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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Le gouvernement choisit de reculer

Accessibilité pour les personnes handicapées (conclusions de la CMP) -

Par / 21 juillet 2015

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que la loi de 2005 sur le handicap avait consacré l’obligation de rendre accessibles tous les lieux recevant du public avant le 1er janvier 2015, seulement 40 % de ceux-ci le sont aujourd’hui, d’où une première déception des personnes en situation de handicap, de leurs familles et de l’ensemble des actrices et acteurs présents à leur côté au quotidien.

En effet, dans plus de la moitié des cas, une personne en situation de handicap voulant se rendre dans un lieu public pour y faire des courses, déposer un dossier administratif, se faire soigner, se trouvera dans l’incapacité d’y accéder : bloquée au pied des marches, incomprise d’un interlocuteur qui ne sait pas communiquer en prenant en compte son handicap, par exemple auditif, perdue devant des explications auxquelles elle n’a pas accès, du fait de son handicap mental. Dans plus de la moitié des cas, elle se trouve entravée dans la réalisation d’actes quotidiens par un défaut d’accessibilité, donc par la non-reconnaissance de ses droits fondamentaux, inscrits pourtant dans une loi.

Devant une telle situation, qui fait que la France est à la traîne parmi les pays ayant ratifié la convention de l’Organisation des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, le Gouvernement a fait le choix de reculer.

Pourtant, trente ans avaient déjà séparé les deux lois de 1975 et de 2005 portant sur les droits des personnes en situation de handicap. Puis, un délai supplémentaire de dix ans a été accordé pour la mise en accessibilité progressive des ERP, et, à l’échéance de 2015, on voudrait que ces personnes patientent encore pour que des mesures auxquelles elles ont droit soient enfin appliquées… C’est bien l’addition de ces reculs qui est cause de la colère des personnes en situation de handicap !

Les gouvernements successifs, par manque de volonté politique, n’ont cessé de repousser la mise en œuvre de l’accessibilité universelle, tout en se défaussant de leurs responsabilités sur les collectivités territoriales. Or nous connaissons les difficultés budgétaires de ces dernières, liées à la diminution de 28 milliards d’euros des dotations de l’État. Ainsi, sans transfert de moyens, atteindre l’objectif de l’accessibilité universelle reste illusoire.

Mais, au-delà des moyens, la mise en accessibilité est aussi une question de volonté politique et de sens des responsabilités. Il suffit souvent qu’un ou une élu soit un peu plus concerné que les autres par cette question pour que des mesures soient prises et des budgets alloués.

En attendant ce sursaut politique, les décisions votées par le Parlement, par les représentants du peuple – certains d’entre nous étaient déjà là en 2005 –, ne sont pas appliquées : nous ne pouvons l’accepter. Vous venez de le dire, madame la secrétaire d’État, il est de notre rôle de faire appliquer la loi.

Les personnes en situation de handicap et leurs associations manifestent, avec raison, leur opposition à cette ordonnance et nous demandent de ne pas la ratifier. J’ai été à leur côté et j’entends leur exaspération, leur déception, leur colère. Elles ont attendu trop longtemps la mise en place concrète de droits qui leur sont dus ! Du Conseil national consultatif des personnes handicapées au Collectif pour une France accessible, qui regroupe la très grande majorité des associations de personnes en situation de handicap, tous dénoncent cette ordonnance. Le Gouvernement s’obstine donc à défendre un texte qui ne fait que des mécontents parmi les personnes en situation de handicap et leurs familles, ainsi que parmi les acteurs du monde associatif qui les accompagnent dans leur vie quotidienne.

En effet, comment ne pas être déçu, voire en colère, lorsque l’on sait que les dérogations techniques instaurées conduiront à une exonération de la mise en accessibilité de la plupart des établissements recevant du public ?

Aux dérogations existantes, tenant à une impossibilité technique, à la conservation du patrimoine architectural et à la disproportion économique, s’ajoutera désormais une dérogation pour les ERP dont la mise en accessibilité serait jugée trop complexe. Mais qui en jugera, et de quelle complexité parle-t-on ?

Jusqu’à trois ans de délai supplémentaire seront accordés en cas de « difficultés techniques ou financières particulières ». Des prorogations plus longues, pouvant aller jusqu’à six, voire neuf ans, sont prévues pour les établissements de plus grande capacité, les patrimoines comprenant plusieurs établissements et ceux « en difficulté financière avérée ». Même l’obligation de dépôt des agendas d’accessibilité programmée, qui étaient pourtant le fer de lance de la loi d’habilitation, a été assouplie. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous nous étions abstenus en première lecture sur ce texte.

Concernant les transports, les délais maximaux seront de trois ans pour les transports urbains, de six ans pour les transports interurbains et de neuf ans pour le transport ferroviaire.

Nous refusons de soutenir un tel dispositif, un tel recul. Ces mesures sont injustes socialement. Elles ne sont pas dignes du modèle de société que nous préconisons, fondé sur la liberté, d’aller et venir en l’occurrence, l’égalité, ici l’égalité d’accès, et la fraternité, celle qui lie les citoyens, quels que soient leur sexe, leur origine ou leur handicap.

Pour ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen, votera contre ce projet de loi de ratification.

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