Aménagement du territoire et développement durable
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Les marchands de sommeil ont encore de beaux jours devant eux !
Lutte contre le dérèglement climatique : article 42 -
Par Marie-Claude Varaillas / 24 juin 2021L’article 42 est présenté comme l’une des mesures phares du projet de loi, car il prévoit l’interdiction de location des passoires énergétiques. Or, après réflexion, nous considérons qu’il ne change rien. Les modalités resteront les mêmes : il appartiendra toujours au locataire de se tourner vers un juge pour obliger le propriétaire de son logement à effectuer les travaux nécessaires afin de le rendre décent. Par ailleurs, cette interdiction figure déjà dans la loi relative à l’énergie et au climat.
Certes, les chiffres sont impressionnants : 600 000 passoires énergétiques seront concernées en 2025, puis 1,8 million en 2028 et 4,4 millions en 2034, ce délai ayant été porté à 2040 en commission. Ce n’est qu’à partir de ces dates que les locataires pourront se retourner contre les propriétaires afin que les travaux soient effectués. Ces échéances lointaines sont source d’une grande incertitude, la plupart des ménages ayant bien d’autres urgences matérielles et financières à régler avant d’engager des recours qui pourraient, au surplus, les priver de leurs APL.
En commission, nous avions d’abord pensé revenir sur les échéances, afin de les rapprocher, mais cela ne changerait rien non plus. Faute de sanction, faute d’appui aux locataires leur permettant de faire respecter leurs droits, cet article restera lettre morte. La responsabilité collective est renvoyée à une démarche individuelle.
Pis, cet article conduira au retrait du marché d’un certain nombre de biens en fin de bail, puisque les travaux de performance n’ont rien d’obligatoire. Pourtant, la Convention citoyenne pour le climat souhaitait rendre obligatoire la rénovation globale pour tous les propriétaires, occupants et bailleurs, copropriétés, bailleurs sociaux et maisons individuelles. Elle prévoyait également des mécanismes de sanction, malheureusement absents du présent projet de loi.
Tant que l’interdiction nécessitera une décision judiciaire, elle sera inefficace, car les services de l’État et les magistrats n’ont malheureusement ni le temps ni les moyens d’effectuer les vérifications nécessaires. C’est là que le bât blesse ! Tant que notre pays ne sera pas en mesure de faire respecter le droit dans de bonnes conditions, les marchands de sommeil auront de beaux jours devant eux...