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Les communiqués de presse

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La culture face à la concentration et à l’internationalisation

Par / 3 février 2003

Discours de Jack Ralite, animateur des Etats Généraux de la Culture et sénateur communiste de Seine-Saint-Denis, lors des deuxièmes Rencontres Internationales des Organisations
Professionnelles de la Culture.

« Nous avons à la fois la chance et la malchance de représenter une industrie qui par sa nature attire l’attention des professionnels érudits … dont un grand nombre sont également les concurrents et les critiques de notre entreprise. Il n’est pas toujours facile d’arriver à se faire entendre … alors que nos concurrents tentent de faire passer leurs appels à la protection et aux privilèges en les déguisant par un discours sur l’intérêt public. »
J’étais au banquet où Rupert Murdoch, patron d’un grand groupe mondial de la communication, chantre du libéralisme et de la dérégulation, a fait cette déclaration méprisante à l’égard des artistes et du service public.

C’était en avril 1998 à la conférence de Birmingham réunie après l’échec retentissant - imprévu par ses auteurs - de l’AMI, cette tentative de substituer un droit privé international au droit public.

L’ordre du jour de Birmingham était « la convergence ». Donnons un exemple : les télécoms et l’audiovisuel auront désormais avec le numérique le même moyen de transport. Ils doivent donc unifier leurs statuts. Les télécoms étant dérégulés, l’audiovisuel doit suivre. Malgré la pression de R. Murdoch appuyée par Tony Blair, ce fut un échec. Cette histoire du banquet de Birmingham appelle six remarques de principe qui me semblent incontournables pour quiconque veut l’audace de la création (y compris dans l’audiovisuel) à la rencontre des citoyens, c’est-à-dire le pluralisme des œuvres, des territoires, des techniques, des producteurs, des diffuseurs, des publics.

Mon intervention n’a qu’un but, affranchir la clarté.

Une concentration implacable
1/ R. Murdoch dirige un des cinq ou six grands groupes mondiaux de communication où se retrouvent audiovisuel, cinéma, internet, vidéo, multimédia, télécoms, édition, portefeuilles de droits, abonnés, presse, imprimerie, d’autres groupes ajoutent la musique. News Corp. est présent en Angleterre, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Hongrie, aux USA, en Australie, en Asie.

Cette concentration verticale et horizontale mêlant production et distribution, pratique un capitalisme conquérant et implacable de plus en plus lié à la financiarisation (capitalisation, prédominance du critère financier, concentration des valeurs sur les portefeuilles de droits et les abonnés et pouvoir aux actionnaires : banques, assurances et fonds de pension). Ce capitalisme financier a trop souvent l’oreille compréhensive des pouvoirs publics. R. Murdoch était à Birmingham en poisson pilote dérégulateur même s’il ne parla qu’au dessert du banquet. Les grands groupes veulent diriger le monde, notamment l’industrie liée à la création et à l’imaginaire.

Le messianisme technologique
2/ Nous sommes confrontés à de nouvelles technologies. Ne les ignorons surtout pas mais ne surestimons pas non plus leurs capacités. Elles ne sont ni le fil à couper le beurre, ni les organisatrices des sociétés. La technique ne modifie pas les rapports sociaux. Pourtant, certains au plus haut niveau politique, industriel voire philosophique, ont répandu le « messianisme technologique » en substituant l’utopie technicienne à l’utopie sociale. C’est la chosification de l’histoire. Comme dit Lucien Sfez « l’objet technique fascinant devient le centre du monde et des sociétés ».

Les nouvelles technologies donnent la nouvelle économie dont chacun connaît les rêves devenus errements.
Une nouvelle technique pour s’imposer et contribuer à changer l’ordre des choses doit, selon l’historienne américaine Elizabeth Eisenstein, passer par un tissu complexe de médiations sociales et politiques, de conflits d’intérêts, de conflits symboliques. Il n’y a pas d’Adam parfait d’avant la chute.

