Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Projet de loi de Finances pour 2002

Par / 22 novembre 2001

I Intervention générale

Thierry Foucaud, Monsieur le Président, monsieur le Ministre, mes chers collègues,

Le débat que nous ouvrons cet après-midi sur la loi de finances 2002 est profondément marqué par une situation économique et sociale différente de celle de l’année dernière.

Au-delà en effet des évènements internationaux, les données présidant à la conception et la discussion budgétaire sont profondément modifiées.

Premier élément de la situation : la croissance est aujourd’hui quelque peu en panne, générant un décalage avec l’équilibre affiché à l’origine, traduit dans le collectif budgétaire que nous discuterons prochainement.

Ce ralentissement de l’activité économique a des causes sur lesquels il sera utile de revenir.

Second élément : la situation de l’emploi qui avait connu une relative amélioration ces dernières années est désormais plus incertaine et la progression du nombre des chômeurs inscrits atteste d’une moins grande capacité de notre économie à créer des emplois.

Troisième élément : le climat de confiance relative de ces dernières années semble quelque peu émoussé et nous constatons chaque jour sur nombre de questions (sécurité, emploi des jeunes par exemple et emploi de manière générale) une préoccupation grandissante de la part de nos compatriotes, préoccupation que nous partageons et qui nous paraît assez éloignée des calculs politiciens en cours du côté de la Droite.

C’est ainsi que le MEDEF décide aujourd’hui de mettre en œuvre ses moyens contre les 35 heures et contre la modernisation sociale.

Mais ce tableau de la situation, vite esquissé ici, ne doit faire nous faire perdre de vue l’essentiel.

Le Gouvernement de la gauche plurielle dispose d’un riche bilan qui a permis d’initier certains changements essentiels pour la vie du pays.

Les parlementaires communistes et apparentés à l’Assemblée Nationale, les sénateurs du groupe CRC ici ont ainsi contribué à ces résultats et l’ont encore fait cette année au travers de mesures sur la redevance audiovisuelle, sur la fiscalité locale, ou encore sur l’impôt sur les sociétés dû par les compagnies pétrolières.

De même, les mesures prises en faveur de l’hôpital public sont à mettre à l’actif du débat parlementaire et de ce que nous avons porté.

Cependant, sur la durée de la législature, les choix opérés n’ont-ils pas été, parfois, trop timides pour prolonger pleinement les réformes indispensables dont notre pays a besoin et qu’attend la population ?

Nous ne souscrivons donc pas à une politique budgétaire trop restrictive, soucieuse avant tout de réduction des déficits et de maîtrise des dépenses , quitte à ce que ces objectifs fussent atteints au prix de l’insatisfaction des besoins populaires.

Et cela vaut évidemment pour aujourd’hui comme pour l’avenir.

Ceux qui prônent la réduction des dépenses publiques se trompent ou trompent le peuple de ce pays : ce n’est pas ainsi que nous répondrons aux attentes et aux besoins sociaux.

Que le déficit public ait été ramené aux alentours des 200 milliards de francs (excusez-moi de ne pas user ici de l’euro, mais il s’agit de nous faire bien comprendre de tous) peut être apprécié mais quand cela se fait sans qu’une marge suffisante soit utilisée pour répondre aux besoins pose problème.

Une partie des difficultés trouve son origine dans l’insuffisance de la dépense publique.

Quand on limite les dépenses pour l’école, pour la formation des jeunes, on crée les conditions de nouveaux gaspillages ultérieurs de deniers publics.

Quand la politique d’investissement public est trop timide, ce sont des pans entiers de notre économie qui se trouvent dépourvus de possibilités de développement.

Posons-nous maintenant la question de la réduction des prélèvements obligatoires qui a constitué l’une des pierres de touche de la politique menée depuis 1997.

Premier aspect : le poids relatif des impôts, taxes et cotisations sociales dans la richesse nationale est dépendant de la croissance et plus celle-ci est forte, plus il se réduit.

