Groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Écologiste

Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

L’effort budgétaire de l’État dans ce domaine est médiocre

Projet de loi de finances pour 2020 : recherche et enseignement supérieur -

Par / 29 novembre 2019

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à cette même tribune, l’an passé, j’avais appelé votre vigilance sur les prodromes flagrants d’un décrochage de l’enseignement supérieur et de la science françaises.

Les groupes de travail chargés de la réflexion préparatoire à l’élaboration de la future loi de programmation pluriannuelle de la recherche viennent de confirmer ces inquiétudes et dressent un bilan partagé de cet état préoccupant. Notre collègue député Cédric Villani, président de l’Opecst, résume ce diagnostic pessimiste en deux formules : « la France n’investit pas assez dans sa recherche » ; elle a « perdu du terrain ».

De fait, depuis bientôt dix ans, les dépenses de recherche croissent moins vite que le produit intérieur brut. Elles représentaient encore 2,28 % du PIB en 2014 ; aujourd’hui, elles n’en représentent plus que 2,19 %.

L’effort budgétaire de l’État dans ce domaine est médiocre et bien inférieur à celui de nos voisins européens. Quant aux sommes investies par les entreprises privées pour la recherche, elles représentent 1,4 % du PIB en France, contre 2 % en Allemagne. Ce différentiel ne cesse de se creuser, car, en 2017, ces investissements n’ont augmenté en France que de 1,7 %, contre 7,8 % en Allemagne et 8,7 % en Suède.

Or la faiblesse chronique des investissements a des conséquences funestes pour l’emploi scientifique et l’attrait des étudiants pour les carrières scientifiques. La France est ainsi l’un des rares pays d’Europe dont le nombre de doctorants est en baisse constante.

Cette régression doit être rapportée à la chute drastique des recrutements par les opérateurs publics : pour le seul CNRS, les postes ouverts pour les chercheurs, au nombre de 412 en 2010, ne seront plus que de 240 en 2020, soit une baisse de plus de 40 % en dix ans.

Dans ces conditions, c’est la validité scientifique même des concours qui est fragilisée. En effet, par découragement, de nombreux jeunes chercheurs quittent notre pays. Cette fuite des cerveaux est un symptôme de plus du déclin de la science française.
Je pourrais malheureusement poursuivre longtemps la description de ces affaiblissements successifs.

Madame la ministre, votre projet de budget n’ambitionne pas d’y mettre fin. Au contraire, il s’inscrit dans un cadre qui a imposé à l’enseignement supérieur et à la recherche une progression budgétaire inférieure à la moyenne des crédits de l’État.
Au-delà des effets d’annonce et de la promotion de mesures nouvelles, plusieurs déficits structurels vont nécessairement continuer, en 2020, d’affaiblir la situation économique des opérateurs de la mission.

Ainsi, l’absence de compensation du glissement vieillesse-technicité oblige les opérateurs à réduire leur masse salariale. Pour les universités, cette perte conduit au gel de plus de 1 200 emplois. Je regrette vivement, avec nos rapporteurs, que le Gouvernement demande au Parlement de se prononcer sur des objectifs qu’il sait inaccessibles.

De la même façon, dans un contexte de hausse de la démographie estudiantine, la quasi-stabilité des moyens alloués aux universités aboutit à une baisse du budget moyen par étudiant. Ce ratio est en diminution de près de 1 point tous les ans depuis 2010. Pour 2018, il a été estimé à 11 470 euros per capita, son plus bas niveau depuis 2008.

Cette décimation de l’emploi scientifique a touché plus durement encore les opérateurs de recherche. Ainsi, le CNRS a perdu, en dix ans, 3 000 emplois, soit près de 11 % de ses effectifs.

Sans doute la non-compensation du GVT est-elle considérée comme une saignée indolore, puisque le Gouvernement veut aller plus vite : il a décidé d’augmenter le niveau de la réserve de précaution de 3 % à 4 %. Le précédent de la loi de finances rectificative, adoptée cette semaine, révèle que, pour l’enseignement supérieur et la recherche, les crédits gelés en début de gestion budgétaire sont intégralement annulés à la fin de l’année. Mes chers collègues, nous débattons donc d’un budget qui sera encore plus diminué l’année prochaine par ces annulations.

