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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de finances pour 2008 : santé

Par / 7 décembre 2007

Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé », plusieurs intervenants l’ont dit avant moi, stagnent alors qu’en 2006 et 2007 ils avaient augmenté respectivement de 10 % et 7,5 %.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. C’est pour cela que vous aviez voté contre !

M. François Autain. Cette stagnation apparente est, en fait, une régression si l’on intègre l’inflation de 2 % prévue en 2008 par l’OCDE. Cette stagnation ne résulte pas d’une diminution des besoins en santé publique, bien au contraire, mais elle traduit une pénurie de financement public consécutive aux cadeaux fiscaux faits cet été aux Français les plus riches.

Le Gouvernement doit réduire les dépenses jugées à tort improductives, parmi lesquelles figurent évidemment les dépenses de santé, mais aussi les dépenses d’éducation et plus généralement toute dépense à caractère social.

Je limiterai mon propos à l’examen des plans de santé publique et des crédits de la Haute autorité de santé.

Au cours de la période écoulée, la politique de santé publique des gouvernements successifs s’est traduite par l’annonce souvent très médiatisée et la mise en oeuvre d’une multiplicité de plans de santé.

En juin 2005, lors de l’examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, j’avais proposé un amendement visant à faire figurer, dans une annexe à la loi de financement de la sécurité sociale, les plans de santé en cours d’application, ainsi que les modalités financières de leur mise en oeuvre.

Je n’avais pas alors été suivi par le rapporteur. On peut le regretter, car il n’existe pas aujourd’hui de document qui fasse la synthèse de ces plans, retrace leur évolution, leurs conditions d’application, leur financement et présente une évaluation des résultats de ceux qui sont arrivés à leur terme. Compte tenu des informations, souvent lacunaires et dispersées, dont nous disposons, il est difficile de mesurer leur incidence sur la santé publique.

Seize plans de santé ont été décidés entre janvier 2001 et mars 2002 par M. Bernard Kouchner, alors ministre délégué à la santé d’un gouvernement de gauche. Son successeur, M. Jean-François Mattei, a été plus modeste, se contentant apparemment des cinq plans stratégiques nationaux contenus dans la loi relative à la politique de santé publique promulguée en août 2004, qui arrivent d’ailleurs à échéance l’année prochaine.

Quant à M. Douste-Blazy, il a présenté, en un an, pas moins de quinze plans, sans égaler toutefois le record de M. Bernard Kouchner.

Depuis, cette fièvre planificatrice est, je le reconnais, un peu retombée. Désormais, on se contente le plus souvent de prolonger les plans qui arrivent à échéance. Certes, quelques nouveaux plans sont encore créés, mais leur nombre est moindre.

Le suivi de ces plans pose de nombreux problèmes, en ce qui concerne tant leur financement, leur faisabilité, leurs objectifs que leurs résultats.

Leur financement est souvent confus, entouré d’un flou budgétaire préjudiciable à leur efficacité. De plus, certains plans se recouvrent partiellement.

Ainsi, le plan cancer, dont les crédits s’élèveront à 3,2 millions d’euros en 2008, financera une partie des actions menées par le plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l’alcool au titre du financement des associations de lutte contre le tabac et l’alcoolisme.

Les sources de financement sont multiples. À titre d’exemple, je citerai le plan stratégique psychiatrie et santé mentale, dont le financement relève de l’ONDAM hospitalier, de l’ONDAM médico-social, de la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, et de la mission « Santé ».

La participation financière de la mission « Santé » à tous ces plans n’est pas systématique ; son niveau, très variable, mais généralement très bas, est établi sans aucune règle. Ainsi, elle est de 17 % pour le plan psychiatrie et santé mentale, de 12 % pour le plan douleur, mais seulement de 1 % pour le plan pour l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques créé en avril 2007.

L’articulation de tous ces plans avec l’ONDAM, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, n’est pas évidente. C’est pourtant un vrai sujet qui n’a jamais été abordé de front. Leur impact n’est jamais pris en considération, ni avant ni pendant leur mise en oeuvre.

Les dépenses d’assurance maladie qui leur sont liées font partie intégrante de l’ONDAM, sans qu’il soit possible de les identifier en leur dédiant, par exemple, une sous-enveloppe.

Un ONDAM croissant de 2 %, voire de 1,5 % par an, dans l’hypothèse la plus basse, comme le prévoit la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, peut-il prendre en compte l’augmentation du volume des soins entraînée par la mise en oeuvre de ces plans ? L’État ne doit-il pas en tirer les conséquences et prendre une part plus importante dans leur financement, dès lors qu’il les considère comme une priorité de santé publique ?