Second aspect : la baisse des prélèvements a donné aux agents économiques (ménages, entreprises, etc..) plus de liberté.

Si le comportement des ménages a été plutôt positif puisque la consommation intérieure a largement soutenu la croissance, il semble bien qu’il n’en a pas été tout à fait de même pour les entreprises.

En effet, que constate-t-on ?

A la fois absence de progression de la part des salaires dans la valeur ajoutée et, dans le même temps, sensible amélioration de la rémunération et de la rentabilité du capital.

Malgré la crise traversée par le marché des valeurs mobilières dans la dernière période, force est de constater que les dividendes versés ont largement augmenté, bien plus vite en tout cas que le pouvoir d’achat des salaires ou des prestations sociales.

Cette incapacité des responsables d’entreprise de notre pays et des assemblées d’actionnaires à définir et appliquer des choix plus positifs pour l’emploi, la formation et l’investissement est, de notre point de vue, à la source des difficultés rencontrées aujourd’hui.

Et ce n’est pas le pis-aller de la prime pour l’emploi, sorte de prise en charge par les deniers publics de l’absence de revalorisation des salaires au niveau des branches et des entreprises, qui doit nous faire oublier l’essentiel.

La croissance s’essouffle d’un partage inéquitable de ses fruits.

Dans ce contexte, notre participation au présent débat budgétaire est guidée par une ligne directrice ainsi déterminée.

Soutenir toute mesure allant dans le sens d’un soutien effectif à l’activité, qu’elle soit de nature fiscale ou par mobilisation de la dépense publique, comme nous le verrons en seconde partie.

Nous présenterons dans ce débat, une quarantaine d’amendements portant, notamment, sur une plus grande justice dans le calcul de l’impôt sur le revenu, sur la baisse générale de la TVA ou certaines baisses établies, sur le renforcement de l’efficacité de l’impôt sur les sociétés par exemple.

Ensuite, combattre avec la dernière énergie toute mesure (et je pense évidemment ici à la philosophie générale qui anime les amendements de notre Rapporteur Général) qui tendrait à confisquer le produit de la croissance au profit de quelques-uns, et singulièrement dans le cas qui nous préoccupe, des revenus les plus élevés, des entreprises disposant des capacités financières les plus importantes ou des ménages les plus fortunés.

Les propositions de la majorité sénatoriale sentent quelque peu le réchauffé ou le renfermé et même parées des couleurs de la « sincérité budgétaire », elles ne constituent que le catalogue habituel des idées les plus étroitement libérales.

Aussi, au nom des membres de notre Groupe, rappelons-nous quelques instants ce que nous ne devons jamais oublier au moment d’engager cette discussion.

Quand nous débattons de la loi de finances, nous devons penser aux salariés en lutte pour préserver leur emploi, sacrifiés sur l’autel de la rentabilité financière immédiate, victimes de la violence feutrée des décisions d’assemblée d’actionnaires.

Pensons également aux infirmiers et infirmières du secteur de l’hospitalisation privée en lutte pour un relèvement sensible de leurs rémunérations, la reconnaissance de leur compétence et de leur qualification et saluons les acquis de leur mobilisation comme de celle des agents des hôpitaux publics qui ont obtenu la création de 45 000 nouveaux emplois, dans le cadre de la nécessaire refonte de notre système de santé, et de l’application de la réduction du temps de travail.

Nous sommes aux côtés des chômeurs, qui ont aujourd’hui besoin d’une véritable politique de formation et d’emploi que la seule mise en œuvre du PARE, qui tend à les culpabiliser, ne permet pas de poursuivre et d’atteindre.

Nous sommes aux côtés des emplois-jeunes, dont l’expérience a montré, dans de nombreux domaines sensibles, l’utilité pour l’ensemble de la société.

Nous sommes aux côtés des demandeurs de logement qui attendent une véritable relance de la construction de logements sociaux.

Nous sommes aux côtés des parents d’élèves et des familles préoccupées par la réussite scolaire de leurs enfants, par l’amélioration du service public de l’éducation et notamment de l’enseignement technique et technologique.

