Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

Lire la suite

Commercialisation et utilisation de certains engins motorisés

Par / 10 avril 2008

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, chacun en convient, les mini-motos et les quads non réceptionnés, utilisés trop souvent sans aucun discernement par leurs propriétaires, causent des nuisances à la fois sonores et environnementales et sont à l’origine d’accidents graves, parfois mortels, impliquant généralement de jeunes enfants.

Ces engins ont connu ces dernières années un véritable engouement. De petite taille, ils circulent sur la voie publique au mépris de la loi et des règles de sécurité et sont très vite devenus un véritable phénomène de mode. Les parents en ont voulu pour leurs enfants, même pour les plus jeunes ; les revendeurs ont vu dans ce marché une aubaine ; le prix de ces engins de poche, devenu attractif, a rendu cet achat accessible au plus grand nombre.

Alors que ces petits véhicules sont interdits de circulation sur la voie publique, ils sont en vente libre dans les grandes surfaces, qui les commercialisent comme s’il s’agissait de produits de consommation courante, pis, comme des jouets, alors que c’est loin d’être le cas.

On trouve également de nombreux modèles à bas prix et à la sécurité douteuse sur Internet, où, en outre, aucune information n’est donnée aux acheteurs sur l’usage de ces véhicules, qui, compte tenu de la vitesse qu’ils peuvent atteindre, sont dangereux lorsqu’ils sont utilisés en dehors des structures sportives adaptées.

Partant de ce constat, des propositions de loi ont été déposées pour tenter d’apporter des solutions aux problèmes posés par l’utilisation illégale, dangereuse et nuisible des mini-motos et autres quads non soumis à réception.

Le texte que nous examinons aujourd’hui vise ainsi à mieux encadrer la commercialisation de ces véhicules de poche et à limiter leur usage.

Je partage cet objectif, mais je m’interroge. Si l’intention est bonne, ce texte, qui a été réécrit par la commission des lois du Sénat, suffira-t-il à régler le problème dans sa globalité ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’avenir le dira !

Mme Éliane Assassi. J’en doute, d’abord parce que je pense que la loi ne peut pas tout. D’ailleurs, le dispositif législatif prévu dans la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, qui était censé remédier à ce problème, n’a rien réglé du tout.

J’en doute ensuite parce que je pense que la question des mini-motos doit être posée à l’échelon européen compte tenu des importations anarchiques de ces produits et du problème des ventes sur Internet, qui sont difficilement contrôlables, surtout lorsque les sites concernés sont hébergés sur des serveurs situés à l’étranger.

Au-delà de ces aspects, ce qui est indispensable à la mise en oeuvre de tout dispositif en la matière, c’est la mise à disposition de moyens adaptés pour une application efficace. À cet égard, le présent texte, dont les décrets devront encore être pris, risque de se heurter rapidement à de nombreux obstacles.

S’il y a réglementation, interdiction, sanction, il faut alors instaurer des contrôles. Quels moyens avez-vous prévus à cet effet ?

Ainsi, concernant les contrôles des importations et de la qualité des produits, les personnels des douanes et ceux de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, effectuent un travail remarquable, que je salue ici. Toutefois, ils ont de plus en plus de difficultés à accomplir leurs missions en raison du nombre trop élevé de produits à contrôler par rapport à leurs effectifs, lesquels ne risquent guère d’évoluer compte tenu de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, actuellement en cours.

Quant aux contrôles sur la voie publique en cas d’infraction, par qui seront-ils effectués ? Avec quels effectifs ? Par exemple, les effectifs de la brigade d’intervention spécialisée constituée de motards expérimentés seront-ils augmentés, comme le demandent de nombreux maires ?

Là encore, ce n’est pas la RGPP qui permettra de répondre aux besoins !

Il y a actuellement 40 000 mini-motos et 10 000 quads en circulation. Contrôlerez-vous réellement leurs utilisateurs ? Comment procéderez-vous ?

D’autres questions sont en suspens, comme le problème de la pollution environnementale. En effet, ces engins polluent pendant et après leur utilisation. Compte tenu de leur médiocre qualité, de leur durée de vie assez courte et de la quasi-impossibilité de les réparer, la question de leur recyclage est donc posée. Comment traiterez-vous ce problème ?

Si aucune réponse, singulièrement en termes de moyens, n’est apportée aux questions non exhaustives que je viens de soulever, alors cette proposition de loi ne sera qu’un texte d’affichage, difficilement applicable et donc malheureusement inefficace.

Je ne suis d’ailleurs pas la seule à douter du dispositif proposé. En effet, M. le rapporteur est lui-même dubitatif quant à la mise en oeuvre effective de ce texte, et ce pour deux raisons. Je partage son point de vue.

Il s’agit, d’une part, de la difficulté d’endiguer la vente de mini-motos et de quads sur Internet faute d’une action européenne et, d’autre part, de la difficulté pour les forces de l’ordre d’interpeller les utilisateurs de mini-motos et de quads qui circulent illégalement sur la voie publique.

La commission des lois a presque entièrement réécrit le texte issu de l’Assemblée nationale, à tel point que je me demande si les députés, qui avaient pourtant adopté cette proposition de loi à l’unanimité, vont y retrouver leurs petits lors de la deuxième lecture.