Un droit sans fondamentaux
3/ Ces nouvelles technologies sont considérées comme un mode de régulation remplaçant le droit, cette mise en forme générale et obligatoire de valeurs communes. On assiste à un basculement d’une logique fondée sur des postulats d’intérêt général vers des logiques de simple arbitrage entre intérêts privés. Le droit perd ses fondamentaux et s’évanouit dans un Niagara de règles, de responsabilités civiles, pénales, contractuelles et de références à l’éthique, à la déontologie professionnelle, à la bonne conduite, à la morale dont Léo Ferré disait qu’elle était « toujours la morale des autres », à l’auto-régulation.
Avec les nouvelles technologies et notamment « internet » la définition juridique de la communication audiovisuelle n’aurait plus de sens. La révolution numérique c’est la multiplication des chaînes, l’offre quasi sans limites, la réponse à l’attente de programmes et d’images par les téléspectateurs-consommateurs, la « diversité » (vous entendez les guillemets) sur un plateau. Serge Regourd rapportait récemment les propos d’un chercheur américain : « Les sociétés de communication ont réussi à convaincre les gouvernements que les critères d’intérêt général avaient de moins en moins de sens politique puisque les innovations technologiques permettent au marché de répondre naturellement à ses objectifs ».

Ce droit vidé de sens, suspendu, dissous en quelque sorte, est remplacé par le contrat (vive le contrat, à bas la loi !) est juridicisé (vive la prolifération du contentieux !). Et l’OMC a été construite sur la notion de contrat s’appuyant sur des normes venant de groupes d’experts, d’opinion et d’intérêt, sans légitimité juridique, politique, démocratique, des normes entièrement inspirées par l’idéologie dogmatisée du marché sans rivages dont on vient de voir les écroulements avec Vivendi Universal et AOL Time Warner.

En Europe le groupe Bangemann à la fin des années 90 a été prémonitoire de cette pratique remplaçant la recherche de règles acceptables par tous par la violence des divers projets de domination liés aux grands groupes mondiaux qui affectionnent plus la diversité au sens de la pulvérisation des contenus que l’universalité, celle-ci devant bien sûr ne pas laisser échapper, rejeter, abandonner, voire opprimer quelque partie que ce soit de la population, du peuple.

La multitude passe partout
4/ Aujourd’hui les grands groupes et leurs soutiens politiques récusent le mot peuple et lui substituent le mot multitude. Ils préfèrent des individualistes qui considèrent être l’histoire à eux tous seuls, des collections d’hommes et de femmes, plutôt que des collectifs agissants et pensants.

Il n’y a pas de peuple antérieur à sa conscience et à ses actes, et c’est vrai dans le rapport aux œuvres qui ne doit jamais être vulgaire. Le concept d’œuvre est ouvert mais le mot œuvre n’est pas un mot sac. L’œuvre comme la langue dirait Julien Gracq n’est ni un passe partout universel ni un ouvre boîte ni un espéranto qui aurait réussi. Les regardeurs, les lecteurs avec le concept de multitude sont considérés, aimés comme des « consommateurs-partenaires » de produits, des consommateurs qui ne sortent pas d’eux-mêmes qui n’entrent pas en eux-mêmes, qui ne restituent ni ne partagent rien. Nivelés, conformés, ils font du sur place.

Je pense que peuple et création artistique ont quelque chose à voir quant à l’exigence au travail, à la visée, à l’agir. C’est une création politique qui fait le peuple et non un produit.

Le produit contre l’oeuvre
5/ De plus en plus le vocabulaire relatif aux œuvres et à la création se dévalue, s’affadit parce que précisément est imposée la notion de produit. L’œuvre transgresse, doute, le produit affirme.
J’ai relevé dans nombre d’écrits des patrons de la communication et des industries culturelles que
« les auteurs, musiciens et cinéastes, doivent être à l’écoute de leurs clients ».
« Il faut produire des œuvres qui soient adaptées à tout le monde ».
« La création doit devenir créativité ».
« Les lecteurs sont des consommateurs de livres ».
« La télévision commerciale est condamnée à une répétitivité éternelle pour captiver le plus grand nombre possible de spectateurs pendant le plus longtemps possible. La télévision doit demander un effort minimum. Les schémas connus, testés, sont en général récompensés par un choix parce que les téléspectateurs les reconnaissent. L’expérimentation de la nouveauté est dangereuse ». - C’est d’un collaborateur de Berlusconi.

Mais cela va encore plus loin aujourd’hui où l’artiste est aussi atteint par le contentieux accompagnant la juridicisation. Considérez la violence. Elle est aujourd’hui dans un rapport récent publié en France imputée à l’art, à la création, à l’œuvre. Songez au dernier film de Kaurismaki, L’Homme sans passé. Il traite, c’est vrai, de la grande violence de la société, mais avec une distance critique, une réflexion profonde un vrai travail de pensée. Et il serait coupable, le coupable ? On voudrait tout réduire aujourd’hui à une responsabilité morale qui frappe ici le médecin, là le maire, et maintenant l’artiste, alors que la télévision devrait organiser sur ce thème de la violence, des émissions de controverse, de confrontation, la Dispute. Il faut oser l’audace et ne pas se diminuer dans la précaution, l’arrangement, le refus de la douleur, l’absence de danger, tricher. L’art prépare, y compris et même presque toujours sans le vouloir, le redressement, comme cette planche brandie par le héros à la fin du film de Kaurismaki qui fait surgir, pour l’épauler, des citoyens.

