Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Il n’y a pas urgence à légiférer sur cette question

Évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs de 70 ans et plus -

Par / 13 juin 2013

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe CRC soutiendra la motion tendant au renvoi de ce texte en commission. Pour autant, cela ne signifie pas que la question de la prévention routière ne nous intéresse pas, loin s’en faut. Sans doute faudrait-il que cette question fasse l’objet d’une étude plus poussée avant de légiférer, et j’ai cru comprendre qu’un groupe de travail allait se constituer. Cela nous apparaît souhaitable, particulièrement dans un contexte marqué par une accélération du travail parlementaire et une progression continue du nombre de textes adoptés par le Parlement.

Qui plus est, permettez-moi de m’interroger, sans vouloir offenser quiconque, sur l’opportunité d’examiner une telle mesure, qui nous semble en décalage avec les attentes de nos concitoyens. En effet, ne croyez-vous pas que l’explosion du chômage et de la précarité, l’érosion des services publics, les bas salaires, les vagues de licenciements ou encore l’asphyxie de l’hôpital public, sont davantage au cœur des préoccupations de nos concitoyens ?

Cela étant dit, je n’entends nullement minorer l’importance de la prévention routière, qui revêt tout à la fois un aspect tant individuel, dans le drame qui touche les familles, que collectif, dès lors que l’on appréhende la question sous l’aspect de la santé publique. Toutefois, convenez-en : il n’y a pas urgence à légiférer sur cette question.

Je profiterai néanmoins de l’occasion qui m’est donnée pour aborder un certain nombre de questions.

Tout d’abord, personne ne peut l’ignorer, le vieillissement n’est pas sans effet sur les capacités motrices des conducteurs. Il peut diminuer leurs capacités de réaction, de la même manière que l’âge altère les capacités visuelles et auditives. Pour autant, aucune étude scientifique n’est aujourd’hui en mesure de démontrer que les personnes âgées sont impliquées dans un plus grand nombre d’accidents de la route que les actifs. Le site internet de l’Association prévention routière en fait état, comme l’ont rappelé Mme la ministre et certains orateurs à l’instant.

Sur ce site, on apprend également que 399 personnes de plus de 65 ans sont mortes au volant en 2011, et 254 en tant que piétons. En d’autres termes, elles sont presque aussi nombreuses à mourir du fait de conduire que du fait de ne pas conduire. C’est un peu cynique, mais c’est un fait. Aussi, en poussant à son paroxysme le principe de précaution qui sert de fondement à cette proposition de loi, on pourrait être tenté de légiférer pour encadrer les sorties piétonnes de nos concitoyennes et concitoyens les plus âgés !

Compte tenu du nombre important de jeunes qui décèdent chaque année des suites d’un accident de la route, l’application de ce même principe de précaution devrait nous inviter à interdire la conduite des jeunes âgés de 18 à 25 ans qui sont, et de loin, les publics les plus concernés par les accidents de la route. Les pouvoirs publics se sont naturellement mobilisés et saisis de cette question, non pas pour interdire la conduite – ce à quoi pourrait amener à terme cette proposition de loi –, mais pour responsabiliser les jeunes conducteurs, par un mélange subtil de contrôle, de sanction et de prévention.

Sans doute aurait-il été souhaitable que cette approche soit transposée aux publics visés par cette proposition de loi, ne serait-ce que pour une raison : l’application de cette mesure pourrait, en l’état, être profondément discriminante et lourde de conséquences pour ceux qu’il est convenu d’appeler les seniors.

Cette mesure est discriminante, car, à n’en pas douter, ce sont les plus modestes de nos concitoyens, ceux qui ne pourront ni faire face au coût de la visite médicale ni à celui, encore plus important, du stage qu’il est proposé d’instituer ici, qui se verront retirer le droit de conduire.

Cette mesure est lourde de conséquences. En effet, pour nos concitoyens, l’interdiction de conduire, si elle n’est accompagnée d’aucune mesure destinée à compenser cette décision, aura tendance à accroître non seulement leur isolement, qui constitue une source de souffrance psychique, mais aussi les difficultés qu’ils rencontrent déjà dans leur quotidien, que ce soit pour faire leurs courses, aller voir le médecin ou assurer des démarches administratives.

Malheureusement, ces aspects sont ignorés par cette proposition de loi, et j’espère que le groupe de travail qui sera constitué en tiendra compte.

Je dois dire qu’il y a d’ailleurs un certain paradoxe à défendre ce texte aujourd’hui, alors que vous votiez, voilà quelques semaines à peine, la proposition de loi permettant aux retraités les plus pauvres de reprendre une activité.

Le paradoxe est également frappant avec le rapport Moreau, destiné à nourrir la future réforme des retraites, qui préconise notamment un allongement de la durée de cotisations et un recul de l’âge légal du départ à la retraite.

Je vous pose la question, mes chers collègues : est-ce à dire que l’on peut être suffisamment en bonne santé pour travailler plus et en trop mauvais état physique pour conduire ?

La réalité est que, dans l’immense majorité des cas, les personnes concernées par cette proposition de loi font preuve de prudence et décident elles-mêmes de limiter la conduite aux actes indispensables.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

Mme Laurence Cohen. Pour toutes ces raisons, le groupe CRC votera contre cette proposition de loi et soutiendra la motion tendant au renvoi du texte en commission des lois, afin que cette question puisse faire l’objet d’un travail collectif plus large, davantage à même de répondre à toutes les questions, directes et indirectes, qui y sont associées.

Les dernieres interventions

Affaires sociales Grand âge : le coup de com’ prend un coup de vieux

Diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie - Par / 28 mars 2024

Affaires sociales Pour de meilleures retraites, de meilleurs salaires pour les travailleurs agricoles

PPL visant à garantir un mode de calcul juste et équitable des pensions de retraite de base des travailleurs non salariés des professions agricoles - Par / 19 mars 2024

Affaires sociales Maxi Puff, maxi danger pour la santé des jeunes

Proposition de loi visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique - Par / 8 février 2024

Affaires sociales Pour un véritable service public de l’autonomie

Proposition de loi pour bâtir la société du bien vieillir en France - Par / 30 janvier 2024

Affaires sociales Mieux dépister les troubles du neuro-développement

Proposition de loi visant à améliorer le dépistage des troubles du neuro-développement (TND) - Par / 26 janvier 2024

Affaires sociales Vol au-dessus d’un nid d’anxiété

Ériger la santé mentale des jeunes en grande cause nationale - Par / 18 janvier 2024

Affaires sociales Allocation autonome universelle d’études : coût ou investissement ?

Débat sur une proposition de loi proposée par le groupe écologiste au Sénat - Par / 14 décembre 2023

Affaires sociales Budget solidarité : un coup sérieux au pacte social

Vote des crédits Solidarité, insertion et égalité des chances pour 2024 - Par / 6 décembre 2023

Affaires sociales Les mesures prises depuis des années sont d’une inefficacité navrante

Représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes (conclusions de la CMP) - Par / 26 janvier 2022

Affaires sociales Certaines victimes de ces thérapies ont subi de véritables tortures

Interdiction des pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle (conclusions de la CMP) - Par / 20 janvier 2022

Administration