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Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Acces aux fonctions électives

Par / 8 février 2001

par Nicole Borvo

Monsieur le président, madame la secrétaire d’Etat, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi que mon amie Jacqueline Fraysse et les parlementaires communistes ont déposée en vue d’améliorer l’accès aux fonctions électives.

Nos collègues ont fait le choix délibéré de cibler les mesures les plus urgentes, les plus simples et les plus utiles. Il s’agit de donner un signal fort aux conseillers municipaux qui vont être prochainement élus.

Cette question nécessitant d’être traitée dans sa globalité, il ne nous a pas semblé opportun d’accélérer la réflexion d’ensemble qui s’est organisée autour du rapport de la commission Mauroy, que certains membres de la majorité sénatoriale ont, du reste, quittée.

Cette réflexion va aboutir, comme l’a annoncé Lionel Jospin, au dépôt d’un projet de loi relatif à la démocratie citoyenne.

Ce projet de loi ambitionne de franchir de nouvelles étapes dans le décentralisation en réorganisant les compétences des collectivités, en améliorant leur gestion financière et en permettant aux citoyens de mieux participer à la vie de la cité par le biais des conseils de quartiers et par l’instauration d’un véritable statut de l’élu.

Les élus communistes s’inscrivent pleinement dans la démarche en cours. Il est effectivement des sujets où l’importance des enjeux rend la concertation impérative. Les règles qui régissent la vie publique et qui sont le socle de l’édifice de nos institutions en font partie. Vous pouvez compter sur notre signature pour faire en sorte que ce projet corresponde aux besoins actuels des élus.

Voulant néanmoins permettre une réelle application des lois relatives à l’égalité des femmes et des hommes dans la vie publique et au non-cumul des mandats, les parlementaires communistes ont ciblé les mesures qu’il était urgent d’adopter avant les élections cantonales et municipales.

Etant donné l’attitude que la majorité sénatoriale a adoptée lors de l’examen de la proposition de loi organique relative à la date d’expiration des pouvoirs de l’Assemblée nationale, il semble très difficile que les mesures les plus urgentes puissent être adoptées entre aujourd’hui et la fin de la session.

De surcroît, la commission des lois propose une réécriture complète du texte adopté à l’Assemblée nationale, alors qu’une adoption conforme aurait permis des avancées immédiates. C’est bien là que le bât blesse.

Vous en avez décidé ainsi et, de ce point de vue, je dois dire que vous êtes très loin des intérêts des élus locaux, que vous prétendez pourtant représenter.

Lors des prochaines élections, la loi sur la parité va s’appliquer - c’est un fait - mais comment lui permettre d’avoir immédiatement une réelle efficacité, afin qu’elle ne se traduise pas par des mesures volontaristes, dans un esprit de « quotas » humiliant pour les candidates ?
Posons-nous d’abord la question de ce qui entrave l’engagement politique des femmes.

Quelles évolutions faciliteraient la participation des citoyennes et, au-delà, des citoyens à la vie publique ?

Ces interrogations ne concernent évidemment pas uniquement les femmes. Cependant, leur arrivée programmée dans la vie publique accentue la nécessité de mettre très rapidement en place un statut de l’élu digne de ce nom.

Instaurer un tel statut de l’élu est un enjeu de taille, et, selon nous, c’est l’un des moyens, bien évidemment pas le seul, de commencer à sortir de la crise de confiance politique que nous traversons.

Les lois de décentralisation avaient pour objet premier de rendre le pouvoir aux citoyens pour mieux répondre aux besoins. Elles ont conféré des pouvoirs accrus aux élus locaux avec, en corollaire, des responsabilités plus lourdes exigeant toujours plus de disponibilité et de compétences spécifiques.

Les élus locaux - chacun le sait - jouent un rôle irremplaçable dans le bon fonctionnement de la démocratie.

Même si leurs tâches s’avèrent de plus en plus dures, les élus locaux doivent répondre à des besoins de plus en plus diversifiés et de plus en plus nombreux, avec des moyens qui stagnent.

La décentralisation ne remplira pas entièrement ses objectifs tant que les collectivités locales n’auront pas des moyens financiers à la hauteur de leurs responsabilités. Je ne suis pas la seule à le dire.

L’instauration d’une taxe sur les actifs financiers telle que nous le proposons permettrait aux collectivités locales d’assumer leurs missions et de répondre correctement aux besoins de nos concitoyens.

Mais, pour que vive également pleinement la démocratie locale, encore faut-il que chaque citoyen puisse y participer. Or, tel n’est pas le cas. Les jeunes de moins de trente ans sont pratiquement absents de la vie locale. La proportion de salariés du secteur privé reste très faible. Le pourcentage de femmes est de 21,7 % - il va changer - chez les élus locaux. Le taux de féminisation tombe à 8 % chez les maires - j’espère aussi qu’il va changer, même si la loi ne l’impose pas - et il est surtout très bas dans les grandes communes.

Les lois sur la parité et sur le non-cumul des mandats, qui peuvent être mises au crédit du gouvernement actuel ainsi que le développement de la coopération intercommunale et des nouvelles fonctions qui s’y attachent sont autant d’occasions de renouveler et de diversifier la classe politique.

Si telle ou telle catégorie socioprofessionnelle est plus représentée parmi les élus locaux, ce n’est pas parce que la chose publique intéresse certains et pas d’autres, mais c’est surtout parce qu’il existe des facteurs favorisant cet état de fait. Pour certains, c’est la formation. Pour d’autres, c’est la possibilité de s’organiser de façon autonome dans le cadre de leur emploi et de maîtriser leur temps, ce qui correspond à la disponibilité nécessaire pour assurer pleinement un mandat électif.

