Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Ce budget traduit le fossé entre les ambitions affichées et les moyens mobilisés

Loi de finances pour 2012 : écologie -

Par / 25 novembre 2011

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour l’année 2012 étaient, dans le projet de loi de finances initial, en baisse de 2 % en autorisations d’engagement et en hausse de 2,4 % en crédits de paiement par rapport à ceux votés en 2011. Leur montant a été diminué, à l’Assemblée nationale, par l’adoption, à la dernière minute, de deux amendements du Gouvernement : le budget de la mission a été amputé de 84 millions d’euros, puis de 55,6 millions d’euros. Après s’être prévalu, dans un premier temps, d’avoir augmenté les crédits de cette mission, le Gouvernement a donc fait supporter par les députés la responsabilité de leur diminution, au nom d’une rationalité économique imposée dans l’urgence par les agences de notation…

Au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », le programme 203 « Infrastructures et services de transports » est le plus touché : l’adoption des deux amendements a réduit ses crédits de 98,5 millions d’euros.

Par exemple, le montant des crédits alloués aux voies navigables – initialement fixés à 840 millions d’euros – a été réduit de 5 millions d’euros. Ces sommes sont très inférieures aux besoins qui résultent du plan de relance de la voie d’eau et aux 2,5 milliards d’euros nécessaires, d’ici 2018, pour financer la régénération de ces voies. Et je ne parle pas des projets inscrits au schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT, dont le coût est évalué à 13 milliards d’euros : ils ressemblent de plus en plus à des déclarations d’intention…

Or les besoins en investissements sont réels, qu’il s’agisse de la régénération du réseau ferroviaire, de la relance du fret ferroviaire, de la maintenance des routes – qui risque de connaître le même sort que celle du réseau ferroviaire – ou de l’entretien des voix navigables.

Nous savons tous que les réseaux de transports sont décisifs non seulement pour stimuler le commerce, l’attractivité économique et la nécessaire réindustrialisation de nos territoires, mais aussi pour garantir à tous un accès aux besoins et services de base que sont le travail, la santé et l’éducation.

Vous promettiez, voilà deux ans, d’investir 13 milliards d’euros dans le plan de régénération du réseau ferré, 870 millions d’euros pour le transport dans le cadre du plan de relance face à la crise et 7 milliards d’euros dans le plan fret d’avenir.

Nous ne pouvons que constater la baisse continue de la part modale du fer, qui peine à atteindre les 10 %. Il faudrait au moins 20 % de croissance par an pour atteindre l’objectif de part modale fixé par le Grenelle.

Rien ne semble engagé pour enrayer la spirale infernale dans laquelle RFF est entraîné. Les concours de l’État baissent, les péages augmentent et la dette explose : le blocage du système ferroviaire semble, dans ces conditions, irréversible. Ainsi, le concours de l’État à la gestion des infrastructures ferroviaires est en baisse, à 2,54 milliards d’euros, contre 2,654 milliards d’euros en 2011.

La régénération de 3 940 kilomètres de voies ferrées engagée en 2006 ne se fera donc qu’à la faveur d’une augmentation des péages en 2012. Ces péages étant payés par les opérateurs à RFF, le transfert de charge porte encore principalement sur la SNCF. L’État continue donc de maltraiter les services publics que sont RFF et la SNCF.

La subvention de l’État à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui était déjà en baisse dans le précédent budget, poursuit sa chute – presque 290 millions d’euros de moins par rapport à 2011. Pourtant, l’AFITF devra, « d’ici à 2014, procéder à des financements s’élevant à plus de 13,91 milliards d’euros ». Le décalage énorme entre les moyens de l’AFITF et les besoins persiste et, une fois n’est pas coutume, les documents budgétaires soulignent la situation financière intenable de l’agence. En cinq ans d’existence, elle a perçu 10 milliards d’euros de recettes, alors même qu’elle s’est engagée à payer 17 milliards d’euros et qu’elle en a déjà payé 10 milliards. L’évolution du « reste à payer » de l’AFITF constitue donc un facteur de risque réel et grandissant. Pourquoi, dès lors, avoir plafonné à 610 millions d’euros les recettes issues de la taxe d’aménagement du territoire, payée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, qui constitue une ressource de l’agence ?

En ce qui concerne plus particulièrement le maillage du territoire, je partage les inquiétudes du rapporteur pour avis sur la pérennité des trains d’équilibre du territoire, qui, malgré tous leurs handicaps, jouent un rôle essentiel dans l’aménagement du territoire et dans le quotidien de nos concitoyens. Un compte d’affectation spéciale a été créé l’an dernier afin d’en assurer la pérennité. Il est abondé par la SNCF, d’une part, via une taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires, qui passe de 75 millions d’euros à 155 millions d’euros, et par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, d’autre part, à hauteur de 35 millions d’euros, via une fraction de la taxe d’aménagement du territoire.

Au sujet de cette dernière, il semble bien difficile d’affirmer que ces 35 millions d’euros ne sont pas pris sur ce qui était destiné à l’AFITF pour les infrastructures. C’est pourquoi nous souscrivons totalement aux conclusions du rapporteur pour avis quant à la nécessité d’augmenter significativement la taxe d’aménagement du territoire payée par les sociétés d’autoroutes. Comme il l’écrit, « il n’est pas cohérent […] que la route ne finance le rail qu’à la marge ».