Nous sommes attentifs devant la préoccupation de tous ceux qui attendent de notre pays qu’il prenne, au niveau international, des initiatives concrètes pour lutter contre le développement des inégalités de développement, plutôt que de suivre sans cesse plus aveuglément l’orientation imprimée à la marche du monde par les seules décisions du Président Bush.

Nous reposerons donc la question de l’instauration d’une taxation des opérations monétaires de caractère spéculatif, source de transparence et d’équité.

Enfin, nous serons de nouveau porteurs, dans ce débat, de propositions d’une réforme plus complète des finances locales, permettant aux collectivités territoriales de jouer pleinement leur rôle dans la vie du pays en termes d’emplois, de réponse aux besoins de nos concitoyens, d’investissement public.

Tout cela, au début de ce débat, gardons-le de vue.

Nos compatriotes, habitants de ce pays développé, riche de potentiels de création et de production, attendent de cette loi de finances qu’elle participe de la satisfaction des besoins collectifs.

Elle doit répondre aux aspirations populaires, portant la croissance et la confortant, au moment où notre politique économique et budgétaire laisse de sa substance dans le cadre étroit de la convergence des politiques voulue par la mise en place de l’Union Economique et Monétaire, bridant par-là même nos propres potentiels.

C’est cet objectif qui constitue, en première et dernière instance, la motivation des amendements que notre Groupe défendra dans le cadre de la discussion.

Je vous remercie de votre attention.

II Intercommunalité

Marie France Beaufils. Monsieur le Président, monsieur le Ministre, mes cher(e)s collègues.

Conseillère générale de 1982 à 2001, Maire depuis 1983, je dois dire que la situation financière des collectivités territoriales est un sujet auquel je m’intéresse.

Je ne m’arrêterai dans cette courte intervention que sur la question de l’intercommunalité.

Nous entrons dans la préparation des troisièmes budgets des nouvelles structures. Il n’est pas ici question de faire un état des lieux, mais il s’agit de préciser les modifications qu’il nous semble souhaitable d’apporter au financement des communes et des structures intercommunales pour que celles-ci puissent faire face à leur responsabilité, celles que les habitants leur ont confié.

Si les réalisations d’intérêt communautaire viennent alléger certains investissements des communes, elles ne répondent pas aux besoins d’équipements de proximité et les charges de fonctionnement continuent à progresser.

Au bout de deux années de mise en œuvre de cette loi, on peut formuler quelques remarques : il est indéniable que les 250 francs par habitants apportés par la DGF communautaire ont joué un rôle majeur dans le développement du nombre de structures intercommunales, bon nombre d’élus y voyant une aubaine financière !

J’ai noté, dans le budget qui nous est présenté, un abondement de 309,01 millions d’euros qui correspond à l’intégration du financement des communautés d’agglomérations. L’application du coefficient d’intégration fiscale à partir de 2002 aura des incidences inacceptables, confirmant notre opposition lors de la discussion de la loi CHEVENEMENT.

Je partage l’avis de M. Louis BESSON, ancien Secrétaire d’Etat au logement, maire de Chambéry, qui précise « A la réflexion et à l’usage, il me semble que cette affaire de CIF n’est pas très digne d’une relation saine entre l’Etat et les collectivités locales, puisqu’en définitive, l’Etat cherche à contenir l’enveloppe globale de ses dotations, mais organise pour leur répartition une compétition qui peut tourner à l’attrappe-nigaud ».

Le CIF peut avoir un autre effet pervers : le transfert de compétences vers les communautés, sans apporter de meilleure réponse aux besoins des populations des communes. Puisqu’il a été institué, selon leurs auteurs, pour inciter à la création de structures intercommunales plus intégrées, cet objectif étant largement réalisé, il peut maintenant être abandonné. Ainsi, on pourra revenir à la déclaration du préambule de la loi qui prévoyait que l’intercommunalité se réalise sur la base de projets.