Ainsi, de Murdoch à AOL Time Warner, de Disney à Sony, de Microsoft à Hachette, de Bertelsmann à Vivendi Universal, les grands groupes mondiaux de communication dominés par les pays Nord Américains, bâtis uniquement sur une offre de la triade des pays d’Amérique du Nord, de l’Europe de l’Ouest et du Japon, - où est le Sud et la solidarité qu’on lui doit ? - sont marqués par la concentration, la dérégulation, la financiarisation, le déterminisme de la technique, la connexion des parcs d’abonnés et des portefeuilles de droits, le statut de champions nationaux et continentaux, la visée des deux grands marchés d’avenir, l’imaginaire et le vivant, l’américanisme des régulations, l’américanisation des programmes, tout cela pour des millions de consommateurs clients de divertissements où se diluent de plus en plus les œuvres authentiques, qui devenues recettes, perdent de leur force, de leur sens.

Que sera la société - monde ?
6/ Tout cela se passe dans un monde où se croisent la société interétatique et des sociétés transnationales où la souveraineté est en crise, où une conscience universelle balbutie. L’homme sent en lui des unités plus grandes que ses ancêtres et est en même temps inquiet. Davos et Porto Alegre traduisent cette contradiction, cet affrontement. Comment en effet va se construire cette société-monde ? Sera-t-elle débridée ou maîtrisée ? Se verra-t-elle disciplinée par l’économie - hégémonie et les marchés généralisés, la concurrence où toujours le plus fort gagne, la déréglementation comme table de la loi ?

Ou se verra-t-elle animée, dans un monde multipolaire par une politique voulue, choisie du développement humain, du bien commun, assurant des normes de civilisation humaine, comprenant l’audace de la création, l’élan du pluralisme, leur production et leur distribution assurée, l’atout d’un large public s’exprimant de plus en plus ?
Personne, aucune nation ne peut ignorer ce débat ni esquiver l’avènement progressif de l’institutionnalisation de domaines universels dans lesquels la norme nationale de décision et de contrôle ne sera plus exclusive.
Personne ne devrait méconnaître cette pensée de Césaire : « Il y a deux manières de se perdre, par ségrégation murée dans le particulier, ou par dilution dans l’universel. »
Oui, Davos et Porto Alegre expriment ce questionnement, d’autant que ce qui vient d’arriver à Jean-Marie Messier montre que si le Tout-Etat a été éprouvé et rejeté, le Tout-Affaires est éprouvé et sera rejeté.

Essayons de ne pas être abattus par ces temps où se fabriquent des causes de guerre. Le monde est alors à portée de travail, de création. Mais il faut en avoir la liberté réelle. Ainsi, la portée du travail est limitée quand devant le séisme culturel, social, économique, créé par la chute de Jean-Marie Messier on ne peut s’informer, débattre, analyser et proposer au Parlement de mon pays. La portée de création est limitée quand au regard de la violence dans notre société l’artiste est désigné comme bouc émissaire.

Le cas Jean-Marie Messier
Un coup de projecteur sur Vivendi Universal :
381 000 salariés dans 70 pays.
En quatre ans, 30 entreprises achetées pour 100 milliards d’euros.
19 milliards d’euros d’endettement.
En 2001, pour les parties musique, télévision, cinéma, édition, internet, un chiffre d’affaires total de 49,76 milliards d’euros.

Derrière ces chiffres il y a le numéro 1 mondial de la musique, 800 000 auteurs gérés, 27 000 épisodes de TV, 9000 films, Canal+ et ses 4000 films français et européens et son rôle dans la production cinématographique. VUP ( 2/3 de l’édition française de référence, 35% de l’édition scolaire, 20% de l’édition littéraire nationale, et ... Houghton Mifflin)

Aujourd’hui les personnels sont ignorés et fragilisés, le groupe se dilapide par appartements soldés, la finance bancaire qui touchait beaucoup sur les transactions folles d’hier, touche toujours beaucoup sur le bradage d’aujourd’hui. Les gros se décomposent et se recomposent en nouveaux gros, comme Hachette. Canal+ connaît une déliquescence au niveau de ses filiales européennes. Les artistes de toutes disciplines sont inquiets et méprisés.
Et quand on songe que la montée paradisiaque de Jean-Marie Messier a été applaudie comme celle d’un champion national, qu’il a été aidé par des fonds publics et accompagné sans exigence par les organismes nationaux et européens chargés du contrôle démocratique !

