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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Derrière le gel des dotations, se cachent en fait des baisses drastiques

Loi de finances pour 2012 : relations avec les collectivités territoriales -

Par / 30 novembre 2011

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission que nous examinons aujourd’hui ne recouvre qu’une infime partie des transferts aux collectivités territoriales, mais son examen va nous permettre de débattre de l’ensemble de cette problématique. Les articles rattachés nous offriront l’occasion d’étudier la mise en œuvre d’une des principales mesures contenues dans ce projet de budget, c’est-à-dire la création d’un nouveau fonds de péréquation.

Avec le projet de budget de cette mission, nous sommes d’abord confrontés aux conséquences de la décision prise l’an passé de geler les dotations aux collectivités locales, un gel qui frappera une nouvelle fois en 2012 les ressources de nos communes, départements et régions. En y regardant de plus près, cette mission subit non pas un simple gel des dépenses, mais bien une baisse très sensible des interventions touchant le programme des concours spécifiques. Cette restriction spectaculaire de plus de 80 % concerne les aides aux collectivités locales fragilisées par des circonstances exceptionnelles. En cette période de calamités naturelles, d’inondations et de sécheresse, les élus locaux et les populations concernées apprécieront le mépris qui leur est réservé.

Derrière le discours global sur le gel des dotations, se cachent donc, en fait, des baisses drastiques. La mise en œuvre du gel des dotations depuis l’an dernier ne doit pas être passée sous silence, même si nous devons aussi dénoncer l’une des mesures phare de ce projet de budget pour 2012 : la diminution de 200 millions d’euros des dotations, qui va aggraver un peu plus encore la situation.

Les mesures de réduction des ressources des collectivités locales s’appliqueront en 2012 et sans doute l’année suivante si rien ne change. Elles fragiliseront une nouvelle fois la capacité d’action des collectivités territoriales en faveur de leurs populations qui sont frappées par la crise et tariront leurs capacités d’investissements. Elles s’ajoutent aux mesures prises depuis des décennies qui n’ont fait que contraindre toujours plus les ressources financières de nos collectivités.

En effet, ce n’est pas d’aujourd’hui que des départements et des communes sont en difficulté, et les diverses mesures prises depuis dix ans ont plongé de nouvelles collectivités dans la tourmente. Des transferts de compétences insuffisamment compensés, des obligations nouvelles qui leur ont été imposées, une réduction de leur capacité fiscale avec la disparition de la taxe professionnelle, une hausse des taux, des emprunts toxiques et maintenant des difficultés à obtenir un prêt : la tâche des élus n’a jamais été aussi difficile. L’immense majorité de nos collectivités locales rencontre des difficultés croissantes à mettre en œuvre leurs missions dans un contexte de situation économique et sociale dégradée.

Le chômage et la précarité, doublés du ralentissement économique et de la désindustrialisation de nos territoires, ont particulièrement affecté les capacités d’interventions de nos institutions locales, en réduisant leurs ressources, alors qu’augmentait partout la demande sociale. Dans le même temps, les diverses mesures de restriction des politiques publiques prises par le Gouvernement se sont partout soldées par des réductions ou des disparitions de services publics.

Nos territoires ont dû faire face, ces dernières années, à de véritables saignées, avec les nombreuses fermetures de tribunaux d’instance, de casernes, d’hôpitaux et de cliniques de proximité, en raison de la réorganisation des schémas d’organisation sanitaire, auxquelles il faut ajouter les fermetures d’écoles, de classes, de bureaux de postes et de cabinets médicaux ! Au total, un grand nombre de communes ont subi de véritables plans sociaux de perte d’emploi local, de réduction des services à la population et d’affaiblissement de leur vitalité économique.

Monsieur le ministre, passer sous silence ces mesures reviendrait à oublier la forte responsabilité du Gouvernement dans les dégradations subies par nos collectivités. C’est aussi cela le bilan du Gouvernement ! Dans ce paysage dégradé, les élus locaux font ce qu’ils peuvent pour tenter de répondre malgré tout aux attentes de leur population et aux besoins de leur territoire. Et c’est ce moment que le Gouvernement choisit pour dénigrer leur gestion !

Ainsi, il ne cesse de critiquer l’action des collectivités locales et de leurs élus qui dépenseraient sans compter. Maintenant, il s’agirait, comme le fait remarquer notre collègue Bernard Saugey dans son rapport, de responsabiliser les élus locaux en leur attribuant des ressources budgétaires toujours plus contraintes, afin de les obliger à réduire la dépense publique. Aujourd’hui, ces élus sont désignés comme des coresponsables de la crise que traversent notre pays, l’Europe et même le monde. Dire cela, c’est laisser entendre d’abord qu’ils seraient pour partie des « irresponsables », ce qui n’est pas acceptable, mais aussi que, d’une certaine façon, leurs dépenses locales seraient contraires à l’intérêt général, alors que chacun sait que c’est tout le contraire.

