Les communiqués de presse
L’autoritarisme numérique du gouvernement censuré par le Conseil constitutionnel
Loi Avia -
Par Le groupe CRCE-K / 19 juin 2020Le Conseil Constitutionnel a censuré l’essentiel des articles de la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, dite « loi Avia ». Ne subsiste de ce texte, totalement vidé de sa substance, que les dispositions relatives à la création d’un observatoire de la haine en ligne au sein du CSA ou d’une juridiction spécialisée.
Dans sa décision, le Conseil Constitutionnel a rappelé que « la liberté d’expression et de communication est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie » et a considéré que les dispositions de cette loi étaient attentatoires à cette liberté en donnant aux autorités administratives et aux plateformes numériques un pouvoir de proscription des usagers et de censure des contenus, sans intervention du juge et sans possibilité de recours.
Les juges l’estiment contraire à la Constitution car plusieurs articles de la loi parce qu’ils considèrent qu’ils ont pour conséquence, selon eux, de donner aux opérateurs de plateformes en ligne, une obligation de sélection et d’élimination a priori des contenus qui porte « atteinte à l’exercice de la liberté d’expression et de communication ».
Cette proposition de loi déposée à l’initiative de la députée L. Avia, avocate de son état, avait été portée et ardemment défendue devant le Parlement par le Gouvernement qui était resté, durant tout le débat législatif, totalement indifférent aux critiques unanimes qui lui étaient adressées. La censure du Conseil constitutionnel sanctionne donc aussi une pratique législative gouvernementale autoritaire et obtuse sur des sujets qui concernent pourtant nos libertés individuelles.
Après la loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information qui s’est avérée absolument inapplicable, ce nouvel échec consacre le caractère inopérant ou liberticide de la stratégie du Gouvernement qui consiste à confier aux plateformes en ligne le soin de la régulation de l’internet. Elles sont les bénéficiaires et les complices de la haine qui s’y déverse. Il n’est donc pas possible de leur imposer des règles morales sans intervenir sur cette « économie de l’attention » qui fonde leur monopole. Il est grand temps de leur imposer l’interopérabilité et la protection des données personnelles.
Il nous faut entendre Kate Crawford, chercheuse australienne et spécialiste du numérique, quand elle nous explique que « nous sommes dans une course à l’extraction de données et [que] c’est cette culture qu’il faut changer ! ».