Et pour le moment, aucune thérapie n’a été mise à jour. L’impression prévaut qu’en haut lieu et alentours on s’habitue. Il est vrai que J6M aimait citer René Char : « Impose ta chance, serre ton bonheur, et va vers ton risque. A te regarder ils s’habitueront. »
Nous ne nous habituerons jamais.

L’art : « Faire visage comme on fait surface »
Et précisément, si je me remémore le banquet de Birmingham j’ai découvert avec plaisir le Banquet Imaginaire, que nous propose dans un livre du même nom l’équipe de « L’Exception », 39 personnes ayant à voir avec les images, notamment le cinéma, individuellement et non individualistement. Avec le cinéma, cet art au carrefour des questions du social donc du politique, de l’économique, du juridique et du technique on trousse le monde et on découvre comme disait Musset dans Les Confessions d’un enfant du siècle les scories et les semences sur lesquelles on marche sans le savoir d’autant qu’on ne sait pas nommer ce qui vient.

Or, l’art y a un rôle à jouer. « Faire visage comme on fait surface » disait Michaux. Et je constate qu’aujourd’hui les artistes, en tout cas certains d’entre eux réfléchissent, agissent et créent dans la foulée d’un beau texte de Paul Valéry des années 30 qui, réfléchissant sur les révolutions techniques prédisait « des changements prochains et très profonds dans l’antique industrie du Beau » et aussi dans la transmission des œuvres, qui « acquerront une sorte d’ubiquité ». Il ajoutait « je ne sais si jamais philosophe a rêvé d’un société pour la distribution de réalités sensibles à domicile ».

Le DVD est une instance critique nouvelle, extrêmement riche de potentialités pour les créateurs et pour les spectateurs. La déclinaison numérique aux conséquences encore mal perçues est aujourd’hui le même choc que l’apparition de la reproduction mécanique à la fin du XIX° siècle. Les arts plastiques, la musique, ont aussi à voir avec ces bouleversements techniques. On a pu parler à côté du statut de l’œuvre de statut du processus de création. Anne Cauquelin, comme les auteurs du Banquet Imaginaire évoque des nouveaux gestes artistiques. Il y a là un enjeu qu’il ne faut pas abandonner aux grandes affaires, d’autant que saisissant ces évolutions elles avancent l’idée piège du « droit a minima » pour tout ce qui concerne hier et du « pas de droit du tout » pour tout ce qui naît. Ou encore, comme cela a été avancé au sommet de Nice dans le cadre de l’Union européenne, le vote à l’unanimité pour les anciennes techniques et le vote à la majorité qualifiée pour les nouvelles.

C’est rendre inconciliable la fidélité au passé avec l’attente du nouveau. Il ne s’agit ni de jouer les prolongations ni de faire du passé table rase. Hier est inoubliable, demain est nécessaire. Il y a besoin d’une mêlée où demeure ce que dit un Soulage : une toile c’est un « accumulateur d’énergie », ou un Kafka : un écrivain est celui qui « fait un bond hors du rang ».

Pour une responsabilité publique :

Cet exposé, les six remarques initiales et les enjeux d’aujourd’hui où se contredisent et s’affrontent si souvent les élans de liberté des artistes et la financiarisation des grands groupes de communication soutenus par les pouvoirs publics, conduisent à élaborer et mettre en œuvre une responsabilité publique à tous les échelons de la société en matière de culture et d’art. Elle serait la loi du service public lavé de ses défauts et méfaits et une obligation d’intérêt général pour le secteur privé, renonçant à ses errements et forfaits. Cette responsabilité s’enchâsserait dans ce qui est et fut le résultat de combats acharnés et prendrait part au relancement des dés de la culture et de l’art. J’emploie les deux mots parce qu’il existe une culture de résignation, tandis que l’art est toujours mutin.

Et comme « les faits pénètrent mal dans le monde où vivent nos croyances » (Marcel Proust), il faut être, osons le mot, « skieur au fond du puits ».
Cette responsabilité publique permettrait de dépasser tous les rapports habituels et habitués que nous avons avec le monde et d’appréhender la multiplicité d’être au monde, l’expression du pluralisme humain, et le miroir tournant du mouvement de la société.

