pouvoir prétendre à une retraite à taux plein, si ce n’est que ces revendications se « heurtent à la pratique des entreprises et aux revendications des salariés », comme l’a souligné Alain Deleu, de la CFTC ?

La majorité sénatoriale a déjà pris position sur cette question, jouant du catastrophisme pour imposer la promotion des fonds de pension.

Que dire enfin du système envisagé pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, dont la gestion serait laissée aux seuls employeurs, ou de la diminution des cotisations engagées, si ce n’est que ces choix n’optimiseraient pas plus la protection des salariés que la prévention ?

Pour des raisons bien éloignées de celles du MEDEF ou de la droite sénatoriale, qui refuse le projet de loi de financement de la sécurité sociale sans pour autant proposer d’alternative claire, les parlementaires communistes ont été et restent globalement assez critiques sur les réponses qu’apporte le projet de loi à ces questions.

Certes, des avancées ont été obtenues en matière d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, puisque l’engagement a été pris d’une réparation intégrale, et notre groupe, en particulier Marie-Claude Beaudeau, a apporté une contribution décisive. Mais, hormis ce point positif, qu’il s’agisse de l’assurance maladie, des retraites ou de la politique familiale, les dispositions envisagées ne nous semblent être à la hauteur ni des réalités ni des enjeux.

En ce qui concerne la retraite, tout d’abord, nous avons pris acte de l’adoption par l’Assemblée nationale, lors de l’examen du budget de l’emploi, de l’allocation équivalent retraite garantissant aux chômeurs et aux inactifs un revenu minimum de 5 750 francs par mois jusqu’à l’âge de la retraite. Pour autant, madame la ministre, nous continuons de soutenir l’idée d’un développement de la retraite à taux plein avant l’âge de soixante ans, dès lors que quarante annuités de cotisations sont acquises.

Tel était d’ailleurs le sens de la proposition de loi du groupe communiste, présentée mardi à l’Assemblée nationale et qui n’a pu être discutée.

Nous regrettons vivement votre attitude, madame la ministre.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Ah !

M. Guy Fischer. Nous contestons l’invocation d’arguments comptables lorsqu’il s’agit de mesures de justice sociale. Les députés du groupe communiste et apparentés étaient ouverts à une progressivité du dispositif ; l’alternative n’était pas tout ou rien, et ils auraient pu, par leurs propositions, contribuer à faire avancer le dossier. C’est dans ce sens que nos collègues députés, je le répète, ont vivement regretté votre attitude, madame la ministre.

Aussi avons-nous déposé sur le bureau du Sénat une proposition de loi ayant un objet similaire. Je suis convaincu que cette question reste et restera d’actualité et que nous aurons l’occasion de la faire progresser ensemble, si vous voulez bien nous écouter.

En ce qui concerne, ensuite, les personnels hospitaliers, qui continuent de s’inquiéter des conditions dans lesquelles la réduction du temps de travail sera mise en oeuvre, nous avons dit clairement qu’il fallait entendre la lassitude actuelle des agents hospitaliers et des médecins qui, déjà, souffrent de leurs horaires, des repos et des congés décalés, de la surcharge de travail liée aux pénuries chroniques de personnels. Il convient en conséquence de répondre correctement à leur demande de recrutements en nombre suffisant, pour que la réduction du temps de travail soit effective et synonyme de progrès social.

Nous avons sollicité de votre part, madame la ministre, un certain nombre de réponses sur l’association effective au comité de suivi des syndicats non signataires de la convention, faute de vous voir accepter la réouverture des négociations nationales demandée de nouveau cette semaine par les syndicats majoritaires CGT, FO, CFTC et SUD.

Pour ce qui est de l’affichage des moyens nouveaux concédés, des clarifications nous paraissent toujours indispensables.

Enfin, au sujet des cliniques privées et du ciblage des 1,7 milliard de francs nouveaux dégagés, la droite sénatoriale, en première lecture, nous avait beaucoup reproché notre scepticisme, notre archaïsme. C’était malheureusement de la clairvoyance de notre part, puisque la fédération de l’hospitalisation privée a annoncé, il y a deux jours, son refus de revaloriser les salaires avant février 2002 et a fait part des difficultés pour répartir l’enveloppe débloquée, faute de bilan social fiable de la branche. C’est un comble !

Les infirmiers et les personnels soignants, mis en avant par les patrons des cliniques lorsqu’ils ont voulu exercer leur chantage, sont aujourd’hui plus inquiets que jamais, car les dotations débloquées pour 2001 et 2002 ne répondent pas à leurs revendications. Il est vrai que ce matin, madame la ministre, lors de votre audition par la commission, vous nous avez un peu rassurés sur ce point.

Notre volonté est justement de poursuivre le débat sur les points précis que nous venons de discuter. Par conséquent, vous comprendrez, mes chers collègues, que nous ne puissions voter la question préalable présentée par la commission des affaires sociales : son adoption aurait pour effet de couper court à toute discussion de ce projet de loi, qui est important parce qu’il conditionne les choix de société de demain. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

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