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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Budget 2004 : affaires étrangères

Par / 1er décembre 2003

par Danielle Bidard-Reydet

Monsieur le Président,
Messieurs les Ministres,
Chers Collègues,

Je souhaite, pour tenir dans le temps qui m’est imparti, privilégier deux questions éclairées par l’actualité.

Ce lundi 1er décembre n’est pas, en effet, un jour ordinaire.
D’une part, pour la première fois, l’ensemble des syndicats du Ministère des Affaires Etrangères a déposé un préavis de grève et décidé de cesser le travail. Leur unanimité en souligne le caractère exceptionnel et révèle le grand malaise social de tous les personnels, puisque vraisemblablement seront touchés l’administration centrale, le réseau diplomatique et consulaire, mais aussi les établissements français à l’étranger.

La revendication porte sur, je cite : « une mission action extérieure de l’Etat avec des moyens financiers et humains à la hauteur des ambitions affichées ». Nous la partageons pleinement et j’avais eu l’occasion de la formuler lors d’une de vos auditions devant la Commission des Affaires Etrangères.
Compte tenu de la complexité, de l’instabilité et des dangers du monde d’aujourd’hui, votre budget devrait bénéficier d’une attention toute particulière et de moyens conséquents si la diplomatie française veut continuer à jouer un rôle positif et constructif. Les positions françaises ont, ces derniers mois, été appréciées et partagées par les Etats et les peuples qui veulent construire un monde basé sur la justice et le droit, un monde multipolaire où les conflits seraient réglés autrement que par la force.

Notre réseau diplomatique est l’héritier de notre histoire et des liens politiques, économiques et culturels que nous avons tissés. La densité de son maillage est une vraie richesse pour notre pays et non un simple coût ou surcoût, comme le prétendent certains.
Il nous permet d’établir et de multiplier nos relations, d’apprécier la complexité de certaines crises et d’aider à leur règlement. Il permet à bon nombre de nos compatriotes expatriés d’entretenir des contacts avec notre pays.
Qu’il faille procéder à des réajustements, des remises en perspective est tout à fait concevable, parfois nécessaire pour conserver la qualité de nos interventions. Mais cette qualité est menacée si l’on touche à l’essentiel. Or l’essentiel repose sur le professionnalisme et la stabilité des hommes et des femmes qui y travaillent. Ce sont eux qui, aujourd’hui, sont les plus touchés par les mesures annoncées.

Hormis l’aide publique au développement qui augmente sensiblement ce dont nous nous réjouissons pour l’avoir souvent demandé, nous déplorons que votre budget soit en recul de 1,26 % et que toutes les lignes budgétaires baissent ou stagnent. Deux exemples : les crédits de rémunération et de fonctionnement baissent de 2,37 %, représentent désormais 35,6 % du total des crédits du Ministère contre 37,4 % en 2003 et 41,2 % en 2002. Les effectifs diminuent de 116 postes et les rémunérations passent de 773 à 740 millions d’euros.

Ces choix imposés ne peuvent que susciter amertume et contestations. Entraînant une baisse des effectifs, des indemnités de résidence à l’étranger et une réduction de certains crédits de fonctionnement, ils s’ajoutent aux mesures de régulation (réserves, gel ou annulation) ayant marqué le budget précédent. Amputations que nous ne cessons de dénoncer régulièrement.

Ces mesures de rigueur anticipent d’ailleurs le plan d’économie et de réforme 2004 - 2007. En abaissant les indemnités de résidence à l’étranger pour augmenter certains personnels de l’administration centrale, elles renforcent les inégalités salariales. Les agents expatriés, notamment aux Etats-Unis, en dénoncent les incohérences, le non respect des engagements et le mépris des personnels.
L’accroissement du recours au recrutement local, basé sur des contrats de droit privé étranger, dont les aspects précaires et mal rétribués sont connus, confirme la volonté de remettre en cause le service public et de désengager progressivement l’Etat.

Enfin, il faut également signaler le blocage des carrières et les retards dans les règles d’avancement automatique. Ils sont vécus comme une non reconnaissance du travail accompli et risquent de favoriser les départs de personnels jeunes, actifs, compétents, mais sans perspective de carrière. Cela pourrait également freiner la venue de jeunes fonctionnaires permettant un renouvellement et un enrichissement du Ministère. Tout cela ne pourrait qu’entraîner une baisse de motivation et de dynamisme.

