Lois
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Nous regrettons le manque d’anticipation du gouvernement
Élections législatives et sénatoriales partielles -
Par Éliane Assassi / 8 décembre 2020Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les textes examinés ce jour viennent s’ajouter à la liste des dispositions que nous votons, depuis maintenant plusieurs mois, pour contrecarrer les conséquences de l’épidémie de covid-19. Nous le savons, cette crise met sous cloche la vie sociale, en général, et malheureusement une de ses composantes essentielles, la démocratie.
Oui, cela implique que le Parlement vote des dispositions aux premiers abords techniques et pratiques, comme ces deux projets de loi visant à reporter des élections partielles dont la tenue a été compliquée par la situation sanitaire. Je crois que nous partageons tous ce constat.
Toutefois, l’agenda démocratique a aussi été perturbé par la gestion de cette crise – rappelons-nous l’organisation chaotique des élections municipales. Nous regrettons un manque d’anticipation, allant à l’encontre des conditions démocratiques de tenue des scrutins, de l’égalité entre les candidats, de la bonne information des électeurs ou encore des impératifs de transparence.
Pourquoi le Gouvernement a-t-il attendu pour nous transmettre ces textes ? Nous nous retrouvons à devoir les examiner de manière précipitée : en commission, ce matin, et en séance, cet après-midi. Cela illustre le peu de respect de l’exécutif envers le Parlement, qui devrait acter machinalement ses volontés.
Nous saluons d’autant plus le travail de la commission des lois.
Celle-ci a substitué, aux recommandations et avis du comité scientifique, un rapport plus poussé et localisé des ARS, délivré tous les quinze jours sur les circonscriptions concernées, afin que l’on dispose de chiffres et valeurs exacts pour décider, ou non, de la tenue d’élections partielles.
La commission a aussi rappelé, utilement, que l’État doit se porter garant des bonnes conditions matérielles d’organisation du scrutin.
Les élections ne sont pas une formalité. Ce sujet à l’apparence technique ne peut donc pas être pris à la légère et glisser ainsi dans notre ordre du jour.
Cette précipitation semble liée à un cas particulier, celui de l’élection partielle dans la sixième circonscription du Pas-de-Calais.
Au-delà de la forme, le fond de ce texte soulève certains problèmes. Le report des élections nous fait sortir du droit commun pour aller vers un dispositif extraordinaire, et ce dans le cadre d’une procédure excluant encore une fois le Parlement et donnant tout pouvoir à l’exécutif sur le maintien du système démocratique en temps de crise.
Alors que, après les multiples erreurs commises par le Gouvernement dans son mode de travail, la situation sanitaire est incertaine, la tenue des élections doit être discutée et envisagée de manière plus transparente.
L’arrivée tardive de ces textes proposant de décaler des élections jusqu’au 13 juin prochain semble d’autant plus à contre-courant qu’on nous les présente au moment même où l’on déconfine le pays. La démocratie, aussi, doit être déconfinée ! Le Gouvernement le doit aux représentants des forces politiques, aux élus locaux et aux citoyens !
Nous ne sommes pas dans la même situation que pour les élections municipales. Les élections partielles sont circonscrites à certains lieux et leur organisation ne peut répondre à une logique unique venant d’en haut.
Les méthodes du Gouvernement, dans ses choix et dans sa communication, ont nourri tout au long de la crise une perte de confiance et un malaise démocratique.
Donc, certes, il y a des aspects techniques à traiter, mais considérons que la tenue des élections est un sujet éminemment politique. Ce n’est pas une simple case à cocher, un simple report à décider ! Cela implique des campagnes bousculées, des façons d’informer à réinventer, des moyens à donner aux candidats et aux organisateurs pour assurer, au-delà du bon fonctionnement de ces élections, la visibilité et la consistance républicaine qui y est attachée.
Les effets de la crise ne doivent plus être des surprises quotidiennes ; le Gouvernement aurait dû prendre ses responsabilités pour mieux anticiper les échéances électorales.
C’est un constat global depuis les municipales puisque, s’agissant des élections départementales et régionales, nous sommes toujours dans l’attente du projet de loi qui devrait les reporter à juin prochain, avec un risque non négligeable de concomitance avec des élections partielles.
Ces élections structurent la vie citoyenne de notre pays ; certaines attentes des élus et des citoyens qui ne sauraient être bâclées. S’il est nécessaire d’apporter des réponses aux situations locales en suspens, nous souhaitons que le Gouvernement sorte d’une stratégie de l’improvisation constante.
Cependant, en cohérence avec notre exigence que la démocratie soit déconfinée et que le vote reste l’un des outils pour lui permettre de s’exprimer, nous voterons ces textes.