Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Loi de finances 2004 : question préalable

Par / 20 novembre 2003

par Nicole Borvo

Le budget de l’État est la traduction de la politique de régression sociale du gouvernement, dont M. le Premier ministre fait les frais. Cette politique est impopulaire, parce qu’elle est dure pour les plus pauvres et clémente pour les plus riches.

 Mais elle est aussi inefficace puisque les objectifs affichés, sécurité et emploi, sont en échec.

 L’insécurité sociale est toujours aussi grande, le chômage inquiétant, la croissance au point mort. Pourtant, votre gouvernement continue, sous la responsabilité du Président de la République, son entreprise de libéralisation qui, s’appuyant sur le développement de la mondialisation capitaliste, s’attaque aux principes mêmes de solidarité et d’égalité.

 Prenant pour modèles les intégristes libéraux du Royaume-Uni, de l’Italie ou de l’Espagne. Vous menez une bataille idéologique de grande ampleur dont M. Balladur dit qu’elle n’est pas finie. Il a au moins le mérite de la franchise. L’offensive libérale est d’un rare dogmatisme. Pour M. le ministre de l’Économie, la France est une grande entreprise qui doit être « managée ».

 Il affirmait le 14 octobre dernier devant les députés que « la nécessité de maîtriser les dépenses et de réformer est aujourd’hui mieux comprise que l’année dernière ». Certitude idéologique qui confine à l’aveuglement !

 Rien de nouveau, toujours les mêmes poncifs libéraux : les chômeurs ne cherchent pas vraiment d’emploi, il faut les mettre au travail. Mais le R.M.A. ne fournit pas un emploi, seulement un avantage aux patrons.

 Selon votre ministre, les riches font des efforts pour être riches, il faut les récompenser. Il pense que « ceux qui paient beaucoup d’impôts, gagnent beaucoup d’argent. En nous, s’ils gagnent beaucoup d’argent, c’est qu’ils le méritent. Cela veut dire qu’ils apportent à la société une valeur supérieure à ceux qui gagnent moins d’argent. »

 Autrement dit, un individu peut valoir deux cent fois plus qu’un autre ?

 On peut prendre la défense des spéculateurs, je le conçois, mais ces propos sont déplacés dans la bouche d’un ministre !

 Ne doit-il pas porter haut les valeurs républicaines et veiller aux intérêts de l’ensemble de la population ?

 Mais pour M. Mer, l’argent roi et la course au profit ont plus d’attrait que la solidarité, la justice sociale et l’égalité.

 L’accumulation pour l’accumulation - de stock-options, par exemple - devrait être dénoncée. M. le ministre pourrait nous faire profiter de son expérience des milieux d’affaires pour nous aider à réduire l’immense avantage dont disposent quelques individus, tels M. Messier ou M. Bilger, ancien P.-D.G d’Alstom.

 Votre projet de budget, empreint de rhétorique libérale, impose contre vents et marées - notamment bruxelloises - une baisse d’impôts qui profite aux plus aisés, alimente la spéculation financière et immobilière, mais certainement pas la consommation ! Votre politique injuste fait fi des principes républicains.

 En 2001, la T.V.A., impôt qui frappe pareillement smicards et milliardaires, a rapporté 105 milliards d’euros, la T.I.P.P. 22,8 milliards, l’impôt sur le revenu, progressif, 49,7 milliards. Il est temps de rééquilibrer les poids respectifs des impôts indirects et de l’impôt direct, même si ce dernier n’est pas suffisamment progressif - pas plus que les impôts locaux, qui vont augmenter avec les volumineux transferts de compétences.

 Votre choix favorise les riches et maintient la pression sur les pauvres, les salariés, l’immense majorité de la population. Plus de la moitié des foyers fiscaux soit 17,4 millions d’entre eux, ne sont pas imposables à l’impôt sur le revenu : ils sont dès lors écartés du bénéfice de la baisse de l’impôt sur le revenu, qui représente 1,65 milliard. (M. Oudin lève les bras au ciel.) Or 500 millions d’euros, trois fois moins, seront redistribués par la prime pour l’emploi. Ainsi, 8 millions de foyers défavorisés recevront 80 euros, mais 1,57 million de contribuables à haut revenu en percevront 520, ce que vous masquez habilement grâce à d’intenses campagnes de communication.

 Nous sommes en profond désaccord avec cette mesure. Le gouvernement n’a même pas proposé une réduction dégressive de l’impôt : c’est du libéralisme brut de décoffrage !

 À quoi s’ajoute une forte poussée d’exonération des charges sociales, 18 milliards d’euros. Au total, plus de 4 milliards de réduction de prélèvements obligatoires sont prévus, dont deux milliards au profit des entreprises.

 La réduction de l’impôt au titre des frais de dépendance masque mal la longue liste d’avantages destinés aux plus favorisés, qu’il s’agisse des plus-values immobilières, des donations ou de l’épargne retraite. L’ambition du gouvernement est de favoriser la capitalisation. Nous nous orientons bien vers un système de retraite à deux vitesses.

 Ces mesures pousseront à la hausse un taux d’épargne déjà élevé à 17 %. Plutôt que de flatter cette tendance, résultat de la crainte du chômage ou d’une vieillesse démunie, il faudrait réorienter ces flux financiers vers la consommation et la production, par une juste revalorisation du Codevi ou du livret A, mais aussi par des emprunts d’État destinés à financer des grands travaux ou une politique offensive de réindustrialisation.