La loi CHEVENEMENT a prévu que la dotation de compensation de taxe professionnelle, reversée par les communautés ayant opté pour la TPU aux communes, s’effectue sur la base du produit perçu en 1999 par chaque commune. Ce qui veut dire que les progressions importantes des bases de TP résultant du dynamisme de la vie économique des années 1998, 1999, 2000 alimentent les caisses des communautés d’agglomération et des communautés de communes.

On va arriver rapidement à cette situation : des structures intercommunales de plus en plus riches, rassemblant des communes ne pouvant plus répondre à leur population, leurs recettes n’évoluant plus au rythme de la richesse créée dans leur commune. Cela met en cause la solidarité que les communes ont pu réaliser en direction des populations fragilisées ; ce n’est pas tolérable.

De plus, de nombreux EPCI ont créé une fiscalité additionnelle. Une étude, parue dans les Notes Bleues du Ministère des Finances du mois d’août dernier, étudie l’évolution des impôts locaux. On s’aperçoit que la taxe d’habitation perçue par les communes et les EPCI passe de 40 048 millions de francs en 1999 à 47 555 millions de francs en 2000, soit +3,27% et la taxe sur le foncier bâti de 57 454 millions de francs à 59 107 millions de francs, soit +2,87%. Dans le cadre des discussions actuelles sur les orientations budgétaires, des propositions d’augmentation des taux d’imposition commencent à « fleurir ».

Cela montre qu’il aurait été sage et efficace, pour le pouvoir d’achat des familles, de suivre la proposition du groupe communiste républicain et citoyen, lors des débats sur la loi CHEVENEMENT, de ne pas autoriser les EPCI à lever une fiscalité additionnelle.

Les communes garderont-elles les moyens financiers nécessaires à leur autonomie ? C’est un des enjeux auquel la future réforme des finances locales devra répondre. C’est un souci qui s’est exprimé au Congrès des Maires de France.

J’ai beaucoup entendu parler de solidarité entre communes riches et communes pauvres pour apporter des réponses financières aux communes rurales particulièrement. Mais de quoi parle-t-on ?

Des communes ont une taxe professionnelle importante par rapport aux autres impôts. Probablement. Mais est-ce le seul critère à observer ? Beaucoup de communes industrielles accueillent en même temps des populations ouvrières fortement touchées par le chômage. Dans ces communes, ce que la communauté de communes ou la communauté d’agglomérations reçoit grâce à la TPU vient d’autant réduire les capacités du budget communal, sans que celui-ci puisse être mieux alimenté par l’impôt des ménages.

Je pense notamment qu’au moment où nous discutons du financement des collectivités locales, si nous voulons assurer une véritable solidarité à la fois vers les communes les plus pauvres, mais aussi vers les communes dont les populations sont fragilisées, il ne nous faut pas proposer de répartir autrement le gâteau si ce n’est peut-être à la marge. Il nous faut surtout faire en sorte que le gâteau à partager soit plus gros.

J’ai beaucoup entendu parler de nécessaire autonomie fiscale des communes. Mais si la capacité contributive de vos habitants est très faible, vous pourrez toujours avoir la capacité de faire évoluer les bases d’imposition, vous n’obtiendrez pas de ressources suffisantes.

Or, c’est ce que certains proposent aujourd’hui pour contrecarrer l’effet négatif de cette diminution des capacités communales au profit de celles des communautés.

Il n’est bien sûr pas question, ici, de nier l’intérêt de la coopération entre les communes, j’y suis attachée et j’y ai largement contribué dans mon agglomération. Mais je ne peux me résoudre à ce que les communes ayant fait le choix de prendre toute leur place dans l’intercommunalité n’aient pas d’autres possibilités que d’augmenter les impôts ou les coûts des services, que de restreindre leurs investissements pour continuer à répondre efficacement aux besoins quotidiens des populations.

