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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Une juste contribution de chacun des pays de l’Union européenne

Ressources propres de l’UE -

Par / 28 septembre 2015

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si l’on se réfère seulement aux montants en jeu, ce débat européen porte sur des masses financières somme toute réduites, notamment au regard des sommes centralisées dans le budget de l’Union européenne.

Toutefois, dans ce cas comme dans bien d’autres, force est de constater que c’est à la validation d’un dispositif quelque peu vicié que l’on nous demande de procéder ici.

Pour des raisons diverses, produits de Conseils européens antérieurs, un certain nombre des pays de la zone euro bénéficient de rabais sur le montant de leur contribution nette au budget de l’Union européenne. Dans cet exercice – je le dis avec toute l’amitié que je porte à nos voisins d’outre-Manche –, le summum est atteint par la trop célèbre « correction britannique », dont l’importance – elle est tout de même supérieure à 5 milliards d’euros – constitue un certain manquement à la solidarité européenne, alors même que la Grande-Bretagne ne semble pas en reste quand il s’agit d’asseoir une bonne partie de son activité économique sur le secteur des services financiers, qui n’est pas dépourvu d’effets pervers sur la situation économique de ses voisins et partenaires.

Le dispositif de rabais sur contributions nettes pose évidemment la question de la qualité des appareils statistiques et fiscaux mis en œuvre dans les différents pays de l’Union européenne, avec tout ce que cela peut impliquer.

Il semble, en particulier, qu’une lutte déterminée contre la fraude fiscale – j’y reviens encore et toujours ! –, sous toutes les formes que celle-ci peut recouvrir aujourd’hui en Europe, pour un montant estimé tout de même, rappelons-le, à 1 000 milliards d’euros pour les vingt-huit États membres – l’enjeu n’est pas mineur ! –, constituerait un outil tout à fait pertinent pour fixer, avec la plus grande équité possible, la juste contribution de chacun des pays de l’Union européenne.

À notre sens, et ainsi que cela a été rappelé par certains de mes collègues, la lutte contre la fraude fiscale doit se polariser, entre autres, sur la fraude à la TVA intracommunautaire, d’autant que les recettes tirées de cet impôt sont directement concernées dans la fixation des contributions, et sur la mise en œuvre de schémas d’optimisation fiscale par les entreprises et les particuliers les plus riches. Il est aujourd’hui évident qu’une entreprise à vocation transnationale ne choisit plus par hasard d’implanter son siège social aux Pays-Bas, par exemple.

Cependant, nous nous interrogeons sur bien d’autres points, qui dépassent par là même le cadre somme toute élémentaire de ce débat.

Le budget européen, sur la période sous revue, s’avère, en effet, d’un montant inférieur aux ressources que la Banque centrale européenne entend lever au titre de l’assouplissement quantitatif pour « fluidifier » le fonctionnement des marchés financiers, notamment du marché interbancaire.

Concernant les priorités de la politique communautaire, nous nous interrogeons évidemment sur la dimension de la politique agricole commune, dont le moins que l’on puisse dire est que celle-ci n’a pas soulevé, ces derniers temps, un enthousiasme débordant parmi les agriculteurs eux-mêmes, comme en ont attesté les manifestations récentes.

Les politiques de développement de la compétitivité pour l’emploi et la croissance présentent, pour leur part, un certain nombre de défauts : l’un d’entre eux, et non des moindres, étant qu’elles sont trop souvent marquées par des logiques de flexibilisation et de réforme du code du travail fondées sur la précarisation des modes d’activité et la hausse du nombre de contrats atypiques.

Certains nous disent que le code du travail en France serait compliqué et qu’il faudrait le réduire à cent cinquante pages. Mais c’est oublier un peu rapidement qu’il n’y a pas eu de plan national pour l’emploi, de « pacte national » dans notre droit du travail et, par la voie législative, de nouveaux éléments de droit et de contrats de travail d’un nouveau type, assortis, comme souvent, d’allégements temporaires ou d’exonérations totales de cotisations sociales.

Ce qui rend le code du travail touffu, au fond, ce ne sont pas les droits individuels et collectifs des salariés en contrat à durée indéterminée, c’est bien plutôt les taillis foisonnants des formes atypiques du contrat de travail, singulièrement des contrats à durée déterminée.

Dans un pays où 85 % des offres de travail portent sur des contrats à durée déterminée, parler de « rigidité » du code du travail n’est pas un non-sens. Ce n’est qu’une contre-vérité, niant la réalité d’une précarité professionnelle renforcée.

Au demeurant, nous pouvons estimer qu’il serait temps de procéder à l’évaluation des politiques communautaires en matière d’emploi et de formation, notamment au regard des inégalités que l’on continue malheureusement d’observer en matière de développement territorial, autant à l’échelle d’un pays, au niveau « infrarégional », que dans les comparaisons entre les différentes nations européennes.

Le débat sur les moyens et les politiques de l’Union européenne prend également un tour nouveau durant cette seconde partie de l’année 2015, avec la persistance de la question grecque, le gouvernement issu des élections de janvier dernier ayant été confirmé en ce mois de septembre, dans le cadre d’élections anticipées faisant suite au premier round de négociations entre l’Union européenne et la Grèce, ainsi qu’avec les interrogations – légitimes – posées par la crise humanitaire résultant des conflits au Proche-Orient.

À cet égard, force est de constater que la situation de la Grèce continue de poser avec force le problème de la dette des États souverains, laquelle devra sans doute faire l’objet d’une sensible atténuation, voire d’une réduction – la question reste aujourd’hui posée –, et les moyens déployés pour venir en aide aux réfugiés s’avèrent évidemment dérisoires et largement insuffisants.

Le jeu de passage de la « patate chaude » auquel se livrent certains des pays de l’Union européenne, notamment certains des derniers membres entrés, les atermoiements et les décisions contradictoires prises par ailleurs, tout cela concourt à ne pas offrir au regard du monde une vision tout à fait positive de l’Europe. De plus, cela nourrit, dans chaque pays concerné, un certain sentiment de repli sur soi là où devraient s’affirmer solidarité, coopération, valeurs humanistes et détermination à résoudre les problèmes.

Bien sûr, des moyens sont nécessaires. Il faudra bien se rendre à l’évidence : le maintien des règles du pacte budgétaire et les politiques restrictives que celui-ci implique ne peuvent permettre de dégager les solutions sociales et politiques dont nous avons besoin tant pour répondre au drame humanitaire venu du Proche-Orient qu’aux discriminations, inégalités et exclusions dont souffrent trop de citoyens de l’Union européenne.

Au-delà du débat relatif à ce projet de loi, produit hybride de quelques politiques comptables de courte vue et d’égoïsmes devenus institutionnels, c’est bel et bien sur le sens même de la construction européenne que l’on s’interroge aujourd’hui. Si l’on n’y prend garde, la belle idée, le grand projet de la seconde moitié du siècle dernier, risquent de devenir lettre morte.

Quant aux nouvelles ressources envisagées pour financer l’Union européenne, nous avons tous, ici, évoqué la question de la taxation des transactions financières, une taxe qui fait figure de véritable arlésienne – en apparence, tout le monde s’accorde à son sujet, mais on ne voit rien avancer concrètement ! –, ainsi que celle de l’évasion fiscale, qui s’élève à 1 000 milliards d’euros au sein des vingt-huit États membres. Voilà des pistes sérieuses auxquelles nous pouvons nous intéresser aujourd’hui.

Dans ces conditions, notre groupe se prononcera, à l’issue de ce débat, par un vote d’abstention.

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