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Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Il faut apporter des réponses supplémentaires, dont des moyens pour la formation et l’information

Signalement de situations de maltraitance -

Par / 22 octobre 2015

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la semaine dernière, notre assemblée a été appelée à examiner la proposition de loi relative à la protection de l’enfant. Aujourd’hui, nous discutons d’une proposition complémentaire, relative à la procédure de signalement des situations de maltraitance par les professionnels de santé.

La maltraitance est définie par la Haute Autorité de santé comme « le non-respect des droits et des besoins fondamentaux des enfants, qu’il s’agisse de la santé, de la sécurité, de la moralité, de l’éducation ou du développement physique, affectif, intellectuel et social ». Elle emporte des conséquences majeures sur la santé de l’enfant, sur son développement, puis, tout au long de sa vie, sur la dignité de l’adulte qu’il est devenu. Elle représente, à ce titre, un véritable enjeu de santé publique.

Les médecins sont des acteurs essentiels dans le repérage de la maltraitance, notamment au cours des premières années de vie des enfants, en raison des contacts réguliers qu’ils ont avec ceux-ci.

Or les situations de maltraitance ne sont que rarement signalées : selon la Haute Autorité de santé, 90 % d’entre elles ne font pas l’objet d’un signalement. Elles sont, en outre, peu déclarées par les médecins : seuls 5 % des cas de maltraitance signalés l’ont été par des médecins, alors qu’un tiers des signalements effectués émanent des services sociaux, 20 % de l’éducation nationale, un peu plus de 15 % du voisinage ou de l’entourage et un peu plus de 15 % de la famille elle-même.

Actuellement, les difficultés à caractériser la maltraitance par manque de formation, les réticences à remettre en cause la sphère de la famille – en opposition à la sphère publique –, mais aussi les méconnaissances du dispositif de signalement sont autant de freins à l’action des médecins. Il faut y ajouter, chez certains d’entre eux, la peur d’être poursuivis par les présumés agresseurs s’ils effectuent un signalement, même si, en réalité, l’absence de signalement fait également courir un risque au médecin, pour non-assistance à l’enfant en danger.

Le repérage précoce est décisif pour la protection des victimes, et les professionnels de santé, parce qu’ils sont en contact régulier avec les enfants dès leur plus jeune âge, sont en première ligne pour détecter un cas de maltraitance et le signaler aux autorités compétentes.

L’objectif de cette proposition de loi est « de protéger l’ensemble des médecins des poursuites qui pourraient leur être intentées et, de ce fait, de renforcer et encourager leur mission de protection des mineurs faisant l’objet de violences ».

En première lecture, nous avions voté en faveur de ce texte, qui, parce qu’il tend à favoriser le signalement par les médecins – il instaurait initialement une obligation de signalement dans tous les cas de présomption de maltraitance –, constitue une réelle avancée.

De ce point de vue, la disposition la plus importante est l’extension de l’encouragement des signalements des médecins à l’ensemble des professionnels de santé. Parmi ceux-ci figurent notamment les sages-femmes.

Je souhaiterais précisément évoquer ici la situation d’une sage-femme accusée de « violation du secret médical » et de « non-respect du code de déontologie » pour avoir signalé des maltraitances dans le cadre de violences conjugales. Après avoir établi, à la demande d’une patiente, un certificat médical constatant des violences subies, cette sage-femme comparaît aujourd’hui devant le conseil de l’ordre des sages-femmes, une plainte ayant été déposée à son encontre par le conjoint agresseur pour les deux motifs que je viens de mentionner. Le conjoint prétend en effet que la sage-femme était tout autant tenue au respect du secret professionnel à son égard qu’à celui de sa compagne.

Au travers de ce cas se pose la question de la protection des professionnels de santé amenés à constater des faits de violence et à produire des attestations.

Au-delà du cadre restreint de cette proposition de loi, qui concerne les signalements des actes de maltraitance sur des enfants, je tiens à souligner l’importance du sujet des maltraitances commises envers les femmes et, a fortiori, les femmes enceintes. Les 3 500 personnes, dont de très nombreux médecins et professionnels de santé, qui ont signé la pétition de soutien à la sage-femme dont je viens d’évoquer le cas considèrent qu’il y a urgence à renforcer la protection des professionnels de santé habilités à délivrer des attestations aux victimes de violences conjugales, au regard des risques de sanction que ceux-ci encourent auprès des juridictions disciplinaires de leurs ordres respectifs.

Selon le docteur Muriel Prudhomme, gynécologue et ancienne directrice de la maternité des Bluets, « entre 30 % et 40 % des violences conjugales commencent lors de la grossesse. Les sages-femmes sont souvent confrontées à ces situations. Il faut que les professionnels de santé puissent dépister et signaler les violences sans aucune crainte et ne surtout pas laisser croire que les agresseurs peuvent les attaquer ».

Si la proposition de loi permet d’autoriser la révélation du secret médical en cas d’atteintes sur mineurs pour les professionnels de santé au sens large, il est nécessaire de préciser que cette faculté concerne également les femmes enceintes. Pour cette raison, nous sommes favorables à ce que la mise en cause de la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire des professionnels de santé qui signalent des actes de maltraitances soit écartée.

Cette proposition de loi, qui facilite et étend les possibilités de signalements, va donc dans le bon sens, même si nous avons conscience que, en raison du faible nombre de déclarations, les situations de maltraitance ne disparaîtront évidemment pas du jour au lendemain.

Elle apporte une réponse supplémentaire dans le cadre du dispositif global qui doit être mis en œuvre. En effet, seule une action globale apportera une solution satisfaisante. Cette réponse globale nécessite des moyens supplémentaires pour former les professionnels de santé à la détection des situations de maltraitance et pour assurer une bonne information sur les obligations de déclaration.

Par ailleurs, nous tenons à relayer les inquiétudes que cette proposition de loi suscite chez certaines associations de parents d’enfants autistes, lesquelles craignent que l’obligation de déclaration ne bascule parfois dans l’excès, pouvant conduire à des placements abusifs à la suite de signalements infondés. Ces associations citent notamment le cas d’enfants placés parce qu’ils présentaient des hématomes, alors qu’il s’agissait en réalité de symptômes de la « maladie des os de verre » et que ces hématomes ne résultaient nullement d’actes de maltraitance.

Pour éviter ces erreurs, nous devons veiller à ce que l’obligation de signalement des actes de maltraitance s’accompagne de dispositifs de formation initiaux et continus sur la détection des actes de maltraitance à destination de tous les professionnels de santé.
Cette nécessité a d’ailleurs été soulignée par M. le rapporteur.

Nous saurons, bien sûr, dépasser les clivages partisans, dès lors que nous estimons que cette proposition de loi va dans le bon sens. Notre groupe votera évidemment celle-ci sans aucune réserve !

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