Le fait qu’ils soient plus ou moins assurés de retrouver leur emploi s’ils perdent leur mandat électif constitue également, pour d’autres, un facteur déterminant, les autorisant à se lancer dans la vie politique locale.

Aussi, le statut de l’élu doit-il permettre de gommer les disparités et d’autoriser ainsi toutes et tous à exercer un mandat électif local, ce qui nécessite, vous en conviendrez, une concertation en profondeur et une prise en charge budgétaire importante, faute de quoi il n’y aura pas de changement réel.

Or, pour l’heure, la présente proposition de loi a pour objet l’adoption de quelques mesures simples dont la nécessité ne fait aucun doute et qui, sans prétendre tout régler, apportent des améliorations utiles et rapides dans l’attente d’un vrai statut.

Les dispositions de cette proposition de loi devront être complétées, ce ne sont pas les membres de notre groupe qui diront le contraire.

D’abord, parce qu’elle ne traite que des élus municipaux, pour les raisons que j’ai précisées.

Monsieur le rapporteur, vous proposez, et la commission des lois l’a accepté, d’élargir les réévaluations des indemnités à celles des conseillers généraux. Nous n’y sommes pas opposés, bien entendu.

D’autres amendements vont dans le bon sens, je pense en particulier à celui qui traite de l’indemnité de retour à l’emploi.

En revanche, votre texte est en retrait quant à la protection de l’élu salarié et à la validation professionnelle de l’expérience acquise en cours de mandat, auxquelles nous tenons.

Je formulerai deux objections de fond, plus importantes encore, pour expliquer notre état d’esprit.

Seule une adoption conforme du texte voté à l’Assemblée nationale permettrait, en raison des contraintes du calendrier - mais notre groupe n’en est pas responsable - une avancée dès la prochaine échéance électorale. Or, en modifiant le texte comme vous le faites, en réalité, vous rejetez toute possibilité d’améliorer l’exercice des fonctions électives dans l’immédiat. Vous refusez ainsi aux 500 000 conseillers municipaux qui vont être élus une amélioration concrète de l’exercice de leur mandat dès mars 2001. Nous ne pouvons pas l’accepter.

Pourtant, la proposition de loi se compose de sept articles tous intéressants.

L’article 1er inclut les frais de garde d’enfant aux pertes de revenu de l’élu qui peuvent être compensées par la collectivité. L’article 6 a un objet similaire.

L’article 2 élargit les crédits d’heures aux élus des communes de moins de 3 500 habitants et doublent leur montant pour tous.

L’article 3 accorde des garanties professionnelles aux salariés élus.

L’article 4 ouvre aux élus, en fin de mandat, les droits au congé individuel de formation.

L’article 5 porte à dix-huit le nombre de jours de formation.

Enfin, l’article 7 pose le principe d’une codification des dispositions sur le statut des élus dans le code du travail afin de leur donner plus de force vis-à-vis des employeurs, ce qui est tout à fait nécessaire.

Ces dispositions, sans répondre à tous les besoins, seraient tout à fait utiles tout de suite.

La deuxième objection porte sur les moyens financiers.

Le financement nécessaire pour un statut conséquent de l’élu n’est pas prévu à l’heure actuelle. Ce n’est pas de notre fait, l’Assemblée nationale en a décidé ainsi. Or, vous proposez des mesures bien plus importantes que celles que nous proposons, mais vous ne prévoyez aucun moyen de les financer.

Croyez-vous que vos propositions, si bonnes soient-elles, avec les réserves que j’ai émises, puissent être prises en charge uniquement par les collectivités locales ? C’est complètement irréaliste.

La mise en place de garanties pour les élus a un coût dont le montant est élevé.

La réflexion contradictoire engagée doit aboutir, à terme - je l’espère, le plus rapidement possible - à trouver un financement à la hauteur des enjeux ce qui éviterait de reporter le financement sur les collectivités locales.

En ce qui nous concerne, nous avons proposé la création d’un fonds qui servirait à prendre en charge les périodes d’absence des salariés élus, du fait de leurs mandats. Ce fonds pourrait être alimenté par les entreprises, au-delà d’un seuil de salariés.

La dotation « élu local » doit également être réévaluée et, surtout, versée à toutes les communes, sans considération démographique. Faut-il rappeler qu’elle n’est versée qu’aux communes de moins de 1 000 habitants et que chacune d’entre elles ne touche que 13 220 francs ?

Vous avez laissé entendre, monsieur le rapporteur, que les parlementaires communistes voulaient garder la paternité de la loi. Je trouve curieux que vous cherchiez, pour votre part, à empêcher le texte d’aboutir pour des raisons que je qualifierais de partisanes.

Je vous demande donc très solennellement, mes chers collègues, de retirer tous vos amendements, afin que le texte soit voté conforme. Je vous demande de ne pas faire de surenchère, de garder vos propositions
- qui seront, je n’en doute pas, très utiles - pour le débat d’ensemble programmé pour le printemps. Cette proposition de loi est certes incomplète, mais elle est néanmoins utile dans l’immédiat.

Explication de vote.

Bien entendu, nous nous engageons à poursuivre le débat lors de l’examen du projet de loi sur la décentralisation et la démocratie citoyenne.

Il nous a semblé important de donner tout de suite un signal fort aux 500 000 élus municipaux qui vont devoir exercer un mandat électif dans quelques semaines à peine. Je regrette, bien évidemment, que nous ne puissions aboutir aujourd’hui à l’adoption dans les mêmes termes de la proposition de loi votée par l’Assemblée nationale.

Pour cette raison et parce que nous ne voulons pas adopter, par démagogie, des mesures plus ambitieuses dont le financement n’est pas précisé, le groupe communiste, républicain et citoyen s’abstiendra.

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