 Cela n’est pas du marxisme puisqu’au sein du capitalisme, diverses voies existent. L’Europe qui se construit aujourd’hui, les principes de Maastricht, sont le fruit d’une conception purement financière de l’économie de marché. D’autres choix sont possibles. De grands travaux financés par voie d’emprunt, l’idée n’a-t-elle pas été envisagée il y a quelque temps, avant les années de plomb, ou d’or, de la Banque centrale européenne ? Pourquoi occulter ce débat ? Sinon par idéologie ?

 La politique du gouvernement est marquée également par la restriction du pouvoir d’achat des salariés ou des chômeurs, par l’appel à la solidarité à sens unique.

 Réduction du forfait hospitalier, suppression d’un jour férié, hausse du prix du gazole, culpabilisation des RMistes : l’idéologie anti-pauvres domine. Il est hautement significatif que l’on demande aux salariés, après la canicule, de payer la solidarité vieillesse ou que l’on supprime en partie l’allocation spécifique de solidarité.

 Quand le ministre de l’Économie déclare - avec un cynisme qui me glace - que « Le licenciement fait partie de la vie industrielle », il montre que pour lui, les salariés ne sont plus des femmes et des hommes en chair et en os, mais des variables d’ajustement.

 Savez-vous que 130 000 personnes ne bénéficieront plus de cette aide indispensable à leur survie ? La suppression de l’A.S.S. est immorale. Elle démontre l’inhumanité profonde de ce gouvernement.

 Nous ne sommes pas les seuls à critiquer votre budget, voté à l’Assemblée nationale par les seuls députés de l’U.M.P.

 Mais, si M. Bayrou, de manière très médiatisée, s’est fait le héraut d’une certaine justice sociale, la lecture de l’explication de vote du groupe U.D.F. est saisissante. M. de Courson dénonce l’insuffisante réduction des dépenses publiques, stigmatise l’absence de réforme de l’assurance maladie et le maintien des 35 heures. Il regrette la réforme de l’avoir fiscal, trop défavorable aux actionnaires.

 L’U.D.F. qui apporte son soutien et sa participation au gouvernement, a voté la réduction de l’I.S.F. dans le texte relatif à l’initiative économique, et dans ce projet de loi de finances même, la baisse de l’impôt sur le revenu.

 Votre budget est profondément libéral et tourne le dos à une juste redistribution des richesses. La baisse des impôts et des charges patronales contribue à accroître l’épargne financière, tandis que s’accentue la pénurie des moyens pour les services et entreprises publics.

 Car c’est la seconde grande caractéristique de ce projet de budget : la réduction des dépenses publiques, non parce que la quasi-récession le justifierait, mais par principe. L’État doit se replier sur ses fonctions régaliennes et céder la place au marché. Les préceptes des écoles libérales anglaises du xixe siècle sont respectés jusqu’à la caricature. Seuls trois budgets sont en progrès : la défense, la justice et l’intérieur.

 On est loin du discours présidentiel de Valenciennes, des effets de manches de M. Borloo - son budget, celui du logement, est en forte régression.

 Face au mouvement social, les attaques contre le service public de l’éducation nationale ont été adoucies. Mais 5 000 postes sont malgré tout supprimés, sans compter le départ de 23 000 M.I.- S.E.

 La colère gronde dans les universités, parmi les salariés dont les entreprises ferment chaque jour. Bientôt, vous devrez rendre des comptes. Votre politique s’apparente, depuis le mois de juin 2002, à un coup de force libéral permanent. Lors des prochaines élections, vous serez sanctionnés.

 Votre jeu est dangereux pour la démocratie, car le 21 avril 2002 et surtout le 5 mai, ce n’est pas pour une politique profondément réactionnaire que les Français se sont prononcés. Vous tentez de revenir aux rapports sociaux et économiques du XIXe siècle, vous semez la désespérance et la désillusion, vous favorisez la rancœur et la colère, qui peuvent déboucher sur l’abstention et le succès du populisme d’extrême-droite.

 Une autre politique est possible, fondée sur la relance de la consommation populaire et de la production.

 Nous rejetons vos choix libéraux et désespérants.

Les dernieres interventions

Finances Les injustices de la solidarité fiscale pour les femmes

PPL Justice patrimoniale au sein de la famille - Par / 19 mars 2024

Finances Médecine scolaire : l’État doit assumer son rôle

Proposition de loi visant à PPL visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires - Par / 18 mars 2024

Finances Et pour 13 000 milliards de dollars

Rapport de la Cour des comptes 2024 - Par / 13 mars 2024

Finances Non à l’économie de guerre

Financement des entreprises de l’industrie de défense française - Par / 7 mars 2024

Finances Les Départements dans le collimateur

Débat sur les finances des Départements - Par / 7 mars 2024

Finances Que faire d’EDF ?

Proposition de loi proposition de loi visant à protéger visant à protéger EDF d’un démembrement - Par / 24 janvier 2024

Finances Un budget, deux visions de la société

Explication de vote sur le projet de loi de finances pour 2024 - Par / 12 décembre 2023

Finances La chute de la démographie a bon dos

Débat sur les crédits de l’enseignement supérieur - Par / 4 décembre 2023

Finances Le logement est en urgence humaine, sociale et économique

Vote des crédits pour la cohésion des territoires - Par / 1er décembre 2023

Finances Les lois de la République contre celles des actionnaires

Débat sur la partie recettes du projet de loi de finances pour 2024 - Par / 23 novembre 2023

Finances Le budget de l’État à l’aune de la vie de Chantal

Question préalable au projet de loi de finances 2024 - Par / 23 novembre 2023

Finances 30 millions d’euros pour l’aide alimentaire

Vote sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 - Par / 20 novembre 2023

Administration