Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Une année entière consacrée seulement au service des plus riches

Réunion du Parlement en Congrès -

Par / 9 juillet 2018
Un exercice monarchique et autoritaire du pouvoir au service des privilégiés
par [Groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste->https://www.youtube.com/channel/UCGMy4lcU26bYb4ZFHYMZQZw]
https://youtu.be/se8oV9EkMYs
Une année entière consacrée seulement au service des plus riches

Monsieur le président du Congrès, monsieur le président du Sénat, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, chers collègues, cette seconde convocation en seulement un an du Parlement, réuni en Congrès par le nouveau président de la République, ici même, au château de Versailles, est plus qu’un symbole : c’est à nos yeux une alerte pour la démocratie, après une année entière consacrée seulement au service des plus riches, une année menée à un train d’enfer, très souvent sans égards ni respect pour le travail du Parlement.

Certes, on nous dira que le Président de la République ne fait qu’utiliser un article de la Constitution créé par Nicolas Sarkozy – rendons à César ce qui lui appartient –, permettant cet exercice de discours présidentiel à sens unique auquel nous venons à nouveau d’assister. Mais pourquoi cette utilisation répétée ? Y avait-il urgence à sacrifier de nouveau à un tel rituel ? L’annonce du plan pauvreté, ou celle de la réforme de l’hôpital, qui relèvent bien de l’urgence, ont pourtant été repoussées sans ménagement à l’automne.

M. Pierre Dharréville. C’est une honte !

M. Pierre Laurent. C’est bien là qu’il aurait fallu presser le pas. (Applaudissements sur quelques bancs.)

Quelle urgence y avait-il à cette nouvelle démonstration de communication gouvernementale ? Une seule, en vérité : le président Emmanuel Macron est venu nous dire une nouvelle fois qu’il entend achever la transformation de notre République en une monarchie présidentielle dont il devrait être l’unique chef. L’amendement évoqué tout à l’heure par le Président de la République n’est en aucun cas une solution : en l’absence d’une restauration du rôle central du Parlement, il ne corrigera pas cette dérive, il ne fera que l’accompagner.

Nous avons entendu, aujourd’hui, beaucoup de belles paroles, mais nous sommes bien placés, en ce qui concerne le respect du travail du Parlement, pour faire la part des paroles et des actes. Un épisode significatif est resté gravé dans ma mémoire – et, je crois, dans celle de tous les sénateurs – : le veto gouvernemental opposé, à deux reprises, à la proposition de loi visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles. (Vifs applaudissements sur plusieurs bancs.) Je précise que cette proposition de loi avait été acceptée, à notre initiative, par tous les groupes politiques du Sénat, sauf le groupe La République en marche !

Mme Cécile Cukierman. Exactement !

M. Pierre Laurent. Cette atteinte aux droits souverains du Parlement restera comme une tache indélébile.

Un analyste de la communication du Président de la République écrivait ceci le 6 mai dernier, un an après son élection : « Du Louvre à Versailles, en passant par Villers-Cotterêts et Chambord, c’est à la profondeur du champ monarchique que s’adosse ce jeune prince républicain. » Tout est dit : on croirait entendre du Stéphane Bern dans le texte, glorifiant la noblesse d’un autre âge ! Mais la communication n’y fait rien : c’est à un exercice monarchique et autoritaire du pouvoir que l’on veut nous habituer, au service des privilégiés.

Symbole contre symbole, nous en avons choisi un autre. Avant de rejoindre cet hémicycle, nous avons marqué notre indéfectible attachement à la République et à la souveraineté populaire en nous rendant devant la salle du Jeu de Paume, à quelques encablures de ce château. C’est là que tout a commencé, quand 300 députés du Tiers État clamèrent, le 20 juin 1789, qu’ils ne se sépareraient pas avant d’avoir élaboré une Constitution, engageant un transfert de pouvoir historique et révolutionnaire du roi vers la nation et le peuple. C’est à ce serment que nous sommes et resterons fidèles.

À ce propos, je veux dire un mot de la révision institutionnelle en cours, que le Président de la République a totalement éludée. Ces trois textes constituent un seul bloc, et visent à asseoir une concentration des pouvoirs inégalée. Vous réduisez le pouvoir d’amendement du Parlement, vous renforcez la maîtrise de l’exécutif sur son ordre du jour ; enfourchant les arguments populistes, vous justifiez la réduction d’un tiers du nombre de parlementaires, et de moitié du nombre de membres du Conseil économique, social et environnemental, alors que c’est l’Élysée et le Gouvernement qui engorgent le Parlement par un assaut de textes visant à libéraliser et à marchandiser toute la société. (Applaudissements sur quelques bancs.)

Mme Cécile Cukierman. Tout à fait !

M. Pierre Laurent. Avec des circonscriptions de plus de 200 000 habitants, vous allez éloigner le pouvoir législatif des citoyens comme dans aucun autre pays européen. Vous parlez de proportionnelle : vous vous moquez du monde ! Avec une telle réduction du nombre de parlementaires, elle sera réduite à rien ; pire, le pluralisme de nos assemblées sera gravement atteint. Un seul exemple : plusieurs dizaines de départements n’éliront plus qu’un seul sénateur. Dans ces départements, le pluralisme au Sénat sera purement et simplement interdit : vous vous en moquez, car c’est ce que vous voulez.

Vous parlez de l’efficacité et de la qualité du travail législatif, mais en vérité, la seule chose qui vous importe, c’est que le Parlement entérine et exécute ce que le Château a décidé. L’attaque que vous portez contre nos institutions et le Parlement est d’autant plus grave qu’elle se conjugue à celles que vous menez contre les collectivités locales, en premier lieu les communes, et plus précisément leurs budgets. Vous remplacez de fait le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales par une mise sous tutelle abusivement baptisée contractualisation, et par la différenciation, qui n’est autre que la fin de l’égalité sur le territoire.