On parle beaucoup de solidarité. Une légère taxation de 0,3% des actifs financiers comme nous le proposons, apporterait une solidarité utile pour les communes et leurs habitants qui en ont bien besoin.

III Finances locales

Thierry Foucaud. Monsieur le Président, monsieur le Ministre, mes cher(e)s collègues.

Depuis 1997, les collectivités locales connaissent de nombreuses réformes, participant ainsi à un mouvement plus vaste de modernisation de l’Etat.

Ces réformes sont indispensables : les lois SRU, Voynet et Chevènement, la parité et le non-cumul des mandats, le nouveau code des marchés publics, le texte en cours d’examen, relatif à la démocratie de proximité, les diverses politiques contractuelles…, devraient conférer à nos collectivités plus de souplesse dans leur action, faire avancer la solidarité, la justice sociale et la démocratie.

Pour certaines d’entre elle, l’effet se mesure déjà.

En témoigne, par exemple, l’entrée massive des femmes dans les centres de décision politique.

Pour d’autres, il faut encore vaincre les résistances et réticences. C’est le cas concernant le 20% de logements sociaux institué par la loi SRU.

Cette modernisation de nos institutions ne peut évidemment ignorer les finances locales.

Mais une réforme en profondeur s’impose, et elle est amorcée. Le gouvernement a en effet engagé une vaste concertation, dans le cadre de la commission Mauroy et aussi à la suite la note d’orientation émanant du ministère de l’économie et des finances, présentée au comité des finances locales le 12 juillet 2001.

Nous sommes pleinement engagés dans ce processus, et présentons nos propositions dans le cadre de cette concertation. Cette réforme est en effet pour nous une priorité. Elle est urgente.

C’est que la situation financière des collectivités est loin d’être satisfaisante.

Les incertitudes sont nombreuses, qui entravent la mise en place de politiques. L’autonomie de gestion est réduite. Il existe surtout un grand nombre de collectivités dont les marges de manœuvre sont, ni plus ni moins, inexistantes.

Ce sont d’abord les populations qui en subissent les conséquences : les services, pourtant indispensables, qui leur sont dus ne peuvent être complètement rendus.

De surcroît, il y a fort à craindre une augmentation des impôts pesant sur les ménages. Nous l’avons constaté, par endroit. La note de conjoncture de Dexia de juillet 2001 en fait état : « Comme en 2000, la fiscalité des communes enregistre l’impact de la montée en puissance du mécanisme de la TPU qui se traduit par une baisse importante du produit de la TP, et par un accroissement notable au cas par cas de la pression fiscale « communale » pesant sur les ménages ».

La croissance est également affectée ; il est indéniable que les collectivités locales jouent un rôle moteur dans l’économie. N’oublions pas qu’elles réalisent 76% des investissements publics, ce qui se traduit en emplois, en infrastructures. L’argent des collectivités ne dort pas.

Si on en est arrivé là, c’est du fait de la non prise en compte des charges pesant sur les collectivités locales, dans la détermination de leurs ressources.

C’est l’effet de la philosophie en œuvre dans le cadre de nos engagements européens, du carcan de la norme de dépense, mis en œuvre par le gouvernement Juppé. Nous ne cessons de dire que c’est une autre logique qu’il faut appliquer, déterminer les ressources en fonctions des charges.

Or les charges nouvelles pèsent lourds sur les budgets locaux.

Les frais de personnel sont encore à la hausse cette année, du fait de la mise en place des 35h sans moyen, la NBI, des emplois jeunes à former, et à pérenniser, emplois qui sont par ailleurs de nouveaux services nécessitant la mise en place d’équipements.

Il y a aussi les mises aux normes (déchets, assainissement, alimentation en eau potable), la mise en œuvre des politiques contractuelles… la liste est longue.

Depuis 1997, le gouvernement a réalisé un effort important, tant en matière de dotations, que dans le cadre de politiques contractuelles.

