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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Projet de loi de finances pour 2009 : solidarité, insertion et égalité des chances

Par / 2 décembre 2008

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, en début de semaine dernière, un juge de proximité parisien a condamné l’association « Droit au logement », le DAL, à une peine d’amende de 12 000 euros, au motif que des objets non autorisés auraient été déposés sur la voie publique. Il s’agissait, pour être précis, de 319 tentes, de sacs de couchage et de couvertures destinés à protéger du froid des familles rassemblées pour obtenir un logement.

M. Alain Vasselle. Ce n’est pas le budget du logement !

Mme Isabelle Pasquet. Cette formidable mobilisation a contraint Mme Boutin, ministre du logement et de la ville, à signer un accord de relogement en faveur des familles concernées.

M. Alain Vasselle. Vous vous êtes trompée de mission budgétaire !

Mme Annie David. Mais non !

Mme Isabelle Pasquet. C’est pourquoi la décision de justice que j’évoquais, qui est venue sanctionner une action dont le Gouvernement lui-même reconnaît la légitimité, puisqu’elle a débouché sur un accord de relogement, s’apparente à une véritable sanction politique qui semble constituer, avec celle qui frappe une autre association, « Les enfants de Don Quichotte », une criminalisation du mouvement associatif.

Je demande donc au Gouvernement, comme l’a fait l’un de ses membres ici présents, M. Martin Hirsch, de « passer l’éponge », considérant avec lui qu’il n’était « pas normal » d’infliger une amende à l’association « Droit au logement » pour avoir installé des tentes rue de la Banque. (Mme Gisèle Printz applaudit.)

Mme Annie David. Très bien !

Mme Isabelle Pasquet. Ce propos liminaire n’est pas sans lien avec l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui nous réunit aujourd’hui.

MM. Alain Gournac et Alain Vasselle. Ah bon ?

Mme Annie David. Exactement !

M. Alain Vasselle. Mme Boutin n’est pas là !

Mme Isabelle Pasquet. Je sais bien qu’il existe une mission « Ville et logement », mais personne ici ne doute que la lutte contre la pauvreté appelle une mobilisation bien plus large, qui dépasse le seul champ de ce budget.

Mme Annie David. Très bien !

Mme Isabelle Pasquet. Les associations qui viennent d’être condamnées le disent elles-mêmes, la lutte contre l’exclusion et la pauvreté passe par une politique ambitieuse en matière de santé, de travail, de logement ou encore d’éducation.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » se résume en fait à trois grands axes : la généralisation du RSA, le handicap et la dépendance, l’égalité entre hommes et femmes, ce dernier programme subissant une sévère réduction de crédits, comme d’ailleurs la quasi-totalité des actions, à l’exception de la généralisation du RSA.

Ainsi, le programme 106, intitulé « Actions en faveur des familles vulnérables », connaît une diminution très importante de ses moyens, à hauteur de 32 % pour ce qui concerne l’action « Accompagnement des familles dans leur rôle de parents ». Autant dire que nous sommes inquiets, particulièrement pour deux sous-actions relevant de cette dernière.

Il s’agit, d’une part, de l’aide à l’apprentissage de l’enfant lorsque les parents, en raison d’accidents de la vie ou d’une rupture conjugale, ont besoin d’un soutien, qu’ils pouvaient jusqu’alors trouver auprès des associations.

Il s’agit, d’autre part, de l’information sur l’IVG dans les établissements scolaires, rendue obligatoire par la loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception.

Quant à l’action « Protection des enfants et des familles », censée permettre de lutter contre la maltraitance des enfants, ses crédits connaissent une baisse légèrement supérieure à 12 %. Cette compétence est partagée avec le ministère de la justice et les départements. C’est à ces derniers, nous le savons, qu’il reviendra de compenser les désengagements successifs de l’État.

Mme Annie David. Eh oui !

Mme Isabelle Pasquet. Comment ne pas faire le lien entre cette baisse des crédits et l’annonce récente, par Mme la ministre de la justice, de l’autorisation des sanctions à l’encontre des mineurs de plus de douze ans ?

Mme Annie David. Et voilà !

M. Guy Fischer. C’est scandaleux !

Mme Isabelle Pasquet. On sait pourtant que les violences en appellent d’autres !

En outre, vous diminuez les crédits alloués à quatre des cinq actions du programme 137 « Égalité entre les hommes et les femmes ».

Pourtant, vous en conviendrez, l’objectif visé au travers de ce programme, à savoir promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux postes à responsabilités tant dans le secteur privé que dans le public, est loin d’avoir été atteint.

Je regrette, par exemple, que les crédits destinés à subventionner les associations intervenant dans ce domaine diminuent. Je déplore également la réduction des crédits alloués à l’action « Égalité professionnelle », dont l’une des finalités est tout de même d’adapter l’offre de formation initiale et de sensibiliser aux situations d’inégalité au travail entre les hommes et les femmes.

Certes, les écarts tendent à se réduire,...

Mme Annie David. Si peu !

