C’est la rentrée et ceux qui sont propriétaires d’industries culturelles, de groupes de presse, de chaînes de télévision et de radios commentent l’esprit qui les anime, leurs « novations », leurs programmes.

Ce n’est pas la première fois qu’à les entendre et à considérer leurs actes, quiconque est attaché à la création artistique et à sa liberté, au pluralisme des pensées et à sa garantie, à l’indépendance des femmes et des hommes des métiers concernés, au respect de leurs partenaires dans la société, ne peut manquer d’être inquiet, très inquiet.
Mais cette rentrée, ces propriétaires d’industries culturelles font un pas, un très grand pas de plus.

En effet depuis juillet et singulièrement ce mois de septembre, alors que sont faites ou sont en chemin de nouvelles concentrations financières dans les industries culturelles notamment l’édition, dans l’information et la communication, alors que se tient l’université d’été du MEDEF, nous sommes confrontés à des déclarations qui atteignent la dignité humaine, qui agressent « l’irréductible humain » , là où la femme, l’homme trouvent le respect d’eux-mêmes et le pouvoir de reprendre incessamment force.

De Monsieur LE LAY à Monsieur SEILLIERE c’est le raidissement normatif, les coups de pioche, le temps du mépris et du cynisme, l’arrogance.
Simplement quelques citations.

Patrick LE LAY PDG de TF1 dans un livre « Les dirigeants face au changement » :
« Le métier de TF1 c’est d’aider Coca Cola, par exemple, à vendre son produit….. Ce que nous vendons à Coca Cola c’est du temps de cerveau humain disponible…… Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est à dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages ».

C’est sans vergogne expliciter « le mieux disant culturel » derrière quoi a été bradée au géant du ciment Bouygues la première chaîne publique française en 1986. C’est sans fard dire que les humains sont à vendre aux publicitaires c’est à dire à l’argent. C’est avouer que l’économique et la finance doivent dominer tout.
Ernest-Antoine SEILLIERE président du MEDEF, propriétaire d’EDITIS à travers la société WENDEL dont il est actionnaire majoritaire :
« L’acquis social doit céder devant la nécessité économique ».
Au moment de l’achat d’EDITIS il avait déclaré : « les manuels scolaires d’économie sont trop marxisants ».
Une femme patron à l’université du MEDEF : « on se dit que si l’on insiste on finira bien par faire abroger le code du travail ».

C’est « La Grande Transformation » voulue par Ernest-Antoine SEILLIERE. C’est une « politique bissectrice » qui veut imposer des micro-solutions notamment pour les horaires de travail et qui a décidé d’harceler la société de ses propositions.

Le rapprochement est évident. Monsieur LE LAY comme Monsieur SEILLIERE et Monsieur SEILLIERE comme Monsieur LE LAY font du critère économique et financier une référence naturelle et totalitaire. Ils veulent flexibiliser les esprits et les hommes, et mettre en cause plus fondamentalement les capacités d’initiative de tous les salariés. C’est « un principe de ruine » comme dirait l’écrivain Danielle SALLENAVE. Et Monsieur PEBEREAU autre grand patron-financier par ailleurs chroniqueur au Journal du Dimanche ose comparer ces démarches à la pensée de Galilée. Tout cela se retrouve chez l’avionneur DASSAULT ayant acheté le groupe SOCPRESSE dont fait partie Le Figaro ou chez Monsieur LAGARDERE qui, déjà dans le cinéma, la musique, l’audiovisuel et la communication vient de s’emparer d’une partie d’EDITIS, Larousse.

Il n’est pas tolérable que ces hommes ne rendent pas compte de leurs propos et de leurs actes comme il n’est pas admissible que le CSA et le Ministère de la Culture soient et restent silencieux. Je demande donc au président de la commission culturelle du Sénat d’organiser dans les meilleurs délais une audience au cours de laquelle seraient successivement entendus Messieurs LE LAY, SEILLIERE, DASSAULT, LAGARDERE, Dominique BAUDIS président du CSA et Renaud DONNEDIEU de VABRE ministre de la culture et de la communication.

Il est temps, « à ce moment brèche », marqué par l’avancée du Sarkozysme, d’accomplir la fonction du refus à l’étage voulu. Parmi les actions d’entreprises de tous genres que connaît notre pays, les conflits des chercheurs et des intermittents sont à la fois symboliques du degré de l’attaque et des nouveaux commencements de résistance-construction face au capitalisme, qui n’est pas une donnée mais une variable.
On peut, comme cela vient d’avoir lieu en Suède, voler l’extraordinaire toile de MÜNCH « Le cri ».
Démontrons qu’on ne peut pas voler à un peuple ses cris de pensées, de rêves et d’agir.

« On ne peut accepter la vie qu’à la condition d’être grand, de se sentir à l’origine des phénomènes, tout au moins d’un certain nombre d’entre eux. Sans puissance d’expansion, sans une certaine domination sur les choses la vie est indéfendable » disait Antonin ARTAUD. Osons être sur la place publique les voix qui crient et qui dans tout réclament la dignité de la vie.