D’autre part, la deuxième question porte sur l’initiative de Genève. Aujourd’hui, après plusieurs mois de rencontres et de travail, plusieurs personnalités israéliennes et palestiniennes, ayant occupé des postes ministériels, présenteront ce qu’il est convenu d’appeler « le plan de Genève ». Celui-ci s’inspirant des négociations de Taba, apporte des propositions très détaillées pour aboutir directement à une solution politique mettant fin à 50 ans de conflit. Ce document peut faire renaître l’espoir, mais suscite beaucoup d’interrogations et déjà des oppositions.

Dès son annonce, il a été fortement combattu par Ariel Sharon. Il faut cependant souligner ses points positifs. Tout d’abord, c’est la première fois qu’une solution politique d’ensemble est présentée depuis l’arrivée d’Ariel Sharon au gouvernement. Il contredit tous ceux qui ne cessent de déclarer qu’il n’existe aucun interlocuteur chez les Palestiniens. Ensuite, il s’adresse à l’ensemble des citoyens israéliens et palestiniens pour permettre ainsi à chacun de se déterminer personnellement, en pleine connaissance et transparence. Enfin, il interpelle les politiques qui, depuis de longs mois, sont particulièrement silencieux.
Cette nouvelle initiative qui peut redonner courage et confiance à tous ceux qui pensent que la paix est possible et qu’il est temps de sortir de ce conflit historique doit être soutenue.

Vous avez déclaré que ce document était complémentaire de la feuille de route, confortons cette complémentarité par un engagement significatif de la France, de l’Europe et du Quartet.

J’aborderai maintenant quelques autres questions :
Après l’échec du Sommet de l’OMC à Cancun où les pays pauvres refusant les choix des pays riches ont proposé des alternatives, de nouvelles règles doivent être établies. La très forte mobilisation des altermondialistes au Forum Social Européen qui vient d’avoir lieu à Paris, St-Denis, Bobigny et Ivry, a conforté, s’il en était besoin, la nécessité de développer d’autres rapports humains, politiques, économiques et culturels avec les pays du sud. La France et l’Union Européenne doivent s’impliquer avec encore plus de vigueur dans cette direction.
L’Europe en construction doit prendre en compte les aspirations des citoyens européens qui s’opposent à une marchandisation et une concurrence effreinée et qui réclament plus de démocratie, plus de solidarité et de justice sociale. Ils demandent à être entendus et consultés d’où la nécessité d’un référendum dans notre pays. Nous aurons à reparler de ce sujet ultérieurement.

Le dernier point que j’évoquerai concerne la situation en Irak. L’an dernier, tous nos efforts consistaient à soutenir le travail des observateurs de l’ONU et éviter une guerre dont nous savions qu’elle aurait des conséquences incontrôlables et funestes. L’enlisement des forces de la coalition américano-britannique en Irak prouve combien la position française était justifiée.

Alors qu’aucune trace d’armes de destruction massive n’a été décelée, ce conflit s’enfonce dans une crise majeure et le bilan en pertes humaines s’alourdit chaque jour. Dans le même temps, le peuple irakien attend des mesures concrètes pour l’amélioration de sa vie quotidienne et aspire à retrouver une véritable souveraineté, sur le plan politique et économique, notamment pour l’exploitation de ses ressources pétrolifères. La position française, comme celle de l’ONU, que nous soutenons répondent à ces aspirations. Elles permettraient d’éviter une totale déstabilisation de l’Irak et de toute la région.

Le sens de l’engagement de la France est positif et doit être poursuivi. Pour ce faire, le Ministre doit pouvoir s’appuyer sur des moyens à la hauteur de nos ambitions et sur des personnels motivés parce que respectés. Ce budget ne le permet pas, au contraire, il traduit une sous estimation de la place que la France doit tenir. Il démontre, une fois de plus, que les priorités et les choix du gouvernement ne sont pas ceux que l’on ambitionne pour notre pays.

Nous espérons que la mobilisation des personnels mais aussi votre action permettront de l’améliorer. En l’état, nous sommes amenés à voter contre.

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