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dossier Patrimoine national, la SNCF n’est pas à vendre

Servir la finance ou l’intérêt général ? Pour les libéraux du gouvernement comme de la Commission européenne, le transport ferroviaire se résume à une activité marchande, qui doit enfin être soumise à la logique impérieuse du profit, quitte à en finir avec sa mission historique de service public. C’est le sens profond de la réforme de la SNCF engagée par Emmanuel Macron et sa majorité. Une réforme qui prépare de fait le démantèlement et la privatisation de l’opérateur historique. Selon nous, le train relève au contraire de l’intérêt général. Il nécessite un système d’exploitation modernisé, unifié, public, sur un réseau unique, pour garantir une offre cohérente et performante, ainsi qu’une péréquation à l’échelle nationale.

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Aménagement du territoire et développement durable

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Vous livrez clef en main les moyens et les savoir-faire de la SNCF aux intérêts privés

Nouveau pacte ferroviaire (explication de vote) -

Par / 5 juin 2018
Il n’aura fallu que trois jours au Sénat pour mettre fin à 80 ans de service public ferroviaire
par [Groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste->https://www.youtube.com/channel/UCGMy4lcU26bYb4ZFHYMZQZw]
https://youtu.be/DDb_RONh8Wc
Vous livrez clef en main les moyens et les savoir-faire de la SNCF aux intérêts privés

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les masques sont finalement tombés. Malgré un semblant de rébellion avec la proposition de loi Maurey-Nègre, la majorité sénatoriale et le Gouvernement sont en fait au diapason.

Vous êtes d’accord pour changer le statut de la SNCF, pour casser le statut des cheminots et pour ouvrir à la concurrence les transports ferroviaires sans aucune étude d’impact.

Mon groupe a été le seul à voter un amendement de suppression de l’article 1er A, qui transforme la SNCF en une myriade de sociétés anonymes soumises au code du commerce.

Ainsi, il n’aura fallu que trois jours à la Haute Assemblée pour mettre fin à quatre-vingts ans de service public ferroviaire, livrant aux appétits privés un secteur d’intérêt général.

Pourtant, ni le Président de la République ni le Gouvernement n’ont reçu de mandat populaire pour cela.

Le président Macron nous apporte la preuve que, loin d’emmener le pays vers la modernité, il en revient, en réalité, aux très vieilles sirènes libérales.

Votre légitimité est extrêmement fragile. Elle est même d’autant plus fragile que le résultat du « vot’action » démontre qu’une majorité de cheminots refuse cette réforme, alors qu’ils sont les premiers acteurs du système ferroviaire.

M. Jacques Grosperrin. Mais ce ne sont pas eux qui font les lois !

Mme Éliane Assassi. Malgré votre volonté de faire de cet examen une simple formalité, nous avons voulu débattre sur le fond, combattant pied à pied vos arguments et en étant aussi force de proposition.

Nous sommes fiers d’avoir bousculé le scénario par la force de nos interventions et par nos amendements.

Nous sommes fiers d’avoir porté au Sénat la voix des cheminots, mais aussi celle des usagers, des citoyens et de tous ceux qui refusent une société dans laquelle l’accès au droit à la mobilité sera différent selon que l’on réside en ville ou à la campagne. Un droit dont l’exercice sera lié, demain, au niveau de rentabilité qui en résultera pour les entreprises auxquelles on confiera sa réalisation.

Sur la forme, l’adoption de ce texte va témoigner d’un double mépris : un mépris politique, à l’égard des parlementaires, avec le recours aux ordonnances, et un mépris social dont fait preuve l’absence de négociation avec les organisations syndicales. Concertation n’est pas négociation.

Aujourd’hui, c’est bien le Gouvernement qui porte la responsabilité morale et politique d’un conflit social majeur.

Sur le fond, ce projet de loi est dogmatique et technocratique. Il est déconnecté du quotidien de nos concitoyens et ne traduit qu’une obsession pour un libéralisme exacerbé.

Ce texte organise l’arrivée de nouveaux entrants en livrant clef en main les moyens et les savoir-faire de l’opérateur public et des cheminots aux intérêts privés : transfert de salariés formés, transfert des matériels roulants et des ateliers de maintenance, filialisation des gares… Autant de « facilités » permettant aux nouveaux entrants de bénéficier de l’investissement conjoint de la SNCF et des autorités organisatrices. C’est une véritable distorsion de concurrence !

