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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Nous vous proposons de stopper la discussion d’un texte dont les Français en majorité ne veulent pas

Loi Travail : question préalable -

Par / 13 juin 2016

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, cette motion tendant à opposer la question préalable est une chance pour notre assemblée. Le Sénat a en effet le pouvoir de dénouer la crise dans laquelle le projet de loi a plongé le pays. En vous invitant à adopter cette motion, nous vous proposons d’effectuer le geste qu’attend le pays : mettons un terme à la discussion d’un projet de loi dont la grande majorité de nos concitoyens ne veut pas.

Depuis quatre mois, sans avoir tiré aucune leçon du fait que la méthode mise en œuvre pour le projet de révision constitutionnelle relatif à la déchéance de nationalité vous avez déjà conduits à une impasse, vous vous acharnez une nouvelle fois à imposer un texte sans convaincre, sans discuter, sans négocier. Et, depuis quatre mois, force est de constater que c’est un fiasco !

Sortir de l’impasse, envoyer un signal d’apaisement, reprendre la discussion avec les organisations syndicales sur de nouvelles bases, notamment pour tendre vers une véritable sécurisation de l’emploi : voilà ce que nous vous proposons au travers de notre refus de poursuivre la discussion d’un texte dont la philosophie est à revoir de fond en comble.

À l’inverse, poursuivre le débat sur ce texte, ce serait à coup sûr continuer à jeter de l’huile sur le feu, prendre le chemin de la surenchère, avec la décision de la droite sénatoriale de durcir le texte, alors que c’est la négociation avec les organisations syndicales qui devrait être recherchée. En débattant de ce projet de loi, le Sénat ignorerait donc cette urgence.

De plus, nous le savons tous, ce serait ouvrir la voie à un nouveau passage en force à l’Assemblée nationale, à un nouveau recours au 49.3, car vous n’y aurez pas plus de majorité en deuxième lecture qu’en première lecture.

Mme Éliane Assassi. Eh oui !

M. Pierre Laurent. Adopter notre motion tendant à opposer la question préalable, ce sera au contraire choisir la voie de la raison, du dialogue, du retour à la négociation.

Oui, depuis quatre mois, votre acharnement à promouvoir ce texte est un fiasco, sur le fond comme sur la forme.

En quatre mois, malgré la monopolisation des ondes par les soutiens de la loi, la mobilisation de toute la batterie d’experts en libéralisme dont nos chaînes de radio et de télévision ont le secret, vous n’avez réussi à convaincre ni la jeunesse, ni les salariés, ni les artisans, ni les petites entreprises, qui craignent tous la spirale du dumping social qu’entraînera cette déréglementation sociale.

Cette loi ne créera pas d’emplois ; elle précarisera toujours plus les salariés et le tissu des petites entreprises. Elle va donc fragiliser les ressorts économiques du pays. Jamais, en quatre mois, vous n’avez pu convaincre du contraire : le fait est que le rejet de ce projet de loi reste majoritaire dans l’opinion.

Demain, des manifestations monstres se dérouleront dans le pays. Elles réduiront à néant la thèse d’une contestation minoritaire que vous avez en vain tenté d’accréditer.

C’est un fiasco pour le dialogue social : quel paysage de désolation ! Vous n’avez cherché qu’à diviser et à stigmatiser le mouvement syndical. La CGT, FO, Solidaires, la FSU, l’UNEF et, depuis ces derniers jours, la CGC s’opposent à ce projet de loi, mais vous n’avez jamais vraiment essayé de négocier avec eux. Vous avez préféré les salir, les caricaturer et assimiler à de la violence l’action légitime de ces femmes et de ces hommes qui vivent difficilement de maigres salaires. (Mme Nicole Bricq proteste.)

Mme Éliane Assassi. Tous les jours, vous les insultez !

M. Pierre Laurent. Je pourrais aligner les citations par dizaines. Elles proviennent de la droite, ce qui n’étonnera personne, mais aussi, malheureusement, du camp gouvernemental.

Vous avez préféré le passage en force, par le recours au 49.3, à l’amendement du texte par des députés socialistes, communistes et écologistes. Vous avez ouvert la voie à un déferlement de propos inacceptables : ceux du patron du MEDEF, assimilant l’action de la CGT à du terrorisme ; ceux d’un célèbre éditorialiste, Franz-Olivier Giesbert, comparant la CGT à Daesh.

Mme Nicole Bricq. Il n’est pas socialiste, celui-là !

M. Pierre Laurent. Le même écrit, cette semaine : « Je persiste et signe, n’en déplaise aux sites tenus par la police de la bien-pensance (Mediapart, l’Express, Le Huffington Post, etc.) ou aux twittos, avatars des chiens de Pavlov dont les clabaudages rappellent ceux de la populace robespierriste. »

Voilà ce que des éditorialistes osent écrire, ces jours-ci, à propos du monde syndical ! Où est la violence ? Ce sont les auteurs de tels propos qui devraient être déférés devant les tribunaux, et non, par exemple, cette jeune Manon, étudiante d’Amiens, jugée et menacée de prison pour avoir lancé un micro sur un CRS dans une manifestation contre le projet de loi Travail, le 28 avril dernier.

Mme Laurence Cohen. Bravo !