Concernant l’évolution des dotations, le contrat de croissance et de solidarité est ­ nul ne peut le nier - nettement plus généreux que le pacte de stabilité du gouvernement Juppé, avec la prise en compte de la croissance à hauteur de 33% dans le calcul du taux d’évolution de l’enveloppe normée. La DGF progresse.

Mais c’est le principe même de l’enveloppe normée qu’il faut abandonner, dans le cadre de la réforme des finances locales. Il faut cesser d’utiliser la DCTP comme variable d’ajustement. Au titre des mesures urgentes, nous présenterons des amendements, visant à atténuer la baisse de la DCTP pour l’année 2002.

La réforme des finances locales doit aussi conduire à revaloriser, très largement, le montant des dotations.

Que penser, par exemple, de la dotation élu local, d’un montant dérisoire, comparée aux besoins de formation des élus, et aux montants des indemnités ?

Que penser aussi, du fait que, malgré les abondements exceptionnels dont ont bénéficié la DSU et la DSR, les communes les plus pauvres le restent ?

Concernant les politiques contractuelles, l’effort de l’Etat s’est également renforcé. Néanmoins, la part de financement restant à la charge des collectivités, les dépenses annexes, et l’absence de financement au delà du contrat, les amènent parfois à ne pas s’engager dans ce type de politique.

A côté d’un renforcement des dotations, c’est aussi à la fiscalité locale qu’il faut recourir.

Elle a fait l’objet de réformes, qui visent à moderniser un système, dont l’archaïsme est indéniable, et vont, en cela, dans le bon sens.

Il conviendrait maintenant de poursuivre cette modernisation, par la mise en place d’impôts modernes, d’un rendement suffisant pour redonner aux collectivités des marges de manœuvre, et garantissant un équilibre entre la contribution des ménages, bien trop importante dans notre fiscalité, et celle des entreprises.

Voilà pourquoi nous proposons la prise en compte des actifs financiers dans la base de la taxe professionnelle.

Cela permettrait de tripler le montant de la DGF (part péréquée).

Ce serait une mesure de justice fiscale, vis-à-vis des ménages, mais également des entreprises, en faveur de celles qui réalisent des investissements productifs.

Pour que la modernisation de notre fiscalité favorise la croissance, l’emploi, et instaure une plus grande justice fiscale, c’est à la financiarisation de l’économie qu’il faut s’attaquer.

C’est tout autre chose, que la majorité de cette assemblée nous propose.

En matière de fiscalité locale, vous n’avez aucune proposition, sauf à continuer la suppression des impôts locaux.

Concernant l’effort de l’Etat en faveur des collectivités, vous ne revenez pas sur le principe de la norme de dépenses, que vous aviez institué en 1995.

Vous avez volontairement fait échouer un certain nombre de réformes, dont des mesures urgentes relatives au statut de l’élu, qui pourtant auraient facilité l’entrée en fonction des nouveaux élus de nos communes et départements, et la formation de tous les élus, confrontés à de nombreuses nouvelles réglementations.

Explication de vote final

Nicole Borvo. Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mes cher(e)s collègues,

Le débat budgétaire, cette année, est intervenu dans un contexte confirmé de ralentissement de la croissance, dans le contexte d’une récession possible au niveau international.

Ces interventions de mon groupe, les propositions que nous avons pu faire, ont été guidées par le souci constant que l’intervention publique soit en capacité de faire face à ce contexte, donc de soutenir la consommation populaire, les investissements utiles, de dynamiser l’activité économique, de favoriser la croissance.

Aujourd’hui, notre vote intervient à un moment où des attentes sociales s’expriment très fortement. Des mouvement sociaux touchent des grands secteurs publics de façon diverse mais convergente.

Ce qui les unit, à mon sens, le fil conducteur, ce sont les immenses besoins de la société : besoin de sécurité, besoin de santé, d’écoles, de services publics.

Notre pays, nos concitoyens, sont très attachés aux services publics. Ils ont raison. Ils sont des éléments indispensables en France de la cohésion sociale, de « vivre ensemble » et ils ont fait la preuve de leur grande efficacité.