Réduire les interventions des collectivités locales, c’est prendre le risque d’une récession économique, puisque chacun sait ici que ces dernières jouent un rôle primordial d’amortisseurs sociaux et d’investisseurs de premier plan, avec 73 % des investissements publics. Ce sont alors leurs deux principaux secteurs d’interventions, l’action sociale et l’aménagement, qui seront touchés. Cela se soldera donc, en termes macro-économiques, par une baisse de la demande, alors que c’est justement cette demande qui, de l’avis de tous les économistes, est à la base de notre croissance.

Cette politique de restriction des financements publics sera un frein à la croissance, et donc à la reprise tant attendue. Vous comprendrez que, dans ces conditions, nous ne pouvons qu’exprimer notre désaccord total avec cette perspective et avec l’ensemble des mesures de restriction des ressources des collectivités locales contenues dans ce budget.

Nous sommes d’autant plus confortés dans notre prise de position que les débats sur la première partie du projet de budget ont permis au Sénat, à sa nouvelle majorité de gauche, de faire la démonstration que d’autres chemins étaient envisageables, en dégageant des ressources nouvelles qui permettraient de réduire les déficits et de relancer notre économie dans le cadre d’une fiscalité plus juste. Dans le domaine qui nous concerne aujourd’hui, il serait possible de « dégeler » les dotations de fonctionnement et de ne pas les amputer de 200 millions d’euros supplémentaires.

Pour terminer, je voudrais dire les préoccupations qui nous animent à propos du FPIC, le Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales.

Ce fonds soulève d’abord une question de principe : est-il normal que le Gouvernement impose les conditions de cette péréquation à moyens constants entre les communes et les intercommunalités, quand il se refuse à mettre en place la péréquation verticale de l’État vers les collectivités que nous réclamons ? Les départements, par exemple, se sont vu confier, sans compensation, la charge d’allocations nationales de solidarité, pour lesquelles il manque, semble-t-il, 6 milliards d’euros.

Si nous sommes sensibles au partage, il faut tout de même noter que, au moment où la péréquation va se développer, l’État fait régresser la solidarité nationale en réduisant la contribution des entreprises. Après avoir vu leur fiscalité locale réduite de 4 milliards d’euros avec la réforme de la taxe professionnelle, le Gouvernement exonère une nouvelle fois les entreprises de la nécessaire solidarité nationale en faveur de nos territoires.

Pour notre part, nous proposons au contraire que les entreprises, sur la base de leurs actifs financiers, soient mises à contribution. Avec une taxation de 0,5 %, le fonds de péréquation disposerait de 30 milliards d’euros au profit de nos territoires et des populations qui y vivent. Voilà une ressource mobilisable !

Par ailleurs, les prélèvements liés à la nouvelle péréquation auront une base si large qu’ils frapperont de façon indirecte des communes percevant des dotations de solidarité, qu’elles soient situées en milieu urbain ou en milieu rural. Ainsi, des communes parmi les plus défavorisées de France seront contributrices par l’intermédiaire de leur intercommunalité.

Enfin, cette nouvelle contribution éclaire d’un jour particulier la réforme de la carte intercommunale qui est actuellement en cours d’achèvement et de rationalisation. En effet, les commissions départementales, les CDCI, ne disposent déjà pas des études financières sur les conséquences des périmètres proposés. Comment pourront-elles émettre un avis sans mesurer les conséquences communales et intercommunales de cette nouvelle péréquation ? Après la réforme de la taxe professionnelle, après les incidences financières de la future carte intercommunale, cette nouvelle péréquation est un motif d’inquiétude supplémentaire pour les communes.

Compte tenu des remarques que je viens de faire sur la nouvelle péréquation, vous comprendrez que nous soyons satisfaits de la sage décision prise hier soir par la commission des finances de repousser, par le biais d’un amendement, la mise en place de ce fonds à 2013. Cette mesure nous permettra de disposer du temps et des études nécessaires pour élaborer un projet plus équitable.

En attendant, pour toutes les raisons que j’ai soulevées, nous condamnons le désengagement renforcé de l’État au détriment des collectivités locales : notre groupe votera donc contre le projet de budget de cette mission.

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