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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Aujourd’hui, la situation de la population pauvre, modeste, ouvrière et de la classe moyenne est plus mauvaise, alors que celle du capital fait des bonds

Plan de rigueur et nouvel emprunt à la Grèce -

Par / 8 septembre 2011

À l’université d’été de l’UMP, dimanche dernier, le Premier ministre a eu recours aux termes « éthique », « sincérité », « conscience morale et civique », « esprit citoyen », qui caractériseraient, selon lui, sa politique, en les opposant à ceux de « mirage », « faux-semblant », « amertume », « inconséquence » et « préjugé », qu’il attribue à l’opposition. Pour justifier ce langage, il a affirmé : « Dans un souci d’équité, nous avons demandé un effort supplémentaire aux plus fortunés. »

La terminologie du Premier ministre est une tromperie qui rend tout douteux et suspect, et fait perdre confiance en la nature humaine. La preuve en est cet amendement visant à supprimer la diminution de l’impôt de solidarité sur la fortune, fixée par la majorité le 21 juin dernier à 1,8 milliard d’euros. Cette somme est à rapprocher des 200 millions d’euros « raisonnables » et « exceptionnels », disait Maurice Lévy, PDG de Publicis, en réclamant une contribution des grandes fortunes.

C’est le niveau indigne de la réflexion du Gouvernement et des grandes fortunes réunies, soixante-dix-neuf jours après le 21 juin. C’est une égratignure, presque un geste de caresse à l’égard du capital, en tout cas une friponnerie !

Intervenant ce même 21 juin et prenant l’exemple d’un patrimoine de 40 millions d’euros, je calculai que l’allégement fiscal correspondait à une diminution d’impôt de 449 050 euros, 8 654 euros par semaine, soit un SMIC très amélioré par jour. Si le SMIC avait été augmenté de 2 % au 1er juillet, comme cela aurait été logique, chaque salarié au SMIC aurait reçu 27,30 euros bruts par mois, 7 euros par semaine, soit 1 euro par jour. Un SMIC très amélioré par jour pour les riches ; un euro par jour pour un smicard !

Aujourd’hui, la situation de la population pauvre, modeste, ouvrière et de la classe moyenne est plus mauvaise, alors que celle du capital – je pense au CAC 40 – fait des bonds. Mes collègues communistes et socialistes en ont parlé, mais le rapporteur général du budget, M. Marini, ainsi que M. Baroin et Mme Pécresse n’en ont soufflé mot. Ils sont en cela fidèles à la tradition de la bourgeoisie française, rencontrée ici même lors du bicentenaire de la naissance de Victor Hugo, en novembre 2002.

Intervenant à cette occasion, j’avais cité la parole du poète à l’Assemblée nationale législative le 9 juillet 1849. Écoutez-le :

« Je ne suis pas de ceux qui croient qu’on peut supprimer la souffrance en ce monde […] mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu’on peut détruire la misère.

« Remarquez-le bien, messieurs, je ne dis pas diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire, je dis détruire. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en pareille matière, tant que le possible n’est pas fait, le devoir n’est pas rempli. »

Dans le cadre de la belle exposition organisée alors par le Sénat dans la salle des conférences, la citation que je viens de faire avait été reprise, sauf la dernière phrase. (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.).

Dès qu’elle prit le pouvoir, en 1789, la bourgeoisie française pratiqua ainsi. Sous la Constituante, il y eut des débats à ce propos. Robespierre fut dénigré parce qu’il parlait des « droits sacrés de l’infortune » face aux « prodigalités ruineuses qui se perpétuent en faveur des particuliers opulents » ou quand il déclarait : « Vous n’avez rien fait pour la liberté si vos lois ne tendent pas à diminuer l’extrême inégalité des fortunes. » Les opposants à l’Incorruptible lui retirèrent souvent la parole et le qualifièrent de député « populomane ».