Le Gouvernement, en lançant ces plans, fait souvent l’impasse sur leurs répercussions potentielles sur différents acteurs du système de santé, tels que les agences sanitaires ou la direction générale de la santé, posant ainsi clairement la question de leur faisabilité. De même, l’anticipation des évolutions organisationnelles nécessaires à l’application de certains plans fait défaut.

Ainsi, en 2005, le lancement du plan santé au travail a correspondu à une diminution de 87 % du nombre de postes d’internes en médecine du travail.

On pourrait en dire autant du plan périnatalité engagé l’année où l’on réduisait de moitié le nombre de postes offerts aux internes en pédiatrie.

L’évaluation de ces plans n’est pas explicitement prévue, et c’est sans doute la raison pour laquelle elle est rarement pratiquée.

Ni le plan cancer ni le plan Alzheimer n’ont fait l’objet d’évaluations. Pourtant, un second plan Alzheimer est sur les rails.

En revanche, sans que l’on sache vraiment pourquoi, le plan national santé environnement a fait l’objet d’une évaluation. Monsieur le rapporteur pour avis, vous indiquez que l’état d’avancement de 60 % des actions du plan était conforme aux prévisions. En réalité, cela signifie qu’il n’est pas du tout conforme aux prévisions !

Il est vrai que les évaluations peuvent se révéler délicates lorsque les objectifs, comme c’est souvent le cas, ne sont ni clairs ni précis ; a contrario quand ils sont quantifiés, ils manquent de réalisme.

Pour conclure sur ce point, il manque un chef d’orchestre, une instance susceptible d’assurer la coordination et le suivi de tous ces plans, la détermination de leur contenu et de leurs objectifs, ainsi que la réalisation systématique d’une évaluation. Il va de soi que le budget de l’État, notamment à travers les crédits de la mission « Santé », doit prendre une part beaucoup plus importante dans leur financement, qui doit être transparent, notamment à l’égard de l’ONDAM.

De nombreux progrès doivent être réalisés pour faire en sorte que ces plans de santé deviennent des outils performants au service de la politique de santé publique.

J’en viendrai, pour terminer, à la Haute autorité de santé.

Tout d’abord, je regrette que l’examen de son budget ne s’effectue pas en même temps que celui des autres agences sanitaires, dont les missions sont très voisines.

Ensuite, je déplore le désengagement de l’État à l’égard d’une structure qui, pourtant, met en oeuvre des politiques publiques.

Cette situation est d’autant plus incompréhensible que vous venez - vous vous en souvenez certainement, mes chers collègues - d’élargir ses compétences dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, en lui demandant d’émettre des avis médico-économiques sur les stratégies de soin, de prescription et de prise en charge les plus efficientes.

On peut comprendre que la subvention n’ait été, en 2007, que de 1 million d’euros, compte tenu de l’existence d’un fonds de roulement pléthorique. Mais tel n’est pas le cas cette année, et il aurait fallu que la Haute autorité de santé retrouve le niveau de 2006, à savoir 9,6 millions d’euros. Or, en 2008, elle devra se satisfaire de 2,5 millions d’euros.

Non seulement vous mettez cette instance dans une situation financière inconfortable, mais vous l’affaiblissez, alors même qu’il faudrait la renforcer pour qu’elle relève un certain nombre de défis, parmi lesquels figure l’information des médecins.

Vous le savez, mes chers collègues, l’industrie pharmaceutique exerce aujourd’hui un quasi-monopole, soit directement soit indirectement, en matière d’information et de formation continue des médecins. Chaque année, elle y consacre 3 milliards d’euros, soit 25 000 euros par médecin, selon un rapport récent de l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales. Or la Haute autorité de santé ne dispose en tout et pour tout que de 1 million d’euros pour diffuser à ces mêmes médecins une information indépendante et objective, notamment sur le médicament. C’est dérisoire !

Cette situation très déséquilibrée n’est pas sans conséquences sur la sécurité sanitaire des Français et les dépenses d’assurance maladie.

Le Sénat avait adopté, contre l’avis du Gouvernement, un amendement visant à confier à la Haute autorité de santé la mission de créer une base de données indépendantes sur le médicament. La commission mixte paritaire a dû renoncer à cette disposition devant le refus du Gouvernement de donner à cette instance les moyens de remplir cette mission.

Ce faisant, le Gouvernement rend un grand service à l’industrie du médicament, mais porte atteinte à la sécurité sanitaire des patients qui les consomment et lèse les assureurs qui les paient, tournant ainsi le dos aux principes sur lesquels repose toute politique de santé publique.

Dans ces conditions, vous comprendrez que le groupe CRC ne vote pas ce budget, madame le ministre.

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