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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Trop d’abus ont été et sont encore commis

Statut des stagiaires -

Par / 29 avril 2014

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, eu égard à l’explosion du nombre de stagiaires en France, estimé – cela a été dit – à 1,6 million par an, les membres du groupe communiste républicain et citoyen partagent avec M. le rapporteur, comme avec l’auteur de la présente proposition de loi, la conviction qu’il est nécessaire que la loi apporte une réponse globale et mette en place un cadre juridique stable des stages pour garantir aux stagiaires des droits qui, souvent, leur font défaut.

Trop d’abus ont été et sont encore commis, au seul prétexte que les stages en entreprise sont devenus des passages obligés dans certains cursus universitaires rendant les étudiants captifs.

Bien entendu, il serait exagéré d’affirmer que tous les stages en entreprise donnent lieu à des abus. Pour autant, les témoignages des associations et syndicats étudiants, l’UNEF ou le collectif Génération précaire notamment, sont de plus en plus négatifs : soit les droits élémentaires des stagiaires sont méconnus, soit le stage sert en réalité aux employeurs de voie de contournement aux règles du travail, à tel point que le ou les stagiaires qui se succèdent occupent des postes correspondant à un emploi permanent.

Il était donc nécessaire de légiférer, notamment pour préciser l’objectif du stage – tel est le sens de l’article 1er.

À ce titre, nous nous réjouissons que, pour la première fois, les missions de l’établissement d’enseignement envers le stagiaire soient clairement énoncées et que la vocation pédagogique du stage soit réaffirmée.

De la même manière, comment ne pas nous féliciter que toute discrimination ou tout harcèlement d’un stagiaire tombe sous le coup de la loi, comme ceux qui sont commis à l’égard de tout salarié ?

Ainsi, les stagiaires verront leurs droits consolidés dans les établissements d’accueil. Je pense, par exemple, à l’extension à leur profit du droit à un congé de maternité ou de l’application des règles relatives au temps et à la durée de travail.

M. le rapporteur a par ailleurs renforcé le dispositif en prévoyant de limiter la durée hebdomadaire de travail à 35 heures ou en insérant dans le code du travail une section relative à une demande de requalification en contrat de travail d’une période de formation en milieu professionnel ou d’un stage devant les conseils de prud’hommes.

Les amendements que vous avez présentés lors des travaux de la commission, monsieur le rapporteur, s’inscrivent dans la continuité de la proposition de loi que vous aviez déposée en 2006, et cela vous honore.

Toutefois, et vous ne le contesterez sans doute pas, la rédaction, même améliorée, de l’article susvisé et, de manière plus générale, de cette proposition de loi demeure moins ambitieuse que ce que vous aviez vous-même proposé, ce que nous regrettons.

Je ne prendrai que quelques exemples pour étayer mon propos. Le présent texte réaffirme la portée pédagogique du stage, mais renvoie au décret la fixation du nombre de stagiaires qu’un même tuteur peut encadrer.

De même, il prévoit de réduire les cas de recours abusifs au stage, mais ne précise pas clairement le nombre de stagiaires qu’un organisme peut accueillir, alors que, en 2006, vous proposiez qu’il n’excède pas 15 % de l’effectif total.

Si la proposition de loi précise à raison que l’enseignement, qui sert en quelque sorte de support au stage, doit avoir une durée minimale, elle reste silencieuse sur cette durée. En outre, elle ne supprime pas le recours à des diplômes universitaires de complaisance. Or l’inscription à ces diplômes, qui n’ont pas de portée nationale, constitue la première faille permettant les abus. Je regrette d’ailleurs que ce texte n’indique pas que la durée d’enseignement devrait être systématiquement supérieure à la durée du stage.

En outre, et cela nous paraît être l’insuffisance la plus importante, le montant minimal de la gratification demeure identique à celui d’aujourd’hui et son versement ne sera dû que pour les stages dont la durée excède deux mois comme actuellement.

Or la proposition de loi sénatoriale que vous aviez présentée en 2006, mon cher collègue, rejetée par la droite, était plus ambitieuse. Le changement de majorité politique à l’Assemblée nationale et au Sénat rend pourtant possible l’adoption de la mesure que vous aviez alors proposée. C’est pourquoi nous avons déposé un amendement allant dans ce sens.

Je voudrais d’ailleurs, sur un sujet connexe, faire part de notre étonnement et de notre mécontentement. Dans sa rédaction actuelle, la proposition de loi prévoit que les stagiaires ne bénéficiant d’aucune gratification n’auront droit ni aux titres-restaurant, ni à la restauration scolaire, ni à la prise en charge des frais de transport. En définitive, les plus précaires des plus précaires sont ceux qui ont le moins de droits !

Autre point que je tiens à mettre en exergue, à l’Assemblée nationale, nos collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine sont parvenus à faire adopter un amendement pertinent, tendant à accélérer la procédure de requalification d’une convention de stage en contrat de travail. Pour autant, il nous paraît opportun de préciser dans la loi le cadre complet dans lequel cette demande de requalification peut être formulée. La situation est en effet quelque peu étonnante, la proposition de loi indiquant les conditions dans lesquelles la demande peut être portée devant les juges prud’homaux, mais non les cas dans lesquels les stagiaires peuvent la présenter.

Si les amendements que nous avons déposés sur ce point n’étaient pas adoptés, le fondement de cette saisine demeurerait jurisprudentiel et, par voie de conséquence, soumis à une forme d’aléa, alors même qu’il existait auparavant, dans le code du travail, un article R. 136-32 précisant les cas dans lesquels cette demande de requalification était possible.

Positive dans l’esprit, constituant sans doute un premier pas dans la voie du renforcement de leurs droits, cette proposition de loi n’apporte pas pour autant toutes les protections attendues par les stagiaires de notre pays, comme en témoignent, je l’ai déjà souligné, les divers courriers et interpellations que nous avons reçus de la part d’étudiants, d’organisations syndicales ou de collectifs.

C’est pourquoi, monsieur le rapporteur, nous ne pouvons pleinement vous suivre lorsque vous affirmez qu’elle est la concrétisation de l’engagement 39 du candidat François Hollande qui prévoyait un encadrement des stages afin d’empêcher les abus.

Cette concrétisation est effectivement partielle, alors que votre propre proposition de loi aurait, mon cher collègue, permis une réalisation complète, et elle l’est d’autant plus que le même engagement 39 prévoyait la création d’une allocation d’autonomie pour les jeunes. Or celle-ci se fait encore attendre…

Par conséquent, les membres du groupe CRC, comme à leur habitude, soutiendront les mesures positives, seront critiques à l’égard des faiblesses du présent texte et se voudront également force de proposition pour combler ses insuffisances, comme l’attestent les amendements que nous avons déposés.

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