M. Pierre Laurent. Oui, le dialogue social sort gravement abîmé des événements de ces quatre derniers mois !

Enfin, c’est un fiasco politique. Vos électeurs se sentent trahis, à juste titre, tandis que la droite, qui rêve d’enfoncer le clou plus profondément encore, se régale.

M. Roger Karoutchi. Bof…

M. Pierre Laurent. Le Premier ministre a déclaré cette semaine qu’il en avait assez des « procès en trahison de la gauche ». Éliane Assassi a cité les propos tenus par Alain Vidalies en 2008 ; pour ma part, je vous donnerai lecture, mes chers collègues, du texte de la motion majoritaire adoptée lors du congrès du parti socialiste de juin 2015,…

Mme Nicole Bricq. Moi, je ne l’ai pas votée !

M. Philippe Dallier. On saura tout !

M. Pierre Laurent. … dont Manuel Valls et de nombreux ministres étaient signataires :

« La démocratie sociale que nous devons construire doit s’appuyer sur un syndicalisme fort et respecté, constructif sur l’innovation, intransigeant sur les régressions sociales. Et puis, il faut rétablir la hiérarchie des normes : la loi est plus forte que l’accord collectif et lui-même s’impose au contrat de travail.

Mme Éliane Assassi. Et voilà !

M. Pierre Laurent. « Si la loi peut permettre à des accords de déroger à ces dispositions, elle ne peut le prévoir dans des domaines relevant de l’ordre public social : salaire minimum, durée légale du travail, droit du licenciement, existence de la représentation du personnel. » (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Jean Desessard applaudissent également.)

M. Jean-Pierre Caffet. On ne change rien !

M. Pierre Laurent. Force est de constater, madame la ministre, que, à peine six mois plus tard, votre projet de loi tend à prévoir exactement l’inverse en matière de hiérarchie des normes et de régressions sociales. Il n’y a donc pas de procès en trahison de la gauche : les Français constatent simplement des faits !

Pour justifier ce retournement majeur, historique au regard du passé de la gauche, vous invoquez la « modernité ». À vous entendre, vous faites ces choix pour ne pas avoir à trancher entre le libéralisme à outrance de la droite et l’immobilisme de la gauche traditionnelle. La vérité, c’est que vous avez choisi l’immobilisme dans le libéralisme et que vous avez renoncé à réformer à gauche, c’est-à-dire dans le sens du progrès social !

Pensez-vous réellement que le compromis et le progrès consistent à permettre un droit social par entreprise, à flexibiliser les règles de licenciement, à autoriser les licenciements économiques sur la base d’une simple baisse du chiffre d’affaires d’un semestre ?

Au nom de l’emploi, vous cédez mesure après mesure aux exigences du MEDEF qui, après avoir obtenu 40 milliards d’euros sans aucune contrepartie et sans aucune création d’emploi, vous demande instamment de le débarrasser du code du travail.

Votre projet de loi, madame la ministre, est si peu éloigné de ce que souhaite la droite qu’il aura suffi à cette dernière de rétablir en commission le texte initial et d’y rajouter quelques dispositions.

Chers collègues socialistes, vous allez, je le sais, protester contre la surenchère de la droite, mais qui a ouvert la porte, qui a mis le doigt dans ce dangereux engrenage ? Une nouvelle fois, la droite va vous piéger, et vous vous prêtez à son jeu ! Elle prolonge la vie de ce texte, qui n’a pas réuni de majorité à gauche à l’Assemblée nationale, et elle vous pousse sciemment au recours au 49.3. Ainsi, le crime contre le code du travail sera commis sans que ses empreintes ne figurent sur l’arme du crime. Du grand art ! Elle espère revenir demain au pouvoir ; elle n’aura plus alors qu’à mettre ses pas dans les vôtres pour finir le sale boulot.

Les sénateurs du Front national se sont eux-mêmes engouffrés dans cette brèche, en déposant des amendements allant dans le sens d’une surenchère libérale. Ils les ont aussitôt retirés, par calcul politicien, mais le fait est là !

Vous le voyez, mes chers collègues, ce projet de loi n’est pas le fruit d’un bon compromis, comme l’affirme le Gouvernement. C’est une machine infernale qui inquiète et insécurise le pays. Ce ne sont pas les grèves qui doivent s’arrêter ; c’est la discussion de ce texte qui doit être stoppée !

Pour conclure, je vous livrerai la version complète de la citation de Maurice Thorez que beaucoup ont utilisée ces derniers temps : « Il faut savoir terminer une grève dès que la satisfaction a été obtenue. Il faut même savoir consentir au compromis si toutes les revendications n’ont pas encore été acceptées mais que l’on a obtenu la victoire sur les plus essentielles revendications. »

Aucune de ces conditions n’est aujourd’hui réunie ! Faut-il rappeler, en outre, que cette déclaration de Maurice Thorez intervenait alors que des accords venaient d’être signés pour étendre les congés payés et réduire la durée de la semaine de travail à 40 heures ?

C’est peut-être ceci qu’il conviendrait de méditer : la France est toujours sortie de la crise par la porte du progrès social, pas l’inverse !

Votez notre motion tendant à opposer la question préalable, mes chers collègues, et débarrassez-nous de ce projet régressif. Nous pourrons alors débattre utilement de la sécurisation de l’emploi, de la formation, de la réduction du temps de travail, de l’encadrement des salaires patronaux faramineux et de l’impunité zéro pour l’évasion fiscale.

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