Or, ce qu’expriment nombre de ceux qui font part de leurs inquiétudes, mécontentements, revendications, ce n’est pas leur intérêt égoïste, leur corporatisme, comme on l’entend trop souvent, mais bien leurs difficultés à accomplir leurs missions, à répondre aux attentes de la population.

Voilà, à mon sens, le cœur du débat sur la défense publique.

Une autre grande question concerne la Démocratie et l’avenir du débat budgétaire à un moment historique, celui du passage à l’euro et à l’abandon du franc.

Il ne s’agit pas pour moi de donner dans la nostalgie et le conservatisme.

Mais ne passe-t-on pas trop rapidement sous silence le rapport étroit entre un peuple et sa monnaie.

Quel sera demain le rapport entre les peuples européens et l’euro ? Qui décide et dans quelles conditions ? L’euro existe et si un défi est à relever, c’est bien celui de permettre aux peuples de s’approprier ce nouvel outil et de le mettre au service des objectifs de justice sociale, de développement économique et de coopération internationale.

Nous en sommes bien loin et malheureusement, beaucoup de facteurs nous laissent penser que nous assistons à la naissance d’un nouvel outil, de spéculation internationale qui placent toujours et encore au premier plan, la maîtrise des dépenses publiques et l’austérité salariale.

Je regrette, à ce titre, que le programme pluriannuel de finances publiques transmis aux autorités de Bruxelles pour notre pays ne fasse pas l’objet d’un large débat.

Même si la tendance est modifiée, la baisse indifférenciée des impôts continue à marquer ce plan. Cet axe ne peut qu’aller de pair avec l’objectif de réduction des dépenses.

Au-delà du contenu même de ce plan, il met en évidence l’absence de transparence des choix sur le plan européen. Qui fait ensuite le choix et sous le contrôle de qui ?

Le projet de budget dont nous discutons, reste encore marqué par le contexte du pacte de stabilité qui bride les ambitions de la gauche plurielle.

La première partie, relative aux recettes, à notre sens, n’ambitionnait pas de trouver de nouveaux moyens pour une politique budgétaire au service de l’emploi et de la justice sociale.

Si les députés communistes ont voté l’ensemble du budget à l’Assemblée Nationale, c’est que des efforts ont été faits pour maintenir et faire progresser bon nombre de crédits.

Des avancées ont été possibles et ces mêmes députés communistes n’y sont pas pour rien, par exemple : doublement de la prime pour l’emploi, 1 milliard pour l’investissement hospitalier, l’octroi aux collectivités locales de prêt à taux préférentiels dans les travaux d’investissement scolaire en zones sensibles, le dégrèvement du foncier bâti et l’exonération de la redevance TV pour les personnes de plus de 65 ans.

Ces avancées poussent la consommation, donc la croissance.

Les députés communistes ont d’ailleurs contribué à reconstituer en recettes une partie des dépenses supplémentaires. Le maintien du barème de l’ISF ou de la contribution des compagnies pétrolières représentent en effet une plus-value fiscale de 1,5 milliard de francs.

Nous avons toutefois regretté la baisse de l’impôt sur les sociétés sans obligation en matière d’emploi et la réduction du barème des deux plus hautes tranches de l’impôt sur le revenu.

Notre vote au Sénat sur l’ensemble du projet de loi de Finances, modifié par la droite sénatoriale, sera tout autre, puisque nous nous prononçons contre.

La droite sénatoriale a fait jouer une nouvelle fois, à la Haute Assemblée, le rôle de caisse de résonance des propositions de l’actuelle opposition parlementaire.

Le débat budgétaire est devenu, dans ce cadre, une tribune pour des déclarations et propositions marquées par le libéralisme telles que l’allégement de l’impôt sur le revenu des ménages les plus aisés, l’allégement de l’impôt sur les sociétés ou encore, celui de l’impôt de solidarité sur la fortune.

Le cas de l’impôt de solidarité sur la fortune est parlant, à l’heure où le bilan des plus grosses fortunes de France ont été publiées dans la presse.

