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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Le budget que vous nous présentez n’est pas en mesure de rendre à notre diplomatie les moyens d’exercer convenablement ses missions

Loi de finances pour 2012 : action extérieure de l’État -

Par / 29 novembre 2011

Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, ce budget, qui est le dernier de la législature, est, une fois encore, sur la voie du déclin. Bien que la tendance à la baisse des crédits se soit ralentie, il suit la pente entamée depuis vingt ans qui diminue peu à peu les moyens du ministère des affaires étrangères et européennes.

Cela est d’autant plus regrettable que ce budget est censé donner à notre pays les moyens nécessaires à la défense de ses valeurs, de sa langue, de sa culture, mais aussi de ses intérêts à travers le monde.

Le résultat est que l’action extérieure de la France est handicapée par un affaiblissement continu de notre réseau diplomatique et culturel. Pourtant, avec un budget réduit, l’efficience du travail réalisé dans nos représentations permanentes, nos ambassades, nos consulats, nos écoles, nos centres culturels, et à travers les programmes d’aide et de coopération, est remarquable.

Je veux à cet égard saluer la compétence et la grande qualité des fonctionnaires et des personnels de tous grades qui mettent œuvre au quotidien, et parfois dans des conditions difficiles, les grandes orientations de la politique étrangère de notre pays.

Cela étant dit, je partage bon nombre des critiques qui ont été émises par les rapporteurs et je veux formuler ici quelques remarques sur les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Avec un peu moins de 3 milliards d’euros de crédits de paiement et 2,914 milliards d’autorisations d’engagement, ce budget, à structure constante, affiche, par rapport à la loi de finances initiale pour 2011, une diminution de 2 % en autorisations d’engagement et de 1,4 % en crédits de paiement.

Force est de constater que la révision générale des politiques publiques, qui s’applique à tous les ministères, est beaucoup plus sévère pour les personnels du ministère des affaires étrangères.

Depuis 2006, environ 1 400 emplois ont été supprimés au sein du ministère. D’ici à 2013, 450 le seront encore ; sur quatre personnes partant à la retraite, trois emplois disparaîtront.

Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde », qui finance une grande partie de l’administration centrale et le réseau des ambassades, est faible en dotations – 522 millions d’euros pour 162 chancelleries – et est particulièrement touché : les crédits diminuent de 0,8 % en autorisations de paiement et de 1,3 % en crédits de paiement par rapport à 2011. La dégradation se poursuit donc.

Vous admettrez, monsieur le ministre d’État, que les perspectives ne sont guère réjouissantes pour ces hommes et ces femmes qui se consacrent tant à notre diplomatie.

Je voudrais particulièrement relever la diminution de 14 % de notre contribution aux opérations de maintien de la paix. Je comprends qu’il s’agit de prévoir la fin de la mission des Nations unies à laquelle nous participons au Tchad et en République centrafricaine.

Mais parce que les crédits consacrés à ces opérations ont été souvent sous-estimés et que les conflits dans le monde ne sont pas sur le point de diminuer, je redoute que nous n’ayons plus à l’avenir les moyens de répondre aux demandes de maintien de la paix de l’ONU.

Je crains qu’elle ne soit le prétexte à privilégier désormais des opérations sous le seul drapeau de l’OTAN.

Enfin, le programme « Diplomatie culturelle et d’influence », dont l’intitulé traduit assez l’importance, connaît lui aussi des difficultés et des disparités dans la répartition des crédits. C’est ainsi, par exemple, que malgré ses besoins et le rôle déterminant qu’elle joue pour le rayonnement de notre langue, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger reçoit une subvention qui stagne.

Les seuls crédits qui progressent sont ceux du programme « Français à l’étranger et affaires consulaires », l’essentiel de cette progression s’expliquant d’ailleurs par l’approche des élections législatives.

Si un budget est en grande partie la traduction d’une politique, je considère alors, monsieur le ministre d’État, que les crédits qui vous sont alloués ne vous permettront pas d’assurer à notre pays sa capacité de rayonnement et d’influence, c’est-à-dire de tenir la place qui doit être la sienne.

Vous aviez vous-même, en d’autres temps, tiré la sonnette d’alarme et reconnu que si nous continuions dans cette direction, l’outil de notre influence et de notre diplomatie serait irrémédiablement cassé.

Aujourd’hui, vous faites preuve de davantage de pragmatisme et vous feignez de croire qu’il est malgré tout possible de faire mieux avec moins.

Pourtant, dans le contexte international actuel, avec la globalisation, la guerre financière et économique sans merci que se livrent les États, la singularité de notre pays, son influence politique et éthique pourraient être un contrepoids indispensable à la domination silencieuse des nouveaux maîtres du monde que sont devenus les marchés financiers.

