Aménagement du territoire et développement durable
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Retrait gonflement des argiles : un enjeu majeur
Par Marie-Claude Varaillas / 28 mai 2024145%. C’est l’explosion du nombre de sinistres causés par le retrait gonflement des argiles entre la période 2006 – 2024 par rapport à la période 1989 – 2005.
10,5 millions de maisons individuelles soit 54% sont menacées par ce phénomène climatique et 3,1 millions d’entre elles sont en zone d’exposition forte.
C’est dire à quel point cette nouvelle proposition de loi revêt un enjeu majeur. A ce titre, je regrette, avec les membres de mon groupe, que ce texte ait été rejeté en commission des finances et qu’opportunément une proposition de loi de notre collègue rapporteure soit déposée la veille de l’examen du présent texte au Sénat. Cette démarche qui consiste à manier le calendrier parlementaire mine l’initiative législative des groupes minoritaires et rompt avec la conception de la démocratie sénatoriale. Nous le déplorons et le condamnons.
Mon département, la Dordogne, est particulièrement en proie à ce phénomène du fait de nos sols argileux qui agissent comme une éponge, se rétractant en séchant, se gonflant à l’humidité. Sur la période, les précipitations y ont été soutenues, et les nappes phréatiques peinent à absorber le surplus. Force est de constater que comme ailleurs, ce sont les logements construits avant 1921 et après 1976 qui cumulent 69% des risques les plus importants. Nous devons nous fixer un objectif de 0 aléa moyen ou fort sur les constructions neuves !
Les collectivités disposent de 24 mois pour demander le classement en régime de catastrophe naturelle. Certaines communes espèrent toujours décrocher le sésame tant espéré : figurer sur l’arrêté ministériel de reconnaissance du régime « Catnat ». Sauf que nous le savons, chaque année, nombre d’entre elles sont exclues du bénéfice du régime de catastrophe naturelle et les élus locaux se trouvent dépourvus de solutions face à leur population. La procédure est pourtant longue et fastidieuse et, le délai de recours insuffisant. Nous proposerons par amendement de le porter à 90 jours de façon à laisser à la collectivité le temps de mener les contre-expertises nécessaires pour apporter les éléments nouveaux et fonder leur recours.
En Dordogne, dans le dernier arrêté du 16 avril 2024, sur les 303 demandes formulées 135 sont restées sur le carreau. Les raisons sont bien connues : d’une part les retraits gonflement d’argiles sont difficiles à faire reconnaitre et d’autre part les modalités de relevés n’intègrent que le niveau d’humidité des sols superficiels.
Sur ces points la proposition de loi apporte des solutions opportunes en instaurant une présomption de RGA à l’article 2 car ce n’est qu’en renversant la charge de la preuve que l’indemnisation des sinistrés pourra s’améliorer.
L’expert devra désormais démontrer que le dommage n’a pas comme cause déterminante le phénomène RGA.
Le surcoût de 250 millions d’euros relevé par la rapporteure est à ce titre raisonnable et malgré l’allongement à trois années évoqué et probablement surestimé par la rapporteure ; il constitue d’une certaine manière un moindre mal.
Le financement de cette proposition de loi a été souligné en commission pour la rejeter. Mais il faut voir que le risque RGA représente 2,1 milliards d’euros par an dans les années à venir et à pratiques inchangées, alors qu’il n’était que d’un milliard entre 2017 et 2020 et deux fois moins depuis 1982. C’est donc tout le modèle du financement du risque climatique qui doit être passé en revue.
Toutefois, nous affirmons que les assureurs doivent prendre toute leur part, et la puissance publique ne pourra s’exonérer d’apporter sa contribution. Le risque climatique intègre progressivement l’une des missions régaliennes de l’Etat moderne, qui sans une protection accrue des populations, créera des sans droits et des sans toits.
Mon groupe CRCE-K soutiendra unanimement cette proposition.