Mme Isabelle Pasquet. ... mais la réalité est toujours la même : à travail égal, les femmes sont moins bien rémunérées que les hommes ! De véritables blocages existent même, rendant certains postes de direction inaccessibles aux femmes, soit parce que certains présupposés sexistes persistent, soit parce que l’organisation du travail et des dispositifs de garde d’enfants ne facilite pas la conjugaison de la vie professionnelle et de la vie personnelle.

C’est pourquoi, plutôt que de les restreindre, il aurait fallu au contraire renforcer les crédits de ce programme, en privilégiant la participation des associations.

Par ailleurs, je voudrais vous faire part de mon regret, partagé par mes collègues du groupe CRC-SPG, devant la disparition programmée, au nom des économies budgétaires, du service des droits des femmes et de l’égalité. De la part d’un Gouvernement qui ne compte même pas, en son sein, un secrétariat d’État aux droits des femmes, cette décision apparaît comme un très mauvais signal.

Si l’État lui-même ne montre pas l’exemple et diminue les crédits qu’il accorde à ce programme, on voit mal comment il pourrait se montrer réellement exigeant envers les entreprises publiques et privées en matière d’accession des femmes aux postes à responsabilités, ou encore envers les entreprises et les médias sur la construction d’une autre représentation des femmes, débarrassée des vieux concepts sur lesquels s’édifient les inégalités.

En outre, concernant le sort réservé au programme « Handicap et dépendance », il s’agit certes d’un des rares budgets en hausse. Toutefois, cette progression est à peine supérieure à l’inflation constatée durant l’année 2008. C’est tout à fait insuffisant, notamment pour répondre aux besoins des maisons départementales des personnes handicapées, d’autant que, lors de l’examen de la mission « Travail et emploi », vous avez ponctionné les crédits de l’AGEFIPH à hauteur de 50 millions d’euros.

Mme Annie David. Eh oui !

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. On ne va pas y revenir !

Mme Annie David. C’est la vérité !

Mme Isabelle Pasquet. Vous réduisez donc d’autant la participation financière directe de l’État à la rémunération des stagiaires en situation de handicap.

M. Guy Fischer. Et M. Paul Blanc laisse faire cela !

Mme Isabelle Pasquet. Pour conclure, j’évoquerai la principale action de cette mission : la généralisation du revenu de solidarité active. Sans elle, les crédits de la mission auraient été en très forte baisse.

En décidant de rendre incontournable le RSA, de le généraliser et d’en faire l’axe majeur de votre politique de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, vous indiquez clairement qu’il n’y aura pas d’aide de l’État pour ceux qui ne le mériteront pas. Vous entendez en effet conditionner le versement de ces aides à la reprise d’une activité professionnelle par le bénéficiaire.

Au regard de la crise financière, de l’éclatement de la bulle spéculative et des dramatiques conséquences que cela entraîne sur l’emploi, on voit mal comment vous pouvez continuer à tenir un tel discours !

Comment conditionner l’aide de l’État à la reprise d’une activité professionnelle quand le chômage explose, quand on comptera bientôt plus de 2 millions de salariés privés d’emploi et quand le chômage partiel se répand ?

Devant cette situation, vous auriez pu inventer d’autres pistes pour garantir une réelle solidarité. Vous auriez pu supprimer le bouclier fiscal et instaurer un véritable bouclier social.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. Encore !

Mme Annie David. Très bien !

Mme Isabelle Pasquet. En effet, s’il existe, depuis l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République, une forme nouvelle de solidarité, elle s’adresse à ceux qui en ont le moins besoin : les plus riches, les banques ou encore les entreprises.

M. Guy Fischer. On n’a jamais vu ça !

M. Éric Doligé. Vous n’avez jamais rien vu !

Mme Isabelle Pasquet. Les pauvres et les personnes en situation précaire, quant à eux, ne peuvent plus compter que sur eux-mêmes et sur un éventuel contrat de travail à temps partiel, parfois de quelques heures, permettant de bénéficier du dispositif que vous instaurez.

Je ne recommencerai pas le débat sur le RSA et sur les raisons de notre opposition à ce mécanisme de subvention à l’emploi précaire, mais, alors que vous réduisez tous les budgets alloués à la solidarité, je ne peux que dénoncer, une nouvelle fois, son mode de financement.

Plutôt que sur les revenus issus de la spéculation, celui-ci reposera sur une taxation assise sur l’épargne, qui sera proportionnelle alors que la justice sociale aurait voulu qu’elle soit progressive afin de solliciter davantage les plus riches, qui peuvent d’ailleurs s’abriter derrière le bouclier fiscal.

Ainsi, l’effort de l’État se réduit en réalité à un seul dispositif : le RSA ! Et encore, vous faites des économies sur les droits connexes, par exemple avec la suppression de l’exonération de taxe d’habitation ou de redevance télévisuelle...

Quant au partage des compétences, il est très favorable à l’État. En effet, ce sont bien les départements qui devront assumer la majeure partie des dépenses de solidarité, l’État se bornant à prendre en charge les rares cas de RSA complémentaire.

C’est pourquoi les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG, considérant que la situation économique actuelle aurait dû susciter une tout autre expression de la solidarité nationale et, par voie de conséquence, un tout autre projet de budget, voteront contre les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

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