Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Vous renforcez la « contributivité », si néfaste aux femmes

Avenir du système de retraites : article 2 -

Par / 29 octobre 2013

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à chaque étage de la fusée – salaire de référence, durée de cotisation, décote –, les femmes restent pénalisées par un système des retraites, pensé et conçu, comme l’a très bien résumé Christiane Marty de la Fondation Copernic, sur le « modèle de l’homme soutien de famille à temps plein, sans interruption de carrière », un modèle qui désavantage structurellement les femmes.

C’est la raison pour laquelle des mécanismes de compensation – droits familiaux, assurance vieillesse des parents au foyer, l’AVPF, pension de réversion – ont été progressivement aménagés.

Leur montée en charge, combinée à la progression continue de l’activité des femmes sur le marché du travail, a permis une réduction lente, mais progressive, des inégalités. Cependant, cet élan a été contrarié et arrêté par les réformes successives menées depuis vingt ans, qui ont eu pour effet d’accentuer les inégalités.

C’est le cas de la décote de 5 % par année manquante par rapport à la durée validée exigée, étendue au secteur public en 2003. Elle pénalise plus fortement les femmes : on constate, en moyenne, douze trimestres manquants, contre neuf pour les hommes.

C’est le cas de l’allongement régulier de la durée de cotisation, acté depuis 2003 au motif de l’allongement de l’espérance de vie.

Un critère doublement pénalisant pour les femmes : leurs carrières étant globalement plus courtes que celles des hommes et leurs pensions plus faibles, elles se trouvent obligées, du fait de la décote, de partir plus tard à la retraite. En cela, la réforme de 2010, en repoussant de 65 à 67 ans l’âge de départ à taux plein, a affecté bien davantage de femmes que d’hommes.

Le passage, en 1993, des dix aux vingt-cinq meilleures années de carrière, dans le régime général, permettant de déterminer le salaire moyen de référence pour le calcul de la pension pénalise davantage les carrières courtes, donc les femmes.

L’indexation des salaires sur les prix, et non plus sur les salaires, a eu pour conséquence d’appauvrir les retraités, dont le taux de pauvreté est passé de 8,5 % en 2004 à 10 % en 2010. Les plus concernés sont les plus de 75 ans, population au sein de laquelle les femmes isolées, notamment les veuves, sont surreprésentées.

La réduction et la modification de la majoration de durée d’assurance, la MDA, accordée au titre des enfants, entamée en 2003 dans le secteur public et poursuivie en 2010 pour le régime général, ont eu des conséquences très négatives pour les mères. La réforme a notamment pénalisé celles qui avaient choisi de poursuivre leur activité professionnelle.

Parallèlement à tous ces effets négatifs, les dispositifs « correctifs » – le départ anticipé pour carrière longue, la surcote, le rachat de trimestres au titre des études – bénéficient principalement aux hommes.

On peut s’interroger très légitimement sur l’évolution à venir. L’aggravation prendra-t-elle le pas sur la réduction ? Les comportements s’adaptant pour intégrer et tenter d’amortir les effets des réformes, l’optimisme ne semble pas de mise.

Lors de leur audition devant la délégation aux droits des femmes du Sénat, les responsables du Conseil d’orientation des retraites, le COR, ont affirmé que l’on ne pouvait attendre de résorption spontanée du différentiel entre hommes et femmes au regard des retraites à l’échéance des trente à quarante prochaines années.

De plus, une autre évolution intervient : celle du modèle de couple qui caractérise les nouvelles générations. Cette évolution verra la population des retraités composée non plus essentiellement de couples mariés et de personnes veuves, mais aussi de célibataires, de personnes séparées ou divorcées. Or rappelons que la pension de réversion, en 2008, représentait environ 25 % de l’ensemble des pensions des femmes de plus de 65 ans, contre 1 % pour les hommes. C’est pourquoi nous devons agir aujourd’hui pour améliorer par des droits propres l’accès à une retraite digne et décente.

Pour les femmes, cela doit passer par l’amélioration de la pension de droit direct, ce qui implique de rompre avec toutes les mesures précédemment citées. En renforçant la « contributivité » du système et en pesant plus fortement sur les femmes, ces mesures ont justement creusé les inégalités sur la pension de droit direct.

À partir de ce préalable pourra être mise en route efficacement une logique visant à renforcer le lien entre la retraite et un meilleur salaire, favorable aux hommes et aux femmes. Les outils d’action sont connus : égalité salariale, lutte contre les stéréotypes et meilleure prise en compte du temps partiel et de la pénibilité, notamment celle qui concerne le travail des femmes.

Toutefois, votre réforme fait l’impasse sur ce préalable. Pis, par cet article 2, elle renforce la « contributivité » du système des retraites, si néfaste aux femmes. Du coup, les mesures proposées, devenues marginales, seront bien incapables de réduire les inégalités.

Voilà, brièvement développée, l’une des raisons pour lesquelles je m’oppose, en tant que militante des droits des femmes, à cet article 2.

Les dernieres interventions

Affaires sociales Grand âge : le coup de com’ prend un coup de vieux

Diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie - Par / 28 mars 2024

Affaires sociales Pour de meilleures retraites, de meilleurs salaires pour les travailleurs agricoles

PPL visant à garantir un mode de calcul juste et équitable des pensions de retraite de base des travailleurs non salariés des professions agricoles - Par / 19 mars 2024

Affaires sociales Maxi Puff, maxi danger pour la santé des jeunes

Proposition de loi visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique - Par / 8 février 2024

Affaires sociales Pour un véritable service public de l’autonomie

Proposition de loi pour bâtir la société du bien vieillir en France - Par / 30 janvier 2024

Affaires sociales Mieux dépister les troubles du neuro-développement

Proposition de loi visant à améliorer le dépistage des troubles du neuro-développement (TND) - Par / 26 janvier 2024

Affaires sociales Vol au-dessus d’un nid d’anxiété

Ériger la santé mentale des jeunes en grande cause nationale - Par / 18 janvier 2024

Affaires sociales Allocation autonome universelle d’études : coût ou investissement ?

Débat sur une proposition de loi proposée par le groupe écologiste au Sénat - Par / 14 décembre 2023

Affaires sociales Budget solidarité : un coup sérieux au pacte social

Vote des crédits Solidarité, insertion et égalité des chances pour 2024 - Par / 6 décembre 2023

Affaires sociales Les mesures prises depuis des années sont d’une inefficacité navrante

Représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes (conclusions de la CMP) - Par / 26 janvier 2022

Affaires sociales Certaines victimes de ces thérapies ont subi de véritables tortures

Interdiction des pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle (conclusions de la CMP) - Par / 20 janvier 2022

Administration