M. Daniel Reiner. Il a raison !

M. Michel Billout. Puisque nous parlons là de la place et de l’influence de la France dans le monde, je voudrais profiter de l’occasion pour répondre au mauvais procès fait à une partie de la gauche par le parti présidentiel et des membres du Gouvernement.

Prétextant l’affirmation d’une nécessaire réforme démocratique du Conseil de sécurité de l’ONU, que nous pourrions souhaiter tous ici, la gauche a été accusée de vouloir abaisser la France en bradant l’un des principes fondamentaux de notre indépendance. Il y a eu, certes, des déclarations ambiguës et maladroites sur le statut de la France en tant que membre permanent du Conseil de sécurité.

Mais pour notre part, en tant que parlementaires communistes, il est tout à fait clair qu’il n’est pas question de remettre en cause unilatéralement notre siège de membre permanent du Conseil de sécurité avec les prérogatives qui s’y attachent actuellement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)

De la même façon, nous nous opposons fermement à l’idée de proposer que ce siège soit attribué à l’Union européenne, si tant est que l’Europe soit d’ailleurs aujourd’hui capable de parler d’une seule voix en matière de politique extérieure.

M. Christian Cambon. Excellent !

M. Michel Billout. De mon point de vue, un tel abandon accentuerait précisément l’affaiblissement de notre pays et entamerait encore plus son indépendance déjà gravement mise à mal par l’alignement et le suivisme atlantiste qui, trop souvent, inspire les grandes orientations du Président de la République dans ce domaine.

Cette posture est d’ailleurs encore plus affirmée depuis que nous avons pleinement réintégré le commandement militaire de l’OTAN au détriment de notre autonomie stratégique.

Cependant, je reconnais volontiers, monsieur le ministre d’État, que depuis votre retour aux affaires, vous avez donné un nouveau souffle à notre politique étrangère. (Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.)

M. Christian Cambon. Excellent !

M. Michel Billout. Mais, en même temps, notre action est parfois pour le moins contrastée.

Je salue, par exemple, la position de la France en faveur de l’entrée de la Palestine à l’UNESCO,…

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Michel Billout. … et j’apprécie vos efforts au Proche-Orient pour une paix juste et durable entre les Israéliens et les Palestiniens. Toutefois, ces efforts devraient se concrétiser maintenant par un processus de reconnaissance pleine et entière d’un État palestinien à l’ONU.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Michel Billout. Quant aux processus démocratiques en cours dans les pays du Maghreb et du Machrek à la suite des printemps arabes, ils suscitent à la fois des espoirs et des inquiétudes.

Je souhaite sincèrement que notre pays trouve la bonne manière de coopérer étroitement avec les nouvelles autorités et institutions qui se mettent et se mettront en place, et ce afin que ne soient pas dévoyées les aspirations de ces peuples qui ont lutté pour la démocratie, la liberté, la dignité, la laïcité et la justice sociale.

Dans cet esprit, il sera également nécessaire que nous jouions un rôle auprès de nos partenaires européens pour que l’Union européenne envisage les relations avec ces pays sur des bases économiques plus équitables.

Dans d’autres secteurs géographiques, l’action diplomatique de la France reste trop alignée sur les positions des États-Unis.

Ce suivisme peu digne de notre pays nous conduit, par exemple, à maintenir un dispositif militaire en Afghanistan en calquant notre désengagement sur le calendrier des Américains ou bien encore, à propos du dossier nucléaire iranien, à nous laisser entraîner par les États-Unis dans une politique de sanctions dont l’efficacité reste à prouver.

Nous savons pourtant pertinemment que le Président Obama est en campagne électorale et que, compte tenu d’une situation économique difficile, sa politique extérieure est guidée par de forts relents électoralistes, comme son soutien sans faille à Israël, quitte à contribuer au blocage de la situation ou à accepter de graves régressions.

Mme Nathalie Goulet. Eh oui !

M. Michel Billout. Enfin, nous perdons beaucoup de notre singularité, de notre identité, voire de notre souveraineté, dans les sommets européens ou ceux du G20.

Quel est encore le poids de notre pays dans ces sommets européens impuissants à se défendre contre les marchés financiers et où la France cède facilement aux conceptions allemandes ?

Quelle défense des intérêts de notre pays, quels bénéfices politiques et diplomatiques avons-nous réellement tirés de la présidence française du G20 ?

De fait, la place et l’influence de la France dans le monde ont beaucoup décliné ces dernières années.

Monsieur le ministre d’État, pour revenir plus précisément à la question qui nous occupe cet après-midi,…

M. Raymond Couderc. Enfin !

M. Michel Billout. … le budget que vous nous présentez n’étant pas en mesure de rendre à notre diplomatie les moyens d’exercer convenablement ses missions, le groupe communiste républicain et citoyen n’en votera pas les crédits.

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