L’idée d’exception :

Mais pour atteindre cette audace de la création, cet élan du pluralisme, cette obligation de produire, cette maîtrise de la diffusion, cet atout d’un large public, cette nécessaire coopération internationale par quoi échapper à l’audimat, à l’audience, aux sondages, véritables violences à allure démocratique, il faut remplir deux conditions indispensables :

l’exception culturelle
et
un outil international efficace pour traiter hors OMC les questions culturelles et artistiques.

Dans cette enceinte et à des titres divers, la diversité culturelle a été préférée à l’exception. Je trouve que ce faisant il y a un chaînon manquant, car on ne m’a toujours pas expliqué pourquoi en 1999 dans une réunion européenne inter Etats, les participants sont entrés avec l’exception culturelle à l’ordre du jour et sortis avec la diversité culturelle adoptée. Les réunions européennes ne sont pas des séances du dictionnaire, que je sache !

Mais surtout, ce n’est pas du tout la même chose, et cela s’est produit au moment où en sport, en santé, en recherche, l’idée d’exception, du refus de traiter ces domaines comme des marchandises gagnait du terrain.
Oui, mais voilà, l’idée d’exception c’est l’idée de soustraire au profit un domaine de la vie humaine. C’est bien là que le bât blesse. Pourtant ça n’est pas une idée seulement récente et ça n’est pas une idée limitée à la culture. L’école gratuite laïque et obligatoire de la fin du XIX° siècle en France, c’est une exception culturelle. La sécurité sociale créée à la Libération en France, c’est une exception culturelle. En culture en Europe, la directive TV Sans Frontières et le prix unique du livre sont des exceptions culturelles. La diversité oui, mais grâce à l’exception. Autrement, si j’emprunte le langage des fleurs, la diversité seule c’est un bouquet d’œillets de toutes les couleurs, c’est-à-dire une diversité pauvre, la vraie diversité, c’est un bouquet de toutes les fleurs existantes.

Cela me fait penser aux pauvres. Ils sont maintenant reconnus, mais au lieu de les considérer selon le principe d’égalité, ils sont traités selon le principe d’équité. C’est une réponse à minimum. Or, le droit comme le respect ne se divise pas, et vous savez bien que le monde du peu se satisfait finalement de la démocratie du petit.

Un outil qui se compromettrait avec la personne humaine
Quant à l’outil international indépendant, il est incontournable, car l’OMC entièrement bâtie sur le marché roi ne peut être un référent, d’autant qu’elle travaille dans l’ombre. L’Accord Général pour le Commerce des Services (AGCS) - la culture est considérée à l’OMC comme un service - a prévu deux étapes pour leur libéralisation. Première étape aujourd’hui close : les Etats ont interrogé les autres Etats pour connaître les secteurs qu’ils seraient prêts à libéraliser. Deuxième étape, close le 31 mars : les Etats déposent leurs offres de libéralisation. Eh bien la Commission européenne ne communique pas les documents de ces deux étapes. Jean-Claude Lefort, député, a déposé une Proposition de résolution à l’Assemblée Nationale proposant une suspension de l’AGCS. En commission elle a été rejetée à deux voix près (15 voix pour, 17 contre).

Le marché et son institution l’OMC ne reconnaissent pas le droit de savoir. Il s’agit d’un « coup de pioche » dans la vie culturelle. Notre société n’a plus le Mur de Berlin ce qui est très bien, mais elle a un autre mur, toujours plus haut, celui de l’argent. On nous malmène sous un ciel bancaire.

Oui, il nous faut un outil international indépendant, c’est-à-dire un outil d’exception, un outil qui se compromettrait avec la personne humaine, et pour la construction duquel chacune et chacun d’entre nous doit se dire : « Si ce n’est pas moi alors qui ? Si ce n’est pas maintenant alors quand ? » Cet outil nous permettrait avec le soutien en permanence actif de ses supporters d’assumer « notre devoir de civiliser les nouveaux nouveaux mondes issus de l’œuvre civilisatrice » selon la belle formule de l’ethnologue Georges Balandier.

Une tâche inouïe :

Au Banquet de Birmingham on nous a décrit comminatoirement l’objectif des grands groupes. Au Banquet de l’Imaginaire, on nous fait rêver des potentialités de la société d’aujourd’hui. Au « Banquet du bonheur où bien peu sont conviés » disait Hugo, aujourd’hui les convives se multiplient et ont le pouvoir de l’emporter, pourvu qu’ils se rassemblent dans cette tâche inouïe.

Concluons avec Zola :

« Savoir où l’on veut aller c’est très bien. Mais il faut encore montrer qu’on y va ».

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