Vous vous entêtez, alors que les expériences européennes sont édifiantes : dégradation du service et du coût pour les usagers et dégradation des conditions de travail en Allemagne, en Italie, en Angleterre, en Suède…

Au final, nous ne savons toujours pas pourquoi il est nécessaire de changer le statut de la SNCF. Pourquoi, au lieu des trois établissements publics, est-il urgent de créer quatre ou cinq sociétés anonymes ? L’Europe ne le demandait pas.

Pis, ce changement va entraîner une augmentation des taux d’intérêt du fait de la dégradation des notes des agences de notation liée à la suppression de la garantie illimitée de l’État…

Pour aller au bout de son projet de libéralisation, le Gouvernement est même prêt à reprendre une partie de la dette à hauteur de 35 milliards d’euros. Vous vous gardez bien, toutefois, d’expliciter à la représentation nationale le scénario envisagé et la structure de la dette reprise, et ce malgré nos multiples interventions.

Finalement, il s’agit d’une stricte obligation comptable liée aux règles sur l’endettement des sociétés anonymes. Et c’est cela que vous érigez en symbole de l’engagement de l’État.

Soyons clairs : il ne s’agit en aucune manière de donner plus de marges de manœuvre à SNCF Réseau, puisque, dans le même temps, vous avez fait adopter une nouvelle règle d’or qui contraint drastiquement les investissements, notamment dans le réseau secondaire.

Le président Macron est en quelque sorte entré dans cette réforme, au nom de l’équité, par la dénonciation du statut des cheminots, jetant ceux-ci à la vindicte populaire, organisant le « tous contre tous ». Pour cela, il n’a pas hésité à déclarer que le coût de ce statut s’élevait à 700 millions d’euros, alors qu’il est de 15 millions, soit un montant vingt fois inférieur au budget de communication du groupe.

Au final, le changement de statut risque de coûter plus cher puisque les conditions de travail des cheminots sont moins favorables que les dispositions du code du travail, notamment en ce qui concerne le travail de nuit ou du dimanche. En agitant ce chiffon rouge, le Président de la République a détourné l’attention des véritables maux du ferroviaire : désengagement de l’État et sous-financement.

La presse du week-end ne tarit pas sur les concessions faites au Sénat. Franchement, nous ne voyons pas de quoi il s’agit puisque tous les principes directeurs ont été confirmés. L’incessibilité a été inscrite dans le texte, mais cela n’engage que ceux qui croient aux promesses d’un gouvernement aux ordres de la finance. Les conditions de transfert ont été légèrement assouplies, le volontariat étant favorisé et la réintégration étant exceptionnellement permise.

Il faut tout de même avoir à l’esprit que nous assistons à une grande première : le transfert de salariés statutaires d’une entreprise publique vers une entreprise privée.

Au-delà du profond désaccord sur l’ouverture à la concurrence et le changement de statut de la SNCF, vous avez refusé toutes les assurances que nous proposions en repli : un transfert fondé exclusivement sur le volontariat et un véritable droit de réintégration au statut sans limitation dans le temps.

Enfin, moins de trains, puisque c’est à cela que va conduire la concurrence, c’est plus de cars, plus de camions, plus d’avions pour un coût environnemental que nous n’avons pas le luxe de nous payer.

C’est notamment pour cette raison, madame la ministre, que nous aurions souhaité que le Gouvernement se saisisse du règlement sur les obligations de service public, ou règlement OSP, pour préserver le modèle français – intégré et permettant une péréquation à l’échelon national et entre les différentes activités –, son haut niveau de sécurité et la compétence des agents. Autrement dit, une maîtrise publique qui garantisse l’égalité des territoires et une réelle priorité au rail.

Nous le répétons, cette réforme est avant tout idéologique. Elle montre combien le président des riches et son gouvernement ont décidé de s’attaquer aux citoyens et aux salariés.

Après les APL cet hiver et les pseudo-privilèges des cheminots aujourd’hui, viendront demain des aides sociales et les retraites. C’est cela votre projet de société : détruire les acquis sociaux et les garanties collectives en laissant les individus démunis devant la mondialisation capitaliste.

La réforme de la SNCF est un symbole, madame la ministre ; c’est un repère social que le Gouvernement et le Président de la République veulent faire sauter.

Nous voterons contre ce projet de loi dont nous continuons à demander le retrait. Il va à l’opposé d’une réforme ambitieuse pour construire le service public ferroviaire du XXIe siècle, écologiquement responsable et répondant aux besoins de la Nation. Avec ce texte, vous ne préparez pas l’avenir, madame la ministre, vous nous engagez dans une voie de garage.

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