C’est ainsi que le Sénat a rétabli le plafonnement de cet impôt, cadeau fiscal accordé à un millier de personnes particulièrement riches.

Rappelons-nous que le milliard de francs d’allégement de l’ISF que vous proposez, c’est, par exemple, l’équivalent du budget de la ville.

La même observation vaut évidemment pour l’ensemble des autres mesures préconisées par les amendements de la majorité sénatoriale. C’est particulièrement vrai, pour l’allégement de l’impôt sur les sociétés à hauteur de 102 millions d’euros et la baisse des impôts pour les plus hauts revenus s’inscrivent dans ce cadre.

Voulant mener jusqu’au bout le débat parlementaire, nous avons fait des propositions à l’occasion de la discussion de la première partie pour créer les conditions d’un confortement de la croissance au travers de mesures spécifiques pour un ciblage plus précis de la réforme de l’impôt sur le revenu, par une réduction du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une amélioration des dispositifs incitatifs à la réduction du temps de travail ou encore, des modes de fonctionnement des petites et moyennes entreprises.

Bien entendu, elles n’ont pas été retenues par la majorité sénatoriale.

Seule exception à la règle, notre proposition de réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les appareillages lourds destinés aux personnes handicapées qui est une véritable mesure de justice sociale et qui a été adoptée.

S’agissant des collectivités locales, nous ne pouvons, encore une fois, que dénoncer les contradictions dans lesquelles se trouve la majorité sénatoriale.

Désormais, tout ou presque est possible.

Mais, mes cher(e)s collègues, de la majorité sénatoriale, devons-nous pour autant oublier dans la problématique des finances locales que c’est vous qui avez réformé la DGF en 1993, en gelant la dotation forfaitaire en 1994 ; que c’est vous qui avez réduit la compensation de la TVA sur les dépenses d’équipement, que c’est vous qui avez voté la suppression de la DGE des communes importantes, que c’est vous qui avez fait de la DCTP la variable d’ajustement de l’enveloppe des dotations…

Nous sommes effectivement convaincus que les finances locales et le champ des relations entre l’Etat et les collectivités locales doivent être profondément réformés.

Pour ce qui nous concerne, cette réforme passe entre autres par un examen réel des transferts de compétences et de moyens financiers, la mise en œuvre d’une véritable réforme de la taxe professionnelle passant par l’intégration des actifs financiers dans son assiette qui permettrait d’aider au financement des EPCI, de donner des moyens supplémentaires aux collectivités locales, pour satisfaire leurs nombreux besoins, pour donner les moyens d’une bonne mise en place des 35 heures.

Votre allergie à la dépense publique s’est à nouveau manifestée dès le début sur la deuxième partie. Alors que souvent, vous vous auto-proclamiez porte-parole des collectivités locales, que penseront les élus locaux, inquiets de la fermeture envisagée de leur perception, de la minceur des effectifs de gendarmerie ou des menaces pesant sur l’activité de leur hôpital local ? Que penseront les élus locaux qui, en permanence, se battent pour les moyens de l’école publique ?

Nous relèverons comme une contradiction de plus votre démarche quand vous avez rejeté sans complexe les deux amendements relatifs à l’accord intervenu sur le conflit dans la police nationale et sur la question de la rémunération de l’astreinte des gendarmes.

Comprenne qui pourra, en effet, votre position lors même vous soufflez sur les braises des justes préoccupations de nos concitoyens quant aux questions de sécurité alors qu’au pouvoir, vous n’avez en rien enrayé la délinquance avec votre politique de réduction des dépenses.

En tout état de cause, nous avons la conviction que les propositions que nous avons faites et que vous avez rejetées sont en symbiose avec ce qui se passe aujourd’hui dans le pays.

Dans ce contexte et compte tenu des observations qui précèdent, nous ne pourrons évidemment que rejeter, sans la moindre hésitation, le texte de loi de Finances tel que modifié par le Sénat.

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