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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Ne laissons pas les lobbies des pesticides répandre leur poison

Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques -

Par / 1er février 2018

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux saluer le travail de Nicole Bonnefoy et Bernard Jomier, qui se concrétise au travers de cette proposition de loi.

Les pesticides et leurs effets sur la santé sont devenus, à juste titre, un sujet de préoccupation pour nos concitoyennes et nos concitoyens, une véritable question de santé publique.

Pendant des décennies, les fabricants de produits phytosanitaires ont promis aux agriculteurs que l’emploi de ces produits leur permettrait d’obtenir des rendements des plus intéressants sans prise de risque particulière sur la santé. Pendant longtemps, rien n’indiquait, sur les bidons utilisés, la dangerosité des produits. Pendant longtemps, les agriculteurs ont versé à mains nues des pesticides dans leur cuve, ont déambulé en plein épandage sans masque ni combinaison.

L’Union des industries de la protection des plantes, le lobby des fabricants de pesticides, renvoyait même les agriculteurs victimes aux précautions qu’il fallait prendre pour manipuler ces produits.

Des dizaines d’études épidémiologiques menées sur toute la planète ont fait la démonstration que les utilisateurs de pesticides sont plus souvent atteints par certains cancers que la population générale.

Je rappellerai que, d’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, les expositions aux pesticides au cours de la période prénatale, in utero, et périnatale, ainsi que pendant la petite enfance, présentent des risques pour le développement de l’enfant.

Alors que l’interdiction du glyphosate a cristallisé les tensions, un article du Monde diplomatique, paru au mois de septembre 2017 et intitulé Pratiques criminelles dans l’agroalimentaire, a relaté les pratiques graves dans ce secteur. Je n’ai pas le temps de m’y arrêter plus longuement.

Les alternatives techniques aux pesticides existent. Pour sortir de l’utilisation en masse de ces produits phytosanitaires, il faut avant tout oser affronter la logique de compétition sur les prix à laquelle les paysans doivent faire face pour obtenir un revenu.

Dans le cadre d’une question écrite du 21 décembre dernier, ma collègue Christine Prunaud vous a interpellée, madame la ministre, concernant l’interdiction de l’utilisation de pesticides et d’insecticides dans les filières de l’agroalimentaire. En attendant cette interdiction, nous pensons que les victimes doivent être prises en charge.

La proposition de loi de nos collègues socialistes et républicains s’insère dans la continuité de la création, en 2014, d’un système de pharmacovigilance. Elle prévoit de compléter ce dispositif en créant un fonds d’indemnisation pour les victimes des pesticides, comme cela a été fait pour les victimes de l’amiante ou des essais nucléaires. Elle va dans le sens d’une juste réparation des dommages des victimes au même titre que les maladies professionnelles.

Il faut le rappeler, si les agriculteurs et les salariés agricoles sont les premières victimes de pesticides, l’exposition concerne aussi les salariés de l’agroalimentaire, ceux qui œuvrent dans les usines de traitement du bois ou encore des milliers de travailleurs qui ouvrent au quotidien des conteneurs et y pénètrent pour des contrôles ou de la manutention.

Toutefois, il paraît indispensable que l’exposition aux pesticides soit étendue au-delà des seuls professionnels, car, en réalité, l’ensemble des citoyens sont concernés à des degrés divers. C’est d’ailleurs ce que vous avez souligné, madame la ministre. Je pense bien sûr non seulement au voisinage des champs traités, mais également aux produits alimentaires que nous consommons. Il est en outre primordial que le fonds soit ouvert aux enfants malades du fait de l’exposition de leurs parents.

Pour finir, nous sommes très attentifs aux critères et aux procédures d’accès au fonds d’indemnisation : les premiers ne doivent pas s’avérer trop restrictifs, les secondes, trop complexes, sous peine de créer un droit inapplicable.

Et si le nombre de demandes est trop important, comme vous semblez le craindre, madame la ministre, il sera toujours temps de revoir la contribution des entreprises de produits phytopharmaceutiques en taxant leurs profits.

En attendant, la réparation des préjudices liés à l’utilisation de ces produits s’inscrit dans la lutte pour la reconnaissance des nouvelles maladies professionnelles et leur indemnisation.

Je ne partage pas votre prudence, madame la ministre. Bien sûr, chaque jour, les progrès des sciences nous permettent de nouvelles découvertes. Mais attendre est une prise de risques aux conséquences graves, voire mortelles. Ne laissons pas les lobbies des fabricants de pesticides continuer à répandre leur poison. D’autant que nous n’en sommes pas à l’année zéro, des avancées ont déjà été faites dans ce domaine. Vous avez ainsi mandaté un certain nombre de commissions de réflexion, c’est une bonne chose. Mais pourquoi ne pas prendre en compte la présente proposition de loi ? Pourquoi vouloir finalement ériger un certain barrage ?

Il faut, ensemble, nous rappeler les victimes, notamment de l’amiante. À un moment donné, il devient trop tard pour réparer les préjudices subis par certaines d’entre elles. Entendons ce qui s’est exprimé, me semble-t-il, sur toutes les travées, même si les conclusions tirées n’ont pas été identiques, ce que les parlementaires, ici, au Sénat, vous disent, et ce dans un certain unanimisme.

Cette proposition de loi, bien que perfectible, va dans le bon sens. C’est la raison pour laquelle le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera en sa faveur, sans aucune retenue.

Pourquoi faire barrage à cette proposition de loi ? Souvenons-nous des victimes de l’amiante, bientôt il sera trop tard. Il y a eu une certaine unanimité au Sénat autour de cette proposition de loi. Votons-la.

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