Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Loi de finances pour 2008 : écologie, développement et aménagement durables

Par / 6 décembre 2007

Nous nous attendions cette année à innover en mettant en oeuvre la « rupture puissante, forte et radicale » dans le secteur des transports, à laquelle invitait le ministre de l’écologie, le 3 octobre à l’Assemblée nationale. La création d’un ministère de l’écologie, de l’aménagement et du développement durables et l’organisation d’un « Grenelle de l’environnement » laissaient présager une forte détermination gouvernementale à définir une nouvelle politique des transports, plus soucieuse de l’environnement. La conscience des dangers d’un développement uniquement fondé sur la compétitivité économique a poussé à décider d’intégrer des critères sociaux et environnementaux dans toute décision publique. Par exemple, le document final du Grenelle de l’environnement, affirme : « le paradigme actuel, fondé sur la priorité accordée aux infrastructures routières et autoroutières, doit être abandonné au profit d’une logique de développement intégré, dans laquelle la route et l’avion deviennent des solutions de dernier recours ». Le nouveau président annonçait également, durant sa campagne, l’objectif d’augmenter le fret ferroviaire de 25 %, objectif qui suppose des investissements massifs en faveur du rail.

Nous attendions donc impatiemment de découvrir les crédits de la mission transport. Quelle déception ! Loin de la révolution annoncée, ce budget est une nouvelle fois en nette régression puisque les crédits aux transports terrestres et maritimes baissent de13 %. De plus, le nouveau périmètre de la mission permet habilement de restreindre le temps de parole des groupes parlementaires. Nous sommes consternés par un tel fossé entre les discours et les actes. La Cour des comptes a aussi regretté que la Lolf n’ait pas été l’occasion de progrès décisif en matière d’intermodalité. Cette remarque de juin dernier aurait pu être prise en compte dans ce budget. La Cour estime aussi que « le discours récurrent sur le rééquilibrage des modes de transports ne se traduit pas en acte ». Même notre commission des finances regrette « l’absence de traduction financière et budgétaire des orientations proposées par le Grenelle de l’environnement ». Pourtant, l’absence de réduction significative des émissions de gaz à effet de serre aura des conséquences dramatiques et irréversibles. La part des transports dans le total des émissions françaises s’élève à 26,5 %, dont 93 % pour les transports routiers. Il s’agit en outre du secteur qui a connu la plus forte croissance depuis 1990 puisque l’émission a augmenté de 22 %. Le Grenelle a justement décidé de revenir au niveau de 1990. En France, en vingt ans, la part du fret routier est passée de 58 % à 80 % et celle du fret ferroviaire de 26 % à 12 %. Il y a donc fort à faire pour le rééquilibrage modal, véritable levier pour la réduction de l’émission des gaz à effet de serre. Nous sommes intervenus régulièrement, lors de la discussion de chaque loi de finances, pour demander plus de moyens pour les transports alternatifs à la route.

Pourtant, à contrepied de toutes les déclarations d’intention, ce budget organise une nouvelle fois le désengagement de l’État du secteur des transports et la rupture annoncée ne sera pas si radicale. En effet, dès la présentation stratégique du projet annuel de performance, il est dit que priorité sera donnée, « chaque fois que cela est réaliste au plan économique, aux modes de transports complémentaires à la route ». Nous voilà immédiatement cantonnés aux sacro-saints impératifs de rentabilité économique. Pour le Gouvernement, le développement durable est un objectif, mais seulement si c’est rentable ! Comment ne pas penser alors à la nouvelle politique d’entreprise de la SNCF qui reste une entreprise publique mais dont les maîtres-mots sont dorénavant compétitivité économique...

M. Charles Revet. - Vous savez bien que c’est nécessaire ! (M. Blanc le confirme)

M. Michel Billout. - ...et augmentation de la productivité, au détriment du service public. Cette nouvelle politique d’entreprise justifie le choix du haut débit ferroviaire et la fin programmée du wagon isolé jugé non rentable.

Selon les propos même de sa présidente, « la SNCF renonce à l’universalisme de ce service et à la couverture homogène du territoire. ». L’application de ces nouvelles priorités a eu pour conséquences, dans le plan fret 2004-2006, la suppression de plus de sept mille postes, la fermeture de cent gares de triages et de nombreuses gares de fret. Comment peut-on envisager d’augmenter le chiffre d’affaires en réduisant le réseau ? Parallèlement, ce plan a mis sur les routes plus de 400 000 camions supplémentaires. Avec la fermeture de nouvelles gares de fret, dont 262 gares au service du wagon isolé au 30 novembre dernier, c’est autant de trafic qui se reportera sur la route. Lorsque les entreprises ou le Gouvernement en appellent à la notion de compétitivité économique, cela implique de nouveaux reculs pour le développement ferroviaire durable et la protection de l’environnement.

Les sénateurs du groupe communiste, républicain et citoyen estiment que la mise en oeuvre d’une véritable politique des transports permettant l’essor des modes alternatifs à la route nécessite une intervention publique importante, dégagée des impératifs économiques de court terme. Ainsi, le transport ferroviaire ne pourra regagner des parts sans modernisation de ses réseaux et de son matériel, et sans conditions de travail satisfaisantes pour ses agents. L’audit de l’école polytechnique de Lausanne avait chiffré les besoins d’investissement dans les réseaux à 5,5 milliards d’euros d’ici 2015, ce qui correspond à un effort de 500 millions par an. Pourtant, les subventions au réseau baissent. L’aide au désendettement de RFF stagne à 730 millions d’euros après une baisse de 70 millions depuis 2006. Dans le modèle de développement du réseau ferroviaire allemand si souvent montré en exemple, l’Etat a choisi de reprendre intégralement la dette. Cela mérite réflexion.