Cette même bourgeoisie française, en 2005, a répondu par l’état d’exception à la révolte des banlieues, qui traduisait le mal-vécu de millions de banlieusards, traités comme des « hommes à part », des « hommes dépréciés », des « habitants intermédiaires », des citoyens de l’entre-deux. Le 16 novembre de cette même année, j’étais intervenu pour dire que les banlieues étaient traitées comme des choses, humiliées dans leur vie.

La France connaissait alors un « moment brèche ». Les banlieues refusaient en fait le grand retournement ultralibéral que, depuis, vous avez fait s’épanouir jusque dans l’intimité des êtres, au point de donner aux habitants des banlieues la « voix rauque ».

Aujourd’hui, vous continuez. Vous tentez de perpétuer l’injustice. Notre amendement n’est pourtant qu’un minimum ; c’est une redistribution, alors que la crise que vous voulez avec lancinance enfermer dans le problème de la dette est celle de votre système.

M. Baroin a parlé de « cohérence, de réalisme et d’équilibre ». Or je viens de faire la preuve que, quand les actes ne suivent pas, qu’ils restent absents, les mots ne peuvent que dire. C’est faire infraction au réel, tout comme l’a fait Mme Keller en osant affirmer : « La nécessité nous délivre de l’embarras du choix. »

Le choix salvateur, on peut se l’expliquer, même si on ne le partage pas. Mais le choix proposé par cet amendement est simplement fidèle au préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, aux termes duquel tous les membres de la famille humaine possèdent une « dignité inhérente ». Dans son article 1er, il est énoncé que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. »

M. le président. Mon cher collègue, veuillez conclure. Vous avez déjà doublé votre temps de parole !

M. Jack Ralite. Certes, mais c’est important ! (Sourires.)

Par ailleurs, monsieur le président, j’interviens ici pour la dernière fois !

M. le président. Alors, je vous accorde cette dérogation ! (Nouveaux sourires.)

M. Jack Ralite. Vous clivez la société entre citoyens à part entière et citoyens à part. Vous n’avez plus d’hospitalité pour l’autre. C’est une « désaffiliation », dit Robert Castel, alors qu’il faut mettre au jour une nouvelle sollicitude sociale et en finir avec l’irrespect, ce réalisme du statu quo, qui comprend toujours les forts et jamais les faibles.

Quand il pleut, je garde la possibilité de choisir mon parapluie ! J’attends donc que vous votiez notre amendement, qui ne représente, vous en conviendrez, que quelques gouttes !

Permettez-moi, mes chers collègues, d’ajouter une dernière chose. Nous discutons d’une redistribution, mais elle ne se situe pas au niveau souhaitable, car nous ne nous attaquons pas au processus d’enrichissement. Or l’argent, qui mène le monde quand on le laisse libre, ne constitue pas une source de richesse essentielle. En raisonnant ainsi, on fait la part belle aux grands intérêts financiers et on laisse de côté la production. Or c’est d’elle que vient, et durablement, la richesse. C’est là que les hommes et les femmes pensent, créent, échangent, parlent de leur travail, un travail si malade aujourd’hui qu’il peut mener au suicide. Ils y parlent de la culture, du développement, de leurs désirs, du geste bien fait.

Avec mes amis, nous ne nous résoudrons jamais à abandonner cet espace, où il y a fondamentalement à prendre en considération. Il est habité par les malaises qui se répandent chez ceux qui s’entêtent à travailler correctement et récusent la contrainte du management, le « ni fait ni à faire », par les souffrances qui entament ceux à qui une partie de leurs activités est empêchée, par les colères des professionnels qui, sur toute la palette de leurs responsabilités, ne retrouvent plus leurs métiers dans ce qu’ils font.

Pour cela, pas besoin de « consensus » – ce mot piège qui ne touche en rien à la reféodalisation planétaire, où les grandes entreprises marchent à l’horloge et sont frelons profitant des abeilles –, mais d’un vrai travail historique. Il faudra bien emprunter ce chemin avec les intéressés, qui ont besoin de droits nouveaux, parce que, en tant qu’experts du quotidien, ils sont devenus incontournables.

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