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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de finances pour 2008 : agriculture, pêche, forêt et affaires rurales

Par / 3 décembre 2007

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur deux volets importants de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » : la pêche et la forêt. Mon collègue Gérard Le Cam traitera, lui, de l’agriculture.

En ce qui concerne la situation de la pêche, l’an dernier à la même époque, nous attirions l’attention du Gouvernement sur la crise profonde que traverse ce secteur depuis maintenant de nombreuses années. La pêche a d’ailleurs longtemps été l’enfant pauvre du budget agricole. Le Gouvernement a semblé prendre conscience de l’importance du soutien qui doit être apporté à cette filière.

Cette année, l’effort en direction de la pêche est maintenu à crédits constants. Pourtant, comme en témoignent les événements récents, un certain nombre de problèmes persistent.

L’un d’eux - et non des moindres ! - concerne les ressources halieutiques. Les pêcheurs de nos côtes sont en effet de plus en plus malmenés par les politiques conduites aux niveaux européen et international. L’existence même de certains secteurs est d’ailleurs remise en cause.

Il est prévu, dans la loi de finances pour 2008, une forte augmentation des crédits consacrés à la gestion de la ressource et au contrôle des pêches. Nous aimerions avoir quelques précisions sur les priorités de l’action pour 2008 du Conseil de prospective et de stratégie des pêches maritimes, qui doit être créé et réfléchir aux enjeux de gestion, de revalorisation des produits et de réduction de la facture énergétique.

Les crédits alloués aux contrôles des pêches maritimes passent de 2,7 millions à 5 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2008. Le Gouvernement souhaite ainsi répondre aux nouvelles exigences de Bruxelles. Bien sûr, tous les professionnels reconnaissent l’utilité des contrôles ; il s’agit pour eux de préserver leur outil de travail.

Toutefois, d’une part, on comprend mal l’utilité d’une telle augmentation. Selon nous, c’était loin d’être la priorité au regard des moyens dont dispose déjà la France au travers d’un certain nombre d’administrations : affaires maritimes, douanes, gendarmerie, etc. D’autre part, la politique dictée par l’Union européenne, au service de laquelle seront mis ces moyens, manque de transparence, d’équité et de concertation.

Les exemples de réductions de quotas ou d’interdictions de pêche pure et simple se sont multipliés ces derniers mois. Or, nous le savons, une réduction brutale des quotas peut condamner définitivement une flottille ou un port, tout en ayant des effets pervers compte tenu des reports sur d’autres espèces.

De plus, les techniques modernes de pêche permettent de repérer et de capturer toutes sortes d’espèces avec une plus grande efficacité que par le passé. Or de grandes entreprises ont investi dans ce métier et envoient sur zone leurs navires-usines qui pêchent, trient, nettoient, conditionnent et congèlent le poisson. Cette pêche industrielle, qui travaille beaucoup pour les chaînes de la grande distribution, ne ressent pas les contraintes de la même façon que la pêche artisanale.

En France et en Europe, les bateaux de pêche artisanale subissent la concurrence des navires-usines de manière aggravée. Pour eux les difficultés sont accrues. En effet, d’un côté, compte tenu du coût de la modernisation de leurs bateaux et de l’augmentation du prix du gazole, ils doivent pêcher de plus et plus loin pour tenter de rentrer dans leurs frais et payer les équipages à la part. De l’autre, la diminution de la ressource et la limitation du nombre de jours passés en mer se traduisent, d’année en année, par une diminution des prises, ce qui a des conséquences économiques et sociales douloureuses pour les ports de pêche français.

C’est pourquoi il est essentiel que l’État fasse porter son effort sur la restructuration et la modernisation de la flottille. Au contraire, nous constatons que, sur cette action, les crédits connaissent une baisse de 28,5 %. Cela est d’autant plus regrettable qu’il est question de la sécurité de nos marins. Comme le rappelait M. le ministre à l’instant, le nombre d’accidents et le lourd tribut que paient chaque année nos marins auraient nécessité, au contraire, une augmentation.

De plus, eu égard à la crise structurelle et persistante que connaît la profession, nous déplorons la diminution des sommes allouées aux caisses de garantie chômage contre les intempéries et avaries.

Enfin, s’agissant du prix du gazole, il occupe sans aucun doute une part importante des charges, parfois jusqu’à 30 % ou 40 % du budget. Au retour de la pêche, l’équipage déduit d’abord les frais, puis se divise les revenus. Si le budget consacré au gazole flambe, les parts se réduisent. Aujourd’hui, elles peuvent varier de 300 euros à 500 euros pour une campagne de quinze jours, soit de 600 euros à 1 000 euros mensuels. Autant dire que l’on est proche du seuil de pauvreté...

Toutefois, le prix de la facture énergétique n’est qu’un révélateur d’une situation sociale précaire.

Le président de la République a annoncé plusieurs mesures censées répondre aux difficultés graves que connaissent les pêcheurs.

Nous aimerions avoir des précisions sur le financement et le calendrier des mesures annoncées au début du mois de novembre 2007. Comment va être financé le plan de modernisation des moteurs de bateaux ? Quid de la répercussion du prix du gazole dans le prix du poisson à l’étal, alors que le Gouvernement communique sur la défense du pouvoir d’achat ?

