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Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Avec ce nouvel OVNI institutionnel, c’est une nouvelle étape du démantèlement des institutions républicaines qui est franchie

Règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse -

Par / 26 janvier 2017

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis porte sur la ratification de trois ordonnances qui précisent les modalités de fusion des départements de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse avec la collectivité territoriale de Corse, en application de la loi NOTRe, que notre groupe avait unanimement rejeté. Avec ce nouvel OVNI institutionnel, c’est une nouvelle étape du démantèlement des institutions républicaines qui est franchie.

Faut-il rappeler que le 6 juillet 2003, voilà treize ans, les Corses s’étaient massivement mobilisés lors d’un référendum sur le statut de l’île ? Ils avaient majoritairement exprimé leur attachement à l’existence des trois collectivités qui composent cette région et rejeté la proposition de suppression de l’échelon départemental.

Dix ans plus tard, le projet de collectivité unique a été remis à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée de Corse. Il ne faut pas oublier que ce débat s’est déroulé dans un contexte national où, au plus fort des discussions concernant la loi MAPTAM, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, et la loi NOTRe, certains opéraient, ici à Paris, un véritable coup d’État contre l’existence des départements de France.

En Corse, comme dans l’ensemble du pays, les électeurs ont d’ailleurs sévèrement sanctionné les partisans de la suppression des départements, tant aux élections municipales de 2014 qu’aux élections départementales de 2015.

Et pourtant, au mépris du souhait des Corses, qui se sont exprimés à plusieurs reprises à l’encontre de la création d’une collectivité unique sur l’île, le projet a été glissé par un tour de passe-passe au sein de la loi NOTRe.

Nous dénonçons donc, aux côtés des élus communistes de l’Assemblée de Corse, ce passage en force en cours, qui relève d’un processus particulièrement antidémocratique. Nous réitérons leur demande d’un projet de loi spécifique avec ratification par référendum.

Sans nier les particularités de la Corse liées à son insularité, personne n’est dupe du caractère expérimental de ce changement, après celui de la métropole de Lyon, préalablement à une remise en cause plus large de l’échelon départemental. Certains n’en ont pas fait mystère en commission des lois, M. Kaltenbach indiquant même qu’il s’agissait « d’un très bon exemple de ce qui pourrait se développer sur le continent, en région parisienne par exemple. » Sans que les Corses aient été démocratiquement consultés, ils pourraient donc servir de cobayes aux liquidateurs de nos institutions républicaines.

Mais cette fusion recouvre d’autres enjeux. Adopter la collectivité unique en Corse, c’est adopter le modèle de l’Europe des régions, en concurrence avec les territoires voisins.

Est-ce que le modèle souhaité pour la Corse sous la pression des autonomistes est celui qui prévaut en Italie, avec des territoires autonomes comme le Mezzogiorno, où les habitants ont des revenus 50 % inférieurs à ceux du Nord ? Pour notre part, nous refusons une France à deux vitesses.

Comme l’ont exprimé les syndicats et les travailleurs de Corse, avec cette réforme, la République s’éloignerait un peu plus en Corse des problématiques qu’elle a pour tâche de résoudre.

C’est pourquoi il faut, avant toute chose, réduire les inégalités économiques de l’île, sachant que la Corse a, de très loin, le plus bas PIB régional de France métropolitaine.

C’est pourquoi il faut aussi en finir avec les inégalités éducatives, la population de Corse étant la moins diplômée de France métropolitaine.

C’est surtout pourquoi, enfin, il faut résoudre le problème de la cherté de la vie et des inégalités sociales en Corse, le revenu par habitant y étant le plus faible du pays, et 21 % de sa population vivant en dessous du seuil de pauvreté. N’oublions pas que 10 % des ménages concentrent 33 % des revenus déclarés en Corse et que les ménages les plus fortunés ont des revenus sept fois supérieurs aux moins aisés.

Dans ce contexte, la suppression des départements, qui jouent un rôle essentiel au service des personnes âgées, des personnes handicapées, des enfants en danger, des populations les plus fragilisées, est un risque majeur pour la cohésion sociale de la Corse.

Poursuivre ce modèle de l’Europe des régions, fondé sur la concurrence des territoires et des populations, est, à nos yeux, une profonde erreur. Il s’agit d’un modèle qui, à rebours des exigences sociales de la Corse, a pour objet de permettre, à terme, des dérogations au cadre national du droit du travail.

C’est enfin un modèle au service de l’oligarchie économique, qui souhaite faire main basse sur l’île, comme elle l’a fait avec l’ancienne société maritime nationale, désormais gérée sous la forme d’un consortium privé représentant 10 % du PIB de la Corse. Tout cela s’est fait au détriment des salariés, des agents du service public, des agriculteurs, des PME, notamment celles du tourisme et du BTP.

Mme Cécile Cukierman. Eh oui !

M. Christian Favier. L’égalité entre les territoires et entre les individus est un fondement républicain sur lequel on ne peut transiger. La véritable priorité pour la Corse, c’est de prendre à bras-le-corps la question des inégalités. Or cette réforme, malheureusement, ne conduira qu’à les aggraver.

Enfin, nous refusons la démarche politique qui la sous-tend.

Certains soutiennent cette réforme, car elle est, à leurs yeux, le moyen de réduire le champ de l’action publique et un outil pour la réduction de l’emploi public. C’est la poursuite de la mise en œuvre du dogme libéral de suppression d’un fonctionnaire sur deux, dogme véhiculé successivement par les réformes Fillon et Lebranchu.

D’autres, du côté des nationalistes, y voient l’aboutissement d’un projet politique porteur de divisions, bien loin des 20 000 Corses qui, aux côtés du résistant Jean-Baptiste Ferracci, prêtèrent à Bastia, le 4 décembre 1938, un serment d’attachement aux valeurs progressistes de la République.

Et que dire de l’affaiblissement démocratique, avec une assemblée qui passerait de 104 élus départementaux et territoriaux à 63 élus dans la future collectivité unique, ce qui éloignera un peu plus les citoyens de leurs représentants ?

Mes chers collègues, sans République, il n’y a pas d’égalité, et sans égalité, il n’y a pas de République. Beaucoup de Corses ont raison d’être en colère à ce sujet.

Depuis près de 250 ans, les Corses ont tant apporté à la France que la République doit aujourd’hui leur rendre ce qu’ils lui ont donné, ce qui passe par un véritable projet d’égalité avec le reste du territoire national, ainsi que par un investissement massif dans un développement alliant progrès sociaux et réussites économiques.

Je terminerai mon propos en citant mon ami Dominique Bucchini, ancien président de l’Assemblée de Corse : « La seule voie pour la Corse, c’est la mobilisation populaire. Notre problème n’est pas identitaire, mais économique. »

Attachés au principe de la consultation par référendum des Corses, les sénateurs communistes, républicains et citoyens s’opposeront à ce projet de loi, tout comme l’ont fait les élus communistes de l’Assemblée de Corse.

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