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Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Il est impératif de respecter les principes des droits de la défense 

Adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne -

Par / 23 juillet 2015

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la nouvelle lecture de ce projet de loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne est soumise à notre assemblée après l’échec de la commission mixte paritaire du 17 juillet dernier.

Ce texte transpose avant tout des décisions-cadres et des directives de l’Union européenne que nous aurions dû transposer en 2011 et 2012 dans notre droit pénal : la reconnaissance mutuelle des décisions de probation, afin de rendre celles-ci applicables dans n’importe quel pays européen, indépendamment de l’État qui les a prononcées, la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle judiciaire alternatives à la détention provisoire, et, enfin, la prévention et le règlement des conflits lorsqu’un État ayant ouvert une procédure pénale a des raisons de penser que la même procédure peut être ouverte dans un autre État.
Ces dispositions visent essentiellement à assurer l’égalité entre les citoyens européens, quel que soit leur État d’appartenance, de façon que les décisions judiciaires puissent être appliquées automatiquement dans l’État de résidence, s’il n’a pas pris la décision, ou dans un autre État, sous réserve de l’accomplissement d’une formalité préalable par l’équivalent de notre parquet. Il s’agit également de renforcer la protection des victimes en instaurant des normes minimales de droits et de soutien.

Depuis le début de son examen par le Sénat, en novembre 2014, après engagement de la procédure accélérée, ce projet de loi a été « enrichi » : vingt-huit articles ont été ajoutés au texte initial.
Sur le fond, nous soutenons les articles qui tendent à assurer la mise en œuvre de l’encellulement individuel en favorisant les solutions de substitution à l’emprisonnement et la personnalisation des peines. Nous soutenons également les dispositions renforçant les droits des victimes et, plus largement, l’aide aux victimes. À cet égard, nous saluons le principe d’une majoration de 10 % des amendes contraventionnelles, correctionnelles, criminelles et douanières au profit de l’aide aux victimes.

Cependant, si ces vingt-huit nouveaux articles ne posent pas de difficultés particulières quant à leur contenu, nous regrettons que l’Assemblée nationale ait considérablement modifié le périmètre initial du texte, qui est passé de huit à quarante et un articles. Cette modification porte atteinte aux prérogatives du Sénat, a fortiori s’agissant d’un texte examiné en procédure accélérée, et s’oppose à l’article 45 de la Constitution, dans la mesure où les vingt-huit articles ajoutés n’ont pas de lien avec le texte initial.
Parmi les nouvelles dispositions adoptées par l’Assemblée nationale, l’une d’elles a été introduite par voie d’amendement gouvernemental en séance publique. C’est cette disposition qui fait l’objet d’un désaccord majeur et infrangible entre nos deux chambres. L’article en cause, l’article 5 septdecies A, vise à systématiser la transmission aux autorités administratives compétentes, par le parquet, d’informations sur les faits délictueux reprochés à une « personne exerçant une activité professionnelle ou sociale impliquant un contact habituel avec des mineurs ».

Cet article prévoit que les autorités judiciaires pourront ou devront informer les autorités administratives compétentes pour le contrôle des personnes exerçant des activités auprès des mineurs des procédures mettant en cause ces dernières lorsqu’il s’agit d’infractions graves, commises contre des mineurs ou de nature sexuelle. L’information sera obligatoire en cas de renvoi devant une juridiction, de mise en examen ou de condamnation pour certaines infractions, dont l’article établit la liste. Elle sera laissée à l’appréciation du parquet pendant la période de l’enquête ou s’il s’agit d’une infraction ne figurant pas dans la liste.
Tout l’enjeu consiste à trouver le juste équilibre entre, d’une part, le secret de l’enquête, de l’instruction et du délibéré, et, d’autre part, la présomption d’innocence, à laquelle nous sommes toutes et tous attachés.

La difficulté majeure du dispositif est qu’il prévoit une possibilité de transmission de l’information au moment de l’enquête. Or, à ce stade, bien en amont de l’établissement formel de la culpabilité, et donc du prononcé du jugement, il convient de prendre toutes les précautions nécessaires. Des garanties précises doivent être prévues – des indices suffisamment graves doivent avoir été recueillis –, compte tenu des conséquences catastrophiques que provoquerait la transmission d’informations si la culpabilité n’était pas avérée ; M. le rapporteur l’a souligné.

Bien entendu, nous souscrivons à la volonté de renforcer le contrôle des antécédents judiciaires des personnes exerçant des activités ou professions impliquant un contact avec les mineurs. Il est nécessaire de combler les vides juridiques, afin de renforcer les échanges d’information entre la justice et les administrations, dans le souci de protéger les enfants.

Cependant, il est impératif de respecter les principes des droits de la défense : chaque personne mise en cause doit être informée des pièces et informations transmises à son sujet, et ce d’une manière contradictoire. Il s’agit là de garanties introduites par la commission des lois de l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Ces garanties sont toutefois insuffisantes. Le dispositif proposé contrevient à la présomption d’innocence, standard du droit pénal international, qui constitue, je vous le rappelle, mes chers collègues, à la fois un principe à valeur constitutionnelle, depuis 1789, et un principe à valeur conventionnelle, puisqu’il figure dans la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Nos réserves sur cette question difficile, ainsi que sur la méthode adoptée par le Gouvernement et l’Assemblée nationale, nous conduisent à être sensibles aux arguments avancés à l’appui de la motion d’irrecevabilité que notre rapporteur va nous présenter, et sur laquelle nous ferons une brève explication de vote.

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