Nous exigeons donc un référendum à l’issue du débat parlementaire, pour que les Français puissent se prononcer en connaissance de cause sur cette réforme. (Applaudissements sur quelques bancs.) Nous mènerons ce combat pour la démocratie avec d’autant plus de détermination que le pays est en train de prendre conscience de la raison pour laquelle vous lui demandez les pleins pouvoirs, et du danger que fait courir la politique menée.

Avec les nombreux cadeaux aux plus fortunés – depuis l’allégement considérable de l’ISF à la suppression de l’exit tax, en passant par le refus de faire sauter le verrou de Bercy pour lutter contre l’évasion fiscale –, qui oserait encore contester qu’Emmanuel Macron est le président des riches ?

Mme Cécile Cukierman. Eh oui !

M. Pierre Laurent. Le CAC 40 est en bonne santé : les profits et les dividendes atteignent des niveaux records. Mais cet argent ne ruisselle absolument pas, et pour cause : vous ne vous êtes jamais attaqués à l’essentiel du problème, à savoir la manière dont est utilisé l’argent disponible – l’argent créé dans le pays par le travail – ou les critères d’accès au crédit et au financement.

D’un côté, des politiques fiscales et exonérations de cotisations généreuses pour la finance ; de l’autre, un encouragement à la compétitivité fondé sur la baisse du coût du travail... Quand il faut payer l’addition, cela se traduit par une austérité drastique en matière de dépenses publiques et une explosion de la précarité et des inégalités. Les dépenses sociales utiles des collectivités locales sont partout mises en difficulté, les services publics sont à l’os. L’état d’urgence est déclaré dans les hôpitaux et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD. Tout le système de santé publique est en crise, comme le révèle le tour de France des hôpitaux que nous avons entrepris.

Le rendez-vous avec les banlieues et les quartiers prioritaires a été lamentablement manqué au printemps.

M. Stéphane Peu. C’est une honte !

M. Pierre Laurent. Une fois encore, vous n’avez rien entendu des premiers concernés, élus, associations et habitants, qui s’étaient pourtant mobilisés avec espoir à la faveur du rapport confié à Jean-Louis Borloo.

La ruralité, elle aussi, souffre beaucoup. La promesse de reconstruction de prix rémunérateurs pour le travail paysan n’est pas tenue et les inégalités territoriales se creusent, les territoires oubliés se multiplient dans la République. L’égalité n’est plus qu’un gigantesque gruyère dont les trous se font toujours plus grands !

Mme Cécile Cukierman. Exactement !

M. Pierre Laurent. La crise du logement est gigantesque. Et votre réponse, c’est la loi ELAN – Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique –, une prime à la marchandisation libérale accrue du secteur et à la privatisation de la ville. (« Très juste ! » et applaudissements sur plusieurs bancs.)

Vous vous vantez de parvenir à chaque fois à faire voter vos réformes malgré les oppositions qu’elles suscitent. Mais où est la gloire de cette politique au forceps, dont les bénéfices sont inexistants pour la grande masse des Français ?

Avec la réforme du ferroviaire, qu’avez-vous réglé, à part préparer le secteur à une ouverture à la concurrence qui se paiera très cher en termes de fragilisation du réseau, de pénurie d’investissements et d’effectifs, et de hausse des tarifs pour l’usager ? Vous allégez la dette, mais vous instaurez aussitôt une règle d’or qui bridera l’investissement public nécessaire, notamment dans le fret, indispensable à la révolution écologique des transports.

Quant à l’instauration de Parcoursup, elle était indispensable et urgente prétendument pour mettre fin à l’arbitraire. Or l’arbitraire est cette fois généralisé, plus précisément le tri social est maintenant légalisé. Alors que la France a besoin d’une politique d’éducation et de formation universitaire ambitieuse, c’est le manque d’ambition qui domine tous vos choix budgétaires en ce domaine.

Et que dire d’un autre secteur stratégique pour l’avenir que le Président a évoqué : l’énergie ? Oui, nous avons besoin d’une maîtrise publique de l’énergie au service de la transition écologique, mais que dire de la privatisation scandaleuse des barrages hydrauliques, de l’abandon total de la participation publique de l’État dans Engie, du secteur livré aux appétits de Total, de la déréglementation accélérée des tarifs, du bradage d’Alstom ?

Mme Cécile Cukierman. Exactement !

M. Pierre Laurent. Même quand le Gouvernement déclare une grande cause nationale – pense à la lutte contre les violences faites aux femmes –, il est capable de manquer le rendez-vous législatif, avec, à l’arrivée, une loi pas du tout à la hauteur, ne résolvant pas les problèmes. Et il faut, en plus, la mobilisation et la ténacité du monde féministe et associatif pour repousser une définition discutable et dangereuse du viol sur mineurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs.)

Tout au long de l’année, nous avons résisté et alerté sur les dangers de votre politique, nous avons multiplié les propositions et les pistes de travail alternatives. Nous allons continuer. Puisque vous n’écoutez pas le pays, nous allons l’écouter pour deux et travailler toujours plus avec les forces vives, les forces sociales du pays. Vous ne croyez pas au Parlement, nous si : nous allons en faire la chambre de résonance de toutes les luttes, de toutes les aspirations au progrès, de toutes les intelligences dont regorge notre pays. Car si le pouvoir ne semble plus comprendre ce que veut dire la devise de la République, « Liberté, Égalité, Fraternité », des millions de nos concitoyennes et de nos concitoyens, eux, n’en ont pas perdu le sens. Nous sommes et resterons à leurs côtés pour porter l’espoir d’une République démocratique, d’une France meilleure juste et solidaire.

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