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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Notre droit actuel ne suffit pas à répondre aux objectifs affichés par cette convention de l’OIT

Violence et harcèlement dans le monde du travail -

Par / 28 octobre 2021

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je me réjouis que ce projet de loi soit finalement examiné en procédure normale, à la suite de la demande formulée par notre groupe, le groupe CRCE. Sur un tel sujet, il nous semblait effectivement important que les différents groupes puissent s’exprimer.

Il n’est pas inutile de rappeler ici qu’une travailleuse sur trois a déjà été victime de harcèlement sexuel au travail. Nous ne sommes donc pas face à un phénomène mineur, et il est plus que temps d’agir pour ne pas banaliser ni minimiser ces violences.

Il faut également rappeler que, malgré leur obligation de protection des salariés, 82 % des employeurs n’ont, à l’heure actuelle, rédigé aucun plan de prévention contre les violences sexuelles et sexistes.

Il n’est donc pas étonnant que la grande majorité des victimes ne se sentent pas en confiance pour alerter les directions concernées, et que près de la moitié de celles qui l’ont fait estiment que la situation s’est réglée en leur défaveur.

Si je me réjouis que la ratification de la convention n° 190 soit enfin inscrite à notre ordre du jour, je regrette qu’il ait fallu attendre deux ans et demi après son adoption par l’OIT. Dès le mois de mars 2020, j’avais interrogé la ministre du travail de l’époque pour que le processus soit lancé.

Il y avait en effet urgence. D’une part, cette convention n° 190 s’attaque pour la première fois à une problématique malheureusement structurante et omniprésente dans nos sociétés. D’autre part, par sa portée normative internationale, elle est historique.

Le champ d’application de celle-ci est vaste. On sera protégé en cas de violence et de harcèlement fondés sur le genre, et ce quel que soit son statut, que les violences se soient déroulées sur le lieu de travail, lors d’une pause ou bien lors des déplacements professionnels.

Si la convention et, surtout, la recommandation qui l’accompagne sont ambitieuses, et si la France a joué un rôle important au sein de l’OIT, je dois néanmoins regretter, comme bon nombre d’associations et d’organisations syndicales, que le Gouvernement considère que son adoption puisse se faire à droit constant.

En ce sens, je partage les recommandations de Mme le rapporteur Nicole Duranton pour aller plus loin. Il n’est pas possible, monsieur le secrétaire d’État, de considérer que notre droit actuel suffit à atteindre les objectifs affichés.

En rester là serait véritablement une occasion manquée. Comment peut-on estimer que la législation actuelle est suffisante et satisfaisante quand on sait, par exemple, que les « référents harcèlement », créés en 2018, ne sont absolument pas formés et ne disposent d’aucun moyen pour exercer leur mandat ?

Comment peut-on considérer que notre droit suffit, quand on sait que les violences et le harcèlement ne font pas partie des thèmes obligatoires des négociations annuelles sur la qualité de vie au travail ? De plus, comment ne pas regretter que, pour l’instant, les employeurs – et rien ne les y oblige ! – refusent très majoritairement de prendre en compte les conséquences des violences domestiques sur leurs salariés ?

Je suis pour ma part favorable à la proposition figurant dans la recommandation n° 206 de l’OIT, visant à créer un congé spécifique, qui permettrait aux victimes de violences conjugales de s’absenter, afin d’effectuer certaines démarches.

En outre, pourquoi ne pas vouloir inscrire dans notre droit l’interdiction des licenciements de victimes de violences conjugales ?

Quant aux violences exercées au travail, il nous faut également avancer sur la voie d’une facilitation des procédures d’éloignement des victimes et des harceleurs. Les nombreuses propositions en ce sens devraient être mises en œuvre : renforcement des droits à congé spécifique, aménagements de poste, possibilité de percevoir des allocations chômage pour les victimes qui démissionnent, dispense de préavis de départ, etc.

Au-delà, il convient également de s’interroger sur la baisse continue du nombre des inspecteurs et des inspectrices du travail, malgré les alertes des syndicats et celles de la Cour des comptes.

Faut-il rappeler ici que l’article 4 de la convention impose bien aux États signataires, dont la France, de garantir des moyens d’inspection et d’enquête efficaces pour les cas de violence et de harcèlement ?

Ce n’est pas la seule incohérence de ce gouvernement, bien aidé, il faut le dire, par ses prédécesseurs. Je citerai la création du comité social et économique (CSE), en remplacement des anciennes instances paritaires, qui a conduit à une dilution des problématiques, rendant plus difficile l’élaboration de plans thématiques.

La ratification de la convention constitue un premier pas non négligeable. Notre groupe la soutiendra, en appelant de ses vœux à ce qu’elle ne soit pas appliquée a minima, mais au contraire, qu’elle soit pleinement l’occasion d’améliorer notre législation en termes de prévention, d’accompagnement, de formation, de sanctions, et qu’enfin les lieux de travail deviennent exemplaires en matière d’élimination des violences et du harcèlement.

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