Enfin, face à l’absence de traduction de l’engagement national en faveur du fret ferroviaire de 7 milliards d’euros, annoncé pourtant à grand bruit en septembre 2009,…

M. Roland Courteau. Ah ça oui !

Mme Mireille Schurch. … nous réitérons notre demande de reconnaissance du caractère d’intérêt général de l’activité « wagon isolé ». Pourquoi ne pas créer un mécanisme similaire à celui mis en place pour les trains d’équilibre du territoire ?

S’agissant des infrastructures routières, l’action Entretien et exploitation du réseau routier national est en hausse de 45 millions d’euros par rapport au budget pour 2011 ; toutefois, il faut garder à l’esprit que cette action avait connu une baisse significative de ses crédits de 27 % en 2011. L’augmentation actuelle est loin d’être à la hauteur des besoins. Ainsi, avec le niveau prévu des crédits, il faudrait quinze ans pour renouveler les chaussées. Or 2 % du réseau routier national supportent 25 % du trafic total et 50 % du trafic des poids lourds, avec l’effet d’érosion des chaussées qui en résulte. En outre, on sait que les chaussées les plus sollicitées doivent être renouvelées en moyenne tous les huit ans. On est loin de pouvoir faire face à cet impératif. Si l’on n’y prend garde, l’effort de rattrapage sera aussi douloureux que celui observé dans le domaine ferroviaire. Ce qui est vrai pour l’État l’est aussi pour certaines collectivités territoriales.

Enfin, l’austérité budgétaire au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » se traduit par la suppression de 1 309 équivalents temps plein. La poursuite aveugle de la RGPP entraînera, si vous n’y prenez garde, la disparition quasi totale d’une ingénierie publique performante, avec un impact négatif sur les territoires.

Ce budget traduit le fossé entre les ambitions affichées dans le SNIT et les moyens budgétaires mobilisés. Pourtant, l’inscription au SNIT de certains projets, comme celui de la LGV Paris–Orléans–Clermont-Ferrand, a suscité de grands espoirs et de grandes attentes. La population et les élus se mobilisent, alors que, dans le même temps, on n’observe aucune traduction financière ou budgétaire, pas même la moindre indication.

L’absence de référence, dans ce projet de budget, aux concessions d’infrastructures et aux contrats de partenariat public-privé pour la réalisation des grands projets du SNIT semble indiquer que le Gouvernement en souhaite la généralisation. À la longue, si l’on n’y prend garde, la perte de la maîtrise publique risque être entérinée au profit des sociétés privées.

Par ailleurs, aucune réflexion n’est engagée sur la remise en cause de la privatisation des sociétés d’autoroutes, qui entraîne chaque année un manque à gagner de près de deux milliards d’euros. C’est pourquoi les sénateurs de mon groupe et moi-même avons déposé une proposition de loi en ce sens.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Mireille Schurch. De plus, comment comprendre le énième report de l’écotaxe poids lourds, pourtant présentée comme une mesure phare du Grenelle de l’environnement ? Il représente la perte de plus de 1,2 milliard d’euros de ressources pérennes pour le financement des grands projets d’infrastructures et la régénération ferroviaire.

Enfin, comment accepter la généralisation des poids jours de 44 tonnes sur les routes, alors que nous dressons tous un constat alarmant sur l’état du réseau ?

Ce projet de budget n’est pas en mesure de répondre à la réalité des besoins. C’est pourquoi les sénateurs du groupe CRC ne voteront pas ces crédits, qui sont en décalage complet avec les annonces et les promesses du Gouvernement.

Les dernieres interventions

Finances Les injustices de la solidarité fiscale pour les femmes

PPL Justice patrimoniale au sein de la famille - Par / 19 mars 2024

Finances Médecine scolaire : l’État doit assumer son rôle

Proposition de loi visant à PPL visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires - Par / 18 mars 2024

Finances Et pour 13 000 milliards de dollars

Rapport de la Cour des comptes 2024 - Par / 13 mars 2024

Finances Non à l’économie de guerre

Financement des entreprises de l’industrie de défense française - Par / 7 mars 2024

Finances Les Départements dans le collimateur

Débat sur les finances des Départements - Par / 7 mars 2024

Finances Que faire d’EDF ?

Proposition de loi proposition de loi visant à protéger visant à protéger EDF d’un démembrement - Par / 24 janvier 2024

Finances Un budget, deux visions de la société

Explication de vote sur le projet de loi de finances pour 2024 - Par / 12 décembre 2023

Finances La chute de la démographie a bon dos

Débat sur les crédits de l’enseignement supérieur - Par / 4 décembre 2023

Finances Le logement est en urgence humaine, sociale et économique

Vote des crédits pour la cohésion des territoires - Par / 1er décembre 2023

Finances Les lois de la République contre celles des actionnaires

Débat sur la partie recettes du projet de loi de finances pour 2024 - Par / 23 novembre 2023

Finances Le budget de l’État à l’aune de la vie de Chantal

Question préalable au projet de loi de finances 2024 - Par / 23 novembre 2023

Finances 30 millions d’euros pour l’aide alimentaire

Vote sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 - Par / 20 novembre 2023

Administration