Permettez-nous de dire que nous restons très sceptiques face à ces annonces, notamment sur l’efficacité de l’exonération des cotisations sociales. Le secteur va très mal, et depuis trop longtemps, pour que des demi-mesures suffisent. Il a besoin de réformes d’ampleur pour remettre au centre des débats la sécurité des marins, les effectifs à bord et le prix du poisson au départ du navire jusqu’à l’étal.

J’en viens au programme 149 intitulé « Forêt ».

Après la tenue du Grenelle de l’environnement, tous les ministères ont intégré dans leurs actions la nécessité de conduire des politiques respectueuses du développement durable. Ainsi, monsieur le ministre - et nous nous en réjouissons -, vous avez ouvert les Assises de la forêt, qui ont pour objectif ambitieux de renforcer la production forestière en l’inscrivant dans une gestion durable prenant en compte la biodiversité forestière et la gestion des risques.

Or, si un budget ne fait pas une politique, vous conviendrez qu’une politique sans budget est largement dépourvue d’efficacité. Hélas, c’est un peu l’impression que l’on garde à la lecture des documents budgétaires après les ambitions affichées lors du Grenelle !

S’agissant plus particulièrement de la forêt, il est précisé dans le document budgétaire : « La politique forestière du ministère de l’agriculture et de la pêche, MAP, [...] repose sur l’équilibre entre trois grandes fonctions - écologique, sociale et économique - assurées par les forêts, dans une perspective de développement durable. »

Selon nous, le budget consacré à la forêt reste en deçà de la promotion de ces trois fonctions.

Comme le note le rapporteur, 71 % des crédits du programme couvrent des dépenses de fonctionnement. Cette proportion résulte, pour une large part, du versement compensateur à l’Office national des forêts, subvention pour charges de service public inscrite à l’action n° 2.

Le montant de ce versement compensateur n’est pas laissé à la discrétion du Gouvernement. En vertu des textes, l’État doit verser à l’ONF une somme égale au coût du régime forestier dans le cas où les frais de garderie ne couvriraient pas les dépenses de l’Office. Mais cette somme devrait être réévaluée de 70 millions d’euros pour rester au niveau de celle qui était versée au début des années 1980 ! De plus, si l’on déduit cette somme, on s’aperçoit que les crédits du programme « Forêt » sont en diminution. Cela nous conduit à dire que les investissements de l’État restent trop timides, notamment pour la forêt privée.

La sous-exploitation chronique de nos forêts reste encore un problème. Il est pourtant essentiel d’encourager durablement et régulièrement la filière bois, afin d’exploiter au maximum ce merveilleux patrimoine que constitue la forêt française. À ce titre, il serait utile d’avoir une véritable évaluation de la ressource forestière. Cette question a déjà été soulevée à l’Assemblée nationale ; je crois qu’elle est d’importance.

La sous-exploitation des forêts et leur mauvais entretien sont encore plus préoccupants au regard de l’aggravation du réchauffement climatique. En effet, une forêt qui n’est pas exploitée et qui ne peut se régénérer est une forêt en péril. C’est pourquoi l’État doit s’engager plus fortement s’il veut mener une politique efficace d’un point de vue à la fois économique et environnemental.

En ce qui concerne les personnels, vous serez sans doute d’accord avec nous pour reconnaître qu’une gestion forestière durable ne sera valablement menée que si les moyens en personnel sont en adéquation avec le volume et le niveau des missions.

La loi de finances pour 2008 prévoit une diminution des effectifs de l’ONF. Si l’on tient compte, comme cela est précisé dans le « bleu » budgétaire, de la diminution tendancielle des effectifs prévue par le contrat entre l’État et l’ONF, d’une part, le non-remplacement des départs à la retraite s’appliquerait à l’établissement et, d’autre part, le directeur général de l’ONF l’a confirmé, l’établissement continuerait à supprimer des postes courant 2008, alors que la création de valeur ajoutée se poursuit sans faiblir. Cette diminution des personnels s’inscrit dans un contexte où les produits issus du domaine - vente de bois, location de chasse en forêt domaniale - atteindront en 2007 leur niveau le plus élevé depuis 1999 !

La forêt constitue pour notre pays un atout considérable en termes social, environnemental et économique. Mais la reprise des cours du bois ne doit pas faire oublier la fragilité d’une filière qui reste peu rentable et qui connaît un faible niveau d’intégration.

Monsieur le ministre, certaines activités sont mises en difficulté du fait des politiques menées par votre Gouvernement. Nous connaissons la crise que traverse, à l’heure actuelle, l’industrie papetière, qui est véritablement « étranglée » par le coût de sa facture énergétique. De même, la fermeture généralisée des gares de fret porte un coup très dur à la filière dans son ensemble.

En conclusion, monsieur le ministre, que ce soit dans le secteur de la pêche ou de la forêt, ces activités ont un rôle d’aménagement du territoire, économique et social essentiel. Les questions environnementales ne peuvent pas être exclues de l’approche des politiques menées dans ces secteurs. Toutefois, les crédits qui leur sont alloués dans la loi de finances pour 2008, mal répartis, trop timides, sont insuffisants pour répondre honnêtement aux objectifs affichés. C’est pourquoi nous ne voterons pas ce budget.

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