D’autre part, par un subtil jeu d’écritures, vous augmentez la subvention de régénération de 80 millions d’euros tout en diminuant de 180 millions la contribution aux charges d’infrastructure versée à RFF. La différence de 100 millions doit être comblée par des hausses des péages -qui ont déjà augmenté de 49 % depuis 2003- et des cessions immobilières. Vous continuez la grande braderie du patrimoine public et renforcez la pression financière sur la SNCF. En outre, cet exploitant, chargé d’un service public, est pénalisé par le poids de la dette. La contribution de l’Etat à cette charge diminue cette année de 30 millions d’euros et la compensation au titre de la politique de mobilité passe de 84 à 74 millions. Au moment où les Français souffrent d’une perte importante de pouvoir d’achat, cette nouvelle coupe illustre la conception gouvernementale de la solidarité.

La subvention au transport combiné baisse de 2,5 millions d’euros, pour atteindre péniblement 23,4 millions. C’est une aberration quand le Gouvernement ne cesse de proclamer l’exigence du développement durable et de la protection de l’environnement. Avant l’arrivée de la droite au pouvoir, cette subvention était de 92 millions d’euros. Parallèlement les aides aux transporteurs routiers, grâce notamment aux exonérations fiscales et sociales, augmentent une nouvelle fois et la généralisation des 44 tonnes va accroître la concurrence au détriment du rail. Quant à l’eurovignette, proposition phare du fameux Grenelle, elle est cantonnée au réseau non concédé et le Gouvernement a annoncé des compensations fiscales en faveur des entreprises de fret routier. L’utilité de cette écotaxe sera donc limitée. Où sont passés les engagements du Gouvernement en faveur du développement durable et d’une réorientation de la politique des transports ? Comment comprendre que la SNCF renonce à ses missions de service public au nom de la rentabilité ?

En outre, comment ne pas être inquiet pour l’avenir des financements de l’AFITF ? Le reversement à cette agence d’une partie du produit de la vente des concessions d’autoroutes va cesser dès la fin 2008. Selon le ministre de l’écologie, les besoins de financement pour les actions déjà programmées s’élèvent à 16 milliards d’euros. Dans ces conditions, comment seront financés les engagements pris avec les contrats de projet Etat-région pour 2007-2013, le plan de régénération du réseau et les décisions du Grenelle de l’environnement ? Quelles sont les perspectives ouvertes pour le prochain Comité interministériel d’aménagement et de compétitivité des territoires (CIACT) ? Alors que les dividendes des sociétés d’économie mixte concessionnaires d’autoroutes (Semca) auraient dû rapporter des financements importants et pérennes à l’Etat, le Gouvernement a cédé cette rente au privé dans la précipitation. Comment ne pas être inquiets quand le ministre annonce à l’Assemblée nationale, lors de l’examen des crédits sur la politique des territoires, que l’AFITF pourrait être financé par l’emprunt ou de nouvelles cessions d’actifs ? Nous craignons une pression accrue sur les collectivités locales pour le financement du service public des transports. Aucun signe n’est donné en faveur du rééquilibrage de la clef de répartition des investissements réalisés par l’agence puisque 42 % des sommes allouées financeront des projets routiers.

Nous sommes donc bien loin de la révolution annoncée à grand renfort de médias lors du Grenelle de l’environnement, mais plutôt dans la continuité de l’action de la droite au pouvoir depuis 2002, avec pour objectifs l’austérité budgétaire et la libéralisation du secteur des transports. Nous voterons contre ce projet de budget qui ne répond pas aux enjeux du développement durable et de la protection de l’environnement.

Les dernieres interventions

Finances Les injustices de la solidarité fiscale pour les femmes

PPL Justice patrimoniale au sein de la famille - Par / 19 mars 2024

Finances Médecine scolaire : l’État doit assumer son rôle

Proposition de loi visant à PPL visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires - Par / 18 mars 2024

Finances Et pour 13 000 milliards de dollars

Rapport de la Cour des comptes 2024 - Par / 13 mars 2024

Finances Non à l’économie de guerre

Financement des entreprises de l’industrie de défense française - Par / 7 mars 2024

Finances Les Départements dans le collimateur

Débat sur les finances des Départements - Par / 7 mars 2024

Finances Que faire d’EDF ?

Proposition de loi proposition de loi visant à protéger visant à protéger EDF d’un démembrement - Par / 24 janvier 2024

Finances Un budget, deux visions de la société

Explication de vote sur le projet de loi de finances pour 2024 - Par / 12 décembre 2023

Finances La chute de la démographie a bon dos

Débat sur les crédits de l’enseignement supérieur - Par / 4 décembre 2023

Finances Le logement est en urgence humaine, sociale et économique

Vote des crédits pour la cohésion des territoires - Par / 1er décembre 2023

Finances Les lois de la République contre celles des actionnaires

Débat sur la partie recettes du projet de loi de finances pour 2024 - Par / 23 novembre 2023

Finances Le budget de l’État à l’aune de la vie de Chantal

Question préalable au projet de loi de finances 2024 - Par / 23 novembre 2023

Finances 30 millions d’euros pour l’aide alimentaire

Vote sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 - Par / 20 novembre 2023

Administration