Le texte de l’Assemblée nationale, qui était déjà plus axé sur le renforcement des sanctions que sur l’éducation et la prévention, a été modifié par le rapporteur de la commission des lois du Sénat. Ainsi M. Courtois, conscient de la difficulté qu’il y a à régler le problème des mini-motos et à corriger les défauts du texte adopté par les députés, propose d’obliger les propriétaires de ce genre d’engins à les déclarer auprès de l’autorité administrative qui délivrera un numéro d’identification, devant être marqué de façon visible.

Une telle disposition vise à permettre aux forces de l’ordre d’identifier à distance les véhicules, de retrouver ensuite les propriétaires et d’avoir une meilleure traçabilité des engins achetés sur Internet.

Il n’est donc plus question ni d’améliorer l’information du consommateur au moment de l’achat d’un tel engin ni de la charte de qualité, encore moins de prévenir les accidents.

L’attribution d’un numéro d’identification à ces mini-motos pourrait être perçue comme l’acceptation implicite de l’utilisation de ces engins sur la voie publique alors qu’ils ne devraient être utilisés que sur des circuits prévus à cet effet. On voit bien là les limites de ce texte.

Je pense qu’on se dirige vers un dispositif complexe et répressif, bien loin de la prévention. Je crains aussi que les modifications proposées par la commission des lois ne conduisent à un changement profond de l’approche des problèmes que posent les mini-motos et les quads.

Ainsi, auprès de quelle autorité administrative ces engins devront-ils être déclarés ? De quels moyens cette autorité disposera-t-elle ? Un fichier des détenteurs de mini-motos et de quads sera-t-il constitué, comme pour les propriétaires de chiens dangereux ? Les 40 000 mini-motos et les 10 000 quads déjà en circulation sont-ils concernés par ces dispositions ? Si oui, comment procéderez-vous et dans quels délais ?

Pour ma part, j’estime qu’il est avant tout indispensable de mettre l’accent sur la prévention et l’éducation en prévoyant, par exemple - vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État - une grande campagne d’information et de sensibilisation à destination des détenteurs actuels et des futurs acquéreurs de tels engins. Surtout, il faut absolument responsabiliser les parents sur les dangers de ce genre de petits véhicules, qui ne sont pas des jouets, car ce sont eux qui achètent ces engins à leurs enfants, parfois même âgés de moins de quatorze ans.

Je pense donc qu’il faut traiter le problème en amont, à la source. Il faut assainir le marché des mini-motos et les réserver à la seule pratique sportive ou professionnelle, comme c’était le cas il n’y a pas si longtemps encore, avant que l’utilisation de ces engins ne devienne un phénomène de mode. Pour cela, il faut également limiter les lieux de ventes.

Je partage l’objectif de ce texte, mais, compte tenu des interrogations et des doutes que je viens d’exprimer, les sénateurs du groupe CRC ne voteront pas cette proposition de loi et s’abstiendront.

Les dernieres interventions

Lois Qui va payer les quotas gratuits sur le marché du carbone ?

Adaptation du droit de l’Union européenne - Par / 9 avril 2024

Lois Le nucléaire, quoi qu’il en coûte ?

Fusion de l’Autorité de sûreté du nucléaire avec l’institut chargé de l’expertise sur le nucléaire - Par / 8 avril 2024

Lois Nouvelle-Calédonie : le dégel du corps électoral ne passe pas

projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. - Par / 3 avril 2024

Lois Confisquons les biens criminels

PPL améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels - Par / 26 mars 2024

Lois L’autorité parentale n’est pas automatique

Proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales - Par / 13 mars 2024

Lois Un statut pour que chacun puisse devenir élu

Proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local - Par / 7 mars 2024

Lois Un vote historique pour inscrire l’IVG dans la Constitution

Liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse - Par / 29 février 2024

Lois Alerte sur l’habitat dégradé

Projet de loi sur la rénovation de l’habitat dégradé - Par / 27 février 2024

Lois Une colonisation de peuplement en Nouvelle-Calédonie

Projet de loi organique pour reporter les élections en Nouvelle-Calédonie - Par / 27 février 2024

Lois Une boîte noire pour les entreprises ?

Garantir la confidentialité des consultations juridiques - Par / 15 février 2024

Lois Coup de pouce pour les communes rurales

Dérogation à la participation minimale pour la maîtrise d’ouvrage pour les communes rurales - Par / 13 février 2024

Lois Protéger les enfants, même des parents

Proposition de loi sur les violences intrafamiliales - Par / 6 février 2024

Lois Action de groupe : la conquête entravée du collectif

Proposition de loi sur le régime juridique des actions de groupe - Par / 5 février 2024

Lois Un maire sans argent est un maire sans pouvoir

Vote sur la proposition de loi tendant à améliorer la lisibilité du droit applicable aux collectivités locales - Par / 25 janvier 2024

Lois Ne pas tomber dans le piège des terroristes

Proposition de loi instituant des mesures judiciaires renforçant la lutte antiterroriste - Par / 23 janvier 2024

Lois Outre-mer : une question de continuité intérieure

Débat sur les mesures du Comité Interministériel des Outre‑mer - Par / 10 décembre 2023

Administration