À tout cela, il faut ajouter le refus du Gouvernement d’anticiper les conclusions de la récente et inédite décision du Conseil constitutionnel. Grâce à votre décret sur les droits d’inscription différenciés, madame la ministre, les Sages ont considéré que l’enseignement supérieur était constitutif du service public de l’éducation nationale et que le principe de gratuité s’y appliquait.

Le Conseil constitutionnel admet toutefois qu’il est loisible aux établissements de percevoir des droits d’inscription, à la condition expresse qu’ils restent modiques par rapport aux capacités contributives des étudiants. Il n’est point besoin d’attendre l’interprétation que donnera le Conseil d’État de cette décision pour supposer que celle-ci ouvre des voies de recours à tous les étudiants qui considèrent leurs frais d’inscription comme disproportionnés. Ces possibles contentieux risquent de priver de nombreux établissements de ressources importantes.

En théorie, votre projet de budget paraît quasi stable ; en pratique, il risque de s’avérer encore plus déficient que l’an passé. À tout le moins, il n’est pas la manifestation budgétaire d’une priorité politique en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche. Au reste, vous en avez parfaitement conscience, puisqu’il nous est demandé d’attendre le début de l’année prochaine pour connaître des ambitions du Président de la République en ces matières.

Mes chers collègues, nous débattons donc d’un projet de budget des affaires courantes, les annonces décisives étant réservées à un autre auditoire. Il en va du budget de la recherche comme de celui de la sécurité sociale : l’essentiel n’est pas destiné à cet hémicycle... Nous voterons contre ces crédits !

Les dernieres interventions

Finances Programme de stabilité ? Ou d’austérité ?

Le Gouvernement présentait au mois d’août son programme de stabilité pour 2022-2027 - Par / 26 août 2022

Finances Du quoi qu’il en coûte à qui doit payer...

Lecture du projet de loi de règlement du budget 2021 par Pascal Soveldelli / 19 juillet 2022 - 19 juillet 2022

Finances Ce débat est une mascarade

Nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2022 - Par / 14 décembre 2021

Finances Une politique pour les riches, grands gagnants de ce quinquennat

Nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2021 - Par / 24 novembre 2021

Finances Ce texte consacre le dogme libéral

Modernisation de la gestion des finances publiques (conclusions de la CMP) - Par / 24 novembre 2021

Finances Le vote de notre question préalable aurait constitué le véritable vote sanction contre ce budget

Projet de loi de finances pour 2022 : explication de vote sur la première partie - Par / 23 novembre 2021

Finances Le CIR a parfois des effets nocifs

Projet de loi de finances pour 2022 : article additionnel après l’article 4 ter - Par / 19 novembre 2021

Finances Nous devons lutter contre la concentration du CIR par les grandes entreprises

Projet de loi de finances pour 2022 : article additionnel après l’article 4 ter - Par / 19 novembre 2021

Finances Si l’ISF n’existait pas, il faudrait l’inventer !

Projet de loi de finances pour 2022 : article additionnel après l’article 5 sexies - Par / 19 novembre 2021

Finances Les revenus des plus riches ont explosé

Projet de loi de finances pour 2022 (question préalable) - Par / 18 novembre 2021

Finances Un plan de relance européen qui coûte très cher à la France

Projet de loi de finances pour 2022 : artcile 18 - Par / 18 novembre 2021

Finances Avec le gouvernement et la majorité sénatoriale, c’est la distribution des miettes

Projet de loi de finances rectificative pour 2021 : explication de vote - Par / 17 novembre 2021

Finances Les marchés financiers seront les grands bénéficiaires de ce texte

Accord modifiant le traité instituant le Mécanisme européen de stabilité - Par / 28 octobre 2021

Finances Cette proposition de loi crée une concurrence entre les associations

Dons et adhésions aux associations à vocation sportive, culturelle et récréative - Par / 14 octobre 2021

Finances La LOLF est confortée dans ses principes et ses objectifs

Modernisation de la gestion des finances publiques - Par / 27 septembre 2021

Finances Nous n’échangeons plus que sur des décisions déjà arrêtées

Débat sur l’orientation des finances publiques et règlement du budget 2020 - Par / 15 juillet 2021

Finances Le Sénat s’arrime à la majorité de l’Assemblée nationale

Loi de finances rectificative pour 2021 (conclusions de la CMP) - Par / 12 juillet 2021

Finances Donnons des leviers aux finances des départements

Projet de loi de finances rectificative pour 2021 : articles additionnels après l’article 7 quater - Par / 1er juillet 2021

Administration